Jean 13, 1

Avant la fête de la Pâque, sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père, Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout.

Avant la fête de la Pâque, sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père, Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout.
Saint Thomas d'Aquin
COMMENT LE CHRIST PRÉPARE SES DISCIPLES À VIVRE SA PASSION

I – COMMENT LE CHRIST PRÉPARE SES DISCIPLES À VIVRE SA PASSION EN LES FORMANT PAR UN EXEMPLE

1727. Plus haut, l'Évangéliste a exposé certaines occasions qui ont entraîné le Christ vers la Passion et la mort ; dans cette partie, il montre comment le Christ prépare ses disciples avant sa Passion. Il commence par montrer [c'est le but du présent chapitre] comment il les forma par un exemple. Ensuite, au chapitre 14, il montre comment il les réconforta par ses paroles [n° 1848] ; enfin, au chapitre 17, comment il les fortifia par le soutien de ses prières [n° 2177].

Ici l'Évangéliste expose d'abord l'exemple que le Christ a donné à ses disciples. Puis il montrera la défaillance des disciples qui n'étaient pas encore capables de le suivre [n° 1795].

II présente d'abord l'exemple, puis il en ajoute la finalité [n° 1751], enfin il entraîne ses disciples à l'imiter [n° 1768].

A. L'EXEMPLE QUE LE CHRIST DONNA À SES DISCIPLES

Il montre d'abord l'amour du Christ donnant l'exemple. Puis il indique l'action par laquelle il donna l'exemple [n° 1739].

Trois aspects sont abordés ici : la fête présente, ensuite la mort imminente du Christ [n° 1731], enfin la dilection fervente du Christ [n° 1735].

La fête présente.

1728. La fête présente était la Pâque. Certains disent que ce nom Pâque est grec et vient donc du verbe πασχείν (paschein), comme si à partir de là cette fête était appelée Pâque, parce qu'on y célèbre la Passion du Seigneur. Et cela concorde avec le grec car πασχείν en grec est la même chose que pati en latin (souffrir). Mais l'origine première de ce mot se prend de l'hébreu : pâque en effet signifie phase qui en hébreu signifie passage ; et ici il s'agit du passage du Seigneur.

Ici, l'Évangéliste traduit ainsi en fonction d'un double passage du Seigneur. Le premier, celui de l'ange frappant les premiers-nés d'Égypte et sauvant les premiers-nés des Hébreux ; et l'autre qui suit, celui des fils d'Israël traversant la mer Rouge. C'est pourquoi on a bien fait d'appeler cette fête Pâque. Et nous pouvons dire ainsi que notre Pâque a la signification de l'une et de l'autre langue, à savoir de l'hébreu et du grec, parce que dans la Passion même du Seigneur se réalisa le passage du Christ de ce monde vers le Père - Il a passé en faisant le bien et en guérissant. De même notre passage à tous se fait en suivant le Christ soit par la pénitence et le martyre selon le psaume - Nous passions par le feu et par l’eau -, soit par le désir de l'esprit en aspirant aux choses célestes, selon l'Ecclésiastique : Passez à moi, vous tous qui me désirez''.

1729. Or dire : LE JOUR DE LA FÊTE, c'est s'exprimer par antonomase. Car, comme il est dit dans le livre de l'Exode, il y avait dans l'année trois jours solennels où les Juifs devaient se rassembler dans le lieu que le Seigneur avait choisi : la Phase où était immolée la Pâque, la Pentecôte, et la fête des Tentes, la Scénopégie. Mais entre tous, le jour de la Pâque était le plus célébré.

Ici un doute se présente à propos de : AVANT LE JOUR DE LA FÊTE DE LA PÂQUE. Car le jour de la Pâque était le jour où était immolé l'agneau, et c'était la quatorzième lune. Donc, puisque l'Évangéliste dit que cela se passa avant le jour de la fête de la Pâque, il semble que cela eut lieu à la treizième lune, qui précédait la quatorzième lune. Et les Grecs, en suivant cela, disent que le Seigneur a souffert à la quatorzième lune, quand les Juifs devaient célébrer la Pâque. C'est pourquoi le Seigneur, sachant que sa Passion était imminente, devança la célébration de la Pâque en célébrant sa Pâque le jour précédent, avant la fête de la Pâque des Juifs. Mais parce que dans le livre de l'Exode il est prescrit que, du soir du quatorzième jour au vingt et unième jour du mois, on ne trouve pas de pain levé chez les Hébreux, ils disent en outre que le Seigneur a tout réalisé non pendant le temps des azymes, mais pendant le temps du pain levé. Car avant le jour de la fête de la Pâque, c'est-à-dire la treizième lune, on trouvait du pain levé chez les Hébreux.

Mais les trois autres Évangélistes vont à l'encontre de cette opinion. Eux disent que cela eut lieu le premier jour des azymes au moment où devait être immolée la Pâque. Il s'ensuit que la Cène du Seigneur fut accomplie le jour où était immolée la Pâque des Juifs.

