Luc 18, 14
Je vous le déclare : quand ce dernier redescendit dans sa maison, c’est lui qui était devenu un homme juste, plutôt que l’autre. Qui s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé. »
Je vous le déclare : quand ce dernier redescendit dans sa maison, c’est lui qui était devenu un homme juste, plutôt que l’autre. Qui s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé. »
«Il faisait en lui-même cette prière», c'est-à-dire qu'il ne l'adressait pas à Dieu, parce que dans son orgueil il n'envisageait que lui-même: «Mon Dieu, je vous rends grâces».
L'orgueilleux ne diffère de celui qui insulte que par l'extérieur; celui-ci abaisse les autres par ses outrages, celui-là s'élève au-dessus par les efforts présomptueux de son âme.
Il y a aussi une fierté louable, c'est celle de l'âme qui dédaigne de penser aux choses de la terre, et qui s'élève avec noblesse jusqu'à la hauteur de la vertu. Cette grandeur d'âme consiste à dominer les chagrins, à faire preuve de courage dans les tribulations, à mépriser toutes les choses de la terre, pour penser à celles du ciel. Cette grandeur de l'âme diffère autant de la hauteur qui est le produit de l'orgueil, que l'embonpoint d'un corps bien portant diffère de l a grosseur qui vient de l'hydropisie.
Notre-Seigneur nous a enseigné le zèle pour la prière par la parabole de la veuve et du juge, il nous apprend par l'exemple du pharisien et du publicain, quelles doivent être les conditions de nos prières, si nous ne voulons qu'elles soient frappées de stérilité, car le pharisien fut condamné pour avoir mal prié: «Or, le pharisien se tenant debout, priait ainsi en lui-même».
Le genre humain tout entier n'avait pu assouvir ce désir de mépris, il faut qu'il s'attaque à ce publicain. Son péché eût été moins grand s'il eût excepté le publicain; mais au contraire, d'une seule parole il s'en prend aux absents, et rouvre les blessures de celui qu'il a sous les yeux. Or, l'action de grâces n'est pas une invective contre le prochain, si vous rendez sérieusement grâces à Dieu, ne vous occupez que de lui seul, sans tourner vos regards du côté des hommes pour condamner votre prochain.
Or, celui qui outrage son prochain, se nuit considérablement en même temps qu'il fait beaucoup de mal aux autres. D'abord il rend plus mauvais celui qui l'écoute. Est-il pécheur, il est dans la joie d'avoir trouvé un complice de ses péchés. Est-il juste, les fautes des autres le portent à avoir de lui une meilleure opinion. Secondement, il fait tort à la société de l'Église, car ceux qui sont témoins de ces outrages, ne blâment pas seulement celui qui s'en rend coupable, mais ils comprennent la religion chrétienne elle-même dans leur condamnation et leurs mépris. Troisièmement, il est cause que la gloire de Dieu est blasphémée, car nos péchés font blasphémer le nom de Dieu, de même que nos bonnes oeuvres le font glorifier. Quatrièmement, il couvre de confusion celui à qui s'adressent les outrages, le rend plus inconsidéré et s'en fait un ennemi. Cinquièmement, il se rend digne de châtiment pour avoir proféré des paroles outrageantes et coupables.
Il a entendu le pharisien dire: «Je ne suis pas comme ce publicain»; loin d'en concevoir de l'indignation, il s'en humilié avec compassion; le pharisien a découvert la blessure, il en cherche la guérison. Que personne donc ne prononce cette froide parole: Je n'ose, j'ai trop de honte, je ne puis ouvrir la bouche. Cette crainte est diabolique, le démon veut vous fermer les portes qui donnent accès auprès de Dieu.
