Luc 11, 27
Comme Jésus disait cela, une femme éleva la voix au milieu de la foule pour lui dire : « Heureuse la mère qui t’a porté en elle, et dont les seins t’ont nourri ! »
Comme Jésus disait cela, une femme éleva la voix au milieu de la foule pour lui dire : « Heureuse la mère qui t’a porté en elle, et dont les seins t’ont nourri ! »
C'est-à-dire: Je retournerai vers les enfants d'Israël qui n'ont en eux rien de divin, qui sont comme déserts, et m'offrent un endroit où je puis habiter. « Et lorsqu'il y est rentré, il la trouve nettoyée et parée ».
Dans ce seul homme, se trouve donc figuré tout le peuple juif qui avait été délivré de l'esprit mauvais par la loi. Cependant comme les coeurs des Gentils, arides d'abord, mais pénétrés ensuite de la rosée de l'Esprit saint par le baptême, ne pouvaient offrir au démon un lieu de repos, parce qu'ils croyaient en Jésus-Christ, et que Jésus-Christ est une flamme dévorante pour les esprits impurs, il revint vers le peuple juif: « Et comme il n'en trouve point, il dit: Je retournerai dans ma maison d'où je suis sorti ».
Mais sous cette pureté extérieure et apparente, l'intérieur n'en demeurait que plus souillé; car elle ne pouvait ni se purifier de ces souillures, ni éteindre le feu des passions dans les eaux de la fontaine sacrée; aussi l'esprit impur s'empressait-il de rentrer dans cette maison, avec sept esprits plus mauvais que lui: « Alors il s'en va prendre sept esprits plus méchants que lui, et entrant dans cette maison, ils en font leur demeure ». Juste punition du crime que ce peuple sacrilège avait commis en violant la semaine de la loi, et le mystère du huitième jour. Ainsi de même que la grâce se répand avec abondance sur nous par les sept dons de l'Esprit saint, toute la malice des démons s'empare aussi de ce peuple par ces sept esprits impurs; car le nombre sept, dans l'Écriture, exprime ordinairement l'universalité.
Les démons qui habitent les âmes des Juifs sont pires que les premiers. Autrefois, ils traitaient avec cruauté les prophètes; aujourd'hui, c'est au Seigneur lui-même que s'adressent leurs outrages, aussi en ont-ils été punis bien plus sévèrement par Vespasien et par Tite, qu'ils ne l'avaient été en Égypte et lors de la captivité de Babylone: « Et le dernier état de cet homme devient pire que le premier ». Autrefois encore, ils étaient gouvernés par la divine Providence et par la grâce de l'Esprit saint, mais aujourd'hui cette protection toute paternelle leur fait défaut, et par suite, ils sont dans un dénuement complet de vertu, et en proie à des peines plus déchirantes et à toute la violence des démons.
Ce n'est pas seulement aux Juifs, mais à nous-mêmes, que s'appliquent les paroles suivantes: « Le dernier état de cet homme devient pire que le premier ». En effet, si après avoir été éclairés et délivrés de nos fautes passées, nous retournons à nos habitudes vicieuses, le châtiment qui attend ces nouvelles fautes sera bien plus terrible.
Notre-Seigneur fait voir ensuite comment le peuple juif en est venu à se faire de semblables idées sur le Christ: « Lorsque l'esprit impur est sorti d'un homme », etc. Dans saint Matthieu, le Sauveur applique aux Juifs cette comparaison en termes exprès « C'est ce qui arrivera à cette génération criminelle »,( Mt 12,45 ). En effet, lorsqu'ils vivaient en Égypte, en se conformant aux usages des Egyptiens, ils étaient la demeure de l'esprit mauvais, il en fut chassé lorsqu'ils immolèrent l'agneau qui était la figure du Christ, et qu'ils marquèrent leurs portes de son sang pour échapper à l'ange exterminateur ( Ex 12,3-13 ).
Le dernier état devient pire que le premier, selon cette parole de l'apôtre saint Pierre: « Il eût mieux valu pour eux ne jamais connaître la voie de la vérité, que de s'en écarter après l'avoir connue .
