Matthieu 20, 28
Ainsi, le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour la multitude. »
Ainsi, le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour la multitude. »
C'est-à-dire: Vous savez que, non contents de gouverner leurs sujets, ils aspirent à une domination tyrannique; mais pour vous, qui êtes mes disciples, il n'en sera pas de la sorte, car, si les choses matérielles sont soumises à la nécessité, les choses spirituelles dépendent de la volonté. Ceux donc qui sont revêtus d'une puissance toute spirituelle doivent faire reposer toute leur autorité sur l'affection de ceux qui leur sont soumis, plutôt que sur la crainte des châtiments extérieurs.
Les anges et Marthe l'ont servi, il est vrai; il n'est cependant pas venu pour être servi, mais pour servir, et il poussa si loin cette servitude à l'égard des autres, qu'il ac complit les paroles suivantes: «Et pour donner sa vie en mourant pour la rédemption de plusieurs», qui ont cru en lui. Mais comme il a été le seul qui fût libre entre les morts ( Ps 88,6 ), et plus fort que toute la puissance de la mort, il a par là même affranchi de la mort tous ceux qui ont voulu le suivre. Les princes de l'Église doivent donc imiter Jésus-Christ qui se rendait accessible, ne dédaignait pas de parler aux femmes, d'imposer les mains sur les petits enfants, et de laver les pieds à ses disciples pour les engager à en faire autant à leurs frères. Mais, malgré cet exemple, nous offrons dans notre conduite le spectacle d'un orgueil qui va au delà de l'orgueil des princes du monde; car, soit que nous ne voulions pas comprendre, soit que nous méprisions le précepte de Jésus-Christ, nous voulons, comme les rois de la terre, nous faire précéder par des gardes, nous cherchons à nous rendre redoutables et de difficile accès, surtout à l'égard des pauvres; nous n'avons pour les autres et nous ne voulons pour nous-mêmes aucune marque d'affabilité.
Ce n'est pas sur la mère qu'ils font retomber la témérité d'une pareille demande, mais sur les enfants qui, parais sant ignorer ce qu'ils étaient, se sont laissé dominer par une ambition aussi démesurée.
Donc, à quelque degré que vous puissiez vous humilier, jamais vous ne descendrez aussi bas que votre Sauveur et votre Dieu.
Tant que Jésus-Christ n'a fait qu'exprimer sa volonté à l'égard des deux disciples, les autres Apôtres n'éprouvèrent aucun sentiment de peine; ils ne s'indignent que lorsqu'il les reprend: «Et les dix autres ayant entendu», etc.
La demande des deux disciples avait été toute char nelle, la tristesse des dix autres fut de même nature, car s'il est blâmable de vouloir s'élever au-dessus des autres, il est on ne peut plus glorieux d'accepter que d'autres soient élevés au-dessus de nous.
Il leur montre en même temps que c'est le pro pre des nations idolâtres d'ambitionner la primauté, et par cette comparaison il apaise l'agitation de leur âme.
Ils comprirent que cette demande venait des deux frères, quand le Sau veur leur adressa ce reproche. Jusque-là, lorsqu'ils avaient vu les marques particulières d'honneur qu'il leur donnait, comme dans sa transfiguration, quelle que fût la peine qu'ils en ressentaient intérieurement, ils n'osaient pas la faire paraître au dehors, par respect pour leur divin Maître.
Comme il les voit dans le trouble, il les appelle à lui pour les consoler en leur adressant la pa role de plus près, car les deux frères s'étaient séparés de la société des dix Apôtres pour se rapprocher du Seigneur et lui parler en particulier. Or, il apaise les sentiments de leur âme, non plus comme précédemment, en plaçant un petit enfant au milieu d'eux, mais par un exemple tout opposé: «Vous savez, leur dit-il, que les princes des nations dominent sur elles».
