Saint Grégoire de Nysse

Saint Grégoire de Nysse, né vers 335 et décédé vers 395, était un évêque, théologien et philosophe chrétien. Frère de Saint Basile le Grand et ami de Saint Grégoire de Nazianze, il est l'un des Pères cappadociens, un groupe de théologiens du IVe siècle qui ont eu une influence majeure sur la théologie chrétienne.

Grégoire devint évêque de Nysse en 372, et son épiscopat fut marqué par des luttes contre les hérésies, notamment l'arianisme. Il fut également exilé à plusieurs reprises en raison de son opposition à l'influence arienne dans l'Église.

Ses écrits théologiques sont profonds et variés, abordant des sujets tels que la Trinité, la nature du Christ, l'eschatologie et la vie spirituelle. Grégoire est particulièrement connu pour ses réflexions sur la nature de Dieu et le concept de l'infini divin.

En plus de sa théologie, Grégoire a également écrit sur des sujets philosophiques et spirituels. Ses œuvres, telles que "La Vie de Moïse" et ses écrits sur la création et la résurrection, sont considérées comme des contributions fondamentales à la pensée chrétienne.

Saint Grégoire de Nysse est vénéré comme un saint dans l'Église catholique, l'Église orthodoxe, et les Églises anglicane et luthérienne. Il est célébré pour sa pensée théologique profonde, son érudition et son influence durable sur la théologie chrétienne.

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Le petit enfant qui nous est né, Jésus, grandit de façon différente, en sagesse, en âge et en grâce, chez ceux qui l'ont reçu. Il n'est pas le même chez tous mais il se conforme à la capacité de celui en lequel il vit. Il se montre ainsi comme un petit enfant, comme un adolescent ou un homme parfait, selon la nature de la grappe. Car celle-ci, sur la vigne, ne montre pas toujours la même forme, elle change avec le temps: elle fleurit, elle bourgeonne, elle est achevée, puis, parfaitement mûre, elle va se transformer en vin.

La vigne promet donc par son fruit: celui-ci n'est pas encore mûr et à point pour donner du vin, mais il attend la plénitude des temps. Toutefois, il n'est pas absolument incapable de nous réjouir. En effet, il charme l'odorat, avant le goût, dans l'attente des biens futurs, et il séduit les sens de l'âme par les effluves de l'espérance. Car l'assurance ferme de la grâce que l'on espère délecte déjà ceux qui attendent avec constance. Il en est ainsi du raisin de Chypre qui promet du vin avant de l'être devenu: par sa fleur - c'est l'espérance qui est sa fleur - il nous donne l'assurance de la grâce future.

Celui dont la volonté s'harmonise à celle du Seigneur parce qu'il la médite jour et nuit, devient un arbre planté près d'un ruisseau, qui donne du fruit en son temps, et jamais son feuillage ne meurt (cf. Ps 1,3). C'est pourquoi la vigne de l'Époux, qui a pris racine dans la terre fertile de Gaddi (cf. Ct 1,14 Vg.), c'est-à-dire dans le fond de l'âme, qui est arrosée et enrichie par les enseignements divins, produit cette grappe fleurissante et épanouie dans la quelle elle peut contempler son planteur et son vigneron.

Bienheureuse cette culture dont la fleur reproduit la beauté de l'Époux! Puisque celui-ci est la lumière véritable, la vraie vie et la vraie justice, comme dit la Sagesse, et bien d'autres vertus encore, lorsqu'un homme, par ses oeuvres, devient pareil à l'Époux, lorsqu'il regarde la grappe de sa propre conscience, il y voit l'Époux lui-même, car il reflète la lumière de la vérité dans une vie lumineuse et sans tache.

C'est pourquoi cette vigne féconde affirme: C'est ma grappe qui fleurit et bourgeonne (cf. Ct 7,7-8 Ct 7,13). L'Époux est en personne cette vraie grappe qui se montre attachée au bois, dont le sang devient, pour ceux qui se sauvent dans la joie, une boisson de salut, dans le Christ Jésus notre Seigneur, à qui soient la gloire et la puissance pour les siècles des siècles. Amen.