1730. À cela les Grecs répondent en disant que les autres Évangélistes n'ont pas raconté ce fait d'une manière vraie, et qu'à cause de cela Jean, qui fut le dernier à écrire son Évangile, les a corrigés. Mais il est hérétique de dire qu'il puisse se trouver quelque chose de faux, non seulement dans les évangiles, mais encore dans n'importe quel écrit canonique, et c'est pourquoi il est nécessaire de dire que tous les Évangélistes disent la même chose, et ne sont en désaccord sur aucun point. Pour avoir l'évidence de cela, il faut savoir que, comme le rapporte le livre de l'Exode, les solennités des Juifs commençaient le soir du jour précédent. La raison en est qu'ils comptaient les jours selon la lune, qui apparaît dès le soir ; c'est pourquoi aussi ils considéraient qu'un jour allait d'un soir à un autre soir. Ainsi, chez eux, la solennité de la Pâque commençait le soir du jour précédent et était terminée au soir du jour de la Pâque ; c'est aussi de cette manière que les fêtes sont célébrées chez nous.

Ainsi, ce qui se passe chez nous la veille de la Nativité du Seigneur, on peut dire que cela s'est passé en la fête de la Nativité. Et assurément, en gardant cette manière de faire, les autres Évangélistes ont dit que la Cène eut lieu le premier jour des azymes, parce qu'elle eut lieu le jour précédent, au soir, qui déjà appartenait au premier jour des azymes. Or ici l'Évangéliste Jean comprend le jour de la fête de la Pâque comme celui qui était tout entier célébré, et non pas celui dont le soir seulement était célébré, qui était le jour précédant la Pâque ; c'est pourquoi il dit AVANT LE JOUR DE LA FÊTE DE LA PÂQUE. Il est donc évident que la Cène du Seigneur eut lieu la quatorzième lune au soir.

La mort imminente du Christ.

1731. La mort imminente du Christ était son passage hors de ce monde par le moyen de la Passion ; et quant à cela l'Évangéliste dit : JÉSUS, SACHANT QU'EST VENUE SON HEURE, car cette solennité des Juifs était la figure de la Passion du Christ - Tout en effet leur arrivait en figure, comme le dit la première épître aux Corinthiens -, et c'est pourquoi il expose aussitôt la vérité, c'est-à-dire la Passion du Christ. Et comme pour montrer que pâque vient de phase, c'est-à-dire de passage, il fait mention du passage - DE PASSER, dit-il, DE CE MONDE VERS LE PÈRE.

1732. L'Évangéliste expose là trois aspects de la Passion du Christ. D'abord, elle fut prévue ; ensuite, elle convenait [n° 1733] ; enfin, elle fut cause pour nous de croissance et d'élévation [n° 1734].

Certes elle fut prévue, elle n'arriva pas par hasard ; et quant à cela il dit : JÉSUS, SACHANT, comme pour dire : ce n'est ni malgré lui, ni par ignorance, mais en SACHANT et volontairement, qu'il a souffert - Jésus, sachant tout ce qui allait lui arriver... Et à l'inverse il est dit de nous : L'affliction de l'homme est grande parce qu'il ne sait pas ce qui sera, et il ne peut savoir d'aucune manière ce qui va arriver.

1733. Elle convint quant au temps, et c'est pourquoi il dit QU'EST VENUE SON HEURE, c'est-à-dire le jour même de la Pâque, où il s'en irait par la Croix - Pour toute affaire il y a un temps et un moment favorable. C'est cette heure dont il est dit plus haut : Mon heure n'est pas encore venue. Mais il ne faut pas comprendre cette heure comme fatale, comme soumise à la course et à la position des étoiles, mais comme déterminée par la disposition de la Providence divine. C'est pourquoi, dis-je, elle était déterminée à se réaliser dans la Pâque des Juifs, parce qu'il convenait à la solennité des Juifs que la vérité suivît la figure, c'est-à-dire qu'au moment où l'agneau, qui figurait le Christ, était immolé, le Christ fut immolé, lui qui est le véritable agneau de Dieu - Ce n'est pas par des choses corruptibles, or ou argent, que vous avez été rachetés (...) mais par le sang précieux de l'agneau immaculé.

Elle convenait aussi à ce qui était à accomplir. Déjà en effet le Christ avait été glorifié - Maintenant le Fils de l'homme a été glorifié. Désormais il avait manifesté le Père au monde - Père, j'ai manifesté ton nom aux hommes. Il restait donc que fût consommée l'œuvre de la Passion et de la Rédemption humaine dont il est dit : Tout est achevé et inclinant la tête, il remit l'esprit.