C'est une chose louable de désirer le tra vail du ministère, car le travail dépend en partie de notre volonté, aussi bien que la récompense qui la suit; mais c'est une vanité que d'ambitionner l'honneur des premières dignités, parce qu'elles dépendent de la volonté de Dieu. Aussi, quand bien même nous obtiendrions cet hon neur, nous ne savons pas si nous méritons la couronne de justice. En effet, l'Apôtre ne sera pas trouvé digne d'éloges aux yeux de Dieu pour avoir été apôtre, mais pour avoir bien rempli les devoirs de l'apostolat; de même ce n'est pas aux mérites qui ont précédé sa vocation que l'Apôtre doit l'honneur de l'apostolat; mais il a été jugé digne de ce ministère, d'après les dis positions de son âme. Disons encore que les premières dignités vont au devant de ceux qui les fuient, et fuient ceux qui les recherchent. Ce qu'il faut désirer, ce n'est donc point un rang plus élevé, mais une vie plus vertueuse. C'est donc pour éteindre l'ambition des deux frères et l'indignation des autres Apôtres, que le Sauveur établit cette différence entre les princes du monde et les chefs de l'Église, et il montre ainsi que le pouvoir ecclésiastique ne doit être ni recherché par celui qui ne l'exerce pas, ni envié à celui qui en est revêtu. Les princes du monde semblent n'être établis que pour faire peser leur domination sur leurs inférieurs, les réduire en servitude, les dépouiller et les exploiter jusqu'à la mort au profit de leur propre gloire et de leur utilité personnelle. Les princes de l'Église, au contraire, ne sont placés à sa tête que pour servir leurs i nférieurs, leur distribuer tout ce qu'ils ont reçu de Jésus-Christ, pour veiller aux intérêts des fidèles au détriment de leurs intérêts personnels, et ne point reculer devant la mort même pour les sauver. Il n'est donc ni juste, ni utile de désirer la puissance et les honneurs dans l'Église, car quel est l'homme tant soit peu sage qui voudrait se soumettre de lui-même à une si grande servitude et au danger effrayant de rendre compte pour toute l'Église, à moins qu'il n'ait perdu toute crainte des jugements de Dieu, et qu'il ne veuille faire un abus indigne de la puissance ecclésiastique en la transformant en un pouvoir tout séculier ?
Toutefois le divin Maître ne reproche ni leur ambition aux deux disciples, ni leur indignation jalouse aux dix autres: «Mais Jésus les appela à lui», etc.
Jésus termine en se proposant comme exemple pour faire rougir par ses actions ceux que ses paroles laisseraient insensibles: «Comme le Fils de l'homme n'est pas venu pour être servi».
2131. On a donc dit qu’il ne faut pas agir selon la coutume des païens. Parce que [les disciples] pourraient dire : «Qui suivrons-nous ?», [le Seigneur] dit : «Suivez-moi.» Et il montre qu’il est un serviteur en disant : C’EST AINSI QUE LE FILS DE L’HOMME N’EST PAS VENU POUR ÊTRE SERVI, MAIS POUR SERVIR. Cependant, ne lit-on pas plus haut, 4, 11 que les anges s’approchèrent et le servaient ? Ainsi, en Jn 12, 2, il est dit que Marthe servait. Je dis que, bien qu’on l’ait servi, il n’est cependant pas venu pour cela. Mais pour quoi ? Afin de servir, c’est-à-dire de dispenser l’abondance de [sa] gloire aux autres. L’Apôtre dit en Rm 15, 8 : Je dis que le Christ Jésus a été le serviteur des circoncis. Et [on lit] en Lc 22, 27 : Je suis parmi vous comme celui qui sert. Mais tu diras : «N’est-il pas serviteur tout en étant prince ?» Oui. En effet, on appelle serviteur celui qui est acquis à un certain prix, et lui-même s’est fait le prix et s’est donné en rançon pour un grand nombre. IL EST donc VENU SERVIR ET DONNER SON ÂME, c’est-à-dire sa vie corporelle, EN RANÇON POUR UN GRAND NOMBRE. Il ne dit pas : pour tous, car, du point de vue de la suffisance, [il s’est donné] pour tous, et du point de vue de l’efficacité, pour un grand nombre, c’est-à-dire pour les élus. Aussi Jn 15, 13 [dit] : Personne n’a une charité plus grande que de donner sa vie pour ses amis. Jr 12, 7 : Ma précieuse vie, je l’ai livrée aux mains de mes ennemis.
