Matthieu 26, 13
Amen, je vous le dis : partout où cet Évangile sera proclamé – dans le monde entier –, on racontera aussi, en souvenir d’elle, ce qu’elle vient de faire. »
Amen, je vous le dis : partout où cet Évangile sera proclamé – dans le monde entier –, on racontera aussi, en souvenir d’elle, ce qu’elle vient de faire. »
Peut-être pourrait-on dire que les évangélistes on parlé de quatre femmes différentes; mais, à mon avis, ils n'ont parlé que de trois: l'une dont saint Matthieu et saint Marc font mention, l'autre dont parle saint Luc, et la troi sième dont parle saint Jean.
Et la raison en est que saint Matthieu et saint Marc racontent que ce fait a eu lieu dans la maison de Simon le lépreux, tandis que saint Jean nous apprend que Jésus vint dans la maison où était Lazare, et que ce n'était pas Simon mais Marthe et Marie qui le servaient. D'ailleurs, selon saint Jean, c'est six jours avant la fête de Pâque que Marthe et Marie offrirent à Jésus un repas, tandis que lorsqu'il était à la table de Simon, on n'était plus séparé que par deux jours de la fête de Pâque. Dans saint Matthieu et dans saint Marc, nous voyons encore que ce sont les disciples qui manifestent leur mécontentement de la pieuse action de cette femme, tandis que, dans saint Jean, Judas seul s'en indigne parce qu'il aimait à voler; dans saint Luc, nous ne voyons personne murmurer de cette action.
Partout, dans les Écritures, l'huile signifie ou une oeuvre de miséricorde qui entretient la lampe de la parole et lui donne son éclat, ou la doctrine destinée à nourrir la parole de la foi, qui brille en nous comme une lumière. Généralement on donne le nom d'huile à tout ce qui sert à oindre le corps. Mais parmi les huiles, il y a les parfums, et parmi les parfums, il en est de plus précieux les uns que les autres. Ainsi tout acte, selon la justice, s'appelle une bonne oeuvre; mais parmi les bonnes oeuvres, celles que nous faisons pour les hommes ou d'une manière toute humaine, sont différentes de celles que nous faisons pour Dieu et dans l'intention de lui plaire. De même dans les actions que nous faisons pour Dieu, les unes sont utiles aux hommes, les autres ne tendent qu'à la gloire de Dieu. Ainsi, par exemple, un homme fait du bien à son semblable par un sentiment naturel de justice, et sans songer à plaire à Dieu, comme le faisaient parfois les Gentils, cette action est une huile ordi naire, qui n'a point d'odeur exquise, elle est cependant agréable à Dieu; car, comme le dit saint Pierre dans les écrits de saint Clément, les bonnes oeuvres que font les infidèles leur ser vent dans ce monde, mais non dans l'autre où elles sont stériles pour la vie éternelle. Ceux qui agissent pour Dieu, en recueillent surtout le prix dans l'autre vie, et c'est un parfum qui exhale une odeur délicieuse. Quelquefois ils agissent dans l'intérêt du prochain en faisant des aumô nes, ou d'autres oeuvres semblables, et celui qui exerce ces oeuvres de miséricorde à l'égard des chrétiens, répand des parfums sur les pieds de Jésus-Christ. C'est ce que font ordinaire ment les pécheurs repentants pour obtenir la rémission de leurs péchés. Celui, au contraire, qui s'applique à la pratique de la chasteté, qui persévère dans les prières, dans les jeûnes et dans d'autres oeuvres qui ne tendent qu'à la gloire de Dieu, répand des parfums sur la tête du Seigneur; c'est un parfum précieux dont l'odeur se répand dans toute l'Église, et c'est l'oeuvre propre, non pas des pénitents, mais des parfaits. Ou bien, le parfum répandu sur les pieds du Sauveur, c'est la doctrine qui est nécessaire aux hommes, tandis que la connaissance de la foi qui n'a pour objet que Dieu est le parfum répandu sur la tête de Jésus-Christ, et c'est par ce parfum que nous sommes, par le baptême, ensevelis avec Jésus-Christ pour mourir au péché.