1734. La Passion du Christ fut pour nous cause de croissance et d'élévation et non pas de destruction : SACHANT QU'EST VENUE SON HEURE DE PASSER DE CE MONDE VERS LE PÈRE, c'est-à-dire en rendant la nature humaine participante de la gloire du Père - Je monte vers mon Père et votre Père. Mais il ne faut pas comprendre qu'il passe d'un lieu à un autre, puisque Dieu le Père n'est pas contenu dans un lieu - Moi je remplis le ciel et la terre. Mais, de même qu'on dit que le Christ est venu du Père sans le quitter mais en assumant une nature inférieure semblable à nous, de même aussi on dit qu'il est retourné vers lui dans la mesure où, jusque dans son humanité, il partage désormais la gloire du Père - Et s'il vit, il vit pour Dieu. - Que toute langue confesse que Jésus Christ est Seigneur à la gloire de Dieu le Père .

La dilection fervente du Christ.

1735. L'Évangéliste poursuit en mettant en lumière la dilection fervente du Christ, et cela sous quatre aspects. Tout d'abord en ce qu'elle fut prévenante - Ce n'est pas nous qui avons aimé Dieu, mais c'est lui-même qui nous a aimés le premier·. Et quant à cela il dit AYANT AIMÉ LES SIENS, comme pour signifier un « avant ». Il les a aimés avant de les créer - Tu aimes tout ce qui est, et tu ne hais rien de ce que tu as fait. Il les a aimés avant de les appeler - D'un amour éternel je t'ai aimé. Il les a aimés avant de les racheter. C'est pourquoi il est dit plus bas : Personne n'a de plus grand amour que celui qui livre son âme pour ses amis.

1736. En second lieu, il met en lumière la dilection du Christ en montrant qu'elle convenait parce qu'il a AIMÉ LES SIENS. Là, il faut savoir que les hommes sont à lui de diverses manières, et que selon cela ils sont aimés par Dieu de diverses manières. Ils sont à lui de trois manières. D'abord par la création. Et ceux-là il les aime en conservant pour eux les biens de la nature - Il est venu chez lui, et les siens, par la création, ne l'ont pas reçu. D'autres sont à lui parce qu'il les consacre : il s'agit de ceux qui lui ont été donnés par Dieu le Père par la foi, ceux que lui-même racheta - Ils étaient à toi, et tu me les as donnés, et ils ont gardé ta parole. Et ceux-là il les aime en les conservant dans les biens de la grâce. Mais d'autres encore sont à lui par un amour spécial - Nous sommes à toi, ô David. Ceux-là, il les aime spécialement en les consolant.

1737. Ensuite, il met en lumière la dilection du Christ en montrant qu'elle fut nécessaire, parce qu'il a AIMÉ LES SIENS QUI ÉTAIENT DANS LE MONDE. Il y en a parmi les siens qui étaient déjà dans la gloire du Père, parce que même les pères de l'ancien Testament étaient à lui, en tant que tous ont espéré être libérés par lui - Tous les saints sont dans sa main . Mais ceux-ci n'ont pas besoin d'un tel amour autant que ceux qui étaient dans le monde, et c'est pourquoi il dit : LES SIENS QUI ÉTAIENT DANS LE MONDE, c'est-à-dire par le corps, non par l'esprit \

1738. Enfin, il met en lumière la dilection du Christ en montrant qu'elle fut parfaite, c'est pourquoi il dit : [JÉSUS] LES AIMA JUSQU'À LA FIN. Or la fin peut s'entendre de deux manières : la fin de l'intention et la fin de l'exécution.

La fin de l'intention est ce à quoi notre intention est ordonnée ; et une telle fin doit être la vie éternelle, selon l'épître aux Romains : Vous avez pour fruit la sanctification, et pour fin la vie éternelle. Mais le Christ aussi doit être une telle fin - La fin de la Loi, c'est le Christ. Et ces deux réalités sont une seule fin, parce que la vie éternelle n'est rien d'autre que de jouir du Christ selon sa divinité - La vie éternelle est qu'ils te connaissent, toi le seul vrai Dieu. C'est en ce sens qu'il est dit : IL LES AIMA JUSQU'À LA FIN, c'est-à-dire de telle sorte qu'il les conduise lui-même à la fin, ou à la vie éternelle qui n'est rien d'autre - D'un amour éternel je t'ai aimé.

Quant à la fin de l'exécution, c'est le terme de la réalité ; et ainsi la mort peut être dite fin, de sorte qu'il est dit : [JÉSUS] LES AIMA JUSQU'À LA FIN, c'est-à-dire jusqu'à la mort, ce qui peut avoir trois significations. En un premier sens, selon Augustin, cela revient à dire d'une manière humaine que le Christ aima les siens jusqu'à la mort seulement, et non au-delà. Mais ce sens est faux : en effet, il ne saurait convenir que celui qui n'est pas limité par la mort ait limité l'amour par la mort.

