Matthieu 26, 58

Quant à Pierre, il le suivait à distance, jusqu’au palais du grand prêtre ; il entra dans la cour et s’assit avec les serviteurs pour voir comment cela finirait.

Quant à Pierre, il le suivait à distance, jusqu’au palais du grand prêtre ; il entra dans la cour et s’assit avec les serviteurs pour voir comment cela finirait.
Origène
Après avoir dit à Pierre: «Remettez votre épée», et nous avoir ainsi montré toute sa patience; après avoir donné une preuve de sa souveraine bonté et de sa puissance toute divine en guérissant l'oreille que Pierre avait coupée, comme le rapporte un autre Évangéliste ( Lc 22,51 ) l'auteur sacré continue son récit «En même temps Jésus dit à cette troupe», etc. Si elle avait perdu le souvenir de ses anciens bienfaits, Jésus voulait lui faire au moins reconnaître ceux dont elle venait d'être témoin «Vous êtes venus ici armés d'épées et de bâtons pour me prendre comme si j'étais un voleur».
Saint Jean Chrysostome
Or, ils ne s'étaient point emparé de lui dans le temple, parce qu'ils n'avaient pas osé le faire, dans la crainte de la foule, et c'est pour leur offrir le lieu et l'occasion favorable pour se saisir de lui, que le Sauveur sortit hors de la ville. Il nous apprend ainsi que s'il ne l'avait permis par un acte libre de sa volonté, ils n'auraient jamais pu s'emparer de sa personne. L'Évangéliste explique ensuite la raison pour laquelle le Seigneur a consenti à être pris en ajoutant: «Tout cela s'est fait afin que s'accomplissent les oracles des prophè tes».

Les dis ciples qui étaient restés au moment où l'on s'était saisi du Seigneur, s'enfuirent lorsqu'ils eu rent entendu ces paroles: «Alors tous les disciples l'abandonnèrent et s'enfuirent». Car ils savaient bien qu'il n'était plus possible de le délivrer, puisqu'il se livrait volontairement entre les mains de ses ennemis.

Le zèle de Pierre était bien ardent, puisque, après avoir été témoin de la fuite des autres, il ne s'enfuit pas lui-même, mais qu'il tient ferme, et entre dans la cour du grand-prêtre. Il est vrai que saint Jean y entre aussi, mais il était connu du prince des prêtres. Or, Pierre ne le suivait que de loin, parce qu'il devait bientôt le trahir.
Saint Jérôme
Il semble leur dire: C'est une absurdité de venir prendre avec des bâtons et des épées un homme qui se livre lui-même entre vos mains, e t de chercher de nuit, sous la conduite d'un traître, celui qui enseignait tous les jours dans le temple, comme s'il voulait se dérober à vos recherches.

«Ils ont percé mes mains et mes pieds». ( Ps 22,17 ) Et ailleurs: «Il a été conduit à la mort comme une brebis ( Is 53,7 ); et plus loin: «Il a été conduit à la mort à cause des iniquités de mon peuple».

Josèphe rapporte que Caïphe avait acheté à prix d'argent le pontificat pour cette année-là, contrairement à ce que Moïse avait ordonné de la part de Dieu, que les enfants des grands-prêtres succéderaient à leurs pères dans le pontificat, par ordre de naissance. Qu'y a-t-il d'étonnant qu'un pontife inique ait rendu des jugements d'iniquité?

C'était par attachement pour son Maître, ou bien par une curiosité toute naturelle, et parce qu'il dési rait savoir le jugement que le grand-prêtre prononcerait contre lui, s'il le condamnerait à mort, ou s'il le renverrait après l'avoir flagellé.
Saint Augustin
Cependant il fut conduit en premier lieu chez Anne, beau-père de Caïphe, comme le raconte saint Jean. Il fut amené lié, car il y avait dans cette foule un tribun à la tête d'une cohorte, au témoignage du même Évangéliste.

Nous y voyons encore que l'Église doit suivre, c'est-à-dire imiter les souffrances du Seigneur, mais d'une manière bien différente; car l'Église souffre pour elle-même, tandis que le Sauveur souffre pour l'Église.
Saint Rémi
C'est-à-dire, c'est le propre des voleurs de cher cher à nuire et de se cacher; mais pour moi, je n'ai cherché à nuire à personne, au contraire, j'ai guéri un grand nombre de malades, et j'ai toujours enseigné dans les synagogues: «J'étais tous les jours assis parmi vous, enseignant dans le temple, et vous ne m'avez pas pris».

Comme tous les prophètes ont prédit la mort du Christ, le Sauveur ne cite pas un témoignage particulier, mais il dit d'une manière gé nérale que les oracles des prophètes doivent être accomplis.

Cette conduite prouve, toutefois, la fragilité des Apôtres. Ils avaient promis dans l'ardeur de leur foi de mourir avec leur divin Maître, et ils furent maintenant pleins d'effroi, sans se souvenir de leur promesse. C'est ce que nous voyons encore se renouveler dans ceux qui promettent d'exécuter de grandes choses pour l'amour de Dieu, et qui n'en accomplissent aucune, cependant ils ne doivent pas désespérer, mais se relever avec les Apôtres et se renouveler par le repentir.

Il n'aurait jamais pu renier son Seigneur, s'il fût toujours resté près de lui. Cette circonstance signifie que Pierre devait suivre et imiter le Seigneur jusque dans sa passion.
Rabanus Maurus
Dans le sens mystique, de même que Pierre qui a lavé la tache de son renoncement dans les larmes du repentir, figure le retour de ceux qui succombent dans l'épreuve du martyre, ainsi les autres disciples qui s'enfuient, enseignent à ceux qui ne se sentent pas assez forts pour affronter les supplices, de chercher pru demment leur salut dans la fuite.

