Matthieu 25, 45
Il leur répondra : “Amen, je vous le dis : chaque fois que vous ne l’avez pas fait à l’un de ces plus petits, c’est à moi que vous ne l’avez pas fait.”
Il leur répondra : “Amen, je vous le dis : chaque fois que vous ne l’avez pas fait à l’un de ces plus petits, c’est à moi que vous ne l’avez pas fait.”
Ou bien, il veut dire par là qu'il reviendra sur la terre avec cette même gloire dont son corps fut entouré au jour de sa transfiguration sur la montagne. Son trône, ce sont les saints les plus parfaits, dont il est écrit: «Là sont établis les siéges de la justice» ( Ps 122,5 ), ou bien les esprits angéliques, que saint Paul appelle «les Trônes ou les Dominations». ( Col 1,16 )
Ces paroles peuvent être aussi entendues dans un sens différent d'un rassemblement local, c'est-à-dire que les peuples ne seront plus divisés en une multitude de croyances et d'opinions à l'égard de Jésus-Christ; car sa divinité éclatera aux yeux de tous les hommes sans exception, aux yeux des pécheurs aussi bien que des justes, et il n'apparaîtra pas dans un endroit à l'exclusion d'un autre, comme il a voulu nous l'apprendre lui-même par la comparaison de l'éclair. Tant que les méchants ne connaissent ni eux-mêmes, ni Jésus-Christ, et tant que les justes ne le voient que comme dans un miroir et sous des images obscures, les justes ne sont pas séparés des méchants; mais lorsque la mani festation éclatante du Fils de l'homme donnera à tous les hommes cette connaissance, alors le Sauveur séparera les bons des méchants: «Et il séparera les uns d'avec les autres», etc. Car d'un côté les pécheurs verront distinctement les suites de leurs péchés; et les justes, les fruits qu'ont produits les semences de leur justice. Le Sauveur donne le nom de brebis à ceux qui sont sauvés, à cause de la douceur qu'ils ont apprise à l'école de celui qui a dit: «Apprenez de moi que je suis doux» ( Mt 11,29 ), et parce qu'ils ont été disposés à souffrir même la mort, à l'exemple de Jésus-Christ qui a été conduit à la mort comme une brebis. ( Is 53,7 ). Les méchants sont appelés des boucs, parce qu'ils gravissent des rochers escarpés et raboteux, et marchent à travers les précipices dont ils sont bordés.
Car les saints, dont les oeuvres ont été conformes à la droiture, recevront pour récompense de ces oeuvres d'être placés à la droite du Roi, au sein du repos et de la gloire, tandis que les mé chants, en punition de leurs oeuvres mauvaises et sans droiture, sont tombés à la gauche, c'est-à-dire dans les plus tristes tourments: «Alors le roi dira à ceux qui sont à sa droite: Venez», etc., afin de recevoir en vertu de leur union parfaite avec Jésus-Christ, tout ce qui pouvait leur manquer. Il ajoute: «Les bénis de mon Père»,et il fait ainsi ressortir l'excellence de cette bénédiction qu'ils ont reçue auparavant du Dieu qui a fait le ciel et la terre.
Par un profond sentiment d'humilité, ils se déclarent indignes des louanges données à leurs bonnes oeuvres, sans toutefois avoir oublié ce qu'ils ont fait, et le Seigneur, par sa ré ponse, fait éclater toute l'affectIon qu'il porte aux siens «Alors les justes lui répondront Quand est-ce que nous vous avons vu avoir faim ?» etc.