Le vin nouveau, par la fermentation qui lui est naturelle, chasse au dehors, par un mouvement qui tient également à sa nature, l'écume et la lie impure qu'il contient. Ce vin, c'est le Nouveau Testament, que les outres anciennes, vieillies par leur incrédulité, ne peuvent contenir; bien plus, elles se rompent par la force de l'excellence de la doctrine, et laissent ainsi s'écouler la grâce de l'Esprit saint; car la sagesse n'entre pas dans une âme qui veut le mal. ( Sg 1 ).

Il promet à ceux qui sont avides de la justice, l'abondance de tous les biens désirables, car aucune des voluptés qu'on recherche dans la vie ne peut rassasier ceux qui les poursuivent; seul, le désir de la vertu est suivi d'une récompense qui répand dans l'âme une gloire sans limite comme sans durée.

Dans un sens plus élevé, de même que, pour la nourriture matérielle, les goûts divers des hommes leur font préférer diverses espèces d'aliments; de même pour ce qui est de la nourriture de l'âme, les uns recherchent un bien purement imaginaire, et les autres ce qui est naturellement bon. Aussi saint Matthieu proclame-t-il bienheureux ceux qui ont faim et soif de la justice comme d'une nourriture et comme d'un breuvage, justi ce qui n'est point la justice considérée comme vertu particulière, mais la justice universelle, et il proclame bienheureux celui qui a faim de cette justice.

L'homme doit éviter cette damnable cupidité qui lui fait demander à l'indigent un produit de l'or ou de l'argent qu'il lui prête, et exiger les fruits d'un métal stérile, c'est le sens de cette recommandation: «Prêtez sans en espérer rien», etc. Celui qui traitera de vol et d'homicide la funeste invention de l'usure, ne se trompera pas; car quelle différence entre celui qui perce les murs pour s'emparer du bien qui ne lui appartient pas, et celui qui s'approprie le gain illicite, produit par l'argent qu'il a prêté?

Ne vous hâtez donc pas de juger rigoureusement vos serviteurs, si vous ne voulez être traités de même; car par ce jugement sévère vous vous attirez une condamnation plus rigoureuse: « Ne condamnez pas, et vous ne serez pas condamnés ». Notre-Seigneur ne défend donc pas le jugement accompagné de clémence et suivi du pardon.

Le Sauveur prouve la vérité de la résurrection moins par ses paroles que par ses oeuvres. Il commence par des miracles moins importants pour préparer notre foi à des prodiges plus éclatants, il essaie pour ainsi dire le pouvoir qu'il a de ressusciter sur la maladie désespérée du serviteur du centurion; puis, par un acte d'une plus grande puissance, il conduit les hommes à la foi de la résurrection, en rendant à la vie le fils d'une veuve qu'on portait au tombeau: «Comme il approchait de la porte de la ville, il se trouva qu'on portait en terre un mort, fils unique de sa mère».

Par ce peu de mots, l'Évangéliste nous fait connaître le poids de la douleur qui accablait cette pauvre mère. Elle était veuve, et ne pouvait plus espérer d'autres enfants, elle n'en avait aucun sur lequel elle pût reporter les regards de sa tendresse, à la place de celui qu'elle venait de perdre; il était le seul qu'elle eût nourri de son lait, lui seul était la joie de sa maison, lui seul était toute sa douceur, tout son trésor.

En l'appelant «jeune homme»,Notre-Seigneur nous apprend qu'il était à la fleur de l'âge, dans la première jeunesse. Il y a quelques heures encore, il était la joie et le bonheur des regards de sa mère, peut-être déjà il soupirait après le temps, où uni à une tendre épouse, il deviendrait le chef de sa famille, la souche de sa postérité, et le bâton de vieillesse de sa mère.

Profondément convaincue de son indignité, elle se tient derrière Jésus, les yeux baissés et les cheveux épars, elle embrasse ses pieds et les inonde de larmes, elle manifeste ainsi par ses actes la tristesse de son âme, et implore son pardon: «Et se tenant derrière lui, elle commença à arroser ses pieds de ses larmes»,etc.

