Marc 3, 35
Celui qui fait la volonté de Dieu, celui-là est pour moi un frère, une sœur, une mère. »
Celui qui fait la volonté de Dieu, celui-là est pour moi un frère, une sœur, une mère. »
Jésus explique son assertion si extraordinaire du verset précédent. Ce que l’identité du sang
produit entre les proches, l’accomplissement parfait de la volonté divine l’opère entre tous les hommes sans
distinction. C’est un lien qui les unit beaucoup plus étroitement les uns aux autres, et au Seigneur Jésus, que
celui de la maternité, de la fraternité proprement dite. « Il ne dit pas cela en reniant sa mère, mais en
montrant qu’elle n’est pas digne d’honneur uniquement pour l’avoir enfanté, mais à cause des autres vertus
dont elle était douée ». Euthymius. De la sorte, Marie était donc deux fois la mère de Jésus ! — Ces paroles
et cette conduite du Sauveur enseignent admirablement au prêtre ce qu’il doit être dans ses relations de
famille. Mais, il y a là aussi pour lui un grand sujet de consolation, très bien exprimé dans les réflexions
suivantes du vénérable Bède : « Il y a là de quoi s’étonner grandement. Comment celui qui fait la volonté de
Dieu peut-il être appelé la mère du Christ ?… Mais il nous faut savoir que si l’on devient le frère et la sœur
de Jésus en croyant, on devient sa mère en prêchant. Car c’est comme s’il enfantait le Seigneur celui qui le
fait entrer dans le cœur de l’auditeur. Il devient donc sa mère, si, par sa voix, il engendre l’amour du
Seigneur dans l’esprit du prochain » [240].
Pendant la vie publique de Jésus, sa mère apparaît expressément, et dès le début, quand aux noces de Cana en Galilée, touchée de pitié, elle provoque par son intercession le premier signe de Jésus le Messie (cf. Jn 2, 1-11) . Au cours de la prédication de Jésus, elle accueillit les paroles par lesquelles le Fils, mettant le Royaume au-delà des considérations et des liens de la chair et du sang, proclamait bienheureux ceux qui écoutent et observent la Parole de Dieu (cf. Mc 3, 35 par. et Lc 11, 27-28), comme elle le faisait fidèlement elle-même (cf. Lc 2, 19.51). Ainsi la bienheureuse Vierge avança dans son pèlerinage de foi, gardant fidèlement l’union avec son Fils jusqu’à la croix où, non sans un dessein divin, elle était debout (cf. Jn 19, 25), souffrant cruellement avec son Fils unique, associée d’un cœur maternel à son sacrifice, donnant à l’immolation de la victime, née de sa chair, le consentement de son amour, pour être enfin, par le même Christ Jésus mourant sur la croix, donnée comme sa Mère au disciple par ces mots : « Femme, voici ton Fils » (cf. Jn 19, 26-27).
Toutefois, après que Jésus, agé de douze ans, eut été retrouvé dans le temple, et que, à la question de sa mère: «Pourquoi nous as-tu fait cela?», il eut répondu: «Ne savez-vous pas que je dois être aux affaires de mon Père?», l'évangéliste ajoute: «Mais eux (Joseph et Marie) ne comprirent pas la parole qu'il venait de leur dire» (Lc 2, 48-50). Jésus avait donc conscience de ce que «seul le Père connaît le Fils» (cf. Mt 11, 27), à tel point que même celle à qui avait été révélé plus profondément le mystère de sa filiation divine, sa Mère, ne vivait dans l'intimité de ce mystère que par la foi! Se trouvant aux côtés de son Fils, sous le même toit, et «gardant fidèlement l'union avec son Fils», elle «avançait dans son pèlerinage de foi», comme le souligne le Concile. Et il en fut de même au cours de la vie publique du Christ (cf. Mc 3, 21-35), de sorte que, de jour en jour, s'accomplissait en elle la bénédiction prononcée par Elisabeth à la Visitation: «Bienheureuse celle qui a cru».
Quelle entente profonde entre Jésus et sa mère! Comment pénétrer le mystère de leur union spirituelle intime? Mais le fait est éloquent. Il est certain que dans cet événement se dessine déjà assez clairement la nouvelle dimension, le sens nouveau de la maternité de Marie. Elle a un sens qui n'est pas exclusivement compris dans les paroles de Jésus et les divers épisodes rapportés par les Synoptiques (Lc 11, 27-28 et Lc 8, 19-21; Mt 12, 46-50; Mc 3, 31-35). Dans ces textes, Jésus entend surtout opposer la maternité relevant du seul fait de la naissance à ce que cette «maternité» (comme la «fraternité») doit être dans le cadre du Royaume de Dieu, sous le rayonnement salvifique de la paternité de Dieu. Dans le texte johannique, au contraire, par la description de l'événement de Cana, se dessine ce qui se manifeste concrètement comme la maternité nouvelle selon l'esprit et non selon la chair, c'est-à-dire la sollicitude de Marie pour les hommes, le fait qu'elle va au-devant de toute la gamme de leurs besoins et de leurs nécessités.
Dans le cas de Marie, il s'agit d'une médiation spéciale et exceptionnelle, fondée sur la «plénitude de grâce», qui se traduisait par la pleine disponibilité de la «servante du Seigneur». En réponse à cette disponibilité intérieure des a Mère, Jésus Christ la préparait toujours davantage à devenir, pour les hommes, leur «Mère dans l'ordre de la grâce». Cela ressort, au moins d'une façon indirecte, de certains détails rapportés par les Synoptiques (cf. Lc 11, 28; 8, 20-21; Mc 3, 32-35; Mt 12, 47-50) et plus encore par l'Evangile de Jean (cf. 2, 1-12; 19, 25-27), que j'ai déjà mis en lumière. A cet égard, les paroles prononcées par Jésus sur la Croix à propos de Marie et de Jean sont particulièrement éloquentes.