Cette parabole nous représente deux chars et deux conducteurs dans une arène, l'un porte la justice unie à l'orgueil, l'autre le péché avec l'humilité; et vous voyez le char du péché dépasser celui de la justice, non par ses propres forces, mais par la vertu de l'humilité qui lui est unie, tandis que le char de la justice reste en arrière, retardé non par la faiblesse de la justice, mais par la masse pesante de l'orgueil. En effet, de même que l'humilité par son élévation et son excellence triomphe du poids du péché, et s'élance pour atteindre Dieu; ainsi l'orgueil par sa masse pesante entrave facilement la marche de la justice. Ainsi quand vous auriez fait un grand nombre d'actions vertueuses, si elles sont pour vous un sujet de vaine présomption, vous avez perdu tout le frui t de votre prière, elle est tout à fait stérile pour vous. Au contraire, votre conscience fût-elle chargée d'une multitude innombrable de fautes, si vous vous estimez le dernier de tous, vous pourrez vous présenter devant Dieu avec une grande confiance. Notre-Seigneur donne la raison de la sentence qu'il vient de prononcer «Car quiconque s'exalte sera humilié, et quiconque s'humilie sera exalté». Le nom d'humilité s'applique à plusieurs choses toutes différentes. Il y a la vertu d'humilité que nous voyons dans ces paroles: «Mon Dieu, vous ne rejetterez pas un coeur contrit et humilié» ( Ps 50); il y a l'humilité produite par les tribulations: «Il a humilié mon âme jusqu'à terre» ( Ps 142). Il y a l'humilité ou l'humiliation qui est la suite du péché, de l'orgueil, du désir insatiable des richesses, car quelle humiliation plus profonde que celle de ces hommes qui se rendent esclaves, qui s'abaissent et s'avilissent dans la recherche des honneurs et des richesses, et qu iles regardent comme le comble de la grandeur?
Ce faste orgueilleux peut précipiter du ciel celui qui s'y abandonne, de même que l'humilité peut retirer le pécheur de l'abîme de ses crimes. C'est elle qui a justifié le publicain de préférence au pharisien, c'est elle qui a conduit dans le paradis le bon larron avant les apôtres eux-mêmes, tandis que l'orgueil étant entré dans l'esprit des puissances célestes ( Ep 2, 12), a été la cause de leur perte. Or, si l'humilité jointe au péché marche si rapidement qu'elle dépasse la justice qui est unie à l'orgueil, quelle ne sera pas la rapidité de sa course, si vous l'unissez à la justice? Elle se présentera avec confiance devant le tribunal de Dieu au milieu de l'assemblée des anges. Mais d'un autre côté, si l'orgueil joint à la justice peut ainsi l'abaisser, dans quel abîme nous précipitera-t-il, s'il est uni au péché? Je parle de la sorte, non pour nous faire négliger la pratique de la justice, mais pour nous faire éviter l'orgueil.
Comme la foi ne peut être donnée aux orgueilleux, mais qu'elle est le partage des humbles; à la parabole qui précède, Notre-Seigneur en ajoute une autre, pour recommander l'humilité et condamner l'orgueil: «Il d it encore cette parabole pour quelques-uns qui se confiaient en eux-mêmes», etc.
Ce qui est répréhensible dans la conduite de ce pharisien, ce n'est pas de rendre grâces à Dieu, mais de ce qu'il semblait ne plus rien désirer pour lui-même. Vous êtes donc parfait, vous avez tout en abondance, vous n'avez plus besoin de dire: «Remettez-nous nos dettes». Quel crime n'est-ce pas de combattre la grâce avec impiété, puisque cet homme est coupable pour avoir rendu grâces avec orgueil. Écoutez donc, vous qui dites: C'est Dieu qui m'a fait homme, c'est moi-même qui me fais juste. Ah ! vous êtes pire que le pharisien, et votre orgueil plus détestable que le sien. Son orgueil le portait à se proclamer juste, mais cependant il en rendait grâces à Dieu.
S'il disait seulement: Je ne suis pas comme un grand nombre d'hommes. Mais qu'est-ce que le reste des hommes? Tous les hommes, excepté lui seul. Pour moi, dit-il, je suis juste, tous les autres sont pécheurs.
