Jean 20, 10
Ensuite, les disciples retournèrent chez eux.
Ensuite, les disciples retournèrent chez eux.
Le sabbat ou la loi commandait àchacun de rester en repos, étant passé, Madeleine ne put résister plus longtemps au désir qui la pressait; elle vint donc à la première aurore pour trouver quelque, consolation en voyant le lieu où Jésus avait été enseveli: «Le jour d'après le sabbat», etc.
Le Seigneur était ressuscité sans renverser la pierre du sépulcre, sans rompre les sceaux qu'on y avait apposés, mais comme le fait de la résurrection devait être connu avec certitude d'un grand nombre d'autres, le tombeau est ouvert après que Jésus est ressuscité, afin que chacun puisse croire à la vérité de ce qui est arrivé. Cette circonstance frappe vivement Madeleine; aussi à la vue de la pierre ôtée du tombeau, elle n'entra pas dedans, elle ne prit pas le temps de regarder, mais courut avec un empressement mêlé d'amour, apprendre cet événement aux disciples. Elle n'avait encore aucune idée claire de, la résurrection, et croyait seulement qu'on avait changé le corps de place.
L'Évangéliste ne veut point ravir, à cette femme la gloire, qui lui est due, et ne croit pas qu'il y ait de la honte pour eux que Madeleine leur ait appris la première cette nouvelle. Aussitôt donc qu'elle leur eût parlé, ils se rendent en toute hâte au tombeau.
Aussitôt qu'il fut arrivé, il considère les linges qui avaient été laissés dans le tombeau: «Et s'étant penché, il vit les linceuls posés à terre». Toutefois il ne pousse pas plus loin ses recherches, et s'en tient là. Pierre, au contraire, beaucoup plus ardent, entre dans le tombeau, examine tout avec soin, et voit quelque chose de plus: «Simon-Pierre qui le suivait, arriva ensuite et entra dans le sépulcre, et vit les linges posés à terre, et le suaire qui couvrait sa tête, non point avec les linges, mais plié en un lieu à part». Il y avait dans toutes ces circonstances une preuve évidente de la résurrection. Car en supposant qu'on eût enlevé son corps, on ne l'eût pas dépouillé de ses linceuls, et ceux qui seraient venus le dérober, n'auraient pas pris tant de soin d'ôter le suaire, de le rouler et de le placer dans un endroit à pari, séparé des linceuls; mais ils auraient tout simplement enlevé le corps tel qu'il se trouvait. Pourquoi saint Jean nous a-t-il fait remarquer précédemment que Jésus avait été enseveli avec une grande quantité de myrrhe, qui fait adhérer fortement les linges au corps, c'est pour que vous ne soyez pas dupe de ceux qui vous affirment que le corps du Sauveur a été enlevé, car celui qui serait venu pour le dérober, n'aurait point perdu le sens à ce point que de dépenser tant de soins et de temps pour une chose parfaitement inutile.
Jean entre dans le tombeau après Pierre: «Alors l'autre disciple qui était arrivé le premier au sépulcre, entra aussi, et il vit, et il mit», etc.
Marie-Madeleine vint au sépulcre sous l'impulsion d'un amour plus ardent que celui des autres femmes qui avaient servi le Sauveur, et c'est la raison pour laquelle saint Jean ne parle ici que d'elle, à l'exception des autres femmes qui étaient venues avec elle d'après le récit des autres évangélistes.
Ce premier jour de la semaine est celui que les chrétiens appellent maintenant le jour du Seigneur, à cause de la résurrection du Sauveur, et que saint Matthieu désigne sous le nom de premier jour du sabbat.