Cette femme figure le peuple des Gentils, c'est elle qui, dans la passion de Jésus-Christ, rend gloire à Dieu; car elle a répandu des parfums sur sa tête, et la tête du Christ c'est Dieu; l'huile, c'est le fruit des bonnes oeuvres. Les disciples, dans le désir qu'ils avaient de sauver Israël, prétendent qu'on aurait dû vendre ce parfum pour en distribuer le prix aux pauvres, c'est-à-dire aux Juifs qu'ils appellent par une inspiration prophétique des pauvres, comme étant privés des richesses de la foi, et le Seigneur leur déclare qu'ils auront tout le temps nécessaire pour prendre soin de ces pauvres. D'ailleurs ce n'est que par son ordre exprès qu'ils pourront porter le salut aux Gentils qui ont été ensevelis avec lui, et couverts du parfum répan du par cette femme; car la régénération ne sera donnée dans le baptême qu'à ceux qui seront morts avec lui. Or, partout où l'Évangile sera prêché, on racontera ce qu'a fait cette femme, parce qu'après la chute du peuple d'Israël, la foi des Gentils proclamera la gloire de l'Évangile.
On peut donc admettre que ce n'est pas la même femme, et ainsi disparaît toute contradiction entre les évangélistes. On peut encore résoudre cette difficulté, en tenant compte de la différence des temps et du mérite de cette femme, pécheresse en premier lieu, et femme vertueuse et parfaite dans la seconde circonstance.
Après nous avoir fait connaître le conseil que tinrent les princes des prêtres pour faire mourir Jésus, l'Évangéliste va nous apprendre comment ils le mirent à exécution, en nous racontant comment Judas conclut avec les Juifs le traité qui devait leur livrer le Sauveur. Mais il nous instruit tout d'abord des causes de cette trahison, ce fut la peine qu'il éprouva qu'on n'eût pas vendu le parfum que cette femme répandit sur la tête de Jésus-Christ, car il désirait retenir quelque chose sur le prix; ce fut donc pour se dédommager de cette perte qu'il conçut le dessein de trahir son maître, «Or, comme Jésus était à Béthanie, dans la maison de Simon le lépreux», etc.
A s'en tenir au récit des trois évangélistes, saint Matthieu, saint Marc et saint Jean, ce serait une seule et même personne. Or, ce n'est pas sans raison que l'Évangéliste rappelle que Simon était lépreux; il veut ainsi nous apprendre ce qui inspira à cette femme la confiance de s'approcher de Jésus. La lèpre était une maladie qui rendait impur, et cette femme voyant que Jésus en avait guéri cet homme chez qui il se trouvait, conçut la ferme espérance qu'il pourrait facilement purifier son âme de la lèpre impure du péché. Tandis que toutes les autres femmes ne s'étaient approchées de Jésus que pour lui demander la guérison de leur corps, seule cette femme s'approcha du Sauveur, pour lui rendre les honneurs qui lui étaient dus et pour en obtenir la guérison de son âme, car elle n'avait aucune infirmité corporelle; aussi, est-ce là ce qui la rend vraiment digne de notre admiration. D'après l'évangéliste saint Jean, au contraire, ce ne serait pas la même personne, mais une autre, la soeur admirable de Lazare.
Le Sauveur vient de parler de mort et de sépulture, il ne veut pas laisser cette femme sous l'impression de tristesse, que ces paroles devaient lui causer, il la console donc de nouveau en ajoutant: «Je vous le dis en vérité, partout où sera prêché», etc.
Mais comme les disciples avaient entendu le divin Maître proclamer cette vérité: «J'aime mieux la miséricorde que le sacrifice» ( Mt 9,12 ), ils se disaient en eux-mêmes: s'il n'a point pour agréables les holocaustes, à plus forte raison l'usage que l'on fait de ce parfum «Ce que ses disciples voyant, ils s'indignèrent et dirent: A quoi bon cette perte, car on aurait pu vendre», etc.
Telles étaient les pensées des disciples, mais le Seigneur, qui voyait l'intention de cette femme, la laisse agir, tant est grande la piété qui l'inspire, et le zèle qui l'anime. Il condescend donc à ses désirs, et lui permet de répandre ce parfum sur sa tête. Le Père céleste avait souffert qu'on lui offrit l'odeur des victimes et la fumée des sacrifices ( Gn 8,2 ), ainsi Jésus-Christ daigne accepter le parfum que cette femme répand sur lui par un sen timen t de religion, tandis que ses disciples la blâment, parce qu'ils ignorent l'intention qui la fait agir. «Mais Jésus, sachant leurs murmures, leur dit: Pourquoi faites-vous de la peine à cette femme ?»
Il ne se borne pas à dire: «Elle a fait une bonne oeuvre envers moi», mais il commence par réprimander ses disciples: «Pourquoi faites-vous de la peine à cette femme ?» parce qu'il veut nous apprendre à encou rager, à exciter celui qui fait une bonne action quelle qu'elle soit, fût-elle d'ailleurs accompa gnée de quelques négligences, et à ne point exiger tout d'abord la perfection. Si on l'avait in terrogé avant que cette femme fit cette action, il ne lui en aurait pas fait une obligation; mais après que ce parfum eut été répandu, le reproche des disciples n'avait plus d'application, et c'est pour ne point étouffer les saints désirs de cette femme qu'il s'exprime ainsi pour sa consolation.