On peut encore entendre ces paroles de tous les hérétiques, de tous les schismatiques, et même des mauvais catholiques qui, à l'époque de leur baptême, avaient été délivrés de l'esprit immonde. Ce mauvais esprit parcourt alors les lieux arides, c'est-à-dire, qu'en tentateur habile et rusé, il examine les coeurs des fidèles qui ont été purifiés de toutes les pensées impures et dangereuses, pour voir s'il peut y imprimer la trace de ses pas maudits. Il dit: « Je retournerai dans ma maison d'où je suis sorti ». Ces paroles doivent nous faire craindre que les fautes, que nous regardions comme à jamais effacées, ne profitent de notre négligence pour reprendre sur nous leur funeste empire. Il trouve cette maison nettoyée, c'est-à-dire purifiée par la grâce du baptême des souillures du péché; mais complètement dénuée de l'ornement des bonnes oeuvres. Les sept mauvais esprits qu'il prend avec lui, représentent l'universalité des vices. Ces esprits sont plus mauvais que lui, parce que cette maison non seulement aura les sept vices directement opposés aux sept vertus spirituelles, mais elle voudra encore, par un sentiment d'hypocrisie, paraître avoir ces vertus.
On peut encore dire que Notre-Seigneur n'a dans ces paroles d'autre but, que d'établir la distinction qui sépare ses oeuvres de celles du démon, c'est-à-dire que le caractère du Sauveur est de purifier tout ce qui est souillé, tandis que celui du démon est de s'empresser de souiller encore davantage ce que Jésus a purifié.
Jésus
fut donc tout à coup interrompu dans son discours ; ou du moins l'héroïne de cet épisode profita, pour donner
un libre cours à l'enthousiasme qui la pressait, d'une courte pause que le divin orateur fit sans doute avant de
passer au second point qu'il avait à traiter. - Élevant la voix. « Les paroles ont beaucoup d’emphase. Elle
manifeste, cette emphase, une grande émotion et une grande foi dans la proclamation. Elle parle aux sens
intérieurs de l’âme en criant, pour ainsi dire, à tue-tête », Maldonat. Cfr. Euthymius, h. l. Par leur atroce calomnie, les Pharisiens n'avaient pas réussi à tromper cette âme candide. Mais ne dirait-on pas qu'ils ont
transmis leurs sentiments de haine à ces exégètes protestants, malheureusement trop nombreux, qui ne
voient, dans l'exclamation naïve et touchante de l'humble femme, qu'une « admiration inintelligente du
merveilleux Thaumaturge et prédicateur », que « le premier exemple de cet esprit de Mariolatrie (qu'on nous
pardonne de copier ces lignes!) qui a plus tard pénétré dans l'Église pour la corrompre, et qui aujourd'hui,
dans la ville de Rome comme en de nombreuses contrées catholiques, place la Vierge Marie au -dessus du
Fils qu'elle a porté dans son sein ! ». - Une femme au milieu de la foule. C'était probablement une mère,
comme il ressort de son langage. - Ses paroles, dépouillées de leur vêtement figuré, reviennent à dire : Oh !
Que votre mère est heureuse ! Le Talmud et les ouvrages classiques abondent en félicitations semblables. « O
femme heureuse, ta mère qui t'a engendré », Pétrone, 94. Cfr. Ovide, Métam. 4, 231.
L'Evangile de Luc conserve le souvenir du moment où «une femme éleva la voix du milieu de la foule et dit», s'adressant à Jésus: «Heureuses les entrailles qui t'ont porté et les seins qui t'ont nourri de leur lait!» (Lc 11, 27). Ces paroles constituent une louange de Marie comme Mère de Jésus selon la chair. La Mère de Jésus n'était peut-être pas connue personnellement de cette femme; en effet, quand Jésus commença son action messianique, Marie ne l'accompagnait pas et continuait à vivre à Nazareth. On pourrait dire que les paroles de cette femme inconnue l'ont fait sortir, en quelque sorte, de son obscurité.