En un autre sens, on peut comprendre que « jusqu'à » (in) indique la cause. Et le sens est celui-ci : [JÉSUS] LES AIMA JUSQU'À LA FIN, c'est-à-dire jusqu'à la mort, comme si l'Évangéliste disait que son amour pour eux l'a conduit jusqu'à la mort - Il nous a aimés, et s'est livré lui-même pour nous.

En un troisième sens, on peut comprendre que JUSQU'À LA FIN signifie : alors qu'il leur avait donné auparavant de nombreux signes d'amour, à la fin, à savoir au moment de la mort, il leur donna les plus grands signes d'amour - Je ne vous ai pas dit cela depuis le commencement. Comme s'il disait : il ne fut nécessaire de vous montrer combien je vous aimais qu'au moment de mon départ, de telle sorte qu'ainsi l'amour et la mémoire de moi fussent imprimés plus profondément dans vos cœurs.
Louis-Claude Fillion
Avant la fête... La phrase entière du texte original, longue, solennelle, chargée de particules qui décrivent des circonstances extérieures ou des sentiments intimes de Jésus, a été manipulée de différentes manières par les exégètes: la façon dont l'a coupée la Vulgate est excellente. Ce verset 1 est complet en soi, et sert de préambule à toute la section (chap. 13-17) ; les deux suivants (2-3) introduisent le récit spécial du lavement des pieds (vv. 4-20). C'est à aima, plutôt qu'à sachant, ou à aimé les siens, qu'il faut rattacher la note chronologique avant la fête de la Pâque, laquelle, « placée comme elle l'est en tête de tout le morceau, ne peut se rapporter qu'à l'action principale » (Godet). Sur la discussion qui se rattache à cette date, voyez l’Évangile selon S. Matthieu, ρ. 498 201, et l’Évangile selon S. Marc, p. 193. Des études nouvelles et plus approfondies rendent aussi sûre que possible à nos yeux l'opinion autrefois adoptée. - Sachant. « Parce qu'il savait » : la connaissance toute divine et surnaturelle que Jésus avait de sa fin prochaine fut pour lui un motif de manifester plus intimement, plus tendrement son amour à ses apôtres. On redouble d'affection envers ses amis, quand on prévoit qu'on sera bientôt séparé d'eux. - Son heure était venue. Voyez 12, 23. Son heure, il l'a toujours eue sous les yeux comme une chose parfaitement connue. Autrefois, il avait prédit qu'elle n'était pas encore venue ; il annonce maintenant qu'elle est imminente. - Les mots de passer de ce monde au Père précisent la signification de « son heure ». Dans le texte grec, le verbe exprime la translation d'une sphère à une autre ; translation qui, pour N.-S. Jésus-Christ, devait avoir lieu par le triple mystère de sa mort, de sa résurrection et de son ascension. « S'en aller de ce monde » était une locution juive assez fréquemment usitée dans le sens de mourir. Cf. Rosenmüller, Scholia in h. l. S. Augustin relève la paronomase qui semble exister entre «Pâque» (passage) et « passer ». - Α ce moment suprême, les pensées de Jésus sont pour les siens, non pour lui-même : après avoir aimé les siens... Le texte grec est encore plus expressif ; c'est l'équivalent de « lui appartenant » : ses disciples, en effet, lui appartenaient en propre, Dieu les lui ayant donnés et lui-même les ayant choisis. Cf. 1, 11, 12 ; 17, 11 ; Act. 4, 23, etc. Comme il les avait toujours chéris ! Mais, ces privilégiés de son cœur, il allait les laisser dans le monde, dans ce monde méchant et pervers qu'il se disposait à quitter, et où ils rencontreraient toutes sortes de difficultés, de périls. - Les aima jusqu’à la fin. Cf. le v. 34 et 1 Joan. 4, 10, 19. Eux, et nous aussi. Comme plus haut, « aima » exprime le sentiment et sa manifestation, laquelle ne comprendra pas seulement le lavement des pieds, mais la série entière des actes racontés jusqu'à la fin du chap. 17. « A la fin », c'est-à-dire, d'après les uns (Tolet, Corneille de Lapierre, Luc de Bruges, etc.), jusqu'à la fin de sa vie ; d'après les autres (Théophylacte, Euthymius, Maldonat, Beelen, Patrizi ; etc.), jusqu'à la perfection, d’un amour parfait. Nous préférons cette seconde interprétation, qu'ont patronnée dès l'antiquité S. Jean Chrysostome et S. Cyrille. Elle est d'ailleurs plus conforme soit à l'usage classique de la locution grecque, soit au contexte, qui paraît se rapporter beaucoup plus à l'intensité de l'affection de Notre-Seigneur qu'à sa simple durée. Nous allons donc assister, d'après cela, au témoignage le plus vif, le plus intense, et comme au couronnement de l'amour de Jésus pour les siens. - Admirons de nouveau ce début solennel, vraiment digne des scènes qui vont suivre et de tout le récit qu'il inaugure.
Catéchisme de l'Église catholique
En épousant dans son cœur humain l’amour du Père pour les hommes, Jésus " les a aimés jusqu’à la fin " (Jn 13, 1) " car il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime " (Jn 15, 13). Ainsi dans la souffrance et dans la mort, son humanité est devenue l’instrument libre et parfait de son amour divin qui veut le salut des hommes (cf. He 2, 10. 17-18 ; 4, 15 ; 5, 7-9). En effet, il a librement accepté sa passion et sa mort par amour de son Père et des hommes que Celui-ci veut sauver : " Personne ne m’enlève la vie, mais je la donne de moi-même " (Jn 10, 18). D’où la souveraine liberté du Fils de Dieu quand il va lui-même vers la mort (cf. Jn 18, 4-6 ; Mt 26, 53).

