Jean 16, 33

Je vous ai parlé ainsi, afin qu’en moi vous ayez la paix. Dans le monde, vous avez à souffrir, mais courage ! Moi, je suis vainqueur du monde. »

Je vous ai parlé ainsi, afin qu’en moi vous ayez la paix. Dans le monde, vous avez à souffrir, mais courage ! Moi, je suis vainqueur du monde. »
Saint Hilaire de Poitiers
Ils croient qu'il est sorti de Dieu, parce qu'il fait des oeuvre que Dieu seul peut faire. Le Sauveur leur avait déjà dit plusieurs fois: «Je suis sorti de Dieu, et je suis venu de mon Père en ce monde», et cette déclaration si souvent répétée, n'avait excité en eux aucun sentiment d'admiration; aussi ils n'ajoutent pas: Vous êtes venu de votre Père en ce monde; car ils savaient qu'il avait été envoyé de Dieu, mais ils ne savaient pas qu'il était sorti de Dieu, ils ne commencèrent à comprendre cette ineffable naissance du Fils de Dieu que grâce à ce s derniers enseignements du Sauveur, et c'est alors qu'ils reconnaissent qu'il ne leur parlait plus en paraboles. Ce n'est point en effet à la manière des enfantements humains, qu'un Dieu naît d'un Dieu, c'est plutôt une sortie qu'un enfantement, car il vient seul d'un principe unique, il n'en est pas une partie, un amoindrissement, une diminution, une dérivation, une extension, une affection, c'est la naissance d'un être vivant sortant d'un être vivant, il n'est point choisi pour recevoir le nom de Dieu, il n'est point sorti du néant pour arriver à l'existence, il est sorti d'un être immuable, et cette sortie doit s'appeler une naissance, mais non un commencement.
Saint Jean Chrysostome
Les disciples de Jésus consolés et ranimés par l'assurance qui leur est donnée qu'ils sont les amis du Père, lui avouent qu'ils reconnaissent maintenant qu'il sait toutes choses: «Ses disciples lui dirent: Voilà que maintenant vous parlez ouvertement, et sans vous servir d'aucune parabole».

Notre-Seigneur, dans les paroles qui précèdent, a répondu aux secrètes pensées de leur esprit, et c'est pour cela qu'ils lui disent: «Maintenant nous voyons que vous savez toutes choses». Voyez comme ils étaient encore imparfaits; après tant et de si grandes preuves qu'il leur avait données, ils lui disent: «C'est maintenant seulement que nous savons»; ils semblent lui en faire un mérite. «Et il n'est pas besoin que personne vous interroge,» c'est-à-dire, avant même que nous vous le disions, vous saviez ce qui était pour nous un sujet de trouble, et vous nous avez rassurés en nous disant que votre Père nous aimait.

Il leur dit: «L'heure est venue que vous soyez dispersés», c'est-à-dire quand je serai livré à mes ennemis, car la crainte qui s'emparera de vous sera si grande, que vous ne pourrez fuir tous ensemble; mais pour moi il n'en résultera aucun mal. «Et je ne suis pas seul, parce que mon Père est avec moi».

C'est-à-dire afin que vous ne me repoussiez jamais de votre coeur, car ce n'est pas seulement lorsque je serai pris par mes ennemis que vous serez assaillis par le malheur; tant que vous serez dans le monde, vous serez opprimés, c'est-à-dire, persécutés, c'est ce qu'il leur prédit en ces termes: «Dans le monde vous aurez des tribulations».

C'est-à-dire que votre âme ressuscite et revienne à la vie, car il ne faut pas que les disciples restent dans la tristesse et les alarmes, alors que leur Maître a triomphé de leurs ennemis. C'est pour cela qu'il ajoute: «Parce que j'ai vaincu le monde».
Saint Augustin
Le Sauveur leur annonce et leur promet seulement que l'heure vient où il ne leur parlera plus en paraboles, d'où vient donc qu'ils lui tiennent ce langage, sinon qu'ils ne comprennent pas les paraboles dont il se sert, et que leur ignorance est si grande, qu'ils ne la connaissent même pas?