Sainte Marie, tu appartenais aux âmes humbles et grandes en Israël qui, comme Syméon, attendaient « la consolation d'Israël » (Lc 2, 25) et qui, comme Anne, attendaient « la délivrance de Jérusalem » (Lc 2, 38). Tu vivais en contact intime avec les Saintes Écritures d'Israël, qui parlaient de l'espérance – de la promesse faite à Abraham et à sa descendance (cf. Lc 1, 55). Ainsi nous comprenons la sainte crainte qui t'assaillit quand l'ange du Seigneur entra dans ta maison et te dit que tu mettrais au jour Celui qui était l'espérance d'Israël et l'attente du monde. Par toi, par ton « oui », l'espérance des millénaires devait devenir réalité, entrer dans ce monde et dans son histoire. Toi tu t'es inclinée devant la grandeur de cette mission et tu as dit « oui »: « Voici la servante du Seigneur; que tout se passe pour moi selon ta parole » (Lc 1, 38). Quand remplie d'une sainte joie tu as traversé en hâte les monts de Judée pour rejoindre ta parente Élisabeth, tu devins l'image de l'Église à venir qui, dans son sein, porte l'espérance du monde à travers les monts de l'histoire. Mais à côté de la joie que, dans ton Magnificat, par les paroles et par le chant tu as répandue dans les siècles, tu connaissais également les affirmations obscures des prophètes sur la souffrance du serviteur de Dieu en ce monde. Sur la naissance dans l'étable de Bethléem brilla la splendeur des anges qui portaient la bonne nouvelle aux bergers, mais en même temps on a par trop fait en ce monde l'expérience de la pauvreté de Dieu. Le vieillard Syméon te parla de l'épée qui transpercerait ton cœur (cf. Lc 2, 35), du signe de contradiction que ton Fils serait dans ce monde. Quand ensuite commença l'activité publique de Jésus, tu as dû te mettre à l'écart, afin que puisse grandir la nouvelle famille, pour la constitution de laquelle Il était venu et qui devait se développer avec l'apport de ceux qui écouteraient et observeraient sa parole (cf. Lc 11, 27s.). Malgré toute la grandeur et la joie des tout débuts de l'activité de Jésus, toi, tu as dû faire, déjà dans la synagogue de Nazareth, l'expérience de la vérité de la parole sur le « signe de contradiction » (cf. Lc 4, 28ss). Ainsi tu as vu le pouvoir grandissant de l'hostilité et du refus qui progressivement allait s'affirmant autour de Jésus jusqu'à l'heure de la croix, où tu devais voir le Sauveur du monde, l'héritier de David, le Fils de Dieu mourir comme quelqu'un qui a échoué, exposé à la risée, parmi les délinquants. Tu as alors accueilli la parole: « Femme, voici ton fils! » (Jn 19, 26). De la croix tu reçus une nouvelle mission. À partir de la croix tu es devenue mère d'une manière nouvelle: mère de tous ceux qui veulent croire en ton Fils Jésus et le suivre. L'épée de douleur transperça ton cœur. L'espérance était-elle morte? Le monde était-il resté définitivement sans lumière, la vie sans but? À cette heure, probablement, au plus intime de toi-même, tu auras écouté de nouveau la parole de l'ange, par laquelle il avait répondu à ta crainte au moment de l'Annonciation: « Sois sans crainte, Marie! » (Lc 1, 30). Que de fois le Seigneur, ton fils, avait dit la même chose à ses disciples: N'ayez pas peur! Dans la nuit du Golgotha, tu as entendu de nouveau cette parole. À ses disciples, avant l'heure de la trahison, il avait dit: « Ayez confiance: moi, je suis vainqueur du monde » (Jn 16, 33). « Ne soyez donc pas bouleversés et effrayés » (Jn 14, 27). « Sois sans crainte, Marie! » À l'heure de Nazareth l'ange t'avait dit aussi: « Son règne n'aura pas de fin » (Lc 1, 33). Il était peut-être fini avant de commencer ? Non, près de la croix, sur la base de la parole même de Jésus, tu étais devenue la mère des croyants. Dans cette foi, qui était aussi, dans l'obscurité du Samedi Saint, certitude de l'espérance, tu es allée à la rencontre du matin de Pâques. La joie de la résurrection a touché ton cœur et t'a unie de manière nouvelle aux disciples, appelés à devenir la famille de Jésus par la foi. Ainsi, tu fus au milieu de la communauté des croyants qui, les jours après l'Ascension, priaient d'un seul cœur pour le don du Saint-Esprit (cf. Ac 1, 14) et qui le reçurent au jour de la Pentecôte. Le « règne » de Jésus était différent de ce que les hommes avaient pu imaginer. Ce « règne » commençait à cette heure et n'aurait jamais de fin. Ainsi tu demeures au milieu des disciples comme leur Mère, comme Mère de l'espérance. Sainte Marie, Mère de Dieu, notre Mère, enseigne-nous à croire, à espérer et à aimer avec toi. Indique-nous le chemin vers son règne! Étoile de la mer, brille sur nous et conduis-nous sur notre route!