C’est " l’amour jusqu’à la fin " (Jn 13, 1) qui confère sa valeur de rédemption et de réparation, d’expiation et de satisfaction au sacrifice du Christ. Il nous a tous connus et aimés dans l’offrande de sa vie (cf. Ga 2, 20 ; Ep 5, 2. 25). " L’amour du Christ nous presse, à la pensée que, si un seul est mort pour tous, alors tous sont morts " (2 Co 5, 14). Aucun homme, fût-il le plus saint, n’était en mesure de prendre sur lui les péchés de tous les hommes et de s’offrir en sacrifice pour tous. L’existence dans le Christ de la Personne divine du Fils, qui dépasse et, en même temps, embrasse toutes les personnes humaines, et qui le constitue Tête de toute l’humanité, rend possible son sacrifice rédempteur pour tous.

En ceci consiste la rédemption du Christ : il " est venu donner sa vie en rançon pour la multitude " (Mt 20, 28), c’est-à-dire " aimer les siens jusqu’à la fin " (Jn 13, 1) pour qu’ils soient " affranchis de la vaine conduite héritée de leurs pères " (1 P 1, 18).

Il est hautement convenable que le Christ ait voulu rester présent à son Église de cette façon unique. Puisque le Christ allait quitter les siens sous sa forme visible, il voulait nous donner sa présence sacramentelle ; puisqu’il allait s’offrir sur la Croix pour nous sauver, il voulait que nous ayons le mémorial de l’amour dont il nous a aimés " jusqu’à la fin " (Jn 13, 1), jusqu’au don de sa vie. En effet, dans sa présence eucharistique il reste mystérieusement au milieu de nous comme celui qui nous a aimés et qui s’est livré pour nous (cf. Ga 2, 20), et il le reste sous les signes qui expriment et communiquent cet amour :

Jésus fait de la charité le commandement nouveau (cf. Jn 13, 34). En aimant les siens " jusqu’à la fin " (Jn 13, 1), il manifeste l’amour du Père qu’il reçoit. En s’aimant les uns les autres, les disciples imitent l’amour de Jésus qu’ils reçoivent aussi en eux. C’est pourquoi Jésus dit : " Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez en mon amour " (Jn 15, 9). Et encore : " Voici mon commandement : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés " (Jn 15, 12).

" Or, comme approchait le temps où il devait être emporté de ce monde, Jésus prit résolument le chemin de Jérusalem " (Lc 9, 51 ; cf. Jn 13, 1). Par cette décision, il signifiait qu’il montait à Jérusalem prêt à mourir. A trois reprises il avait annoncé sa passion et sa Résurrection (cf. Mc 8, 31-33 ; 9, 31-32 ; 10, 32-34). En se dirigeant vers Jérusalem, il dit : " Il ne convient pas qu’un prophète périsse hors de Jérusalem " (Lc 13, 33).

Enfin vient l’Heure de Jésus (cf. Jn 13, 1 ; 17, 1) : Jésus remet son esprit entre les mains du Père (cf. Lc 23, 46 ; Jn 19, 30) au moment où par sa Mort il est vainqueur de la mort, de sorte que, " ressuscité des morts par la Gloire du Père " (Rm 6, 4), il donne aussitôt l’Esprit Saint en " soufflant " sur ses disciples (cf. Jn 20, 22). A partir de cette Heure, la mission du Christ et de l’Esprit devient la mission de l’Église : " Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie " (Jn 20, 21 ; cf. Mt 28, 19 ; Lc 24, 47-48 ; Ac 1, 8).