Ce que rapporte saint Marc: «Qu'elles vinrent de grand matin le soleil étant déjà levé», n'est point en contradiction avec ce que dit ici saint Jean: «Alors que les ténèbres n'étaient pas encore dissipées», car à la naissance du jour il reste encore quelque obscurité qui se dissipe d'autant plus que la lumière du jour s'avance davantage. Il ne faut pas du reste entendre ces paroles de saint Marc, dans ce sens que le soleil paraissait déjà sur l'horizon, mais dans le sens où nous disons, lorsque nous voulons qu'une chose soit faite le plus tôt possible: «Vous la ferez au soleil levé», c'est-à-dire à l'heure où il est près de se lever.
Ce que saint Matthieu seul rapporte du tremblement de terre, du renversement de la pierre et de l'effroi des gardes avait donc eu déjà lieu.
Saint Jean se désigne ordinairement par l'affection que Jésus avait pour lui, non pas que Jésus n'aimât les autres disciples, mais parce que le Sauveur avait pour lui un amour plus particulier et plus intime.
Quelques exemplaires grecs portent: «Ils ont enlevé mon Seigneur», ce qui parait être l'expression d'un amour plus ardent ou d'un plus grand attachement. Mais nous n'avons pas trouvé cette addition dans un grand nombre de manuscrits que nous avons sous la main.
Après avoir dit: «Ils vinrent au tombeau», saint Jean revient sur ses pas pour raconter comment ils y arrivèrent: «Ils couraient tous deux ensemble, et l'autre courut plus vite que Pierre, et arriva le premier au sépulcre». Il nous apprend ainsi qu'il arriva le premier, mais il raconte tout ce qui le concerne, comme s'il s'agissait d'un autre.
Il en est qui pensent que Jean croyait déjà que Jésus était ressuscité, mais ce qui suit indique le contraire. Il vit que le tombeau était vide, et il crut à ce que Madeleine leur avait rapporté: «Car, ajoute le récit évangélique, ils n'avaient pas encore compris ce que dit l'Ecriture, qu'il fallait qu'il ressuscitât d'entre les morts». Jean ne croyait donc pas encore à la résurrection d u Sauveur, puisqu'il ne savait pas encore qu'il dût ressusciter. Le Seigneur leur en avait parlé souvent, mais bien qu'il s'exprimât dans les termes les plus clairs, l'habitude qu'ils avaient d'entendre des paraboles, les empêchait de comprendre ce qu'il leur disait et leur faisait donner un autre sens à ses paroles.
L'expression: «Lorsque les ténèbres n'étaient pas encore dissipées», est pleine de justesse; Marie, en effet, cherchait dans le sépulcre le Créateur de toutes choses qu'elle avait vu mourir dans son corps sur la croix, et comme elle ne le trouve point, elle croit qu'on l'a dérobé ou enlevé. Il est donc vrai de dire que les ténèbres duraient encore lorsqu'elle se rendit au sépulcre.
En parlant de la sorte, Madeleine prend la partie pour le tout; c'était le corps seul du Sauveur qu'elle était venu chercher, et elle s'afflige comme si on eût enlevé le Seigneur tout entier.
Ce sont ceux dont l'amour est plus grand qui courent aussi plus vite que les autres, c'est-à-dire, Pierre et Jean: Pierre sortit avec, l'autre disciple, et il vint au sépulcre.