Ce récit renferme une leçon des plus utiles. En effet, la plupart de ceux qui se croient justes, enflés par la présomption et la vanité de leurs pensées, se séparent eux-mêmes comme des agneaux qui se séparent des boucs, avant que le jugement véritable vienne faire ce discernement; ils refusent de manger avec la foule, et ils ont en abomination tous ceux qui fuient les extrêmes, et gardent le juste milieu dans la conduite de la vie. Or, saint Luc, médecin des âmes bien plus que des corps, nous montre Dieu lui-même et notre Sauveur visitant avec bonté tous les hommes: «Il entra dans la maison du pharisien et se mit à table», non pour prendre quelque chose de sa vie coupable, mais pour le rendre participant de sa propre justice.

C'est à l'exemple des milices célestes et des légions des anges, que les démons s'appellent légion, de même que le premier d'entre eux se vantait d'établir son trône au-dessus des astres, pour devenir semblable au Très-Haut ( Is 25).

Ce n'était point le ciel qui distillait la manne, ni la terre qui produisait le blé selon sa nature, pour subvenir aux besoins de ce peuple; cette abondante largesse sortait des trésors ineffables de la puissance divine. Le pain se multiplie dans les mains de ceux qui le distribuent et il augmente en proportion de la faim de ceux qui mangent. Ce n'est pas non plus de la mer que sortent les poissons dont ils se nourrissent, mais de la main de celui qui, en créant les diverses espèces de poissons, leur a donné la mer pour séjour.

La volupté est comparée au serpent, dans la sainte Écriture. Or, telle est la nature du serpent, que si sa tête atteint une fente dans un mur, elle attire tout son corps à sa suite; ainsi la nature accorde à l'homme de se construire une habitation comme chose nécessaire, mais à l'aide de cette nécessité, la volupté dresse ses attaques, elle porte l'homme à un luxe exagéré; puis comme conséquence, elle fait entrer dans l'âme la passion de l'avarice, que suit immédiatement le vice de l'impureté, c'est-à-dire le dernier membre et comme la queue de la bestialité. Or, de même que pour faire lâcher prise à un serpent, on ne le saisit point par la queue; ainsi, c'est, inutilement qu'on voudrait déraciner la volupté en commençant par les dernières ramifications, si on ne ferme tout d'abord l'entrée par où le mal a pénétré dans l'âme.

On distingue dans l'âme trois degrés ou trois parties différentes, l'une est simplement végétative, comme dans les plantes, l'autre est sujette aux sensations, comme dans les animaux dépourvus de raison; la troisième enfin qui est la plus parfaite est l'âme raisonnable qui fait le caractère propre de la nature humaine. Ces paroles: «De tout votre coeur», font allusion à la substance corporelle ou végétative; ces autres: «De toute votre âme», à celle qui tient le milieu et qui est purement sensible; ces autres enfin: «De tout votre esprit», expriment la nature la plus élevée, c'est-à-dire la partie intellectuelle qui pense et réfléchit.

Le Sauveur expose à ses disciples la divine doctrine de la prière, parce qu'ils la lui demandent avec instance, et il leur enseigne comment ils doivent prier Dieu pour être exaucés.

Voyez quelle préparation est nécessaire pour que vous puissiez dire avec confiance: «Père»; car si vous arrêtez vos regards sur les choses de la terre, si vous ambitionnez la gloire qui vient des hommes, si vous êtes l'esclave des passions de la chair, et que vous osiez faire cette prière, il me semble entendre Dieu vous dire: Comment, votre vie n'est que corruption, et vous invoquez comme votre Père l'auteur de l'incorruptibilité, et vous ne voyez pas que votre voix criminelle profane ce nom incorruptible ! En effet, celui qui vous a commandé de l'appeler votre Père, ne vous a pas autorisé à ouvrir votre bouche au mensonge.

Or, le principe de tout bien c'est de glorifier le nom de Dieu dans notre vie. Aussi le Sauveur ajoute: «Que votre nom soit sanctifié». Qui pourrait être assez dépourvu de raison, que d'être témoin de la vie pure et sainte des vrais chrétiens, et de ne pas glorifier le nom qu'ils invoquent? Celui donc qui dit à Dieu: «Que votre nom que j'invoque soit sanctifié en moi»,fait à Dieu cette prière: Que je devienne à l'aide de votre grâce juste, et éloigné de tout mal.