Notre-Seigneur avait
commencé cette leçon importante donnée aux Apôtres, en signalant un mauvais exemple dont ils devaient
s’éloigner ; il la termine par un autre exemple, exemple sublime et divin qu’ils doivent imiter. - De même
que, au lieu de « il n'en sera pas ainsi » du v. 26. - N'est pas venu pour être servi, pour se faire servir. - Mais
pour servir : tel a bien été constamment le rôle du Fils de l’homme ; ce n’est pas en vain qu’il était venu sur
la terre sous la forme d’un esclave. Cf. Phil. 2, 7. - Et donner sa vie ; hébraïsme pour « vitam ». Jésus
mentionne, dans cette dernière phrase, la partie la plus importante, comme aussi la plus humiliante, de son
ministère à notre égard. Il a daigné laver nos souillures, porter le fardeau sous lequel nous étions écrasés. -
La rançon, en latin redemptio ; le mot grec signifie proprement rançon ; Cf. Is. 53, 10. - Un grand nombre,
ce que les théologiens appellent la « satisfactio vicaria » de Jésus-Christ. Maldonat explique l'expression
« un grand nombre » par une bonne distinction : « Si l'on considère du moins son souhait, il est mort pour
tous les hommes sans exception... Si l'on considère le résultat,il a touché non pas tous les hommes mais
beaucoup, parce que tous n'ont pas voulu le recevoir. ». De même S. Thomas : « Il ne dit pas pour tous, parce
que « pour tous » indique la quantité nécessaire ; tandis que « pour beaucoup », à savoir les élus, se réfère à
la réalité ». Les écrits du Nouveau Testament emploient tantôt « tous », Cf. 2 Cor. 5, 14 ; 1 Tim. 2, 6, d’après
le texte grec ; 1 Joan. 2, 2, etc., et tantôt « nombreux », Cf. Rom. 3, 25 ; 5, 6 ; Eph. 5, 2, etc., lorsqu’ils font
allusion au salut des hommes, selon que leurs auteurs veulent désigner objectivement ou subjectivement ceux
pour lesquels Notre-Seigneur Jésus-Christ a enduré la souffrance et la mort.
D’un grand nombre ; c’est-à-dire de tous, de tout le monde (ce qui constitue en effet un grand nombre), comme l’explique saint Jean dans sa première épître (voir 1 Jean, 2, 2). On pourrait encore entendre cette expression de ceux-là seulement qui, par leur foi et leur conduite vraiment chrétienne, ont une part réelle aux mérites du Sauveur, mérites que les autres ont volontairement refusé de s’appliquer.
Envoyé par le père de famille pour gouverner les siens, l’évêque doit garder devant ses yeux l’exemple du bon Pasteur venu, non pas pour se faire servir, mais servir (cf. Mt 20, 28 ; Mc 10, 45), et donner sa vie pour ses brebis (cf. Jn 10, 11). Pris parmi les hommes et enveloppé de faiblesse, il peut se montrer indulgent envers les ignorants et les égarés (cf. He 5, 1-2). Qu’il ne répugne pas à écouter ceux qui dépendent de lui, les entourant comme de vrais fils et les exhortant à travailler avec lui dans l’allégresse. Appelé à rendre compte à Dieu de leurs âmes (cf. He 13, 17), que sa sollicitude s’étende, par la prière, la prédication et toutes les œuvres de charité, soit à eux, soit également à ceux qui ne sont pas encore de l’unique troupeau et qu’il doit considérer comme lui étant confiés dans le Seigneur. Étant comme l’apôtre Paul débiteur à l’égard de tous, qu’il soit prompt à annoncer l’Évangile à tous (cf. Rm 1, 14-15) en engageant tous ses fidèles à une activité apostolique et missionnaire. Quant aux fidèles, ils doivent s’attacher à leur évêque comme l’Église à Jésus Christ et comme Jésus Christ à son Père, afin que toutes choses conspirent dans l’unité et soient fécondes pour la gloire de Dieu (cf. 2 Co 4, 15).