De même qu'il avait dit aux justes: «Venez»,il dit aux méchants: «Retirez-vous»; car ceux qui gardent les commandements de Dieu sont près du Verbe, et ils sont ap pelés à s'en rapprocher encore davantage, tandis que ceux qui n'accomplissent pas ses com mandements sont loin de lui, bien qu'ils paraissent en être rapprochés, et il leur dit: «Retirez-vous», pour qu'ils disparaissent entièrement de sa présence. Remarquez aussi que s'il a dit: «Les bénis de mon Père»,il ne dit pas ici: «Les maudits de mon Père»; car le Père est la source de toute bénédiction, mais chacun devient pour soi-même une cause de malédiction, en faisant des oeuvres dignes de malédiction. Or, ceux qui s'éloignent de Jésus, tombent dans le feu éternel, feu bien différent de celui qui sert à notre usage; car il n'y a point sur la terre de feu qui soit éternel, ni même qui dure bien longtemps. Considérez aussi qu'il n'a point dit que le royaume fut préparé pour les anges, tandis qu'il déclare que le feu éternel a été préparé pour, le diable et pour ses anges. En effet, Dieu n'a point créé les hommes pour leur perte, mais ce sont les hommes qui, par leurs péchés, unissent leur sort à celui du démon; et de même que les élus deviennent semblables aux saints anges, ainsi ceux qui persistent pour l'éternité, deviennent semblables aux anges du démon.
Ou bien peut-être, la nature de ce feu est de brûler les substances invisibles, parce qu'il est invisible lui-même, selon ces paroles de l'Apôtre: «Les choses visibles sont passagères, mais les invisibles sont éternelles». Or, ne soyez pas surpris qu'un feu invisible devienne un instrument de supplice, puisque vous voyez tous les jours les corps eux-mêmes souffrir horri blement d'une chaleur toute intérieure. «J'ai eu soif, et vous ne m'avez pas donné à boire». Saint Paul écrit aux fidèles de Corinthe: «Vous êtes le corps de jésus-Christ» ( 1Co 12,27 ). De même donc que l'âme, qui est unie au corps, bien qu'elle ne puisse avoir faim dans sa substance incorporelle, éprouve cependant le besoin de la faim pour le corps, parce qu'elle lui est unie; ainsi le Sauveur ressent toutes les souffrances de l'Église qui est son corps, tout im passible qu'il est lui-même. Remarquez qu'en s'adressant aux justes, il énumère l'un après l'autre toutes leurs bonnes oeuvres, tandis qu'en parlant aux méchants, il abrége cette énumé ration en réunissant leurs fautes contre la charité. «J'ai été malade et en prison, et vous ne m'avez pas visité». Il était digne, en effet, de ce juge miséricordieux, d'énumérer avec com plaisance, et de rehausser les bonnes oeuvres des hommes, et d'abréger, au contraire, l'énumération de leurs mauvaises actions.
Remarquez que les justes s'arrêtent à chaque parole du Sauveur, tandis que les méchants les effleurent comme en courant; car un des caractères des justes lorsqu'on déroule sous leurs yeux le tableau de leurs bonnes oeuvres, c'est de repousser ces éloges et de les réfuter en détail par un profond sentiment d'humilité; les méchants, au contraire, qui ne cherchent qu'à s'excuser, nient effrontément leurs crimes, ou en atténuent le nombre et l'énormité. La réponse de Jésus-Christ vient confirmer cette vérité: «Mais il leur répondra: Je vous le dis en vérité, autant de fois que vous avez manqué de le faire à l'un de ces plus petits», etc. Il veu t rehausser la grandeur des bonnes oeuvres des jus tes, et dissimuler, au contraire, l'énormité des crimes des méchants, il dit aux justes: «Autant de fois que vous l'avez fait à l'un de ces plus petits de mes frères», tandis qu'en parlant aux méchants, il supprime le mot de frères. Les frères de Jésus sont les chrétiens parfaits, et il est plus agréable à Dieu que nous fassions du bien à ceux qui sont plus avancés dans la perfection qu'à ceux qui le sont moins, de même que nous sommes moins coupables de ne pas assister ceux qui sont d'une sainteté moins éminente.
Cette partie du discours du Sau veur est pleine d'attrait, et nous devons l'avoir sans cesse présente à l'esprit pour la méditer avec empressement et componction; car Jésus-Christ lui-même traite ce sujet en termes aussi clairs qu'effrayants. Il ne dit plus comme précédemment: «Le royaume de Dieu est sembla ble», mais il parle de lui-même ouvertement: «Or, quand le Fils de l'homme viendra», etc.