Les apôtres étaient convaincus maintenant que le Sauveur savait toutes choses, d'où vient donc qu'au lieu de lui dire, ce qui paraissait bien plus naturel: Vous n'avez pas besoin d'interroger sur aucune chose, ils lui disent au contraire: «Il n'est pas besoin que personne vous interroge ?» Ou plutôt comment se fait-il que les deux choses eurent lieu, c'est-à-dire que le Seigneur les interrogea, et qu'ils l'interrogèrent à leur tour? La solution de cette difficulté est facile, car ce n'était que pour eux et non pour lui qu'il les interrogeait, ou qu'il en était interrogé lui-même. En effet, il ne les interrogeait pas pour en apprendre quelque chose, mais bien plutôt pour les enseigner eux-mêmes; et ses disciples, qui l'interrogeaient pour en apprendre ce qu'ils voulaient savoir, avaient besoin d'être instruits à l'école de celui qui savait toutes choses. Pour lui au contraire il n'avait aucun besoin qu'on l'interrogeât pour qu'il connût ce que chacun d'eux voulait savoir de lui; car avant même qu'on lui fit aucune question, il connaissait l'intention de celui qui allait l'interroger. Ce n'était point sans doute une chose extraordinaire pour le Seigneur de prévoir les pensées des hommes, mais pour des hommes faibles il y avait un certain mérite à dire comme ils le font: «En cela nous croyons que vous êtes sorti de Dieu».

Le Sauveur leur donne ensuite des avis proportionnés à l'état de faiblesse et d'enfance où se trouvait encore en eux l'homme intérieur : «Jésus leur répondit: Vous croyez maintenant ?»

En effet lorsqu'on se saisit de sa personne, ils n'abandonnèrent pas seulement extérieurement son corps au pouvoir de ses ennemis; mais ils renoncèrent intérieurement à la foi qu'ils avaient en lui.

Il voulait que leur foi prît de l'accroissement et que leur intelligence s'élevât jusqu'à comprendre que le Fils était sorti du Père, mais sans le quitter. Il conclut son discours par ces paroles: «Je vous ai dit ces choses, afin que vous ayez la paix en moi».

Cette oppression devait commencer pour eux à cette heure dont Jésus leur disait: «Vient l'heure où vous serez dispersés chacun de votre côté», mais elle ne devait pas se continuer de la même manière. Car ce qu'il ajoute: «Et que vous me laissiez seul», ne devait point s'appliquer aux persécutions qu'ils auraient à endurer dans le monde, après son ascension; alors, au contraire, loin de l'abandonner, il veut qu'ils lui demeurent attachés et qu'ils mettent en lui leur paix. Il leur dit encore: «Ayez confiance».

Lorsqu'ils eurent reçu l'Esprit saint, c'est en Jésus-Christ qu'ils mirent toute leur confiance, et c'est par lui qu'ils remportèrent la victoire; car on ne pourrait dire que le Sauveur a vaincu le monde, si ses membres étaient vaincus par le monde. Quant à ces paroles: «Je vous ai dit ces choses, afin que vous ayez la paix en moi», nous ne devons pas seulement les entendre de ce qu'il vient de dire immédiatement à ses disciples, mais de tous ses enseignements, soit de ceux qu'il leur a donnés depuis qu'ils ont commencé à être ses disciples, soit de ce long et admirable discours qui suivit la cène. Le but qu'il s'est proposé dans tous ces discours il l'a dit en termes exprès, c'est qu'ils placent en lui leur paix; cette paix n'aura point de fin comme le temps, mais elle sera elle-même la fin de toutes nos pieuses intentions et de nos saintes actions.
Saint Grégoire le Grand
Il semble leur dire: Placez en moi toute votre consolation et votre force intérieure, car pour le monde, vous n'avez à en attendre que l'oppression et la persécution la plus cruelle.
Saint Bède le Vénérable
Ce que l'on peut entendre de deux manières: comme une affirmation, ou comme une ironie; comme une ironie dans ce sens: Il est bien tard pour commencer à croire; car voici l'heure, etc., comme une affirmation, c'est-à-dirc: «Vous croyez maintenant; il est vrai, mais voici que vient l'heure, et déjà elle est venue où vous serez dispersés chacun de votre côté, et où vous me laisserez seul».
Saint Thomas d'Aquin
2173. À présent le Seigneur expose son intention par rapport à son enseignement : il montre d'abord l'utilité de cet enseignement, puis sa nécessité [n° 2175].

