Matthieu 1, 5
Salmone, de son union avec Rahab, engendra Booz, Booz, de son union avec Ruth, engendra Jobed, Jobed engendra Jessé,
Salmone, de son union avec Rahab, engendra Booz, Booz, de son union avec Ruth, engendra Jobed, Jobed engendra Jessé,
Pourquoi Ruth qui était étrangère a-t-elle épousé un israélite, et comment l'Évangéliste croit-il devoir parler d'un mariage, que défendait tout l'ensemble de la loi ? Il vous paraîtra sans doute déshonorant pour la mémoire du Sauveur de compter parmi ses ancêtres une femme illégitime, si vous ne vous rappelez cette maxime de l'apôtre saint Paul : " Que la loi n'est pas établie pour les justes, mais pour les méchants. " Comment en effet, cette femme étrangère et moabite aurait-elle fait partie du peuple de Dieu, alors que la loi défendait ces unions avec les filles de Moab et leur admission dans l'assemblée des enfants d'Israël (cf. Ex 23, 52 ; 34, 15.16 ; Nb 25, 1 ; Dt 7, 7 ; 23, 1.3), si elle n'avait été élevée au-dessus de la loi par la sainteté et la pureté de ses moeurs. Elle se plaça au-dessus des prescriptions de la loi, et mérita d'être comptée parmi les ancêtres du Seigneur, honneur qu'elle dut non pas aux liens du sang, mais à la parenté spirituelle qui l'unissait au Christ. Or elle est pour nous un grand exemple, car elle est la figure de nous tous qui avons été choisis parmi les Gentils pour entrer dans l'Église du Seigneur.
Je crois inutile d'expliquer comment Booz prit pour épouse une femme moabite, parce que chacun connaît cette histoire de la sainte Écriture. Je ferai remarquer seulement que Ruth épousa Booz en récompense de sa foi qui lui fit abandonner les idoles de son pays pour adorer le Dieu vivant ; et que c'est aussi à cause de sa foi que Booz fut jugé digne d'épouser cette femme, et de contracter cette sainte union qui devait le rendre père d'une race royale.
Ce fort, c'est le fils de Raab, c'est-à-dire de l'Église ; Raab, en effet, signifie étendue qui s'est dilatée, parce que l'Église a été réunie et formée de toutes les nations de la terre.
Disons maintenant que ceux qui cherchent la richesse plutôt que la vertu, la beauté plutôt que la foi, qui désirent trouver dans leurs épouses ce que l'on cherche ordinairement dans les femmes de mauvaise vie, auront des enfants sans soumission pour leurs ordres et pour ceux de Dieu, juste châtiment de leur propre impiété. Obed a engendré Jessé ou le rafraîchissement, car celui qui est soumis à Dieu et à ses parents par une grâce particulière de Dieu, aura des enfants qui seront comme le rafraîchissement de sa vie.
Ruth la moabite accomplit cet oracle d'Isaïe : Envoyez, Seigneur, l'agneau dominateur de la terre, du rocher du désert à la montagne de la fille de Sion.
Il est Booz, celui qui est fort, car il a dit : " Lorsque je serai élevé de terre, j'attirerai tout à moi. " il est Obed, celui qui est serviteur, comme il le dit de lui-même : " Le Fils de l'homme n'est pas venu pour être servi, mais pour servir. " Il est Jessé, ou l'encens, lui qui a dit " Je suis venu apporter le feu sur la terre. " Il est David, dont la main est forte ; car il est dit de lui : " Le Seigneur est fort et puissant. " Il est aussi ledésirable, lui dont le Prophète a écrit : " Le désiré des nations viendra ; il est d'une rare beauté selon ces paroles du Roi-prophète : " Il surpasse en beauté les plus beaux des enfants des hommes. "
La Glose
Ce fut dans la terre promise que Salmon eut Booz de Raab, et Booz, Obed de Ruth.
Jessé père de David porte deux noms, il est plus souvent appelé du nom d'Isaï, mais comme le Prophète lui donne le nom de Jessé, et non celui d'Isaï (Is 11) " Un rejeton sortira de la tige de Jessé, " l'Évangéliste choisit le nom de Jessé pour montrer l'accomplissement de cette prophétie en Jésus et en Marie.