Or, voici que cette prédiction a reçu son accomplissement; et dans quelque partie de la terre que vous alliez, vous verrez cette femme devenue célèbre par la puissance de celui qui a fait cette prédiction. Les victoires d'une multitude de rois et de généraux sont ensevelies dans le silence et l'oubli, et on ne connaît ni le nom, ni les actions d'un grand nombre de ceux qui ont construit des villes et ré duit en servitude une infinité de nations. Mais cette femme a répandu un vase de parfum dans la maison d'un lépreux, en présence de douze hommes, et voici que tous la célèbrent à l'envi par toute la terre, et malgré le temps qui s'est écoulé depuis, le souvenir de cette action n'est pas effacé. Mais pourquoi Notre-Seigneur n'a-t-il point promis de récompense particulière à cette femme, mais seulement une mémoire éternelle? Parce que sa récompense est clairement indi quée dans les paroles du Sauveur; car puisqu'elle a fait une bonne oeuvre, il est évident qu'elle en recevra la récompense.
Ce n'est pas qu'il fut encore actuellement lépreux, mais parce qu'il avait été guéri précédemment de la lèpre, et l'Évangéliste lui conserve le nom de lépreux pour rappeler la puissance de celui qui l'avait guéri.
Un autre Évangéliste ( Jn 12,3 ), au lieu d'un vase d'albâtre plein d'un parfum précieux, parle d'un parfum de nard fidèle, c'est-à-dire vrai et sans mélange.
Il ne faut point penser que ce fut la même qui répandit le parfum sur la tête et qui le répandit sur les pieds. Celle qui le répandit sur les pieds les lava de ses larmes, les essuya de ses cheveux, et elle est appelée expressément une femme de mauvaise vie, tandis qu'on ne dit rien de semblable de celle-ci, D'ailleurs, une femme pécheresse n'aurait pas été digne tout d'un coup de répandre des parfums sur la tête du Sauveur.
Je sais qu'il en est qui attaquent ce passage; car d'après saint Jean, disent-ils, Judas seul s'indigna, parce qu'il avait la bourse, et qu'il avait volé dès le commencement; saint Matthieu, au contraire, raconte que tous les disciples s'élevèrent contre cette femme. Mais ils oublient qu'il y a ici cette figure de mots, appelée syllepse (óiëëçøéò), qui consiste à employer le singulier pour le pluriel, et le pluriel pour le singulier. C'est ainsi que dans son épître aux Hébreux, saint Paul dit des justes de l'ancienne loi: «Ils ont été sciés» ( He 11,37 ), tandis que d'après l'opinion commune, Isaïe seul a souffert ce supplice.
Voyez quelle connaissance de l'avenir, lui dont la passion et la mort devaient avoir lieu dans deux jours,il sait que son Évan gile sera prêché dans tout l'univers.
Dans le sens mystique, celui qui doit souffrir pour l'univers entier, s'arrête à Béthanie dans la maison de l'obéissance, autrefois la maison de Simon le lépreux, Simon veut dire aussi obéissant, et selon une autre explication, il signifie le monde, et c'est dans sa maison que l'Église a été guérie.
On peut se demander comment Notre-Seigneur a pu dire à ses disciples après sa résurrection: «Voici que je suis avec vous jusqu'à la consommation du monde» ( Mt 28,20 ), tandis qu'il leur déclare ici qu'ils ne l'auront pas toujours. Je réponds que dans cette dernière circonstance, il veut parler de sa présence sensible dont ils ne devaient plus jouir après sa résurrection, comme ils en jouissaient maintenant en toute intimité dans le commerce habituel de la vie.