Tous les anges l'accompagneront pour attester tous leurs efforts dans l'exercice du ministère qui leur avait été confié par le Seigneur pour le salut des hommes.
Ou bien encore, il appelle les uns des boucs pour montrer leur stérilité; car les boucs ne produisent pas, et les autres des brebis, pour exprimer leur fécondité spirituelle; car les brebis produisent en abon dance de la laine, du lait et des agneaux. Mais la brebis, dans les saintes Écritures, signifie plus ordinairement l'innocence et la simplicité. Les brebis sont donc ici une figure touchante des élus. - S. kit. Le boue est un animal lascif, toujours ardent pour s'unir à sa femelle, et il était toujours offert sous la loi comme victime pour le péché ( Lv 4,23 Lv 9,3 Lv 23,19 Nb 7,82 Nb 15,24 Nb 28,22 Nb 29,38 , etc) .. Il n'est point ici question des chèvres qui peuvent avoir des petits, et qui sortent pures du lavoir après avoir été tondues.
Il les sépare encore en leur donnant une place différente.
Remarquez encore qu'il ne dit pas: Recevez, mais: «Possédez», ou bien: «Héritez», comme d'un bien de famille, comme d'un patrimoine, ou. de biens qui vous sont acquis depuis longtemps: «Possédez ce royaume qui vous est préparé depuis le commencement du monde».
Notre-Seigneur fait ensuite connaître les oeuvres qui auront mérité aux saints les biens du royaume du ciel: «J'ai eu faim, et vous m'avez donné à manger», etc.
Mais s'ils sont ses frères, pourquoi les appelle-t-il les plus petits? Parce qu'ils sont humbles, parce qu'ils sont pauvres, parce qu'ils sont délaissés. Or, il veut parler ici non-seulement des solitaires qui se sont retirés dans les montagnes, mais de tout fidèle, quel qu'il soit, même de celui qui vit dans le monde; s'il a faim, ou s'il éprouve quelque besoin semblable, il veut que la miséricorde vienne à son secours, car c'est le baptême et la participa tion aux mêmes mystères qui établissent cette fraternité.
Ainsi convaincus par cette accusation du juste juge, ils lui répondent avec douceur: «Mais, Seign eur, quand est-ce que nous vous avons vu avoir faim ou soif, et que nous avons manqué à vous assister ?»
Or, considérez que ce n'est point dans une ou deux circonstances, mais dans toutes absolument, qu'ils ont manqué aux devoirs de la miséricorde; car non-seulement ils n'ont pas nourri celui qui avait faim, mais ce qui demandait beaucoup moins de peine, ils n'ont pas visité les malades. Voyez, d'ailleurs, quels devoirs faciles il prescrit. Il ne dit pas: J'étais en prison, et vous ne m'en avez pas fait sortir; j'étais malade, et vous ne m'avez pas guéri, mais: «Vous ne m'avez pas visité, vous n'êtes pas venus à moi». Il ne demande pas non plus pour apaiser sa faim une nourriture recherchée, mais ce qui est strictement nécessaire. Tout se réunit donc pour légitimer le supplice qu'il leur inflige. Premièrement, la facilité de donner ce qui leur était demandé, c'était du pain; secondement, la misère de celui qui leur faisait cette demande, et il était pauvre; troisièmement, la compassion naturelle qu'ils devaient éprouver pour lui, car il était homme; quatrièmement, le désir d'obtenir la récompense pro mise, c'était un royaume; cinquièmement, la dignité de celui qui recevait ces secours, c'était Dieu dans la personne des pauvres; sixièmement, l'honneur extraordinaire que Dieu leur fai sait, en daignant recevoir de leurs mains; septièmement, la justice de cette aumône, puisqu'il ne reçoit que ce qui lui appartient. Mais l'avarice rend les hommes aveugles sur toutes choses.
Deux jours après, il devait célébrer la Pâque, être livré au suppliée de la croix et aux insultes de ses bourreaux; c'est donc dans une pensée toute de sagesse qu'il prédit et promet la gloire de son triomphe, pour compenser par la promesse des récompenses à venir le scandale qui devait résulter de sa passion. Et il faut bien remarquer que celui que les hommes contem pleront dans sa majesté c'est le Fils de l'homme.
