Luc 8, 3

Jeanne, femme de Kouza, intendant d’Hérode, Suzanne, et beaucoup d’autres, qui les servaient en prenant sur leurs ressources.

Jeanne, femme de Kouza, intendant d’Hérode, Suzanne, et beaucoup d’autres, qui les servaient en prenant sur leurs ressources.
Saint Gregoire de Nazianze
Il va de pays en pays, non seulement pour gagner à Dieu un plus grand nombre d'âmes, mais encore pour consacrer par sa présence un plus grand nombre d'endroits. Il dort et se fatigue pour sanctifier notre sommeil et nos travaux; il pleure pour donner du prix à nos larmes, il annonce les mystères du ciel pour élever et agrandir l'esprit de ceux qui l'écoutent.
Saint Jérôme
Suivant une coutume des Juifs, et qui n'avait rien de répréhensible dans les moeurs anciennes de cette nation, les femmes se chargeaient de fournir à ceux qui les enseignaient la nourriture et le vêtement. Saint Paul nous apprend qu'il ne voulut point user de ce droit, pour ne pas scandaliser les Gentils ( 1Co 9,5 ). Ces femmes assistaient le Seigneur de leurs biens; il était juste, en effet, qu'il moissonnât leurs biens temporels, alors qu'elles recueillaient de lui les richesses spirituelles. Ce n'est pas sans doute que le souverain Maître des créatures eût besoin d'être nourri par elles, mais il voulait être le modèle de tous ceux qui enseignent, et leur apprendre à se contenter de la nourriture et du vêtement que leur donneraient leurs disciples.
Tite de Bostra
Celui qui est descendu du ciel sur la terre, annonce le royaume des cieux aux habitants de la terre, pour changer la terre et en faire un ciel anticipé. Mais qui peut annoncer dignement ce royaume, que le Fils de Dieu qui en est le souverain Maître? Bien des prophètes ont paru sur la terre, mais sans annoncer le royaume des cieux, car comment auraient-ils pu parler des choses qu'ils n'avaient pas vues?

Il en est qui pensent que ce royaume de Dieu est plus élevé et plus parfait que le royaume céleste; d'autres prétendent au contraire que c'est le même dans sa nature, mais auquel on donne des noms différents. On l'appelle royaume de Dieu, parce qu'il a Dieu pour souverain; et quelquefois le royaume des cieux, quand on considère ce royaume dans ses sujets, c'est-à-dire, dans les anges et les saints auxquels la sainte Écriture donne le nom de cieux.
Saint Grégoire le Grand
Que signifient, en effet, ces sept démons, sinon tous les vices réunis. Comme la division des sept jours comprend l'universalité du temps, le nombre sept est le symbole de l'universalité, Marie-Magdeleine était donc possédée de sept démons, parce qu'elle avait en elle tous les vices.
Saint Bède le Vénérable
Comme l'aigle qui excite ses petits à voler ( Dt 32,11 ), le Seigneur élève successivement ses disciples vers les choses sublimes. Ainsi, il commence par enseigner dans les synagogues, et par faire des miracles, puis il choisit les douze auxquels il donne le nom d'Apôtres; ensuite il les prend seuls avec lui, lorsqu'il va prêcher dans les villes et dans les bourgades, comme le rapporte l'Évangéliste: «Et les douze étaient avec lui».

Marie-Magdeleine est celle dont saint Luc a raconté la pénitence dans le chapitre précédent. Admirons comment l'Évangéliste désigne cette femme sous son nom propre, lorsqu'il nous la montre à la suite du Sauveur, tandis qu'en racontant ses désordres et sa pénitence, il lui donne simplement le nom de femme, de peur que le scandale de ses premiers égarements ne flétrit un nom aussi connu que le sien. Sept démons étaient sortis d'elle, c'est-à-dire qu'elle avait été remplie de tous les vices.

