Matthieu 3, 17
Et des cieux, une voix disait : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie. »
Et des cieux, une voix disait : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie. »
En ta présence, Seigneur Jésus, je ne puis me taire, car je suis la voix, et la voix de celui qui crie à travers le désert: préparez le chemin du Seigneur (cf. Mt 3,3). C'est moi qui ai besoin de me faire baptiser par toi, et c'est toi qui viens à moi (Mt 3,14)!
Moi, quand je suis né, j'ai effacé la stérilité de celle qui m'enfantait; et comme j'étais un tout nouveau-né, j'ai porté remède au mutisme de mon père en recevant de toi la grâce de ce miracle.
Mais toi, né de la Vierge Marie de la manière que tu as voulue et que tu es seul à connaître, tu n'as pas effacé sa virginité, tu l'as protégée en lui ajoutant le titre de mère; et ni sa virginité n'a empêché ton enfantement, ni ton enfantement n'a souillé sa virginité. Ces deux réalités incompatibles, l'enfantement et la virginité, se sont rejointes en une harmonie unique, ce qui est à la portée du Créateur de la nature.
Moi, qui suis un homme, je ne fais que participer à la grâce divine; mais toi, tu es à la fois Dieu et homme, parce que tu es par nature l'ami des hommes.
C'est moi qui ai besoin de me faire baptiser par toi, et c'est toi qui viens à moi? Toi, tu étais au commencement, tu étais auprès de Dieu, et tu étais Dieu (cf. Jn 1,1); toi qui es le reflet resplendissant de la gloire du Père, toi qui es l'expression du Père (cf. He 1,3) parfait; toi qui es la vraie lumière qui éclaire tout homme venant en ce monde (Jn 1,9); toi qui, lorsque tu étais dans le monde, es venu là où tu étais déjà; toi qui t'es fait chair, mais qui habites en nous (Jn 1,14), et qui t'es fait voir de tes serviteurs dans la condition de serviteur (Ph 2,8); toi qui as uni la terre et le ciel par ton saint nom comme par un pont: c'est toi qui viens à moi! Toi, qui es si grand, vers le pauvre que je suis? Le roi vers le précurseur, le Seigneur vers le serviteur.
Mais tu as beau ne pas rougir de naître selon l'humble manière des hommes: moi, je ne puis franchir les limites de la nature. Je sais quel est l'abîme qui sépare la terre et le Créateur. Je sais quelle est la différence entre le limon de la terre et celui qui l'a modelé. Je sais combien ton soleil de justice l'emporte sur moi qui ne suis que la lampe de ta grâce. Et, bien que tu sois revêtu par la nuée très pure de ton corps, moi, pourtant, je reconnais ma condition servile, je proclame ta magnificence. Je ne suis pas digne de défaire la courroie de tes sandales (Mc 1,7). Et comment oserai-je toucher le sommet immaculé de ta tête? Comment étendrai-je la main sur toi qui as déployé les cieux comme une tenture (Ps 103,2) et qui as affermi la terre sur les eaux (Ps 135,6)? Comment éclairerai-je celui qui est la lumière en personne? Quelle prière vais-je faire sur toi, qui accueilles même les prières de ceux qui t'ignorent?
Moi, quand je suis né, j'ai effacé la stérilité de celle qui m'enfantait; et comme j'étais un tout nouveau-né, j'ai porté remède au mutisme de mon père en recevant de toi la grâce de ce miracle.
Mais toi, né de la Vierge Marie de la manière que tu as voulue et que tu es seul à connaître, tu n'as pas effacé sa virginité, tu l'as protégée en lui ajoutant le titre de mère; et ni sa virginité n'a empêché ton enfantement, ni ton enfantement n'a souillé sa virginité. Ces deux réalités incompatibles, l'enfantement et la virginité, se sont rejointes en une harmonie unique, ce qui est à la portée du Créateur de la nature.
Moi, qui suis un homme, je ne fais que participer à la grâce divine; mais toi, tu es à la fois Dieu et homme, parce que tu es par nature l'ami des hommes.