2174. Le fruit de l'enseignement du Seigneur, c'est la paix. Aussi affirme-t-il : Je vous le dis, vous finirez par me laisser seul, et pour cela je vous offre mon enseignement, afin que vous ne persistiez pas dans cet abandon ; oui, tout ce dont je vous ai parlé dans cet entretien, ou bien dans tout l'Évangile, JE VOUS [L']AI DIT pour que, revenant à moi, EN MOI VOUS AYEZ LA PAIX.

En effet, la fin de l'Évangile, c'est la paix dans le Christ - Paix en abondance pour ceux qui aiment ton nom. En voici la raison : la paix du cœur s'oppose au trouble qui provient des maux qui surviennent et s'accroissent. Mais lorsqu'on a un chagrin ou une joie qui dépasse de beaucoup de tels maux, il est évident que le trouble ne demeure pas. Voilà pourquoi les hommes qui sont du monde, eux qui ne sont pas unis à Dieu par l'amour, ont des tribulations sans paix, alors que les saints qui ont Dieu dans leur cœur par l'amour, même si de la part du monde ils ont des tribulations, ont la paix dans le Christ - Lui qui a mis en paix ton territoire. Telle doit être en effet notre fin : que nous ayons la paix en Dieu - Mon âme refuse d'être consolée, à savoir dans les choses du monde, mais lorsque je me suis souvenu de Dieu, je me suis réjoui.

2175. La nécessité de cette paix vient du tourment infligé par le monde ; aussi le Seigneur dit-il : DANS LE MONDE VOUS AUREZ DE L'AFFLICTION. Il prédit d'abord l'angoisse à venir ; puis, face à elle, il donne confiance.

Quant au premier point, il dit : DANS LE MONDE VOUS AUREZ DE L'AFFLICTION, à savoir venant de ceux qui sont du monde - Ne vous étonnez pas, frères, si le monde vous hait ; et encore : Parce que (...) moi je vous ai choisis du milieu du monde, pour cette raison-là le monde vous hait.

Quant au deuxième point, il dit : AYEZ CONFIANCE : MOI J'AI VAINCU LE MONDE. Car lui nous libère - Tu m'as libéré de la détresse de ce feu qui m'entourait. C'est comme s'il disait : Ayez recours à moi, et vous aurez la paix, et cela parce que MOI J'AI VAINCU LE MONDE, qui vous oppresse.

2176. Le Christ a vaincu le monde d'une première manière en lui retirant les armes avec lesquelles il attaque et qui sont tout ce qui est objet de convoitise - Tout ce qui est dans le monde est soit concupiscence des yeux, soit concupiscence de la chair, soit orgueil de la vie. C'est ainsi que le Christ a vaincu les richesses par la pauvreté - Moi, je suis indigent et pauvre. - Le Fils de l'homme n'a pas où reposer sa tête . Il a vaincu l'honneur par l'humilité - Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur. Il a vaincu les plaisirs par les souffrances et les labeurs – Il s'est fait obéissant jusqu'à la mort, et la mort de la croix. Et encore : Jésus, donc, fatigué de la route, était assis à même la source- Je suis pauvre et je peine depuis ma jeunesse. Celui donc qui vainc ainsi ces concupiscences, vainc le monde ; et c'est ce que réalise la foi - Telle est la victoire qui vainc le monde : notre foi. Car étant la substance des réalités à espérer, qui sont les biens spirituels et éternels, elle nous fait mépriser les biens terrestres et passagers.