Notre-Seigneur nous déclare que la vie de l'homme après la résurrection sera semblable à la vie des anges; il faut donc que la vie présente soit une préparation à cette vie que nous espérons après la mort, et que tout en vivant dans la chair, nous ne vivions pas selon les inspirations de la chair ( Rm 7,12 ). C'est ainsi que le véritable médecin de nos âmes guérit les maladies de notre nature; le principe de nos infirmités c'est de nous être mis en opposition avec la volonté divine; ce n'est donc que par une conformité entière à cette divine volonté que nous serons délivrés de ces infirmités, car la santé de l'âme consiste dans l'accomplissement légitime de la volonté divine.

Le Sauveur, après nous avoir inspiré la confiance qui vient de la pratique des bonnes oeuvres, nous enseigne à implorer la rémission de nos fautes: «Et pardonnez-nous nos offenses».

Il appelle ses enfants ceux qui ont conquis l'impassibilité avec les armes de la justice, et il nous enseigne que le bien que nous ne pouvons acquérir qu'au prix de grands efforts, avait été déposé dès le commencement dans notre nature. En effet, lorsqu'un homme a renoncé à la vie de la chair, et qu'à l'aide de la raison il triomphe de ses passions par la pratique d'une vie vertueuse et sainte, il devient alors insensible comme un enfant, vis-à-vis de ses passions. Par le lit, il faut entendre le repos du Sauveur.

A l'exemple de cette reine d'Ethiopie qui venait d'un pays éloigné, l'Église, composée de ces différents peuples, était noire aussi au commencement, et très-éloignée de la connaissance du vrai Dieu; mais aussitôt que le Christ pacifique apparut, tandis que les Juifs restent dans l'aveuglement, les Gentils viennent le trouver, pour lui offrir les parfums de la piété, l'or de la connaissance de Dieu, et les pierres précieuses de l'obéissance aux commandements.

Suivant quelques auteurs, Zacharie, père de Jean, ayant connu par l'esprit de prophétie le mystère de la virginité inaltérable de la Mère de Dieu, ne l'exclut point de la partie du temple réservée aux vierges, afin de montrer que la puissance du Créateur pouvait manifester une naissance nouvelle, qui ne ferait point perdre à celle qui enfanterait l'éclat de sa virginité. Or, cet endroit se trouvait entre l'autel et la partie du temple où était placé l'autel d'airain, et c'est pour cela qu'il fut mis à mort en cet endroit. On dit encore, que les Juifs ayant appris l'avènement prochain du Roi du monde, et craignant qu'il ne les soumît à son empire, se jetèrent sur celui qui annonçait sa naissance, et massacrèrent le g rand prêtre dans le temple.

Nous en voyons ainsi beaucoup qui, juges sévères pour les pécheurs, et faibles athlètes pour les combats de la vertu; tout à la fois législateurs impitoyables, et observateurs négligents, ils refusent même de s'approcher de la vertu pour essayer de la pratiquer, tandis qu'ils l'exigent sans pitié de ceux qui leur sont soumis.

Car c'est le propre de ceux qui n'ont ni l'espérance de la vie future, ni la crainte du jugement, de s'inquiéter de tous ces biens extérieurs.

Il en est qui ont demandé et obtenu en priant la puissance, les honneurs, les richesses, pourquoi donc nous défend-on d'en faire l'objet de nos prières? Que tous ces biens dépendent de la volonté divine, il n'est personne qui n'en soit convaincu; cependant Dieu les accorde à ceux qui les demandent, afin que nous nous élevions au désir de biens plus parfaits, en voyant que Dieu nous accorde des grâces bien moins importantes; c'est ainsi que nous voyons les enfants, aussitôt qu'ils sont nés, s'attacher de toutes leurs forces au sein maternel, mais lorsque l'enfant grandit, il laisse le sein de sa mère, et demande des parures ou quelqu'autre chose qui charme ses yeux; lorsqu'enfin son esprit s'est développé avec le corps, il rompt avec tous les désirs de l'enfance, et demande à ses parents ce qui est en rapport avec son âge plus parfait.

Ou bien encore, après qu'il eut terminé ses noces, épousé l'Église, et qu'il l'eut admise dans son lit mystérieux, les anges attendaient le retour de leur roi dans le séjour de sa béatitude naturelle. Or, nous devons rendre notre vie semblable à celle des anges; et comme en vivant dans l'innocence ils sont toujours prêts à recevoir leur Maître à son retour, ainsi nous devons veiller nous-mêmes à l'entrée de sa maison, et nous préparer à lui obéir promptement lorsqu'il viendra frapper à la porte: «Afin, dit-il, que dès qu'il arrivera et frappera à la porte, ils lui ouvrent aussitôt».