Ainsi donc, tout comme, par la bienveillance de Dieu, ils ont pour frère le Christ, venu non pour être servi, mais pour servir (cf. Mt 20, 28), alors qu’il est le Maître de tout, ainsi les laïcs ont aussi pour frères ceux qui, appliqués au sacré ministère, font près de la famille de Dieu office de pasteurs, enseignant, sanctifiant, dirigeant par l’autorité du Christ pour que le commandement nouveau de la charité soit accompli par tous. Saint Augustin dit à ce sujet ces très belles paroles : « D’être là pour vous me remplit de terreur ; mais d’être là avec vous me rassure. Car pour vous, je suis évêque ; avec vous je suis chrétien. Cela exprime un devoir, ceci est une grâce ; cela évoque un péril, ceci est le salut. »
À la tête de la communauté, les prêtres doivent donc faire en sorte de ne pas rechercher leurs propres intérêts, mais ceux de Jésus Christ, en unissant leurs efforts à ceux des fidèles laïcs, et en se conduisant au milieu d’eux à la manière du Maître : parmi les hommes, celui-ci « n’est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude » (Mt 20, 28). Les prêtres ont à reconnaître sincèrement et à promouvoir la dignité des laïcs et leur rôle propre dans la mission de l’Église. Ils doivent respecter loyalement la juste liberté à laquelle tous ont droit dans la cité terrestre. Ils doivent écouter volontiers les laïcs, tenir compte fraternellement de leurs désirs, reconnaître leur expérience et leur compétence dans les différents domaines de l’activité humaine, pour pouvoir avec eux discerner les signes des temps. Éprouvant les esprits pour savoir s’ils sont de Dieu ils découvriront et discerneront dans la foi les charismes des laïcs sous toutes leurs formes, des plus modestes aux plus éminents, ils les reconnaîtront avec joie et les développeront avec ardeur. Parmi ces dons qu’on trouve en abondance chez les fidèles, l’attrait d’un bon nombre pour une vie spirituelle plus profonde mérite une attention spéciale. Il faut également avoir assez de confiance dans les laïcs pour leur remettre des charges au service de l’Église, leur laissant la liberté et la marge d’action, bien plus, en les invitant, quand l’occasion se présente, à prendre d’eux-mêmes des initiatives.
Par la profession d’obéissance, les religieux font l’offrande totale de leur propre volonté, comme un sacrifice d’eux-mêmes à Dieu, et par là ils s’unissent plus fermement et plus sûrement à sa volonté de salut. À l’exemple de Jésus Christ qui est venu pour faire la volonté du Père (cf. Jn 4, 34 ; 5, 30 ; He 10, 7 ; Ps 39, 9) et qui « prenant la forme d’esclave » (Ph 2, 7) a appris en souffrant l’obéissance (cf. He 5, 8), les religieux, sous la motion de l’Esprit Saint se soumettent dans la foi à leurs supérieurs, qui sont les représentants de Dieu, et ils sont guidés par eux au service de tous leurs frères dans le Christ comme le Christ lui-même qui, à cause de sa soumission au Père, s’est fait serviteur de ses frères et a donné sa vie en rançon pour la multitude (cf. Mt 20, 28 ; Jn 10, 14-18). Ils sont liés ainsi plus étroitement au service de l’Église et tendent à parvenir à la mesure de la plénitude de l’âge du Christ (cf. Ep 4, 13).
Il n’y a pas de véritable œcuménisme sans conversion intérieure. En effet, c’est du renouveau de l’esprit, du renoncement à soi-même et d’une libre effusion de charité que naissent et mûrissent les désirs de l’unité. Il nous faut par conséquent demander à l’Esprit Saint la grâce d’une abnégation sincère, celle de l’humilité et de la douceur dans le service, d’une fraternelle générosité à l’égard des autres. « Je vous conjure, dit l’Apôtre des nations, moi qui suis enchaîné dans le Seigneur, de marcher de façon digne de la vocation qui vous a été départie, en toute humilité et douceur, vous supportant les uns les autres avec patience et charité, attentifs à conserver l’unité de l’Esprit par le lien de la paix » (Ep 4, 1-3). Cette exhortation s’adresse surtout à ceux qui ont été élevés à un ordre sacré dans le dessein de continuer la mission du Christ venu parmi nous « non pour être servi, mais pour servir » (Mt 20, 28).
Ce dessein divin de salut par la mise à mort du " Serviteur, le Juste " (Is 53, 11 ; cf. Ac 3, 14) avait été annoncé par avance dans l’Écriture comme un mystère de rédemption universelle, c’est-à-dire de rachat qui libère les hommes de l’esclavage du péché (cf. Is 53, 11-12 ; Jn 8, 34-36). S. Paul professe, dans une confession de foi qu’il dit avoir " reçue " (1 Co 15, 3) que " le Christ est mort pour nos péchés selon les Écritures " (ibidem ; cf. aussi Ac 3, 18 ; 7, 52 ; 13, 29 ; 26, 22-23). La mort rédemptrice de Jésus accomplit en particulier la prophétie du Serviteur souffrant (cf. Is 53, 7-8 et Ac 8, 32-35). Jésus lui-même a présenté le sens de sa vie et de sa mort à la lumière du Serviteur souffrant (cf. Mt 20, 28). Après sa Résurrection, il a donné cette interprétation des Écritures aux disciples d’Emmaüs (cf. Lc 24, 25-27), puis aux apôtres eux-mêmes (cf. Lc 24, 44-45).