Il faut entendre ces paroles d'après les règles de la prescience de Dieu pour qui l'avenir est comme le passé.
Nous étions libres d'entendre que Jésus-Christ était nourri, et que sa soif était étanchée dans la personne de tous les pauvres, et ainsi des autres bonnes oeuvres; mais ces paroles: «Autant de fois que vous avez agi ainsi à l'égard d'un de mes frères», etc., ne me paraissent pas devoir s'appliquer à tous les pauvres indistinctement, mais seulement aux pauvres d'esprit qu'il indiquait de la main en disant: «Mes frères sont ceux qui font la volonté de mon Père qui est dans les cieux» ( Mt 12,49 Mc 13 ).
Les impies le verront sous une forme humaine, aussi bien que ceux qui seront placés à la droite; car au jour du jugement il apparaîtra revêtu de notre nature, mais ensuite il se révélera dans sa nature divine, que tous les fidèles désirent ardemment de contempler.
Car il descendra avec ses anges qu'il appellera des hauteurs des cieux pour juger les hommes avec lui, c'est pour cela qu'il ajoute: «Et tous ses anges avec lui».
Ou bien, sous le nom d'anges, il veut désigner ici les hommes qui jugeront avec Jésus-Christ; car les anges sont des envoyés, et nous pou vons donner à juste titre ce nom à tous ceux qui ont été envoyés pour annoncer le salut aux hommes.
Or, ce rassemblem ent se fera par le ministère des anges à qui s'adressent ces paroles: «Rassemblez ses saints autour de lui» ( Ps 50,5 ).
Indépendamment de ce royaume dont le Sauveur doit dire à la fin du monde: «Prenez possession du royaume qui vous a été préparé», l'Église de la terre est aussi appelée son royaume, quoique dans un sens bien différent, royaume où il faut encore combattre contre les ennemis jusqu'à ce que nous parvenions à ce royaume de paix où nous régnerons sans plus craindre d'ennemis.
Mais peut-être quelques-uns diront: Je n'ai point l'ambition de régner, il me suffit d'être sauvé. Or, ce qui les trompe d'abord, c'est qu'il n'y a point de salut à espérer pour ceux qui persévèrent dans l'iniquité. En supposant en suite qu'il y ait une différence entre ceux qui règnent et ceux qui ne règnent pas, il faut, toute fois, que tous les élus fassent partie du même royaume, s'ils ne veulent être comptés parmi les ennemis et les étrangers, et condamnés à périr, alors que tous les autres sont couronnés. Est-ce que tous les Romains ne sont pas en possession de l'empire Romain, bien que tous ne soient pas appelés à le gouverner ?
Nous devons conclure de ce passage, que c'est le même feu qui servira au supplice des hommes et à celui des démons. Mais si le feu doit tourmenter les corps avec lesquels il sera en contact, comment pourra-t-il être le supplice des esprits mauvais, à moins de dire avec quelques-uns que les dé mons ont une certaine espèce de corps, formés de cet air grossier et humide qui nous entoure. Si l'on prétend, au contraire, que les démons ne sont revêtus d'aucun corps, quel qu'il soit, il est inutile de prolonger la discussion sur cette question. Car pourquoi n'admettrions-nous pas que des esprits incorporels, par des moyens aussi vrais qu'ils sont merveilleux, trouvent leur supplice dans la peine d'un feu matériel, puisque les âmes des hommes, qui sont certainement incorporelles, pourront bien alors être unies à leurs corps par des liens indissolu bles, de même qu'elles sont comme enchaînées maintenant dans les corps qu'elles animent. Les démons, bien que d'une nature incorporelle, seront donc comme attachés a ce feu matériel, non pour lui donner la vie, mais pour y trouver leur châtiment. Or, le feu sera corporel, et il sera le tourment tout à la fois des corps des hommes réunis à leurs âmes, et des esprits des démons qui n'ont pas de corps.