Dans la Liturgie de l’Église le Christ signifie et réalise principalement son Mystère pascal. Durant sa vie terrestre, Jésus annonçait par son enseignement et anticipait par ses actes son Mystère pascal. Quand son Heure est venue (cf. Jn 13, 1 ; 17, 1), il vit l’unique événement de l’histoire qui ne passe pas : Jésus meurt, est enseveli, ressuscite d’entre les morts et est assis à la droite du Père " une fois pour toutes " (Rm 6, 10 ; He 7, 27 ; 9, 12). C’est un événement réel, advenu dans notre histoire, mais il est unique : tous les autres événements de l’histoire arrivent une fois, puis ils passent, engloutis dans le passé. Le Mystère pascal du Christ, par contre, ne peut pas rester seulement dans le passé, puisque par sa Mort il a détruit la mort, et que tout ce que le Christ est, et tout ce qu’Il a fait et souffert pour tous les hommes, participe de l’éternité divine et surplombe ainsi tous les temps et y est rendu présent. L’Événement de la Croix et de la Résurrection demeure et attire tout vers la Vie.

Le Seigneur, ayant aimé les siens, les aima jusqu’à la fin. Sachant que l’heure était venue de partir de ce monde pour retourner à son Père, au cours d’un repas, il leur lava les pieds et leur donna le commandement de l’amour (cf. Jn 13, 1-17). Pour leur laisser un gage de cet amour, pour ne jamais s’éloigner des siens et pour les rendre participants de sa Pâque, il institua l’Eucharistie comme mémorial de sa mort et de sa résurrection, et il ordonna à ses apôtres de le célébrer jusqu’à son retour, " les établissant alors prêtres du Nouveau Testament " (Cc. Trente : DS 1740).

A ceux qui vont quitter cette vie, l’Église offre, en plus de l’Onction des malades, l’Eucharistie comme viatique. Reçue à ce moment de passage vers le Père, la Communion au Corps et au Sang du Christ a une signification et une importance particulières. Elle est semence de vie éternelle et puissance de résurrection, selon les paroles du Seigneur : " Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle et moi, je le ressusciterai au dernier jour " (Jn 6, 54). Sacrement du Christ mort et ressuscité, l’Eucharistie est ici sacrement du passage de la mort à la vie, de ce monde vers le Père (cf. Jn 13, 1).

Ainsi prennent vie les paroles du Seigneur sur le pardon, cet Amour qui aime jusqu’à l’extrême de l’amour (cf. Jn 13, 1). La parabole du serviteur impitoyable, qui couronne l’enseignement du Seigneur sur la communion ecclésiale (cf. Mt 18, 23-35), s’achève sur cette parole : " C’est ainsi que vous traitera mon Père céleste, si chacun de vous ne pardonne pas à son frère du fond du cœur ". C’est là, en effet, " au fond du cœur " que tout se noue et se dénoue. Il n’est pas en notre pouvoir de ne plus sentir et d’oublier l’offense ; mais le cœur qui s’offre à l’Esprit Saint retourne la blessure en compassion et purifie la mémoire en transformant l’offense en intercession.
Pape Saint Jean-Paul II
Quand l'Église célèbre l'Eucharistie, mémorial de la mort et de la résurrection de son Seigneur, cet événement central du salut est rendu réellement présent et ainsi « s'opère l'œuvre de notre rédemption ».Ce sacrifice est tellement décisif pour le salut du genre humain que Jésus Christ ne l'a accompli et n'est retourné vers le Père qu'après nous avoir laissé le moyen d'y participer comme si nous y avions été présents. Tout fidèle peut ainsi y prendre part et en goûter les fruits d'une manière inépuisable. Telle est la foi dont les générations chrétiennes ont vécu au long des siècles. Cette foi, le Magistère de l'Église l'a continuellement rappelée avec une joyeuse gratitude pour ce don inestimable. Je désire encore une fois redire cette vérité, en me mettant avec vous, chers frères et sœurs, en adoration devant ce Mystère: Mystère immense, Mystère de miséricorde. Qu'est-ce que Jésus pouvait faire de plus pour nous? Dans l'Eucharistie, il nous montre vraiment un amour qui va « jusqu'au bout » (cf. Jn 13, 1), un amour qui ne connaît pas de mesure.

Le sang du Christ, qui révèle la grandeur de l'amour du Père, manifeste que l'homme est précieux aux yeux de Dieu et que la valeur de sa vie est inestimable. L'Apôtre Pierre nous le rappelle: « Sachez que ce n'est par rien de corruptible, argent ou or, que vous avez été affranchis de la vaine conduite héritée de vos pères, mais par un sang précieux, comme d'un agneau sans reproche et sans tache, le Christ » (1 P 1, 18-19). C'est en contemplant le sang précieux du Christ, signe du don qu'il fait par amour (cf. Jn 13, 1), que le croyant apprend à reconnaître et à apprécier la dignité quasi divine de tout homme; il peut s'écrier, dans une admiration et une gratitude toujours nouvelles: « Quelle valeur doit avoir l'homme aux yeux du Créateur s'il a mérité d'avoir un tel et un si grand Rédempteur (Exultet de la nuit pascale), si Dieu a donné son Fils afin que lui, l'homme, ne se perde pas, mais qu'il ait la vie éternelle (cf. Jn 3, 16)! ».