C'est moi qui ai besoin de me faire baptiser par toi, et c'est toi qui viens à moi? Toi, tu étais au commencement, tu étais auprès de Dieu, et tu étais Dieu (cf. Jn 1,1); toi qui es le reflet resplendissant de la gloire du Père, toi qui es l'expression du Père (cf. He 1,3) parfait; toi qui es la vraie lumière qui éclaire tout homme venant en ce monde (Jn 1,9); toi qui, lorsque tu étais dans le monde, es venu là où tu étais déjà; toi qui t'es fait chair, mais qui habites en nous (Jn 1,14), et qui t'es fait voir de tes serviteurs dans la condition de serviteur (Ph 2,8); toi qui as uni la terre et le ciel par ton saint nom comme par un pont: c'est toi qui viens à moi! Toi, qui es si grand, vers le pauvre que je suis? Le roi vers le précurseur, le Seigneur vers le serviteur.
Mais tu as beau ne pas rougir de naître selon l'humble manière des hommes: moi, je ne puis franchir les limites de la nature. Je sais quel est l'abîme qui sépare la terre et le Créateur. Je sais quelle est la différence entre le limon de la terre et celui qui l'a modelé. Je sais combien ton soleil de justice l'emporte sur moi qui ne suis que la lampe de ta grâce. Et, bien que tu sois revêtu par la nuée très pure de ton corps, moi, pourtant, je reconnais ma condition servile, je proclame ta magnificence. Je ne suis pas digne de défaire la courroie de tes sandales (Mc 1,7). Et comment oserai-je toucher le sommet immaculé de ta tête? Comment étendrai-je la main sur toi qui as déployé les cieux comme une tenture (Ps 103,2) et qui as affermi la terre sur les eaux (Ps 135,6)? Comment éclairerai-je celui qui est la lumière en personne? Quelle prière vais-je faire sur toi, qui accueilles même les prières de ceux qui t'ignorent?
Ou bien ce qui avait lieu dans la personne du Christ, nous apprenait qu'après le bain de la régénération, l'Esprit saint descend sur nous des portes ouvertes du ciel, nous sommes inondés de l'onction de la gloire céleste, et nous devenons enfants de Dieu par l'adoption de sa voix paternelle.
Ce n'est pas seulement par le nom qu'il lui donne que le Père atteste qu'il est son Fils, mais par la propriété qu'il lui attribue. En effet, nous sommes un nombre considérable d'enfants de Dieu ; mais ce Fils est bien différent de nous, car il est son propre Fils, son Fils véritable d'origine et non d'adoption, dans la réalité et non pas seulement par le nom qu'il porte, par naissance et non par création.
En ce jour, comme nous venons de l'entendre par la lecture de l'Évangile, notre Seigneur et Sauveur a été baptisé par Jean dans le Jourdain, et c'est pourquoi cette solennité n'est pas petite, mais grande, et même très grande. Car, lorsque notre Seigneur a daigné se faire baptiser, l'Esprit Saint vint sur lui sous la forme d'une colombe, et l'on entendit la voix du Père qui disait: Celui-ci est mon Fils bien-aimé; en lui j'ai mis tout mon amour (Mt 3,17).
Quel grand mystère dans ce baptême céleste! Le Père se fait entendre du haut du ciel, le Fils est vu sur la terre, l'Esprit Saint se montre sous la forme d'une colombe. Car il.n'y a pas de vrai baptême ni de vraie rémission des péchés là où il n'y a pas la vérité de la Trinité; et la "rémission des péchés ne peut être donnée là où la foi en la Trinité n'est pas parfaite ;
Le baptême que donne l'Église est unique et véritable: il n'est donné qu'une fois et, en y étant plongé une seule fois, on est purifié et renouvelé. Purifié, parce qu'on a déposé la souillure des péchés; renouvelé, parce qu'on ressuscite pour une vie nouvelle après avoir dépouillé la vieillerie du péché. Car ce bain du baptême rend l'homme plus blanc que neige, non quant à la peau de son corps, mais par la splendeur de son esprit et la pureté de son âme.
Donc les cieux se sont ouverts, au baptême du Seigneur, afin que, par le bain de la nouvelle naissance, on découvre que les royaumes des cieux sont ouverts aux croyants, selon cette sentence du Seigneur: Personne, à moins de naître de l'eau et de l'Esprit, ne peut entrer dans le Royaume de Dieu (Jn 3,5). Il est donc entré, celui qui renaît et qui n'a pas négligé de préserver son baptême; et, semblablement, il n'est pas entré celui qui n'est pas rené.
Donc, parce que notre Seigneur était venu donner le baptême nouveau pour le salut du genre humain et la rémission de tous les péchés, lui-même a voulu être baptisé le premier, non pour dépouiller le péché, puisqu'il n'avait pas commis de péché, mais pour sanctifier les eaux du baptême afin de détruire les péchés de tous les croyants renés par le baptême. Lui, le Seigneur, fut donc baptisé dans l'eau pour que, par le baptême, nous soyons lavés de tous nos péchés.