Marie veut dire mère pleine d'amertumes, à cause des gémissements de sa pénitence; Magdeleine signifie tour, ou qui a la forme d'une tour, par allusion à cette tour dont parle le Roi-prophète: «Vous êtes devenu mon espérance, une forte tour contre l'ennemi ( Ps 61,4 )». Jeanne signifie grâce du Seigneur, ou le Seigneur miséricordieux, c'est-à-dire, que tout ce qui soutient notre vie, lui appartient. Or, si Marie purifiée de la souillure de ses vices, représente l'Église des nations, pourquoi Jeanne ne serait-elle pas aussi la figure de cette même Église, autrefois livrée au culte des idoles? Ajoutons que tout malin esprit qui travaille à l'extension du royaume du démon, est comme l'intendant de la maison d'Hérode. Suzanne signifie loi ou grâce, à cause de la blancheur odoriférante d'une vie céleste, et de la flamme d'or de la charité intérieure.
Saint Théophylacte d'Ohrid
Celui qui est descendu des cieux pour nous tracer la voie et nous donner l'exemple, nous enseigne à ne jamais négliger le devoir de l'instruction: «Et il arriva ensuite que Jésus parcourait les villes»,etc.

Ce n'est ni pour enseigner ni pour prêcher qu'il les prend avec lui, mais pour continuer de les instruire. Afin de montrer que les femmes n'étaient point exclues de la suite de Jésus-Christ, l'Évangéliste ajoute: «Il y avait aussi quelques femmes qu'il avait délivrées des esprits malins, et guéries de leurs infirmités: Marie-Magdeleine, de laquelle étaient sortis sept démons».
Louis-Claude Fillion
Trait complètement nouveau, qui a bien lieu de nous frapper. Il y a quelques mots à peine (cfr. Joan. 4, 27), les disciples s'étonnaient de voir leur Maître s'entretenir en public avec une femme, et voici maintenant que plusieurs femmes l'accompagnent fréquemment dans ses voyages ! S. Jérôme rapporte, il est vrai (in Matth. 27, 56), que, d'après une coutume appuyée sur une ancienne tradition, les femmes juives aimaient à fournir aux Rabbins des vêtements et tout ce qui était nécessaire à leur entretien ; et, en réalité, le Talmud encourage fort ces pieuses pratiques : « Quiconque, dit-il, reçoit chez lui un disciple des sages, le nourrit, l'abreuve, et lui donne de son bien, fait la même chose que s'il offrait un sacrifice quotidien », Neveh Schalom, f. 156. Mais on ne voit nulle part que des femmes les aient suivis dans leurs courses. Notre-Seigneur Jésus-Christ innove donc sous ce rapport, et lui seul pouvait le faire en un point si délicat. Il rompt de sa main divine le cercle étroit que l'Orient avait tracé autour de la femme ; il l'émancipe d'après le sens le plus noble de cette expression, et lui ouvre le large champ des bonne œuvres dans l'Église chrétienne. - Qui avaient été guéries… Ces mots nous révèlent le motif principal qui avait attaché ces saintes femmes à la personne du Sauveur : elles le suivaient par reconnaissance, car elles avaient reçu de lui de grandes faveurs, soit qu'il les eût délivrées du malin esprit qui les tenait en son pouvoir, soit qu'il leur eût accordé la guérison de quelque grave infirmité. Trois d'entre elles sont mentionnées à part : 1° Marie, appelée Madeleine. Ce surnom de Madeleine a été différemment interprété. Origène, Tract. in Matth. 35, y voit une allusion prophétique à la grandeur morale dont Marie devait jouir en servant Notre-Seigneur Jésus-Christ. D'autres (en particulier Lightfoot, Hor. Hebr. in Matth. 27, 56 et in Luc. 8, 3), impressionnés par une anecdote talmudique où il est question d'une femme de mauvaise vie, également nommée Miriam ou Marie, qui est ensuite qualifiée de « plieuse de cheveux féminins », identifient cette coiffeuse à Madeleine, et font dériver « Magdeleine » du mot hébreu qui désignait son occupation antérieure. Mais on s'accorde généralement aujourd'hui à chercher l'étymologie de Magdeleine dans Magdala, nom d'une petite ville située sur le rivage occidental du lac de Tibériade (voyez l'Evang. selon S. Matth. p. 315). Marie avait donc été surnommée Magdeleine parce qu'elle était originaire de Magdala. Rien de plus simple et de plus naturel. S. Jérôme, jouant sur ce nom de Magdala ou Migdol, qui signifie tour, écrivait : « Elle a été appelée correctement Madeleine, mot qui signifie munie d’une tour, à