Il a épousé Raab, c'est-à-dire l'Église composée de toutes les nations, car Raab veut dire faim ou étendue, ou mouvement impétueux, et en effet, l'Église des nations a faim et soif de la justice, et elle a converti les philosophes et les rois par l'élan impétueux de sa doctrine. Ruth signifie aussi celle qui voit ou qui se hâte, image de l'Église qui voit Dieu d'un coeur pur et se hâte vers le but de sa sublime vocation (cf. Ph 3, 14).
Considérons maintenant les vertus que le souvenir de ces ancêtres de Jésus-Christ doit nous inspirer. La foi, l'espérance et la charité sont comme le fondement de toutes les autres vertus. Celles qui viennent ensuite n'en sont que la continuation et le couronnement. Or, Juda signifie confession. Il y a deux sortes de confession, celle de la foi, et celle des péchés. Si donc après avoir reçu le don des trois vertus dont nous avons parlé, on vient à offenser Dieu, la confession de la foi ne suffit pas, il faut y ajouter la confession des péchés. Après Juda viennent Pharês et Zara, Pharès signifie division, Zara, Orient,Thamar, amertume. En effet, la confession produit la division en nous séparant des vices, et elle fait en même temps lever les vertus du sein de l'amertume de la pénitence. Après Phares vient Esrom qui veut dire flèche, car celui qui s'est détaché des inclinations vicieuses du siècle, doit devenir une flèche qui perce les vices dans les coeurs des hommes, et y fasse pénétrer l'amour de Dieu. Vient ensuite Aram qui veut dire l'élu ou le sublime, car lorsqu'on s'est éloigné du monde, et qu'on s'est rendu utile aux autres, on est regardé nécessairement comme l'élu de Dieu, et ou acquiert aux yeux des hommes la réputation d'une haute vertu. Nahasson veut dire augure, mais augure du ciel et non de la terre. Joseph se glorifiait de ce titre en faisant dire à ses frères : (Gn 44, 5) " Vous avez enlevé la coupe de mon maître, dont il se sert pour les divinations. " Cette coupe, c'est l'Écriture sainte qui contient le précieux breuvage de la sagesse. Le Sage se sert de cette coupe pour augurer, parce qu'il y voit les choses futures ou célestes. Vient ensuite Salmon, c'est-à-dire sensible, car lorsqu'on s'est livré à l'étude de la divine Écriture, on acquiert cette sensibilité qui fait discerner le bien du mal, ce qui est doux de ce qui est amer. Après Salmon vient Booz, le fort, car celui qui. est versé dans les saintes Écritures y puise une force invincible contre toute sorte d'épreuves.
Vient ensuite Obed ou celui qui sert, car on n'est propre au joug de la servitude qu'autant qu'on est fort. Cet état de servitude vient de Ruth, qui signifie celle qui se hôte, car le serviteur doit être actif et ennemi de la paresse.
Ou bien encore Jessé signifie encens, car si nous servons Dieu par un motif de crainte et d'amour, notre piété aura sa source dans notre coeur et deviendra comme un foyer spirituel sur lequel elle pourra offrir à Dieu un encens de la plus suave odeur. Or, lorsqu'un homme est devenu un digne serviteur de Dieu et un sacrifice d'agréable odeur, il faut également qu'il soit fort et robuste, et qu'il combatte courageusement les ennemis, et rende tributaires les Iduméens, c'est-à-dire qu'il doit soumettre à Dieu les hommes charnels par ses paroles aussi bien que par ses exemples.
44. SALMON ENGENDRA BOOZ, etc. Ici sont présentés les pères qui sont nés après l’entrée dans la Terre promise. En effet, Salmon fut engendré dans le désert et entra avec Josué dans la terre promise ; il prit comme épouse la prostituée Rahab, de laquelle il engendra Booz. Booz signifie «fort», Jr 16, 19 : Le Seigneur est ma force et mon abri. Mais Rahab signifie «faim» ou «étendue», et elle symbolise l’Église, car c’est à elle que revient cette béatitude, Mt 5, 6 : Bienheureux les affamés et les assoiffés de justice, car ils seront rassasiés, etc. L’interprétation d’ «étendue» est que l’Église est répandue par toute la terre, Is 54, 2 : Élargis l’espace de ta tente et déploie les toiles de tes tentes, etc. Elle signifie aussi «élan», car, par l’élan de la prédication, elle convertit les rois et les philosophes. De même, elle signifie l’Église en raison de la réalité [qu’elle désigne]. Rahab plaça un cordon écarlate à la fenêtre, grâce auquel elle fut sauvée du bouleversement de Jéricho, Jos 2, 21. Notre fenêtre est la bouche ; le cordon à la fenêtre est donc la confession de la passion du Christ, par laquelle l’Église est libérée de la mort. De même, en raison de son mariage, car, de même que Rahab a été unie par mariage à Salmon, qui était un prince de la tribu de Juda, de même le Christ s’est-il donné l’Église comme épouse, 1 Co 11, 2 : En effet, je vous ai fiancés à un seul homme, comme une vierge pure à présenter au Christ.