C'est pour nous faciliter la pratique de cette vigilance, que Notre-Seigneur nous avertit précédemment de ceindre nos reins, et d'avoir des lampes allumées; car la lumière qui brille devant nos yeux en éloigne le sommeil, et la ceinture que nous mettons autour de nos reins, empêche le corps de dormir. Ainsi celui qui a la chasteté pour ceinture, et une conscience pure pour flambeau, ne se laisse jamais aller au sommeil.

Quand Jésus dit: Restez en tenue de service (gardez votre ceinture aux reins) et tenez vos lampes allumées (Lc 12,35), il nous enseigne le moyen de rester éveillés. En effet, l'éclat de la lumière frappe les yeux pour en chasser le sommeil. Et la ceinture, serrée autour des reins, produit une sensation de gêne qui ne permet pas au corps de se relâcher ni de s'abandonner au sommeil.

Le sens des symboles est tout à fait clair. L'homme portant la ceinture de la tempérance passe sa vie dans la lumière d'une conscience pure, qui jaillit de la lampe de la droiture pour éclairer sa conduite. La vérité ainsi manifestée tient son âme en éveil, la garde de l'erreur et l'empêche de jamais se distraire par des rêves trompeurs.

Si nous pratiquons ces vertus conformément à l'enseignement du Verbe, la vie angélique nous sera en quelque sorte communiquée. Car le Christ nous déclare semblables aux anges en nous donnant ce divin commandement: Soyez comme des gens qui attendent leur maître à son retour des noces, pour lui ouvrir dès qu'il arrivera et frappera à la porte (Lc 12,35). En effet, les anges attendaient que le Seigneur revienne des noces. Ils se tenaient, les yeux grands ouverts, aux portes du ciel, avec l'espoir que le Roi de gloire, de retour des noces, rentrerait par là dans le céleste et bienheureux séjour.

Il en était sorti comme sort de sa chambre le jeune époux, dont parle le psaume (cf. Ps 18,6). Nous sommes la vierge prostituée aux idoles, qu'il s'est unie par la renaissance sacramentelle, rétablissant notre humanité dans son incorruptibilité virginale. Ainsi, une fois les noces célébrées, l'Église est devenue l'Épouse du Verbe, selon cette parole de Jean Baptiste: Celui qui a l'épouse est l'époux (Jn 3,29). Elle a été admise dans la chambre des mystères, tandis que les anges attendaient patiemment que le Roi revienne à la béatitude qui convient à sa nature.

Il faut donc, comme il l'a dit, que notre vie soit semblable à la leur. Parce qu'ils vivent en se gardant du vice et de l'erreur, ils sont bien préparés à accueillir la venue du Seigneur. Comme eux, nous veillerons aussi à l'entrée de notre demeure et nous nous préparerons à lui obéir lorsqu'il se tiendra à la porte et frappera (cf. Ap 3,20). Heureux, dit-il, ces serviteurs, que leur maître, en arrivant, trouvera occupés de la sorte (Lc 12,43)!

Gardez-vous donc de mépriser les pauvres, comme s'ils n'avaient droit à rien. Réfléchissez à ce qu'ils sont, et vous reconnaîtrez bientôt leur dignité et leur valeur. Ils sont revêtus de l'image de Jésus-Christ, ils sont les héritiers des biens futurs, les portiers du ciel, de puissants accusateurs et d'éloquents défenseurs, sans avoir besoin de prendre la parole, mais par leur seule présence devant le Juge suprême.

Il faut, en effet, de grands efforts pour mener à bonne fin toute grande entreprise spirituelle qui s'élève sur la pratique successive de tous les commandements de Dieu, et accomplir l'oeuvre de Dieu, car une seule pierre ne suffit pas pour construire une tour, et la pratique d'un seul commandement ne peut nous conduire à la perfection; mais il faut d'abord poser le fondement, et selon la recommandation de l'Apôtre placer dessus des assises d'or, d'argent et de pierres précieuses, «de peur, ajoute Notre-Seigneur, qu'après avoir posé les fondements, et n'avoir pu l'achever», etc.