La deuxième manière dont le Seigneur a vaincu le monde, c'est en mettant dehors le prince du monde - C'est maintenant que le prince de ce monde va être jeté dehors. - Dépouillant les principautés et les puissances, il les a résolument données en spectacle, en les entraînant aux yeux de tous dans le cortège de son triomphe, triomphe qu'il a en lui-même. De ce fait, il nous a présenté le diable comme celui qui devait être vaincu par nous - Joueras-tu avec lui comme avec un oiseau, ou l’ attacheras-tu pour tes servantes ? Au sens littéral, après la Passion, les toutes jeunes servantes du Christ et les tout-petits se jouent du diable.

La troisième manière dont le Seigneur a vaincu, c'est en convertissant à lui les hommes de ce monde. Par eux le monde se révoltait en fomentant des séditions, et le Christ les a attirés à lui - Moi, quand j'aurai été élevé de terre, j'attirerai tout à moi. - Voilà que tout le monde est parti à sa suite.

Ainsi donc nous ne devons pas craindre les afflictions venant du monde, parce qu'il a été vaincu - Mais grâces soient à Dieu, qui nous a donné la victoire par notre Seigneur Jésus Christ.

I – COMMENT LE CHRIST PRÉPARE SES DISCIPLES À VIVRE SA PASSION EN LES RÉCONFORTANT PAR SA PRIÈRE

2177. Précédemment, le Seigneur a réconforté ses disciples par un exemple et une exhortation. Dans cette partie, il les réconforte par sa prière, dans laquelle il fait trois choses. D'abord il prie pour lui-même, puis pour l'assemblée des disciples [n° 2193], enfin pour tout le peuple des croyants [n° 2232].