Mais voici que le publicain qui était près de lui, devient pour lui l'occasion d'un plus grand orgueil: «De ce que je ne suis pas comme ce publicain», comme s'il disait: Je suis seul de mon côté, celui-ci est du reste des hommes.
Cherchez dans ses paroles, vous n'en trouverez aucune qui soit l'expression d'une prière à Dieu. Il était monté au temple pour prier, mais au lieu de prier effectivement, il a préféré se louer lui-même et insulter celui qui priait. Quant au publicain, le sentiment de sa conscience le tenait éloigné, mais sa piété le rapprochait de Dieu: «Le publicain se tenant éloigné», etc.
Pourquoi vous étonner que Dieu pardonne au publicain, puisqu'il se juge lui-même? Il se tenait éloigné, mais néanmoins il s'approchait de Dieu, et le Seigneur était près de lui attentif à ses paroles, car le Dieu très-haut abaisse ses regards sur les humbles. Il ne levait pas les yeux vers le ciel, il ne regardait point pour mériter d'être regardé. Sa conscience l'accablait, l'espérance le relevait, il frappait sa poitrine, il se punissait lui-même; aussi le Seigneur lui pardonnait-il les péchés qu'il confessait si humblement. Vous avez entendu l'orgueilleux accusateur, vous avez entendu l'humble coupable, écoutez maintenant la sentence du juge: «Je vous le dis, celui-ci s'en retourna justifié dans sa maison, et non pas l'autre».
L'orgueil des âmes arrogantes se manifeste sous quatre formes différentes: ou elles s'imaginent que le bien qui est en elles vient d'elles-mêmes; ou elles attribuent à leurs mérites personnels de l'avoir reçu de Dieu, ou elles se vantent de vertus qu'elles n'ont point, ou enfin elles veulent qu'on ne soit occupé que du bien qu'elles peuvent faire et qu'on n'ait que du mépris pour les autres. C'est ainsi que le pharisien n'attribue qu'à lui seul le mérite de ses bonnes oeuvres.
C'est ainsi que par son orgueil, ce pharisien a ouvert la cité de son coeur aux ennemis qui l'assiégeaient; vainement il l'a fermée par les jeûnes et la prière, vainement il a fortifié tous les autres côtés, puisqu'il a laissé sans défense l'endroit ouvert par lequel l'ennemi peut entrer dans la place.
Dans le sens figuré, le pharisien représente le peuple des Juifs, qui fier de la justice qui vient de la loi exalte bien haut ses mérites; le publicain représente le peuple des Gentils, qui se tient éloigné de Dieu, et confesse humblement ses péchés; l'orgueil de l'un fut cause de son humiliation, et les humbles gémissements de l'autre lui méritèrent de s'approcher de Dieu et la grâce d'une élévation sans égale.
L'orgueil est de toutes les passions celle qui tourmente le plus le coeur des hommes, aussi le Sauveur en fait-il plus souvent la matière de ses enseignements. Or, l'orgueil est le mépris de Dieu, car toutes les fois qu'on s'attribue à soi-même le bien qu'on fait, au lieu d'en renvoyer à Dieu la gloire, c'est une véritable négation de Dieu (cf. Jb 31,27 ). Cette parabole est donc à l'adresse de ceux qui se confient en eux-mêmes, ne renvoient pas à Dieu la gloire de leurs bonnes oeuvres, et qui, pour cela, n'ont que du mépris pour les autres. Notre-Seigneur veut nous y apprendre que lors même que la justice approcherait l'homme de Dieu, si elle est entachée d'orgueil, elle le précipite dans l'abîme: «Deux hommes montèrent au temple»,etc.
Sa contenance seule indique une âme superbe, et son attitude trahit un orgueil excessif.