Saint Luc raconte un fait semblable, et celui chez qui Notre-Seigneur se trouvait alors à table porte le même nom, puisque saint Luc l'appelle Simon. Cependant, comme il n'est contraire ni à la raison, ni à l'usage que le même nom soit porté par deux personnes différentes, il est plus vraisemblable qu'il y avait à Béthanie un autre Simon, différent de Simon le lépreux, et chez lequel s'est passé cette scène. Je pense donc que la femme dont il est ici question n'est point différente de la pécheresse qui était venue se jeter alors aux pieds de Jésus, mais que c'est la même appelée Marie qui a fait la même action dans deux circonstances différentes; saint Luc a raconté la première et saint Jean lui-même la rappelle, comme trait distinctif de Marie, avant l'arrivée du Sauveur à Béthanie. «Or, il y avait un homme malade nommé Lazare, qui était du bourg de Béthanie, où demeuraient Marie et Marthe sa soeur. Cette Marie était celle qui répandit sur le Seigneur une huile de parfums, et qui essuya ses pieds avec ses cheveux, et Lazare, qui était alors malade, était son frère». Marie avait donc déjà répandu une fois des parfums sur le Seigneur, et elle répète cette action une seconde fois, dans une circonstance dont saint Luc ne parle pas, mais qui est racontée par les trois autres évangélistes, saint Jean, saint Matthieu et saint Marc. Saint Matthieu et saint Marc disent, il est vrai, qu'elle répandit ce parfum sur la tête du Seigneur, tandis que saint Jean le lui fait répandre sur les pieds. Mais il n'y a point en cela de contradiction, si nous admettons que cette femme répandit ce parfum, non-seulement sur la tête, mais sur les pieds du Seigneur. Peut-être nous objectera-t-on, dans un esprit de chicane, que, suivant le récit de saint Marc, cette femme brisa le vase d'albâtre avant de répandre le parfum sur la tête du Seigneur, et qu'il est impossible qu'il en soit resté assez dans ce vase brisé pour parfumer ses pieds. Mais que les contradicteurs veuillent bien remarquer qu'elle a pu répandre le parfum sur les pieds du Sauveur avant de briser le vase, et qu'il en est resté assez dans ce vase entier pour répandre sur sa tête lorsqu'elle l'eut brisé.
Personne, pour peu qu'il fasse usage de sa raison, n'ira croire que le Seigneur a permis que cette femme répandit ces parfums sur ses pieds, à l'exemple des hommes sensuels et voluptueux. Dans toutes ces choses, ce n'est point l'usage qui est coupa ble, mais la mollesse voluptueuse de ceux qui s'en servent. Celui qui, dans l'usage qu'il en fait, dépasse les limites que s'imposent les personnes vertueuses au milieu desquelles il vit, ou fait preuve de dépravation, ou annonce que sa conduite a quelque chose de mystérieux. La même chose donc qui, dans les autres, est presque toujours coupable, dans une personne divine ou dans un prophète, peut être un symbole ou une figure; car la bonne odeur figure la bonne ré putation, et celui qui s'en rend digne par les oeuvres d'une vie vertueuse, en suivant les pas de Jésus-Christ, semble répandre sur ses pieds un parfum d'un grand prix.
Il semble qu'il y ait contradiction entre saint Matthieu et saint Marc, qui, après avoir dit que la Pâque se ferait dans deux jours, mentionnent tous les deux que Jésus était à Béthanie, où ce parfum précieux fut répandu sur sa tête, tandis que saint Jean place le même fait six jours avant la fête de Pâque. Mais ceux qui font cette difficulté, ne remarquent pas que c'est par récapitulation que saint Matthieu et saint Marc racontent ce fait; car aucun d'eux, après avoir dit que la Pâque se ferait dans deux jours, ne continue son récit en ajoutant: «Ensuite comme Jésus était à Béthanie».
On peut encore admettre que les autres disciples partagèrent ces mêmes sentiments, et peut-être à la persuasion de Judas; c'est cette impression générale que saint Matthieu et saint Marc ont voulu exprimer. Mais Judas tint ce langage, parce que c'était un voleur, les autres y participèrent par un sentiment de charité pour les pauvres, et saint Jean n'a fait mention que de Judas, parce qu'il a voulu constater à cette occasion l'habitude qu'il avait de voler.
Preuve évidente qu'ils avaient dit quelque chose de blessant pour cette femme, Il ajoute cette parole remarquable :«Elle vient de faire une bonne oeuvre envers moi»,c'est-à-dire, ce n'est point là comme vous le dites une perte, mais une bonne oeuvre, un acte de piété et de religion.
Notre-Seigneur leur prouve ici par une raison claire, qu'il ne fallait pas incriminer la conduite de ceux qui l'assistaient de leurs biens pendant le cours de sa vie mortelle; car il y aurait toujours des pauvres dans l'Église, et les fidèles trouveraient toujours l'occasion de leur faire du bien quand ils le voudraient, tandis qu'il devait rester peu de temps avec eux revêtu d'un corps mortel. «Mais pour moi, vous ne m'aurez pas toujours».