Concernant le premier point, après avoir présenté sa demande il indique le fruit de sa demande [n° 2182], et enfin le mérite grâce auquel elle sera exaucée [n° 2189].
Louis-Claude Fillion
Je vous ai dit ces choses. Cette formule, si fréquente dans le discours d'adieu, le désigne ici tout entier (13, 31 -16, 32) ; et c'est une erreur de ne la faire retomber que sur le v. 32 (Schegg, etc.). - Afin que vous ayez la paix en moi (pronom emphatique). En lui, c'est à dire, en demeurant étroitement unis à sa personne sacrée. La paix, malgré les tribulations extérieures ; la vraie paix qu'il a laissée à ses amis (14, 27) comme un précieux héritage. Sa vie s'achève, ainsi qu'elle a commencé (Luc. 2, 14), par un message de paix. - Dans le monde. Par antithèse avec « en moi ». En lui, ils auront la paix et la joie ; dans le monde, la guerre et la souffrance. - Vous aurez des afflictions à souffrir. Vigoureuse expression. Cf. v. 22). Le verbe grec est au présent : déjà l'angoisse avait commencé pour les disciples ; elle devait croître après le départ du Sauveur. - Mais (particule adversative : néanmoins, malgré cela) ayez confiance (ici seulement dans les écrits de S. Jean). Qu'ils demeurent absolument inébranlables dans leur confiance. - J’ai (tout à fait majestueux) vaincu le monde. Le parfait de la réalisation complète : déjà le monde est là, gisant aux pieds de Jésus, à la façon d'un ennemi entièrement vaincu. Il y a une énergie incomparable dans ce cri de triomphe. Pourtant, quoi de plus étrange en apparence qu'une telle assertion, au moment où va s'ouvrir la série des humiliations et des défaites extérieures de N. S. Jésus-Christ ? Mais il est absolument sûr de la victoire finale, et ses apôtres, son Église, doivent se rassurer, même au milieu des plus redoutables dangers, en pensant qu'il les protège. C'est une digne et sublime conclusion de ce sublime discours.
Fulcran Vigouroux
J’ai vaincu le monde ; et par ma victoire, je vous ai mérité les grâces nécessaires pour le vaincre aussi vous-mêmes.
Concile œcuménique
Que les prêtres ne l’oublient pas : ils ne sont jamais seuls dans leur action, ils s’appuient sur la force du Dieu tout-puissant ; que leur foi au Christ, qui les a appelés à participer à son sacerdoce, les aide à se donner en toute confiance à leur ministère, car ils savent que Dieu est assez puissant pour augmenter en eux la charité. Qu’ils ne l’oublient pas non plus : ils ont pour compagnons leurs frères dans le sacerdoce, bien plus, les fidèles du monde entier. Car tous les prêtres travaillent ensemble pour accomplir le dessein divin du salut, le Mystère du Christ caché depuis les siècles en Dieu, qui ne se réalise que peu à peu, par l’effort coordonné de ministères différents, « en vue de l’édification du Corps du Christ jusqu’à ce qu’il atteigne toute sa taille». Tout cela, certes est caché avec le Christ en Dieu, et c’est surtout la foi qui peut le percevoir. C’est dans la foi que doivent marcher les guides du Peuple de Dieu, suivant l’exemple d’Abraham le fidèle, qui, « par la foi, obéit à l’appel de partir vers un pays qu’il devait recevoir en héritage, et il partit ne sachant où il allait » (He 11, 8). En vérité, l’intendant des mystères de Dieu ressemble au semeur dont le Seigneur a dit : « Qu’il dorme ou qu’il se lève, la nuit ou le jour, la semence germe et pousse, il ne sait comment » (Mc 4, 27). D’ailleurs, si le Seigneur Jésus a dit : « Gardez courage! j’ai vaincu le monde » (Jn 16, 33), il n’a pas, pour autant, promis à l’Église la victoire totale ici-bas. Ce qui fait la joie de ce saint Concile, c’est que la terre, ensemencée par la graine de l’Évangile, donne aujourd’hui du fruit en bien des endroits, sous la conduite de l’Esprit du Seigneur qui remplit l’univers et qui a fait naître au cœur de tant de prêtres et de tant de fidèles un esprit vraiment missionnaire. Pour tout cela, avec toute son affection, le saint Concile remercie les prêtres du monde entier. Et « à celui qui peut tout faire, et bien au-delà de nos demandes et de nos pensées, en vertu de la puissance qui agit en nous, à lui la gloire ans l’Église et le Christ Jésus » (Ep 3, 20-21).
Catéchisme de l'Église catholique
La force est la vertu morale qui assure dans les difficultés la fermeté et la constance dans la poursuite du bien. Elle affermit la résolution de résister aux tentations et de surmonter les obstacles dans la vie morale. La vertu de force rend capable de vaincre la peur, même de la mort, d’affronter l’épreuve et les persécutions. Elle dispose à aller jusqu’au renoncement et au sacrifice de sa vie pour défendre une juste cause. " Ma force et mon chant, c’est le Seigneur " (Ps 118, 14). " Dans le monde, vous aurez de l’affliction, mais courage, moi j’ai vaincu le monde " (Jn 16, 33).
Pape Saint Jean-Paul II