Lorsque le pasteur eut retrouvé sa brebis, il ne la châtia point, il ne la ramena pas au bercail avec violence, mais il la chargea sur ses épaules, et la porta avec tendresse pour la réunir au troupeau: «Et lorsqu'il l'a trouvée, il la met avec joie sur ses épaules». Il met sa brebis sur ses épaules, c'est-à-dire qu'en se revêtant de notre nature, il a porté sur lui nos péchés. ( 1P 2,24 Is 53,4 ). Après avoir retrouvé sa brebis, il retourne à sa maison, c'est-à-dire que notre pasteur, après l'oeuvre de la réparation du genre humain, est rentré dans son céleste royaume: «Et venant à sa maison, il appelle ses amis et ses voisins, leur disant: Réjouissez-vous avec moi, parce que j'ai trouvé ma brebis qui était perdue». Ses amis et ses voisins ce sont les choeurs des anges qui sont vraiment ses amis, parce qu'ils accomplissent sa volonté d'une manière constante et immuable; ils sont aussi ses voisins, parce qu'étant toujours en sa présence, ils jouissent de la claire vision de Dieu.

Ou bien dans un autre sens, voici la vérité que Notre-Seigneur a voulu nous enseigner sous la comparaison de cette drachme qui est perdue et que l'on cherche; c'est que nous ne pouvons retirer aucune utilité des vertus purement extérieures, figurées ici par les drachmes, (les eussions-nous toutes réunies), si notre âme est dépourvue et comme veuve de celle qui seule peut lui donner l'éclat de la ressemblance divine. La première chose qu'il nous ordonne de faire, c'est d'avoir une lampe allumée; c'est-à-dire la parole divine qui découvre les choses cachées: ou bien encore la lampe de la pénitence. Or, c'est dans sa propre maison, (c'est-à-dire en soi-même et dans sa conscience), qu'il faut chercher cette drachme qu'on a perdue, c'est-à-dire cette image de notre roi qui n'est pas entièrement effacée et perdue, mais qui est cachée sous le fumier, qui figure les souillures de la chair. Il faut enlever ces souillures avec soin, et lorsqu'on les a fait disparaître de la drachme, la sainteté de la vie est alors dans tout son jour ce que l'on cherchait. Il faut donc se réjouir de l'avoir retrouvée et appeler à partager sa joie ses voisines, c'est-à-dire les puissances de notre âme, la partie raisonnable, et la partie irascible ou sensible et toutes les autres puissances de notre âme qui doivent se réjouir dans le Seigneur. Le Sauveur conclut ensuite cette parabole par ces paroles: «Ainsi, je vous le dis, sera la joie parmi les anges de Dieu pour un pécheur qui fait pénitence. Faire pénitence, c'est pleurer les fautes passées, et cesser de commettre celles qu'on déplore; car celui qui déplore ses fautes anciennes, sans cesser d'en commettre de nouvelles, ne sait pas encore ce que c'est de faire pénitence, ou fait l'hypocrite. Il faut encore bien réfléchir qu'une des satisfactions à offrir au Créateur, c'est de s'interdire même les choses permises, parce qu'on s'est permis des choses défendues, c'est d'être sévère pour soi dans les plus petites circonstances, parce qu'on se rappelle d'avoir été infidèle dans les plus grandes.

La volonté de confesser ses égarements suffit pour apaiser son père, le déterminer à aller à sa rencontre et à couvrir son cou de ses baisers: «Il accourut, se jeta à son cou, et le baisa». C'est la figure du joug spirituel imposé aux lèvres de l'homme par la tradition évangélique qui a mis fin aux observances légales.

Le plus jeune fils avait traité son père avec mépris en quittant la maison paternelle, et en dissipant tout son patrimoine; mais lorsque dans la suite il fut brisé par les travaux, réduit à la condition de mercenaire, et à manger la même nourriture que les pourceaux, instruit par une aussi grande infortune, il revint dans la maison de son père: «Rentrant alors en lui-même, il dit: Combien de mercenaires, dans la maison de mon père, ont du pain en abondance, et moi ici je meurs de faim».