Ou bien, cette question peut se résoudre en disant que c'est à Judas seul que Notre-Seigneur a adressé ces paroles, et s'il n'a pas dit: Tu auras, mais: «Vous aurez», c'est que dans la personne de Judas, il a eu en vue tous ses imitateurs. Il dit aussi: «Vous ne m'aurez pas toujours», bien que les méchants ne l'aient même pas pour un temps, parce qu'ils paraissent avoir Jésus-Christ pendant cette vie en se mêlant avec ses mem bres, et en s'approchant de sa table, mais ils ne l'auront pas toujours de cette manière, parce que ce n'est qu'aux seuls élus qu'il dira: «Venez les bénis de mon Père».
«Car en répandant ce parfum»,etc. C'était un usage chez les Juifs d'embaumer avec divers parfums les corps des morts, pour les préserver plus longtemps de la corruption, et comme cette femme devait avoir la pensée d'embaumer le corps du Seigneur après sa mort, pensée qu'elle ne pourrait exécuter, prévenue qu'elle serait par la résurrection, Dieu permit, par une disposition providentielle, qu'elle couvrît de parfums le corps vivant de Jésus. C'est ce que signifient ces paroles: «En répandant ce parfum sur mon corps, elle l'a fait pour m'ensevelir», c'est-à-dire qu'en répandant ce parfum sur mon corps pendant ma vie, elle a comme annoncé ma mort et ma sépulture.
Ou bien, il faut dire que saint Luc appelle femme pécheresse cette même femme à qui saint Jean donne le nom de Marie.
L'albâtre est une espèce de marbre blanc veiné de diverses nuances et dont on se sert ordinairement pour des vases destinés à contenir des parfums et qui ont la propriété, dit-on, de les préserver de toute altération.
Le mot grecgßóôéò ( pistis) veut dire foi, d'où vient le mot p éóôßïí ( pisti con), c'est-à-dire fidèle, et ce parfum était fidèle, parce qu'il était pur et sans mélange.
C'est-à-dire dans tous les lieux où s'étendra l'Église, dans tout l'univers on racontera ce qu'a fait cette femme, etc. Ces dernières paroles nous apprennent que de même que Judas eu blâ mant cette action, s'est couvert à tout jamais d'infamie, ainsi cette femme recueille dans tous les siècles la gloire de son pieux dévouement.
2626. On pourrait dire que donner au prochain est une bonne action. Cela est vrai, mais pas au point où celle-ci doive être publiée à la grandeur du monde. C’est pourquoi il dit : EN VÉRITÉ, JE VOUS LE DIS : PARTOUT OÙ SERA PROCLAMÉ CET ÉVANGILE DANS LE MONDE ENTIER, [CELA] SERA REDIT À SA MÉMOIRE, à savoir, pour faire son éloge. Jérôme dit que lui qui devait être crucifié annonce à l’avance que l’évangile sera annoncé dans le monde entier, alors que [celui-ci] n’était pas encore divulgué au moment où Matthieu écrivait. Remarquez aussi que nombreux sont ceux qui ont voulu que sa naissance soit divulguée dans le monde entier et dont le souvenir a été effacé, alors que ce fait n’a pas été effacé. Pr 10, 7 : Le souvenir des justes est entouré de louanges. Ps 111[112], 7 : Le souvenir des justes durera éternellement.
Après la louange, la
récompense. La promesse qui va sortir des lèvres de Jésus est unique en son genre : le divin Maître la
prononce d'une manière emphatique, après l'avoir placée sous la sauvegarde du serment. - Partout où sera
prêché... : c'est-à-dire en tous lieux et dans tous les temps, d'après d'autres paroles de Jésus, cf. 28, 19-20. -
Cet Évangile ; cf. 24, 14. La prédication évangélique ; la vie, les mystères, la doctrine du Fils de l'homme. -
Dans le monde entier ; ces mots déterminent le sens de « partout ». - On racontera... La prophétie s'est
admirablement accomplie. « On sait au contraire par toute la terre, et on le dit encore tous les jours après la
révolution de tant de siècles, qu’une femme pécheresse est venue dans la maison d’un lépreux répandre, en
présence de douze hommes, un parfum de grand prix sur la tête d’un autre homme. La mémoire de cette
action ne s’est jamais effacée. Les Perses, les Indiens, les Scythes, les Thraces, la race des Maures, et les
habitants des îles Britanniques ont appris et racontent partout ce que cette femme fait aujourd’hui en secret
dans la maison d’un pharisien. », S. Jean Chrys., Hom. 80 in Matth. Quelle gloire pour Marie de voir son
nom à tout jamais associé à l'Évangile et à la Passion de Jésus !