Clément d'Alexandrie

Clément d'Alexandrie, également connu sous le nom de Titus Flavius Clemens, était un théologien et philosophe chrétien du IIe et IIIe siècles, né vers 150 et décédé vers 215. Il est reconnu comme l'un des Pères de l'Église grecque et a joué un rôle majeur dans le développement de la pensée chrétienne dans l'Antiquité tardive.

Clément dirigea l'école théologique d'Alexandrie, où il enseigna et écrivit de nombreux ouvrages influents. Ses écrits, dont les plus connus sont "Le Pédagogue", "Les Stromates" et "Le Protreptique", combinent des éléments de la philosophie grecque avec la doctrine chrétienne, cherchant à établir une synthèse entre la foi et la raison.

Ses œuvres reflètent une profonde connaissance des traditions philosophiques de son époque et un engagement envers l'explication et la défense de la foi chrétienne. Clément d'Alexandrie est souvent cité pour sa tentative de concilier la foi chrétienne avec une approche intellectuelle et rationnelle, faisant de lui un précurseur important du christianisme intellectuel et de la théologie.

Bien que toutes ses idées n'aient pas été acceptées dans la théologie chrétienne orthodoxe ultérieure, l'influence de Clément sur la pensée chrétienne est indéniable, et il continue d'être étudié pour sa contribution à la théologie chrétienne primitive et à la philosophie religieuse.

Commentaires de Clément d'Alexandrie

Les portes sont ouvertes à quiconque se tourne sincèrement vers Dieu, de tout son coeur, et le Père reçoit avec joie un fils qui se repent vraiment. C'est le signe d'un repentir véritable que de ne plus retomber dans les mêmes fautes, mais aussi d'extirper complètement de ton âme les péchés pour lesquels tu te juges digne de mort. Une fois qu'ils auront été effacés, Dieu reviendra donc habiter en toi. Car, comme dit l'Écriture, un pécheur qui se convertit et se repent procurera au Père et aux anges du ciel une joie immense et incomparable (cf. Lc 15,10). Voilà pourquoi le Seigneur s'est écrié: C'est la miséricorde que je désire, et non le sacrifice (Os 6,6 Mt 9,13; 12,7); je ne veux pas la mort du pécheur, mais qu'il se convertisse (Ez 33,11); si vos péchés sont comme la laine écarlate, ils deviendront blancs comme la neige; s'ils sont plus noirs que la nuit, je les laverai, si bien qu'ils deviendront comme la laine blanche (Is 1,18).

Dieu seul, en effet, peut remettre les péchés et ne pas imputer les fautes, alors que le Seigneur nous exhorte à pardonner chaque jour aux frères qui se repentent. Et si nous, qui sommes mauvais, savons donner de bonnes choses aux autres (cf. Mt 7,11), combien plus le Père plein de tendresse (2Co 1,3) le fera-t-il? Le Père de toute consolation, qui est bon, plein de compassion, de miséricorde et de patience par nature, attend ceux qui se convertissent. Or, la conversion véritable suppose que l'on cesse de pécher et que l'on ne regarde plus en arrière.

Dieu accorde donc la rémission des fautes passées, tandis que, pour ce qui concerne le futur, chacun est responsable de ses propres actes. Se repentir, c'est condamner ses fautes passées et prier le Père pour qu'il les oublie. Lui seul peut, dans sa miséricorde, défaire ce qui a été fait et, par la rosée de l'Esprit, effacer les fautes passées.

Si tu es voleur et veux recevoir le pardon, cesse de voler. Si tu as dérobé un objet, restitue-le avec un supplément. As-tu fait un faux témoignage? Exerce-toi à dire la vérité. As-tu été parjure? Ne fais plus de serment. Tu dois aussi refréner les autres passions mauvaises: la colère, la convoitise, la tristesse et la crainte. Les passions que tu as laissé grandir en toi, tu ne pourras sans doute pas les supprimer d'un seul coup. Mais, moyennant un vrai repentir et une application constante, tu y parviendras avec la puissance de Dieu, la prière des hommes et l'aide de tes frères.

Le commandement du Seigneur est limpide, il clarifie le regard (Ps 18,9). Reçois le Christ, reçois la faculté de voir, reçois la lumière, afin que tu connaisses bien Dieu et l'homme (Homère Iliade, 5). Le Verbe qui nous a illuminés est plus délectable que l'or et la pierre précieuse, plus désirable que le miel qui coule des rayons (Ps 18,11). Comment, en effet, ne serait-il pas désirable, celui qui a illuminé l'esprit enseveli dans les ténèbres, et donné l'acuité aux yeux de l'âme porteurs de lumière (Platon Timée, 45 B)? Et de même que sans le soleil, malgré les autres étoiles, tout serait nuit (Héraclite Fragment 99, éd diels), de même, si nous n'avions pas connu le Verbe et n'avions pas été illuminés par lui, rien ne nous distinguerait des volailles que l'on gave, puisque nous serions engraissés dans l'obscurité et élevés pour la mort.

Recevons la lumière afin de recevoir Dieu; recevons la lumière et devenons les disciples du Seigneur. Telle est bien la promesse qu'il a faite à son Père: Je proclamerai ton nom devant mes frères, je te louerai en pleine assemblée (Ps 21,23). Chante la louange de Dieu, ton Père, fais-le moi connaître; tes paroles me sauveront, ton chant m'instruira. Car jusqu'à maintenant j'errais à la recherche de Dieu, mais, puisque tu m'illumines, Seigneur, par toi je trouve Dieu, de toi je reçois le Père; je deviens héritier avec toi, puisque tu n'as pas dédaigné ton frère.