Il s'agit donc maintenant du jugement dernier, alors que Jésus-Christ descendra du ciel pour juger les vivants et les morts; nous appelons ce jour du juge ment, le dernier jour, c'est-à-dire le dernier temps; car nous ignorons quelle sera la durée de ce jugement, le mot jour étant pris ici pour le temps selon l'habitude des saintes Écritures. Or, nous appelons ce jugement le dernier jugement, parce que Dieu juge dès maintenant, et il a jugé dès le commencement du monde en éloignant nos premiers parents de l'arbre de vie ( Gn 3,24 ), et en punissant les anges prévaricateurs. Mais dans ce jugement final, les anges seront juges aussi bien que les hommes Par un effet de la puissance divine, toutes les oeuvres bonnes ou mauvaises que les hommes ont faites, seront rappelées au souvenir de chacun d'eux, elles viendront se placer sous les yeux de leur âme avec une étonnante rapidité, pour que leur conscience y trouve le principe de leur condamnation ou de leur justification.
Le Sauveur détruit ainsi l'erreur de ceux qui prétendent qu'il n'a point conservé la forme d'esclave qu'il a revêtu; la majesté dont il parle ici, c'est la divinité qui le rend égal au Père et au Saint-Esprit.
«Et toutes les nations seront rassemblées devant lui», etc. Ces paroles établissent la vérité de la résurrection future.
Remarquez que le Seigneur fait ici mention de sept oeuvres différentes de miséricorde, et celui qui aura mis tous ses soins à les accomplir, méritera de posséder le royaume qui a été préparé aux élus dès le commencement du monde.
Dans le sens spirituel, ranimer et nourrir du pain de la parole, ou rafraîchir du breuvage de la sagesse ceux qui ont faim et soif de la justice; recevoir dans le sein de l'Église notre mère, ceux qui s'égarent dans les sentiers de l'hérésie et du péché; supporter ceux qui sont faibles dans la foi, c'est observer les prescrip tions de la vraie charité.
Ceux qui seront placés à la droite et à qui le souverain juge dira: «J'ai eu faim», etc., sont ceux qui ont été admis au nombre des élus et appelés à régner éternellement, ceux qui ont lavé dans leurs larmes les taches de leur vie, qui ont racheté leurs péchés passés par toute la suite de leurs oeuvres, et couvert de leurs aumônes, aux yeux du juste juge, toutes les fautes qu'ils avaient commises. Il en est d'autres qui sont appelés à régner sans être soumis au jugement, ce sont ceux qui ont été bien au delà des préceptes de la loi par la perfection de leur vertu.
Ceux à qui le Sauveur tient ce langage, sont les mauvais chrétiens qui sont jugés avant d'être livrés au supplice, tandis, que les infidèles subissent leur châ timent sans jugement préalable. En effet, on ne discutera pas la cause de ceux qui se présentent devant le tribunal du juge sévère et rigoureux avec la sentence de condamnation que leur a méritée leur infidélité. Ce sont ceux qui ont fait profession de la vraie foi sans en avoir les oeu vres, qui auront à subir le jugement avant d'être punis. Ils entendront le souverain juge pro noncer leur sentence, parce qu'ils ont au moins conservé la doctrine de la foi, tandis que les infidèles n'entendront même pas la parole du juge éternel prononçant leur condamnation, parce qu'ils n'ont même pas voulu lui rendre hommage par la confession extérieure de sa parole. C'est ainsi qu'un roi de la terre inflige un châtiment différent au citoyen qui se rend coupable dans l'intérieur du royaume, et à l'ennemi qui l'attaque au dehors; avant de punir le premier, il examine ses droits, tandis qu'il déclare la guerre au second sans s'occuper de ce que la loi renferme sur le châtiment qu'il mérite.
Après les paraboles qui avaient pour objet, la fin du monde, le Seigneur décrit les cir constances du jugement dernier.