45. Mais, ici, puisque Rahab était une prostituée, on se demande, selon la lettre, comment elle a été mariée à un tel prince, qui était le plus grand de tous. La réponse est que Rahab a fait quelque chose de très grand, du fait que, en méprisant son peuple et la religion paternelle, elle choisit le culte du Dieu d’Israël. C’est pourquoi elle fut donnée au prince le plus noble pour l’honorer au plus haut point.
46. BOOZ ENGENDRA OBED, DE RUTH. Ceci se trouve au dernier chapitre de Ruth [Rt 4, 21]. Obed veut dire «esclave» ou «esclavage», et signifie le Christ, dont le prophète [dit] : Par vos péchés, vous avez fait de moi un esclave, Is 43, 24. Mais Ruth signifie l’Église issue des Gentils en raison du lieu : en effet, elle était une Moabite. Moab signifie «venu du père», Jn 8, 44 : Vous venez de votre père, le Diable. Aussi, en raison de son mariage, comme il apparaît dans la Glose.
47. Mais on se demande pourquoi ces femmes sont nommées ici, puisqu’elles étaient des pécheresses. Jérôme donne pour Ruth la raison qu’elle accomplissait la prophétie de Is 16, 1 : Seigneur, envoyez l’agneau, le maître du pays de la pierre, en direction du désert. La pierre est celle du désert, c’est-à-dire du mal, et c’est elle que signifie Ruth, la Moabite. Mais Ambroise donne une explication en disant qu’en effet l’Église serait dans l’avenir rassemblée de toutes les nations infidèles, et qu’elle aurait pu ainsi rougir et être confuse si on ne voyait pas que même le Christ est né de pécheresses. Ainsi, pour que soient écartées leur honte et leur confusion, elles devaient être nommées.
48. Mais une question se pose : en Dt 23, 3, il est dit : Les Moabites et les Ammonites n’entreront pas dans l’assemblée. Ainsi donc, puisque Ruth était moabite, pourquoi fut-elle accueillie dans l’Église ? Il faut dire avec l’Apôtre, Ga 5, 18, que ceux qui sont conduits par l’Esprit ne sont pas sous la loi. En effet, dans la loi, l’intention du législateur doit toujours être observée plutôt que les mots de la loi. Or, quelle avait été la raison pour laquelle le Seigneur avait interdit qu’elles entrent dans l’Église ? Parce qu’Il avait trouvé en elles de l’idolâtrie, afin qu’elles n’entraînent pas les Juifs à l’idolâtrie. Ainsi, celle qui était déjà convertie n’était pas idolâtre, et, dès lors, elle n’était pas soumise à l’interdiction.
49. OBED ENGENDRA JESSÉ, dernier [chapitre] de Ruth [Rt 4, 22]. Or, Jessé veut dire «sacrifice» ou «feu», et signifie celui qui s’est offert en sacrifice à Dieu avec une odeur suave. Mais une question se pose : puisque celui-ci porte un autre nom, celui d’Isaïe, comme il apparaît en 1 R [1 S] en de nombreux endroits, et que ce nom est plus solennel, pourquoi l’évangéliste ne lui a-t-il pas donné ce nom ? Il faut dire que cela s’est produit pour montrer que, dans le Christ, s’est accompli ce qui est dit par le prophète Isaïe, 11, 1 : Un rejeton sortira de la souche de Jessé.
45. Mais, ici, puisque Rahab était une prostituée, on se demande, selon la lettre, comment elle a été mariée à un tel prince, qui était le plus grand de tous. La réponse est que Rahab a fait quelque chose de très grand, du fait que, en méprisant son peuple et la religion paternelle, elle choisit le culte du Dieu d’Israël. C’est pourquoi elle fut donnée au prince le plus noble pour l’honorer au plus haut point.