Mettons donc fin à l'oubli de la vérité. Chassons l'ignorance et les ténèbres qui voilent notre regard comme un brouillard. Contemplons le Dieu véritable en faisant d'abord monter vers lui cette acclamation: Salut, ô lumière (Eschyle Agamemnon, 22, 508)! Alors que nous étions ensevelis dans les ténèbres et prisonniers de l'ombre de la mort, du ciel a resplendi pour nous une lumière plus pure que le soleil, plus douce que la vie d'ici-bas. Cette lumière est la vie éternelle, et tout ce qui y participe a la vie. Mais la nuit se garde de la lumière; de peur, elle disparaît, et fait place au jour du Seigneur.

Tout est devenu lumière sans déclin: l'occident s'est changé en orient. Voilà ce que signifie la nouvelle création (Ga 6,15). Car le soleil de justice (Ml 4,2), qui passe partout dans sa chevauchée, visite sans distinction tout le genre humain. Il imite son Père qui fait lever son soleil sur tous les hommes (Mt 5,45), et il répand sur tous la rosée de la vérité. Il a fait passer l'orient à l'occident et, en crucifiant la mort, il l'a transformée en vie. Il a arraché l'homme à la perdition et l'a fixé au firmament. Il a transplanté la corruption pour qu'elle devienne incorruptibilité, et il a changé la terre en ciel. Il est le divin agriculteur qui signale les moments favorables, excite les peuples au travail - au bon travail - leur rappelant la manière de vivre (Aratos Phénomènes, 6) en accord avec la vérité.

Il nous fait don de l'héritage paternel, vraiment immense, divin et inaltérable. Il divinise les hommes par son enseignement céleste en mettant ses lois dans leur pensée et en les inscrivant dans leur coeur (Jr 31,33). De quelles lois le prophète fait-il mention? Tous connaîtront Dieu, des plus petits jusqu'aux plus grands, et je pardonnerai leurs fautes, dit Dieu, et je ne me rappellerai plus leurs péchés (Jr 31,34).

Accueillons les lois de la vie, obéissons à l'exhortation de Dieu, apprenons à le connaître pour qu'il nous pardonne. Même s'il n'en a pas besoin, manifestons-lui notre gratitude, donnons-lui en paiement notre docilité, notre respect, comme un loyer que nous lui devons pour notre séjour ici-bas.

L'ivresse, c'est l'usage immodéré du vin, la crapule, c'est le malaise et les vomissements qui sont la suite de l'ivresse, elle est ainsi appelée d'un mot grec qui veut dire branlement de tête. Or, de même que nous ne devons faire usage des aliments que pour apaiser la faim, nous ne devons user de la boisson que pour éteindre la soif, et nous devons éviter avec soin tout excès, car le vin est un breuvage trompeur. L'âme qui sera libre des excès du vin aura la prudence et la sagesse en partage; mais celle qui se plonge dans les vapeurs de l'ivresse, sera comme couverte d'un nuage épais.

Malades, nous avons besoin du Sauveur; égarés, de celui qui nous conduira; assoiffés, de la source d'eau vive; morts, nous avons besoin de la vie; brebis, du berger; enfants, du pédagogue; et toute l'humanité a besoin de Jésus.

Si vous le voulez, nous pouvons comprendre la suprême sagesse du très saint Pasteur et Pédagogue, qui est le Tout-Puissant et le Verbe du Père, lorsqu'il emploie une allégorie et se dit le Pasteur des brebis; mais il es t aussi le Pédagogue des tout-petits.

C'est ainsi qu'il s'adresse assez longuement, par l'intermédiaire d'Ézéchiel, aux anciens, et qu'il leur donne l'exemple salutaire d'une sollicitude bien adaptée: Je soignerai celui qui est boiteux, et je guérirai celui qui est accablé; je ramènerai celui qui s'est égaré, et je les ferai paître sur ma montagne sainte (cf. Ez 34,16). Oui, Maître, donne-nous en abondance ta pâture, qui est la justice. Oui, Pédagogue, sois notre Pasteur jusqu'à ta montagne sainte, jusqu'à l'Église qui s'élève au-dessus des nuages, qui touche aux cieux! Et je serai, dit-il, leur Pasteur, et je serai près d'eux (cf. Ez 34,14). Il veut sauver ma chair en la revêtant de la tunique d'incorruptibilité et il a consacré ma peau par l'onction. Ils m'appelleront, dit-il, et je dirai: Me voici (cf. Is 58,9). Tu m'as entendu plus vite que je ne l'aurais cru, Seigneur. S'ils traversent, ils ne glisseront pas (cf. Is 43,2), dit le Seigneur. Nous ne tomberons pas dans la corruption, en effet, nous qui traversons pour aller vers l'incorruptibilité (cf. 1Co 15,42), puisqu'il nous soutiendra. Il l'a dit et il l'a voulu.

Tel est notre Pédagogue: bon avec justice. Je ne suis pas venu pour être servi, dit-il, mais pour servir (Mt 20,28). C'est pourquoi, dans l'Évangile, on nous le montre fatigué, lui qui se fatigue pour nous, et qui promet de donner sa vie en rançon pour la multitude (Mt 20,28). Il affirme que, seul, le bon Pasteur agit ainsi.

Quel magnifique donateur, qui donne pour nous ce qu'il a de plus grand: sa vie! O le bienfaiteur, l'ami des hommes, qui a voulu être leur frère plutôt que leur Seigneur! Et il a poussé la bonté jusqu'à mourir pour nous!