Il n'y eut pour lui de retour à sa félicité première qu'après qu'il fut rentré en lui-même, pour sentir tout le poids de sa misère, et qu'il eut réfléchi sur les paroles de repentir qui suivent: «Je me lèverai», etc.

Le Saint-Esprit, nous décrit les égarements et le retour de cet enfant prodigue, pour nous apprendre comment nous devons déplorer les égarements de notre coeur.

De même que les miroirs les plus parfaits représentent fidèlement les formes des visages, tels qu'ils se placent devant eux, joyeux, s'ils sont dans la joie, tristes, s'ils sont dans la tristesse, ainsi le juste jugement de Dieu est la fidèle reproduction des dispositions de notre âme; le riche n'a eu aucune compassion du pauvre étendu à sa porte, il ne trouve à son tour aucune compassion, lorsqu'il aurait tant besoin de miséricorde: «Et Abraham lui dit: Mon fils».

Ces paroles contiennent encore une autre leçon, c'est que l'âme de Lazare est dégagée de toute sollicitude pour les choses présentes, et n'a pas un regard pour ce qu'elle a quitté. Le riche, au contraire, même après la mort, est encore attaché à la vie charnelle comme avec de la glu, car celui dont l'âme se plonge dans les affections de la chair, reste esclave de ses passions, même lorsque son âme est séparée de son corps.

Peut-être aussi entend-il par ce royaume qui est au dedans de nous la joie que l'Esprit saint répand dans nos âmes, car cette joie est la figure et le gage de la joie éternelle qui est le partage des âmes saintes dans la vie future.

Le Verbe de Dieu nous livre ses enseignements sur la prière lorsqu'il apprend aux disciples qui en sont dignes et qui cherchent avec ferveur à s'en instruire, avec quelles paroles il convient de prier pour se faire entendre de Dieu. <> Au contraire, celui qui ne s'unit pas à Dieu par la prière, se détachera de lui. Ce discours devra donc nous faire comprendre en premier lieu qu'il faut toujours prier sans se décourager (Lc 18,1). Car la prière a pour effet d'unir l'homme à Dieu, et celui qui est en communion avec Dieu est loin de l'Adversaire.

La prière sauvegarde la tempérance, maîtrise la colère, abat l'orgueil, extirpe la rancune. <> La prière est le sceau de la virginité et la fidélité du mariage. Elle est le bouclier des voyageurs, la garde de ceux qui dorment, la confiance de ceux qui veillent, la prospérité des agriculteurs, la sécurité des navigateurs.

Vraiment, quand bien même nous passerions toute notre vie à converser avec Dieu dans la prière et l'action de grâce, nous resterions, je crois, aussi indignes de cet échange avec notre bienfaiteur que si nous n'avions même pas conçu le désir de lui manifester notre reconnaissance.

Le temps se divise en trois moments: le passé, le présent et l'avenir. En chacun d'eux nous saisissons la bienveillance divine. Penses-tu au présent? Tu es en vie grâce au Seigneur. Si tu envisages l'avenir, l'espoir de réaliser tes désirs repose sur le Seigneur. Quant au passé, tu n'aurais pas existé si le Seigneur ne t'avait pas créé.

Il t'a accordé sa faveur en te faisant naître, et depuis ta naissance il te l'accorde encore. Comme l'Apôtre le dit: Tu as en lui la vie et le mouvement (cf. Ac 17,28). Tu fondes sur cette même faveur ton espoir des réalités à venir. Toi, tu n'es maître que du présent.

Même si tu ne cesses de rendre grâce à Dieu durant toute ta vie, cela égalera à peine la grâce qu'il te fait au moment présent, et tu ne trouveras jamais le moyen de payer ta dette de reconnaissance pour le passé et pour l'avenir. Que nous sommes loin, d'ailleurs, de lui rendre grâce selon la mesure de nos capacités! C'est au point que nous n'employons même pas les possibilités qui nous sont offertes de manifester notre gratitude. Nous négligeons, en effet, de réserver, je ne dis pas toute la journée, mais même une infime partie de celle-ci, à la méditation des réalités divines.