Quel grand mystère dans ce baptême céleste! Le Père se fait entendre du haut du ciel, le Fils est vu sur la terre, l'Esprit Saint se montre sous la forme d'une colombe. Car il.n'y a pas de vrai baptême ni de vraie rémission des péchés là où il n'y a pas la vérité de la Trinité; et la "rémission des péchés ne peut être donnée là où la foi en la Trinité n'est pas parfaite ;
Le baptême que donne l'Église est unique et véritable: il n'est donné qu'une fois et, en y étant plongé une seule fois, on est purifié et renouvelé. Purifié, parce qu'on a déposé la souillure des péchés; renouvelé, parce qu'on ressuscite pour une vie nouvelle après avoir dépouillé la vieillerie du péché. Car ce bain du baptême rend l'homme plus blanc que neige, non quant à la peau de son corps, mais par la splendeur de son esprit et la pureté de son âme.
Donc les cieux se sont ouverts, au baptême du Seigneur, afin que, par le bain de la nouvelle naissance, on découvre que les royaumes des cieux sont ouverts aux croyants, selon cette sentence du Seigneur: Personne, à moins de naître de l'eau et de l'Esprit, ne peut entrer dans le Royaume de Dieu (Jn 3,5). Il est donc entré, celui qui renaît et qui n'a pas négligé de préserver son baptême; et, semblablement, il n'est pas entré celui qui n'est pas rené.
Donc, parce que notre Seigneur était venu donner le baptême nouveau pour le salut du genre humain et la rémission de tous les péchés, lui-même a voulu être baptisé le premier, non pour dépouiller le péché, puisqu'il n'avait pas commis de péché, mais pour sanctifier les eaux du baptême afin de détruire les péchés de tous les croyants renés par le baptême. Lui, le Seigneur, fut donc baptisé dans l'eau pour que, par le baptême, nous soyons lavés de tous nos péchés.
Le mystère de la Trinité nous est révélé dans le baptême de Jésus-Christ, le Fils qui est baptisé, l'Esprit saint qui descend sous la forme d'une colombe, le Père dont la voix rend témoignage à son Fils.
Ce n'est plus comme autrefois par Moïse, ou par les prophètes, par des figures ou par des images que Dieu le Père nous annonce l'avènement futur de son Fils dans la chair, il nous le montre à découvert au milieu de nous en nous disant : " Celui-ci est mon Fils. "
Qu'y a-t-il d'étonnant que le mystère de la Trinité ait été révélé au baptême de Jésus-Christ, puisque l'invocation de ce mystère rend parfait notre baptême, car le Seigneur à voulu d'abord accomplir dans sa personne ce qu'il devait exiger du genre humain tout entier.
Quoique le Père, le Fils et l'Esprit saint n'aient qu'une seule et même nature, cependant vous devez croire très fermement qu'ils forment trois personnes distinctes, que le Père est le seul qui fait entendre ces paroles : " Celui-ci est mon Fils bien-aimé ; " le Fils, le seul sur lequel a retenti la voix du Père ; et l'Esprit saint, le seul qui soit descendu sur le Christ après son baptême sous la forme d'une colombe.