La contemplation de la Croix nous conduit ainsi jusqu'aux racines les plus profondes de ce qui est advenu. Jésus, qui avait dit en entrant dans le monde: « Voici, je viens pour faire, ô Dieu, ta volonté » (cf. He 10, 9), voulut obéir en toute chose à son Père et, « ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu'à la fin » (Jn 13, 1), en se donnant totalement lui-même pour eux.

L'Apôtre Paul a traduit cette conception nouvelle sous la forme de l'appartenance radicale au Seigneur, qui concerne l'homme dans toutes les situations: « Nul d'entre nous ne vit pour soi- même, comme nul ne meurt pour soi-même; si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur, et si nous mourons, nous mourons pour le Seigneur. Donc, dans la vie comme dans la mort, nous appartenons au Seigneur » (Rm 14, 7-8). Mourir pour le Seigneur signifie vivre sa mort comme un acte suprême d'obéissance au Père (cf. Ph 2, 8), en acceptant de l'accueillir à l'« heure » voulue et choisie par lui (cf. Jn 13, 1), qui seul peut dire quand est achevé notre chemin terrestre. Vivre pour le Seigneur signifie aussi reconnaître que la souffrance, demeurant en elle-même un mal et une épreuve, peut toujours devenir une source de bien. Elle le devient si elle est vécue par amour et avec amour, comme participation à la souffrance même du Christ crucifié, par don gratuit de Dieu et par choix personnel libre. Ainsi, celui qui vit sa souffrance dans le Seigneur lui est plus pleinement conformé (cf. Ph 3, 10; 1 P 2, 21) et est intimement associé à son œuvre rédemptrice pour l'Eglise et pour l'humanité. C'est là l'expérience de l'Apôtre que toute personne qui souffre est appelée à revivre: « Je trouve ma joie dans les souffrances que j'endure pour vous, et je complète en ma chair ce qui manque aux épreuves du Christ pour son Corps, qui est l'Eglise » (Col 1, 24).

Les deux commandements, auxquels « se rattache toute la Loi, ainsi que les Prophètes » (Mt 22, 40), sont profondément unis entre eux et s'interpénètrent. Jésus rend témoignage de leur indivisible unité par ses paroles et par sa vie : sa mission culmine à la Croix rédemptrice (cf. Jn 3, 14-15), signe de son amour inséparable envers le Père et envers l'humanité (cf. Jn 13, 1).

Ce « comme » indique aussi la mesure avec laquelle Jésus a aimé et avec laquelle ses disciples doivent s'aimer entre eux. Après avoir dit : « Voici quel est mon commandement : vous aimer les uns les autres comme je vous ai aimés » (Jn 15, 12), Jésus poursuit en révélant le don sacrificiel de sa vie sur la Croix, témoignage d'un amour « jusqu'à la fin » (Jn 13, 1) : « Nul n'a plus grand amour que celui-ci : donner sa vie pour ses amis » (Jn 15, 13).

Marie est présente à Cana de Galilée en tant que Mère de Jésus et il est significatif qu'elle contribue au «commencement des signes» qui révèlent la puissance messianique de son Fils: «Or il n'y avait plus de vin. La Mère de Jésus lui dit: "Ils n'ont pas de vin". Jésus lui dit: "Que me veux-tu, femme? Mon heure n'est pas encore arrivée"» (Jn 2, 3-4). Dans l'Evangile de Jean, cette «heure» signifie le moment fixé par le Père où le Fils accomplit son œuvre et doit être glorifié (cf. Jn 7, 30; 8, 20; 12, 23. 27; 13, 1; 17, 1; 19, 27). Même si la réponse de Jésus à sa Mère paraît s'entendre comme un refus (surtout si l'on considère, plus que la question, l'affirmation tranchante: «Mon heure n'est pas encore arrivée»), Marie ne s'en adresse pas moins aux servants et leur dit: «Tout ce qu'il vous dira, faites-le» (Jn 2, 5). Jésus ordonne alors aux servants de remplir d'eau les jarres, et l'eau devient du vin meilleur que celui qui avait été d'abord servi aux hôtes du banquet nuptial.
Pape Benoît XVI
La charité est amour reçu et donné. Elle est « grâce » (cháris). Sa source est l’amour jaillissant du Père pour le Fils, dans l’Esprit Saint. C’est un amour qui, du Fils, descend sur nous. C’est un amour créateur, qui nous a donné l’existence; c’est un amour rédempteur, qui nous a recréés. Un amour révélé et réalisé par le Christ (cf. Jn 13, 1) et « répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné » (Rm 5, 5). Objets de l’amour de Dieu, les hommes sont constitués sujets de la charité, appelés à devenir eux-mêmes les instruments de la grâce, pour répandre la charité de Dieu et pour tisser des liens de charité.