Dans l'annonce de cet Evangile, nous ne devons pas craindre l'hostilité ou l'impopularité, refusant tout compromis et toute ambiguïté qui nous conformeraient à la mentalité de ce monde (cf. Rm 12, 2). Nous devons être dans le monde mais non pas du monde (cf. Jn 15, 19; 17, 16), avec la force qui nous vient du Christ, vainqueur du monde par sa mort et sa résurrection (cf. Jn 16, 33).
Pape Benoît XVI
Sainte Marie, tu appartenais aux âmes humbles et grandes en Israël qui, comme Syméon, attendaient « la consolation d'Israël » (Lc 2, 25) et qui, comme Anne, attendaient « la délivrance de Jérusalem » (Lc 2, 38). Tu vivais en contact intime avec les Saintes Écritures d'Israël, qui parlaient de l'espérance – de la promesse faite à Abraham et à sa descendance (cf. Lc 1, 55). Ainsi nous comprenons la sainte crainte qui t'assaillit quand l'ange du Seigneur entra dans ta maison et te dit que tu mettrais au jour Celui qui était l'espérance d'Israël et l'attente du monde. Par toi, par ton « oui », l'espérance des millénaires devait devenir réalité, entrer dans ce monde et dans son histoire. Toi tu t'es inclinée devant la grandeur de cette mission et tu as dit « oui »: « Voici la servante du Seigneur; que tout se passe pour moi selon ta parole » (Lc 1, 38). Quand remplie d'une sainte joie tu as traversé en hâte les monts de Judée pour rejoindre ta parente Élisabeth, tu devins l'image de l'Église à venir qui, dans son sein, porte l'espérance du monde à travers les monts de l'histoire. Mais à côté de la joie que, dans ton Magnificat, par les paroles et par le chant tu as répandue dans les siècles, tu connaissais également les affirmations obscures des prophètes sur la souffrance du serviteur de Dieu en ce monde. Sur la naissance dans l'étable de Bethléem brilla la splendeur des anges qui portaient la bonne nouvelle aux bergers, mais en même temps on a par trop fait en ce monde l'expérience de la pauvreté de Dieu. Le vieillard Syméon te parla de l'épée qui transpercerait ton cœur (cf. Lc 2, 35), du signe de contradiction que ton Fils serait dans ce monde. Quand ensuite commença l'activité publique de Jésus, tu as dû te mettre à l'écart, afin que puisse grandir la nouvelle famille, pour la constitution de laquelle Il était venu et qui devait se développer avec l'apport de ceux qui écouteraient et observeraient sa parole (cf. Lc 11, 27s.). Malgré toute la grandeur et la joie des tout débuts de l'activité de Jésus, toi, tu as dû faire, déjà dans la synagogue de Nazareth, l'expérience de la vérité de la parole sur le « signe de contradiction » (cf. Lc 4, 28ss). Ainsi tu as vu le pouvoir grandissant de l'hostilité et du refus qui progressivement allait s'affirmant autour de Jésus jusqu'à l'heure de la croix, où tu devais voir le Sauveur du monde, l'héritier de David, le Fils de Dieu mourir comme quelqu'un qui a échoué, exposé à la risée, parmi les délinquants. Tu as alors accueilli la parole: « Femme, voici ton fils! » (Jn 19, 26). De la croix tu reçus une nouvelle mission. À partir de la croix tu es devenue mère d'une manière nouvelle: mère de tous ceux qui veulent croire en ton Fils Jésus et le suivre. L'épée de douleur transperça ton cœur. L'espérance était-elle morte? Le monde était-il resté définitivement sans lumière, la vie sans but? À cette heure, probablement, au plus intime de toi-même, tu auras écouté de nouveau la parole de l'ange, par laquelle il avait répondu à ta crainte au moment de l'Annonciation: « Sois sans crainte, Marie! » (Lc 1, 30). Que de fois le Seigneur, ton fils, avait dit la même chose à ses disciples: N'ayez pas peur! Dans la nuit du Golgotha, tu as entendu de nouveau cette parole. À ses disciples, avant l'heure de la trahison, il avait dit: « Ayez confiance: moi, je suis vainqueur du monde » (Jn 16, 33). « Ne soyez donc pas bouleversés et effrayés » (Jn 14, 27). « Sois sans crainte, Marie! » À l'heure de Nazareth l'ange t'avait dit aussi: « Son règne n'aura pas de fin » (Lc 1, 33). Il était peut-être fini avant de commencer ? Non, près de la croix, sur la base de la parole même de Jésus, tu étais devenue la mère des croyants. Dans cette foi, qui était aussi, dans l'obscurité du Samedi Saint, certitude de l'espérance, tu es allée à la rencontre du matin de Pâques. La joie de la résurrection a touché ton cœur et t'a unie de manière nouvelle aux disciples, appelés à devenir la famille de Jésus par la foi. Ainsi, tu fus au milieu de la communauté des croyants qui, les jours après l'Ascension, priaient d'un seul cœur pour le don du Saint-Esprit (cf. Ac 1, 14) et qui le reçurent au jour de la Pentecôte. Le « règne » de Jésus était différent de ce que les hommes avaient pu imaginer. Ce « règne » commençait à cette heure et n'aurait jamais de fin. Ainsi tu demeures au milieu des disciples comme leur Mère, comme Mère de l'espérance. Sainte Marie, Mère de Dieu, notre Mère, enseigne-nous à croire, à espérer et à aimer avec toi. Indique-nous le chemin vers son règne! Étoile de la mer, brille sur nous et conduis-nous sur notre route!