46. BOOZ ENGENDRA OBED, DE RUTH. Ceci se trouve au dernier chapitre de Ruth [Rt 4, 21]. Obed veut dire «esclave» ou «esclavage», et signifie le Christ, dont le prophète [dit] : Par vos péchés, vous avez fait de moi un esclave, Is 43, 24. Mais Ruth signifie l’Église issue des Gentils en raison du lieu : en effet, elle était une Moabite. Moab signifie «venu du père», Jn 8, 44 : Vous venez de votre père, le Diable. Aussi, en raison de son mariage, comme il apparaît dans la Glose.
47. Mais on se demande pourquoi ces femmes sont nommées ici, puisqu’elles étaient des pécheresses. Jérôme donne pour Ruth la raison qu’elle accomplissait la prophétie de Is 16, 1 : Seigneur, envoyez l’agneau, le maître du pays de la pierre, en direction du désert. La pierre est celle du désert, c’est-à-dire du mal, et c’est elle que signifie Ruth, la Moabite. Mais Ambroise donne une explication en disant qu’en effet l’Église serait dans l’avenir rassemblée de toutes les nations infidèles, et qu’elle aurait pu ainsi rougir et être confuse si on ne voyait pas que même le Christ est né de pécheresses. Ainsi, pour que soient écartées leur honte et leur confusion, elles devaient être nommées.
48. Mais une question se pose : en Dt 23, 3, il est dit : Les Moabites et les Ammonites n’entreront pas dans l’assemblée. Ainsi donc, puisque Ruth était moabite, pourquoi fut-elle accueillie dans l’Église ? Il faut dire avec l’Apôtre, Ga 5, 18, que ceux qui sont conduits par l’Esprit ne sont pas sous la loi. En effet, dans la loi, l’intention du législateur doit toujours être observée plutôt que les mots de la loi. Or, quelle avait été la raison pour laquelle le Seigneur avait interdit qu’elles entrent dans l’Église ? Parce qu’Il avait trouvé en elles de l’idolâtrie, afin qu’elles n’entraînent pas les Juifs à l’idolâtrie. Ainsi, celle qui était déjà convertie n’était pas idolâtre, et, dès lors, elle n’était pas soumise à l’interdiction.
49. OBED ENGENDRA JESSÉ, dernier [chapitre] de Ruth [Rt 4, 22]. Or, Jessé veut dire «sacrifice» ou «feu», et signifie celui qui s’est offert en sacrifice à Dieu avec une odeur suave. Mais une question se pose : puisque celui-ci porte un autre nom, celui d’Isaïe, comme il apparaît en 1 R [1 S] en de nombreux endroits, et que ce nom est plus solennel, pourquoi l’évangéliste ne lui a-t-il pas donné ce nom ? Il faut dire que cela s’est produit pour montrer que, dans le Christ, s’est accompli ce qui est dit par le prophète Isaïe, 11, 1 : Un rejeton sortira de la souche de Jessé.
Rahab. On a parfois prétendu, mais sans raison suffisante, qu’il est question en cet endroit d’une Rahab inconnue, distincte de celle dont nous avons parlé plus haut. D’après le traité Megilla, F. 14, 2, Rahab aurait épousé Josué lui-même ; toutefois, c’est là évidemment une tradition légendaire qui perd toute autorité devant l’affirmation certaine de l’Évangéliste. Peut-être Salmon était-il l’un des deux espions sauvés par Rahab à Jéricho ; son mariage avec elle serait alors un acte de reconnaissance. – Obed. Il est probable qu’ici encore, entre les noms d’Obed et de Jessé, il existe une lacune dans la liste de S. Matthieu. En effet, il s’écoula environ trois-cent-soixante ans entre Salmon et Jessé, ce qui serait un intervalle bien long pour trois générations seulement. Le livre juif Iucharin dit en propres termes que Jessé n’était que le descendant médiat d’Obed, et non son fils. Le nom de Jessé nous rappelle le beau texte d’Isaïe, 11, 1 : « Un rameau sortira de la souche de Jessé, père de David, un rejeton jaillira de ses racines » – David qui fut roi. C’est à partir de David que la race de Jésus devint race royale, de là l’épithète de roi, répétée deux fois de suite avec emphase. Au livre de Ruth, 4, 18-22, nous trouvons, et dans les mêmes termes, les noms des ancêtres de David depuis Pharès ; là aussi, les générations sont réduites au nombre de trois entre Salmon et le grand roi.