En ceci consiste la rédemption du Christ : il " est venu donner sa vie en rançon pour la multitude " (Mt 20, 28), c’est-à-dire " aimer les siens jusqu’à la fin " (Jn 13, 1) pour qu’ils soient " affranchis de la vaine conduite héritée de leurs pères " (1 P 1, 18).
Le Peuple de Dieu participe enfin à la fonction royale du Christ. Le Christ exerce sa royauté en attirant à soi tous les hommes par sa mort et sa Résurrection (cf. Jn 12, 32). Le Christ, Roi et Seigneur de l’univers, s’est fait le serviteur de tous, n’étant " pas venu pour être servi, mais pour servir et pour donner sa vie en rançon pour la multitude " (Mt 20, 28). Pour le chrétien, " régner, c’est le servir " (LG 36), particulièrement " dans les pauvres et les souffrants, dans lesquels l’Église reconnaît l’image de son Fondateur pauvre et souffrant " (LG 8). Le Peuple de Dieu réalise sa " dignité royale " en vivant conformément à cette vocation de servir avec le Christ.
En outre, Jésus révèle, par sa vie même et non seulement par ses paroles, que la liberté s'accomplit dans l'amour, c'est-à-dire dans le don de soi. Lui qui dit : « Nul n'a plus grand amour que celui-ci : donner sa vie pour ses amis » (Jn 15, 13) marche librement vers sa Passion (cf. Mt 26, 46) et, dans son obéissance au Père, il livre sa vie sur la Croix pour tous les hommes (cf. Ph 2, 6-11). La contemplation de Jésus crucifié est donc la voie royale sur laquelle l'Eglise doit avancer chaque jour si elle veut comprendre tout le sens de la liberté : le don de soi dans le service de Dieu et de ses frères. Et la communion avec le Seigneur crucifié et ressuscité est la source intarissable à laquelle l'Eglise puise sans cesse pour vivre librement, se donner et servir. En commentant ce verset du Psaume 100 99 « servez le Seigneur dans l'allégresse », saint Augustin dit : « Dans la maison du Seigneur, l'esclavage est libre. L'esclavage est libre, lorsque ce n'est pas la contrainte mais la charité qui sert... Que la charité te rende esclave, puisque la vérité t'a rendu libre... Tu es en même temps esclave et homme libre : esclave, car tu l'es devenu ; homme libre, car tu es aimé de Dieu, ton Créateur ; bien plus, tu es libre parce que tu aimes ton Créateur... Tu es l'esclave du Seigneur, l'affranchi du Seigneur. Ne cherche pas à être libéré en t'éloignant de la maison de ton libérateur ! » Ainsi l'Eglise, et tout chrétien en elle, est appelée à participer au munus regale du Christ en Croix (cf. Jn 12, 32), à la grâce et à la responsabilité du Fils de l'homme qui « n'est pas venu pour être servi, mais pour servir et pour donner sa vie en rançon pour une multitude » (Mt 20, 28)
A cette exaltation de la «fille de Sion par excellence» dans son Assomption au ciel est lié le mystère de sa gloire éternelle. La Mère du Christ est en effet glorifiée comme «Reine de l'univers». Celle qui s'est déclarée «servante du Seigneur» à l'Annonciation est restée, durant toute sa vie terrestre, fidèle à ce que ce nom exprime, se confirmant ainsi véritable «disciple» du Christ, qui avait fortement souligné le caractère de service de sa mission: le Fils de l'homme «n'est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour une multitude» (Mt 20, 28). C'est pourquoi Marie est devenue la première de ceux qui, «servant le Christ également dans les autres, conduisent leurs frères, dans l'humilité et la patience, jusqu'au Roi dont on peut dire que le servir, c'est régner», et elle a pleinement atteint cet «état de liberté royale» qui est propre aux disciples du Christ: servir, ce qui veut dire régner!