Considérez attentivement toute la suite de sa prière. Il énumère d'abord les défauts dont il est exempt, puis les vertus qu'il croyait avoir: «Je vous rends grâces de ce que je ne suis pas comme le reste des hommes», etc.
Mais il ne suffit pas d'éviter le mal, il faut encore faire le bien. Aussi après avoir dit: «Je ne suis pas comme le reste des hommes, voleurs, injustes, adultères»; il ajoute par opposition: «Je jeûne deux fois la semaine», (dans le sabbat). Les Juifs donnaient à la semaine le nom de sabbat, de son dernier jour qui était un jour de repos. Or, les pharisiens jeûnaient le second et le cinquième jour. Ce pharisien oppose donc ses jeûnes à la passion de l'adultère, car la dissolution vient de la sensualité. Aux voleurs et à ceux qui commettent des injustices, il oppose le paiement fidèle de la dîme: «Je donne la dîme de tout ce que je possède», comme s'il disait: Je suis si éloigné des rapines et des injustices, que je distribue mon propre bien.
Bien que le publicain nous soit représenté comme se tenant debout, il différait cependant du pharisien par son langage autant que par son attitude et le repentir de son âme. Il n'osait lever les yeux vers le ciel, il les jugeait indignes de contempler les choses d'en haut, parce qu'ils avaient préféré regarder et chercher les choses de la terre. Il frappait encore sa poitrine, comme le remarque le Sauveur, meurtrissant pour ainsi dire son coeur pour le punir de ses mauvaises pensées et le réveiller de son sommeil. Aussi n'a-t-il recours qu'à la miséricorde de Dieu: «Mon Dieu, ayez pitié de moi, qui ne suis qu'un pécheur».
On s'étonnera peut-être que ce peu de paroles dites à sa louange ait suffi pour faire condamner le pharisien, tandis que Job qui fit plusieurs discours pour se justifier, fut récompensé de Dieu. Nous répondrons que le pharisien en se vantant de ses bonnes oeuvres, accusait les autres sans motif aucun, tandis que Job accusé par ses amis, et pressé par la souffrance fut forcé de faire l'énumération de ses vertus dans l'intérêt de la gloire de Dieu, et afin que les hommes ne fussent point découragés.
Cet être spirituel qui est le premier auteur du mal et qui s'ingénie à le répandre, se montre très habile à détruire par le désespoir et l'infidélité les fondements de la vertu dans l'instant même où ils ont été posés dans une âme. Ensuite, lorsque se dressent les murs de ce que j'appellerai la maison de la vertu, il se sert aussi très astucieusement du découragement et de la négligence pour leur donner l'assaut. Même quand le toit des bonnes oeuvres vient d'être construit, il l'abat encore avec l'arrogance et la présomption.
Restez fermes pourtant, ne vous effrayez pas, car l'homme zélé pour le bien est plus habile que lui. Et la vertu possède, pour résister au mal, une force plus grande que la sienne. Elle bénéficie, en effet, de l'assistance et du secours envoyés d'en haut par Celui qui peut tout. Dans sa bonté, il rend forts tous ceux qui aiment la vertu.
De la sorte, celle-ci restera inébranlable face aux multiples et funestes machinations ourdies par l'Adversaire. Elle pourra en outre relever et rétablir ceux qui sont tombés dans l'abîme des maux, et les conduire facilement à Dieu par le repentir et l'humilité.
La parabole nous le fait comprendre suffisamment. Le publicain, bien qu'il soit publicain et passe sa vie dans ce que j'appellerai l'abîme du péché, s'unit par une simple prière à ceux qui mènent une vie conforme à la vertu. Grâce à cette courte prière il se sent léger, il s'élève, il triomphe de tout mal, il est agrégé au choeur des justes et justifié par le Juge impartial. Le pharisien, lui, est condamné sur ce qu'il dit, bien qu'il soit pharisien et se considère comme quelqu'un d'important. Car il n'est pas vraiment juste, et de sa bouche sortent beaucoup de paroles d'orgueil qui, toutes, provoquent la colère de Dieu.