cause de la constance de sa foi et de son amour ». - Le détail qui suit, de laquelle sept démons étaient sortis, a semblablement divisé les exégètes. Deux explications existent à son sujet, l'une littérale, l'autre symbolique. S. Ambroise, et beaucoup d'autres à sa suite, croient que Marie avait été réellement possédée par plusieurs esprits mauvais (sept est un nombre rond pour désigner la pluralité, selon la mode hébraïque), en châtiment de sa conduite immorale ; S. Grégoire (Hom. 33 in Evang.), le Vén. Bède et un grand nombre d'auteurs modernes voient dans ces mots un symbole de la conversion de Marie. Il est en effet assez conforme au langage figuré des Juifs de traiter les vices comme des démons incarnés dans les âmes. « Le mal a été disposé par Satan », disaient-ils ; ou encore : « l'ébriété… est un démon ». Voyez Lightfoot, h. l. Mais, d'un autre côté, l'évangéliste a dit expressément que plusieurs des femmes qui accompagnaient Jésus avaient été guéries « d'esprits immondes », circonstance qui nous paraît rendre la première interprétation plus vraisemblable. Le fait que signale S. Luc est aussi mentionné dans le second Évangile, 16, 9, où l'action directe du Sauveur est mieux mise en relief : « dont il avait expulsé sept démons ». - 2° Jeanne. Le mari de cette sainte femme, Chusa, intendant d'Hérode, est identifié par quelques commentateurs avec l'officier royal dont Jésus avait guéri le fils d'après S. Jean, 4, 46 et ss. C'est là toutefois une simple conjoncture. Comp. Bretschneider, Lex. Man., s. v. Nous retrouverons plus tard saint Jeanne avec Marie Madeleine auprès du sépulcre de Jésus ressuscité, 24, 10. 3° Suzanne. Nom célèbre dans l'Ancien Testament : il signifie lis ; mais la sainte amie de Jésus qui le portait nous est tout à fait inconnue. - Et beaucoup d'autres. La suite de la vie de Notre-Seigneur nous apprendra à en connaître quelques autres, par exemple, Salomé. L'évangéliste ne veut pas dire qu'elles aient constamment et toutes ensemble accompagné le Sauveur : les circonstances ne l'auraient pas toujours permis. C'étaient du moins tantôt celles-ci, tantôt celles-là, qui se joignaient à lui, et qui pourvoyaient pieusement à tous ses besoins et à ceux de ses disciples : elles l'assistaient de leurs biens. Sur ce sens spécial de assistaient, voyez Rom. 15, 25 ; 2 Cor. 8, 19, 20. Le Fils de Dieu, qui daigne manger le pain de la charité ! - Arrêtons-nous un instant pour voir passer devant nous la troupe sacrée dont nous venons de signaler les membres principaux. Jésus est au milieu des Douze, qui l'entourent avec affection et respect. Les uns sont en avant, les autres à ses côtés, le reste par derrière, mais tous aussi près de lui que possible, afin de ne rien perdre de ses célestes leçons. Le plus souvent c'est lui qui parle ; toutefois, il permet volontiers à ses apôtres de l'interroger familièrement. A quelque distance, marchent plusieurs femmes voilées. Elles sont munies de paniers à provisions, et conversent modestement entre elles. Les regards qu'elles jettent de temps en temps dans la direction de Jésus montrent qu'il est vraiment leur centre. C'est pareillement sur lui que nous fixons nos yeux. Il est de taille moyenne ; sa physionomie est grave, mais resplendissante d'une céleste beauté. Sa tête n'est pas nue, l'usage ne le permettait pas ; contrairement aux représentations habituelles des peintres, elle est couverte d'un soudar (le koufieh des Arabes), c'est-à-dire d'un mouchoir attaché sous le menton et flottant sur le cou et sur les épaules. Son vêtement principal consiste en une longue tunique, qui recouvre tout le corps, ne laissant à découvert que les mains et les pieds. Elle est de couleur grisâtre striée de rouge. Par-dessus cette tunique Jésus porte un tallith (manteau) bleu, dont les amples replis permettent à peine d'entrevoir par instants la kouttoneth (tunique), et la ceinture qui la relève vers la taille. Enfin ses pieds nus sont chaussés de sandales. Telle était la figure humaine du Verbe divin. Voyez le charmant opuscule de F. Delitzsch, Sehet welch ein Mensch, Leipzig, 1872, p. 3 et ss.
Fulcran Vigouroux
Jeanne, femme de Chusa, se retrouve à l’ensevelissement de Notre-Seigneur, voir Luc, 24, 10.