Gardons-nous de croire que ce récit aussi détaillé ne renferme quelques mystères, en effet, Jean, le plus jeune des deux disciples, représente la synagogue juive; Pierre, le plus âge, est la figure de l'Eglise des nations, car bien que la synagogue ait précédé l'Eglise des nations, pour ce qui concerne le culte de Dieu, toutefois, dans l'ordre naturel, le peuple des Gentils précède la synagogue des Juifs. Ils coururent tous deux ensemble, parce que depuis le temps de leur naissance jusqu'à celui de tour déclin, le peuple des Gentils et la synagogue ont suivi une voie commune, quoiqu'avec des sentiments bien différents. La synagogue arrive la première au sépulcre, mais elle n'y entre pas, c'est qu'en effet, elle a bien reçu de Dieu les commandements de la loi, elle a entendu les prophéties qui avaient pour objet l'incarnation et la passion du Seigneur, mais elle a refusé de croire en lui lorsqu'il fut mort. Simon-Pierre, au contraire, vient et entre dans le sépulcre, parce que l'Eglise des Gentils est venue la dernière, à la suite de Jésus-Christ, et a connu et cru qu'il était mort dans sa nature humaine, mais qu'il était vivant dans sa nature divine. Le suaire qui enveloppait la tête du Seigneur ne se trouve point avec les linceuls, parce que Dieu est la tête du Christ, et que les mystères incompréhensibles de la divinité sont en dehors de l'intelligence de notre faible humanité, et que sa puissance est au-dessus de toute nature créée. Le suaire n'est pas seulement séparé, mais roulé; en effet, un linge qui est roulé ne laisse voir aucune de ses deux extrémités, et il est ainsi la figure de la divinité sublime qui n'a point eu de commencement et ne doit point avoir de fin. L'Évangéliste ajoute avec raison, qu'il était placé dans un endroit seul, parce que Dieu ne se trouve pas dans les âmes divisées, et que ceux-là seuls méritent de recevoir sa grâce qui ne se séparent pas les uns des autres par les scandales que prod uisent les sectes. Le linge qui couvre la tête sert à essuyer la sueur de ceux qui travaillent, et ce suaire peut être considéré comme la figure du travail de Dieu, qui demeure toujours dans son repos et dans son immutabilité, et qui nous déclare cependant qu'il ne cesse de travailler, parce qu'il supporte le lourd fardeau des iniquités des hommes. Le suaire qui enveloppait la tête est trouvé plié en un lieu à part, parce que la passion de notre divin Rédempteur est bien éloignée de nos propres souffrances, car Jésus a souffert sans être coupable, ce que nous souffrons en expiation de nos crimes. Il s'est soumis volontairement à la mort dont nous sommes les victimes involontaires. Après que Pierre est entré, Jean entre à son tour, parce qu'à la fin du monde, les Juifs se réuniront au peuple fidèle pour embrasser la foi du Rédempteur.
Le premier jour du sabbat, c'est-à-dire, le lendemain du sabbat, ou le premier jour qui suit le sabbat.
La Glose
Elle court donc apprendre cette nouvelle aux disciples, pour les engager, ou à chercher avec elles, ou du moins à partager sa douleur: «Elle courut donc, et vint trouver Simon-Pierre et cet autre disciple que Jésus aimait», etc.
Ou bien encore, comme les Juifs donnaient le nom de sabbat à tous les jours de la semaine, ils appelaient le premier du sabbat, le premier des jours du sabbat ou de la semaine. Ce jour est le symbole de la vie future, qui ne sera composée que d'un seul jour que la nuit n'interrompra jamais, car Dieu en est le soleil, et ce soleil ne se couche jamais. C'est donc, dans ce jour que le Seigneur a voulu ressusciter et revêtir son corps de l'incorruptibilité dont nous nous revêtirons nous-mêmes dans la vie future.
Demanderez-vous comment ils osèrent venir au tombeau en présence de ceux qui le gardaient? C'est une question qui suppose bien de l'ignorance, car après que le Seigneur fut ressuscité, et qu'en même temps que la terre tremblait, un ange apparut sur la pierre du sépulcre, les gardes s'enfuirent pour annoncer aux pharisiens ce qui venait d'avoir lieu.
Ou bien encore, Pierre est la figure, de l'esprit actif et prompt, Jean, le symbole de l'esprit contemplatif et instruit dans la connaissance des choses de Dieu. Or, souvent l'esprit contemplatif est le premier par sa facilité à comprendre les charités divines, mais l'esprit actif l'emporte sur cette pénétration d'intelligence par sa ferveur persévérante et sa constante application, et son regard pénètre le premier la profondeur des divins mystères.
Convaincus maintenant par
leur expérience personnelle de la réalité de la résurrection, et rien ne les retenant auprès du sépulcre, les deux
apôtres s'en retournent « chez eux », dans leur maison.