Il y a aussi un rapport entre le nom de Caïphe et sa conduite, Caïphe signifie investigateur ou habile dans l'accomplissement de ses mauvais desseins, ou bien, qui vomit de sa bouche; car il lit éclater son impudence dans les mensonges qu'il proféra, et dans l'homicide qu'il ne craignit pas de commettre. Or, ils amenèrent Jésus chez lui, pour ne paraître agir en tout que par l'autorité du conseil, «ou les scribes, les pharisiens et les anciens étaient assemblés». Là où se trouvent Caïphe et les grands-prêtres, là se rassemblent aussi les scribes, c'est-à-dire les secrétaires, dont le ministère est de copier et de garder la lettre qui tombe, et les anciens qui ont vieilli, non dans la vérité, mais dans la vétusté de la lettre. «Or, Pierre le suivait de loin». Il ne pouvait le suivre de près, mais de loin seulement, sans cependant s'éloigner tout à fait de lui.
Saint Thomas d'Aquin
2755. MAIS PIERRE LE SUIVAIT DE LOIN. Il a été question du lieu. Maintenant, il est question de Pierre qui y accède. Premièrement, [le Christ] y est conduit ; deuxièmement, Pierre y arrive. [Matthieu] fait trois choses : premièrement, il aborde la manière ; deuxièmement, comment [Pierre] y arriva en suivant.

Qu’il y soit arrivé, cela fut le fait de la ferveur ; qu’[il ait suivi] de loin, cela fut le fait de la peur, car le Christ a souffert pour l’Église, et non pour lui-même ; mais Pierre et l’Église ont souffert pour eux-mêmes. De même, le lieu est abordé, car [Pierre le suivit] JUSQU’AU PALAIS DU GRAND PRÊTRE. En effet, il n’osa pas entrer dans la maison afin de ne pas paraître faire partie des disciples de Jésus. Comment il entra, Matthieu n’en parle pas, mais Jean 18, 15 le raconte, car un disciple était connu du grand prêtre et fit entrer Pierre.

2756. Vient ensuite l’entourage : IL PÉNÉTRA À L’INTÉRIEUR ET S’ASSIT AVEC LES SERVITEURS POUR VOIR LE DÉNOUEMENT. Il faisait cela soit par curiosité, soit par attachement. Et ces trois choses préparaient d’une certaine façon la chute de Pierre. Le fait qu’il suivait de loin y préparait, car cela signifiait qu’il n’était pas solide : en effet, celui qui est solide doit s’approcher. Ainsi est-il dit en Jc 4, 8 : Approchez-vous de Dieu, et il s’approchera de vous. Car, dans la maison de Dieu se trouve le trône de Dieu et de l’Agneau, Ap 22, 3. En effet, dans la maison, se trouve la charité parfaite. Pierre ne s’est donc pas approché de la charité du Christ. De même, il n’allait pas jusqu’à la méchanceté des Juifs. Il était donc tiède, et il lui arriva ce qui est dit en Ap 3, 16 : Parce que tu es tiède, je te cracherai de ma bouche. De même, les serviteurs étaient mauvais. Si 10, 2 : Comme est le juge du peuple, ainsi sera son serviteur. Il n’y a donc pas à s’étonner qu’il soit tombé, car il était en mauvaise compagnie. C’est pourquoi Ps 17[18], 16 [dit] : Tu seras saint avec les saints.
Louis-Claude Fillion
Ce verset forme une parenthèse au milieu du récit ; mais les détails qu'il contient ont pour but de préparer la triste scène du reniement de S. Pierre, qui sera racontée plus loin, vv. 69-75. Le prince des Apôtres avait d'abord pris honteusement la fuite avec ses collègues : bientôt cependant, confus de sa faiblesse, il s'était enhardi et il avait suivi, quoique de loin, la bande qui emmenait Jésus captif. C'était du moins une marque de fidélité qu'il fut seul avec S. Jean à donner au Sauveur. - Jusqu'à la cour... Quand le cortège fut parvenu à l'entrée de la cour intérieure que nous avons mentionnée en expliquant le v. 3, Pierre fut obligé de s'arrêter ; mais le disciple bien-aimé, qui survint alors, l'introduisit dans l'atrium à ciel ouvert sur lequel s'ouvraient les principaux appartements du palais. Cf. Joan. 18, 15-18. C'était un coup hardi, digne de ces deux Apôtres dévoués entre tous à Jésus. - Il s'assit avec les serviteurs. Les valets du Sanhédrin et les serviteurs du grand-prêtre, désignés sous le nom de « ministres », après avoir conduit leur prisonnier à la salle d'audience dans laquelle quelques-uns d'entre eux seulement étaient restés, s'étaient retirés dans la cour. S. Jean, 18, 18, les montre assis autour d'un brasier qu'ils avaient allumé à cause du froid. Pierre prit place à côté d'eux. - Pour voir la fin. Son intention était de voir l'issue de l'interrogatoire. Non qu'il lui fût possible d'entrer dans la salle où se trouvait l'assemblée ; mais, à une distance si rapprochée, il ne tarderait pas à connaître le sort réservé à son Maître. Hélas ! De tristes événements l'attendent lui-même dans le milieu si dangereux où il s'est imprudemment jeté !