Pourquoi l'humilité élève-t-elle l'homme à la hauteur de la sainteté, tandis que la présomption le précipite dans le gouffre du péché? Voici. Celui qui se prend pour quelqu'un d'important devant Dieu est à juste titre abandonné par Dieu, puisqu'il pense ne pas avoir besoin de son secours. L'autre reconnaît son néant et, de ce fait, se tourne vers la miséricorde divine. Il trouve à juste raison la compassion, l'assistance et la grâce de Dieu. L'Écriture dit en effet: le Seigneur résiste aux orgueilleux, mais il accorde aux humbles sa grâce (cf. Pr 3,34 grec; Jc 4,6 1P 5,5).
Selon la parole du Seigneur, quand ce dernier rentra chez lui, c'est lui qui était devenu juste et non pas l'autre. Qui s'élève sera abaissé; qui s'abaisse sera élevé (Lc 18,14). Du fait que le diable est l'orgueil même, et l'arrogance son vice propre, ce mal conquiert puis entraîne avec lui toute vertu humaine à laquelle il se mêle. Pareillement, s'abaisser devant Dieu est la vertu des bons anges: elle triomphe également de tous les vices humains dont sont affligés les pécheurs. Car l'humilité est le char qui nous emmène vers Dieu, sur ces nuées qui doivent emporter jusqu'à lui ceux qui lui seront unis dans les siècles sans fin, selon la prophétie de l'Apôtre: Nous serons emportés, dit-il, sur les nuées du ciel à la rencontre du Seigneur. Ainsi, nous serons pour toujours avec le Seigneur (1Th 4,17). Car l'humilité est semblable à une nuée: elle prend corps dans le repentir, elle fait jaillir des yeux un torrent de larmes, elle rend dignes les indignes, elle conduit et unit à Dieu ceux qui, en raison de leur volonté droite, sont justifiés par la grâce.
Restez fermes pourtant, ne vous effrayez pas, car l'homme zélé pour le bien est plus habile que lui. Et la vertu possède, pour résister au mal, une force plus grande que la sienne. Elle bénéficie, en effet, de l'assistance et du secours envoyés d'en haut par Celui qui peut tout. Dans sa bonté, il rend forts tous ceux qui aiment la vertu.
De la sorte, celle-ci restera inébranlable face aux multiples et funestes machinations ourdies par l'Adversaire. Elle pourra en outre relever et rétablir ceux qui sont tombés dans l'abîme des maux, et les conduire facilement à Dieu par le repentir et l'humilité.
La parabole nous le fait comprendre suffisamment. Le publicain, bien qu'il soit publicain et passe sa vie dans ce que j'appellerai l'abîme du péché, s'unit par une simple prière à ceux qui mènent une vie conforme à la vertu. Grâce à cette courte prière il se sent léger, il s'élève, il triomphe de tout mal, il est agrégé au choeur des justes et justifié par le Juge impartial. Le pharisien, lui, est condamné sur ce qu'il dit, bien qu'il soit pharisien et se considère comme quelqu'un d'important. Car il n'est pas vraiment juste, et de sa bouche sortent beaucoup de paroles d'orgueil qui, toutes, provoquent la colère de Dieu.
Pourquoi l'humilité élève-t-elle l'homme à la hauteur de la sainteté, tandis que la présomption le précipite dans le gouffre du péché? Voici. Celui qui se prend pour quelqu'un d'important devant Dieu est à juste titre abandonné par Dieu, puisqu'il pense ne pas avoir besoin de son secours. L'autre reconnaît son néant et, de ce fait, se tourne vers la miséricorde divine. Il trouve à juste raison la compassion, l'assistance et la grâce de Dieu. L'Écriture dit en effet: le Seigneur résiste aux orgueilleux, mais il accorde aux humbles sa grâce (cf. Pr 3,34 grec; Jc 4,6 1P 5,5).