Ou bien il les appelle bénis, parce qu'ils ont mérité par leurs bonnes oeuvres l'éternelle bénédiction. Il dit: «Le royaume de mon Père», parce qu'il rapporte la puissance royale à celui qui la lui a trans mise par l'éternelle génération, et c'est en vertu de cette puissance royale, qui le couvrira seul de gloire dans ce dernier jour, qu'il prononcera la sentence du jugement. Aussi est-ce d'une manière significative qu'il ajoute: «Alors le roi dira».
S'ils parlent ainsi, ce n'est point qu'ils doutent de la vérité des paroles du Seigneur, mais ils s'étonnent d'une si grande élévation, et de la haute dignité dont il couronne leurs oeuvres. Ou bien ils s'expriment de la sorte, parce que le bien qu'ils ont fait leur paraît peu de chose selon ces paroles de l'Apôtre «Les souffrances de la vie présente n'ont aucune proportion avec cette gloire qui doit un jour éclater en nous». ( Rm 8,18 ) «Et le Roi leur répondra: Je vous le dis en vérité, autant de fois que vous l'avez fait à l'un de ces plus petits d'entre mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait».
2601. Vient ensuite la réfutation : EN VÉRITÉ, JE VOUS LE DIS, CHAQUE FOIS QUE VOUS NE L’AVEZ PAS FAIT, etc. On lit quelque chose de semblable en Lc 10, 16 : Celui qui vous méprise me méprise. Za 2, 8 : Celui qui vous aura touchés a touché à la pupille de mes yeux.
Alors il répondra. Le
souverain Juge n'acceptera pas cette vaine excuse ; car, dit S. Jérôme, in h. l., « Cela signifie clairement que
dans chaque pauvre, un Christ affamé est nourri, un Christ assoiffé est désaltéré, un Christ errant est logé
sous un toit, un Christ nu est vêtu, un Christ malade reçoit des visites, un Christ emprisonné est réconforté
par des visites ». Il nous avait assez clairement avertis. - À l'un de ces plus petits : ce comparatif équivaut au
superlatif du v. 40. - Vous ne l'avez pas fait. Nous empruntons encore à Schoettgen un texte rabbinique : « Ils
n’ont pas restauré l’âme du pauvre avec de la nourriture et du breuvage. Ni Dieu non plus ; qu’il en soit
béni ! C’est dans le monde futur qu’il recevra leurs âmes. »
L’Église, dans le Magistère de sa foi et dans le témoignage de ses saints, n’a jamais oublié que " les pécheurs eux-mêmes furent les auteurs et comme les instruments de toutes les peines qu’endura le divin Rédempteur " (Catech. R. 1, 5, 11 ; cf. He 12, 3). Tenant compte du fait que nos péchés atteignent le Christ Lui-même (cf. Mt 25, 45 ; Ac 9, 4-5), l’Église n’hésite pas à imputer aux chrétiens la responsabilité la plus grave dans le supplice de Jésus, responsabilité dont ils ont trop souvent accablé uniquement les Juifs :
Dans la multitude d’êtres humains sans pain, sans toit, sans lieu, comment ne pas reconnaître Lazare, mendiant affamé de la parabole (cf. Lc 17, 19-31) ? Comment ne pas entendre Jésus : " A moi non plus vous ne l’avez pas fait " (Mt 25, 45) ?
Pour les chrétiens, les paroles de Jésus ont encore une autre dimension transcendante. Elles impliquent qu’il faut reconnaître le Christ lui-même dans chaque frère abandonné ou exclu (cf. Mt 25, 40.45). En réalité, la foi fonde la reconnaissance de l’autre sur des motivations inouïes, car celui qui croit peut parvenir à reconnaître que Dieu aime chaque être humain d’un amour infini et qu’« il lui confère ainsi une dignité infinie ». À cela s’ajoute le fait que nous croyons que le Christ a versé son sang pour tous et pour chacun, raison pour laquelle personne ne se trouve hors de son amour universel. Et si nous allons à la source ultime, c’est-à-dire la vie intime de Dieu, nous voyons une communauté de trois Personnes, origine et modèle parfait de toute vie commune. Sur ce point, il y a des développements théologiques de grande portée. La théologie continue de s’enrichir grâce à la réflexion sur cette grande vérité.