Qui a rétabli dans la grâce originelle l'image divine que le péché avait ternie en moi? Qui me fait monter vers le bonheur que je possédais avant d'être exilé du paradis, privé de l'arbre de vie et englouti dans l'abîme de cette existence charnelle? Il n'y a personne qui comprenne (Rm 3,11), dit l'Écriture. Car, en vérité, si nous y étions vraiment attentifs, durant toute notre vie nous ne cesserions de rendre grâce à Dieu.

Considérons quelle était alors la situation de la société. Dans toutes les familles divisées par la différence de religion, on était suspect les uns aux autres. Le fils encore idolâtre trahissait ses parents devenus chrétiens; le père, obstiné dans son infidélité, devenait l'accusateur de son fils qui avait embrassé la foi. Tous les âges étaient exposés à la persécution, et les femmes elles-mêmes, n'en étaient pas à l'abri par la faiblesse naturelle de leur sexe.

Avant la consécration, le pain est un pain ordinaire, mais aussitôt le mystère de la consécration, il devient et il est appelé le corps de Jésus-Christ.

Apollinaire prétend que la nature humaine en Jésus-Christ n'avait pas de volonté propre, et qu'il n'y a en lui qu'une seule volonté, celle du Dieu qui est descendu du ciel. Qu'il nous dise donc quelle est cette volonté dont le Sauveur ne veut point l'accomplissement, car la divinité ne peut renoncer à sa propre volonté.

Mais pourquoi fléchit-il les genoux, selon le récit de l'Évangéliste: «Et s'étant mis à genoux, il priait ?» Les hommes ont coutume de se prosterner ainsi devant les grands pour les supplier, témoignant ainsi par leur attitude, que ceux qu'ils prient leur sont supérieurs. Or, il est évident que la nature humaine n'est rien en comparaison de celle de Dieu, c'est pourquoi dans les devoirs que nous rendons à cette nature incomparable, nous employons les marques d'honneur en usage parmi nous, pour témoigner notre respect à l'égard de ceux qui sont élevés au-dessus de nous. C'est ainsi que celui qui a pris sur lui nos misères, et s'est rendu notre médiateur, fléchit pour prier les genoux de l'humanité dont il s'est revêtu, pour nous apprendre à fuir l'orgueil pendant que nous prions, et à suivre en tout les inspirations de l'humilité; car Dieu résiste aux superbes, et il accorde sa grâce aux humbles. ( Jc 4; 1 P 5).

La forme de la croix, dont les quatre extrémités partent d'un même centre, signifie que la vertu et la puissance de celui qui y est attaché s'étendent partout.

Il nous faut encore examiner comment le bon larron est jugé digne d'entrer dans le paradis, alors qu'un glaive de feu en interdit l'entrée aux saints. Mais remarquez que le texte sacré dit que ce glaive de feu s'agitait toujours pour éloigner les indignes et laisser librement entrer dans la vie ceux qui en sont dignes.

Il convient ici d'examiner comment Jésus-Christ a pu dans le même temps se diviser en trois et aller dans les entrailles de la terre, comme il l'avait prédit aux pharisiens ( Mt 12, 4), dans le paradis, comme il l'a dit au bon larron, et dans les mains de son Père, d'après ses dernières paroles. Or, cette difficulté ne forme même pas une question pour ceux qui veulent tant soi peu réfléchir, car celui qui est partout, est à la fois présent en tout lieu par sa divine puissance.

On peut encore répondre qu'au temps de la passion, la divinité n'abandonna aucune partie de l'humanité à laquelle elle s'était unie, et qu'elle sépara volontairement l'âme du corps en restant elle-même unie à l'une et à l'autre. C'est ainsi qu'il détruit la puissance de la mort par son corps qu'il livre à la mort, tandis que par son âme, il ouvre au bon larron l'entrée du paradis. Or, le prophète Isaïe, en décrivant la céleste Jérusalem, qui n'est autre que le paradis, fait ainsi parler Dieu: «Je vous porte gravée sur ma main, vos murailles sont sans cesse devant mes yeux»; ( Is 49, 16) paroles qui prouvent que la main de Dieu le Père est dans le paradis.

La loi prescrivait qu'on mangeât la pâque avec des laitues amères, parce que c'était encore le temps de l'amertume, mais après la résurrection, cette amertume est adoucie par un rayon de miel: «Et ils lui présentèrent un morceau de poisson rôti, et un rayon de miel».