En ce sens, il est vrai que celui qui ne connaît pas Dieu, tout en pouvant avoir de multiples espérances, est dans le fond sans espérance, sans la grande espérance qui soutient toute l'existence (cf. Ep 2, 12). La vraie, la grande espérance de l'homme, qui résiste malgré toutes les désillusions, ce ne peut être que Dieu – le Dieu qui nous a aimés et qui nous aime toujours « jusqu'au bout », « jusqu'à ce que tout soit accompli » (cf. Jn 13, 1 et 19, 30). Celui qui est touché par l'amour commence à comprendre ce qui serait précisément « vie ». Il commence à comprendre ce que veut dire la parole d'espérance que nous avons rencontrée dans le rite du Baptême: de la foi j'attends la « vie éternelle » – la vie véritable qui, totalement et sans menaces, est, dans toute sa plénitude, simplement la vie. Jésus, qui a dit de lui-même être venu pour que nous ayons la vie et que nous l'ayons en plénitude, en abondance (cf. Jn 10, 10), nous a aussi expliqué ce que signifie « la vie »: « La vie éternelle, c'est de te connaître, toi le seul Dieu, le vrai Dieu, et de connaître celui que tu as envoyé, Jésus Christ » (Jn 17, 3). La vie dans le sens véritable, on ne l'a pas en soi, de soi tout seul et pas même seulement par soi: elle est une relation. Et la vie dans sa totalité est relation avec Celui qui est la source de la vie. Si nous sommes en relation avec Celui qui ne meurt pas, qui est Lui-même la Vie et l'Amour, alors nous sommes dans la vie. Alors nous « vivons ».

Parmi les saints, il y a par excellence Marie, Mère du Seigneur et miroir de toute sainteté. Dans l’Évangile de Luc, nous la trouvons engagée dans un service de charité envers sa cousine Élisabeth, auprès de laquelle elle demeure «environ trois mois» (1, 56), pour l’assister dans la phase finale de sa grossesse. «Magnificat anima mea Dominum», dit-elle à l’occasion de cette visite – «Mon âme exalte le Seigneur» – (Lc 1, 46). Elle exprime ainsi tout le programme de sa vie: ne pas se mettre elle-même au centre, mais faire place à Dieu, rencontré tant dans la prière que dans le service du prochain – alors seulement le monde devient bon. Marie est grande précisément parce qu’elle ne veut pas se rendre elle-même grande, mais elle veut rendre Dieu grand. Elle est humble: elle ne veut être rien d’autre que la servante du Seigneur (cf. Lc 1, 38. 48). Elle sait qu’elle contribue au salut du monde, non pas en accomplissant son œuvre, mais seulement en se mettant pleinement à la disposition des initiatives de Dieu. Elle est une femme d’espérance: uniquement parce qu’elle croit aux promesses de Dieu et qu’elle attend le salut d’Israël; l’ange peut venir chez elle et l’appeler au service décisif de ces promesses. C’est une femme de foi: «Heureuse celle qui a cru», lui dit Élisabeth (Lc 1, 45). Le Magnificat – portrait, pour ainsi dire, de son âme – est entièrement brodé de fils de l’Écriture Sainte, de fils tirés de la Parole de Dieu. On voit ainsi apparaître que, dans la Parole de Dieu, Marie est vraiment chez elle, elle en sort et elle y rentre avec un grand naturel. Elle parle et pense au moyen de la Parole de Dieu; la Parole de Dieu devient sa parole, et sa parole naît de la Parole de Dieu. De plus, se manifeste ainsi que ses pensées sont au diapason des pensées de Dieu, que sa volonté consiste à vouloir avec Dieu. Étant profondément pénétrée par la Parole de Dieu, elle peut devenir la mère de la Parole incarnée. Enfin, Marie est une femme qui aime. Comment pourrait-il en être autrement ? Comme croyante qui, dans la foi, pense avec les pensées de Dieu et veut avec la volonté de Dieu, elle ne peut qu’être une femme qui aime. Nous le percevons à travers ses gestes silencieux, auxquels se réfèrent les récits des Évangiles de l’enfance. Nous le voyons à travers la délicatesse avec laquelle, à Cana, elle perçoit les besoins dans lesquels sont pris les époux et elle les présente à Jésus. Nous le voyons dans l’humilité avec laquelle elle accepte d’être délaissée durant la période de la vie publique de Jésus, sachant que son Fils doit fonder une nouvelle famille et que l’heure de sa Mère arrivera seulement au moment de la croix, qui sera l’heure véritable de Jésus (cf. Jn 2, 4; 13, 1). Alors, quand les disciples auront fui, elle demeurera sous la croix (cf. Jn 19, 25-27); plus tard, à l’heure de la Pentecôte, ce seront les disciples qui se rassembleront autour d’elle dans l’attente de l’Esprit Saint (cf. Ac 1, 14).