Selon la parole du Seigneur, quand ce dernier rentra chez lui, c'est lui qui était devenu juste et non pas l'autre. Qui s'élève sera abaissé; qui s'abaisse sera élevé (Lc 18,14). Du fait que le diable est l'orgueil même, et l'arrogance son vice propre, ce mal conquiert puis entraîne avec lui toute vertu humaine à laquelle il se mêle. Pareillement, s'abaisser devant Dieu est la vertu des bons anges: elle triomphe également de tous les vices humains dont sont affligés les pécheurs. Car l'humilité est le char qui nous emmène vers Dieu, sur ces nuées qui doivent emporter jusqu'à lui ceux qui lui seront unis dans les siècles sans fin, selon la prophétie de l'Apôtre: Nous serons emportés, dit-il, sur les nuées du ciel à la rencontre du Seigneur. Ainsi, nous serons pour toujours avec le Seigneur (1Th 4,17). Car l'humilité est semblable à une nuée: elle prend corps dans le repentir, elle fait jaillir des yeux un torrent de larmes, elle rend dignes les indignes, elle conduit et unit à Dieu ceux qui, en raison de leur volonté droite, sont justifiés par la grâce.
Je vous le dis : Cfr. v. 8.
Conclusion pleine de majesté sur les lèvres du Fils de l'homme : Je vous l'affirme, car je le sais. - Celui-ci
descendit justifié : Le publicain rentra donc chez lui (dans sa maison, trait pittoresque) pur de tout péché :
son humble prière avait percé les nues, sa contrition avait été un sacrifice propitiatoire d'agréable odeur. Le
Pharisien aussi quitte le temple, sans doute avec la conscience d'avoir grandement honoré Dieu et accru la
somme de ses mérites. Mais quel arrêt terrible est porté contre lui dans l'euphémisme plutôt que l'autre ! Car
cela revient évidemment à dire qu'il est revenu réprouvé. « L'orgueil du Pharisien est descendu réprouvé du
temple, et l'humilité du publicain s'est élevée devant les yeux de Dieu, qui l'a approuvée » S. Augustin, Cfr.
Euthymius, h. l. - Car quiconque s'élève… Jésus aime à clore ses paraboles par quelque grand axiome moral,
qui rattache une instruction particulière au vaste ensemble de la philosophie chrétienne. Celui qu'il cite
actuellement nous est déjà connu (cfr. 14, 11 ; Matth. 23, 12) ; mais il n'était pas possible de le répéter plus à
propos.
La Vulgate et le grec présentent absolument le même sens, mais en employant une locution hébraïque signifiant à la lettre : Celui-ci justifié, en comparaison de l’autre.
A l'inverse, nous devons recevoir le message qui nous vient de la parabole évangélique du pharisien et du publicain (cf. Lc 18, 9-14). Le publicain pouvait peut-être avoir quelque justification aux péchés qu'il avait commis, de manière à diminuer sa responsabilité. Toutefois ce n'est pas à ces justifications qu'il s'arrête dans sa prière, mais à son indignité devant l'infinie sainteté de Dieu : « Mon Dieu, aie pitié du pécheur que je suis ! » (Lc 18, 13). Le pharisien, au contraire, s'est justifié par lui-même, trouvant sans doute une excuse à chacun de ses manquements. Nous sommes ainsi confrontés à deux attitudes différentes de la conscience morale de l'homme de tous les temps. Le publicain nous présente une conscience « pénitente » qui se rend pleinement compte de la fragilité de sa nature et qui voit dans ses manquements, quelles qu'en soient les justifications subjectives, une confirmation du fait qu'il a besoin de rédemption. Le pharisien nous présente une conscience « satisfaite d'elle-même », qui est dans l'illusion de pouvoir observer la loi sans l'aide de la grâce et a la conviction de ne pas avoir besoin de la miséricorde.