Ces oeuvres appartiennent à la Trinité tout entière ; dans leur nature le Père, le Fils et le Saint-Esprit ne sont qu'un, sans aucune séparation de temps ou de lieu. Ils sont séparés au contraire dans nos paroles, qui ne peuvent prononcer à la fois le Père, le Fils et l'Esprit Saint. Il en est ainsi dans l'Écriture, où ces noms divers occupent des places différentes ; car on comprend très bien par comparaison que la Trinité qui est indivisible en elle-même ne puisse être révélée qu'à l'aide d'objets extérieurs et d'expressions distinctes, Que la voix soit seulement la voix du Père, nous en avons la preuve dans ces paroles : " Celui-ci est mon Fils. "
Le Père aime son Fils, non pas comme un maître aime son serviteur, mais comme un père aime son enfant ; comme un père aime son fils unique et non pas comme on aime un fils d'adoption, et c'est pour cela qu'il ajoute : " En qui j'ai mis mes complaisances. "
Deux autres évangélistes, saint Marc et saint Luc, rapportent ces paroles d'une manière semblable ; mais leur récit varie sur celles qui se firent entendre du haut du ciel, bien que le sens soit le même. Ainsi, au lieu qu'on lit dans saint Matthieu : " Celui-ci est mon Fils bien-aimé ; " saint Marc et saint Luc ont écrit : " Vous êtes mon Fils bien-aimé. " Mais ces deux versions reviennent au même. La voix du Ciel a nécessairement employé l'une de ces deux locutions ; mais l'Évangéliste a voulu faire comprendre que ce qui avait été dit revenait à cette manière de s'expliquer : " Celui-ci est mon Fils bien-aimé, " pour bien faire connaître à ceux qui étaient présents qu'il était vraiment le Fils de Dieu. C'est pour cela qu'il a rendu cette locution : " Vous êtes mon Fils bien-aimé, " par cette autre : " Celui-ci est mon Fils bien-aimé. " Car cette voix n'avait pas polir but d'apprendre au Christ ce qu'il savait, mais d'instruire ceux qui étaient présents. Quant aux autres variantes que présentent les Évangélistes, l'un : " Dans lequel j'ai mis mes complaisances ; " l'autre : " J'ai mis en vous mes complaisances ; " un autre : " C'est en vous qu'il m'a plu " (Lc 3, 23 ; Mt 3, 17 ; Mc 1, 12) ; si vous me demandez quelle est celle que la voix céleste a fait entendre, je répondrai que vous pouvez choisir celle que vous voudrez, pourvu que vous compreniez que le sens reste le même dans toutes ces locutions différentes. Ces paroles : " J'ai mis en vous mes complaisances, " nous montrent le Père plaçant toutes ses complaisances dans son Fils ; ces autres : " Il m'a plu en vous, " nous apprennent que le Père a été agréable aux hommes dans son Fils. Il est donc facile de comprendre que ces différentes manières de s'exprimer des Évangélistes reviennent à dire : J'ai placé en vous mon bon plaisir, c'est-à-dire : j'ai résolu d'accomplir par vous ce qui m'est agréable.
Si l'on rapporte ces paroles à l'humanité du Christ, et qu'on lise : " En qui j'ai mis mes complaisances, " le sens sera : en qui je me suis complu, parce que je l'ai trouvé seul juste et sans péché. Si au contraire on lit : " dans lequel il m'a plu " ; il faut sous-entendre : de placer ma volonté, de faire par lui ce que je devais faire, c'est-à-dire de racheter le genre humain.
375. Ensuite quand il dit : ET VOICI UNE VOIX DU CIEL DISANT, est mise la déclaration du Père : LUI, C’EST MON FILS. Note que le baptême nous rend non seulement spirituels, mais aussi enfants de Dieu, Jn 1, 12 : Il leur a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu. Et il faut savoir que cette voix exprime en quelque sorte ce que la colombe a signifié.
376. BIEN-AIMÉ, pas comme les autres créatures, Sg 2, 13, mais comme un fils naturel, Jn 5, 20 : Le Père aime le Fils, et lui montre tout ce qu’il fait, et lui montrera des œuvres plus grandes que celles-ci, pour que vous admiriez. C’est aussi ce que veut dire le Ps 2, 7 : Le Seigneur m’a dit : «Mon fils c’est toi, moi aujourd’hui je t’ai engendré.» Mais parce que les saints aussi sont aimés par lui, il ajoute FILS, par quoi il distingue son fils compris dans un sens unique des autres.
377. EN QUI JE ME SUIS COMPLU. Partout où brille une qualité de quelqu’un, quelque chose se complaît en soi-même, comme un artiste se complaît dans la belle œuvre qu’il a faite, et comme un homme qui voit sa belle image dans un miroir. L’excellence divine est dans n’importe quelle créature particulière, mais jamais toute parfaite, sinon dans le Fils et le Saint-Esprit. Et c’est pourquoi il ne se complaît entièrement que dans le Fils, qui a autant d’excellence que le Père. [Il dit] donc : EN QUI, c’est-à-dire que moi je me complais en lui, Jn 3, 35 : Le Père aime le Fils, et il a tout donné dans la main de celui-ci.
378. Mais note qu’il semble y avoir une contradiction entre cet évangéliste et les autres, parce que Mc 1, 11 et Lc 3, 22 disent : Tu es mon fils bien-aimé, mais Matthieu [dit] : LUI C’EST MON FILS BIEN-AIMÉ – et : En toi. Mais l’idée est la même, parce que ce qui est dit : Tu es, paraissait directement dit au Christ, mais [le Père] le disait à cause des autres, parce que le Christ était sûr de l’amour de son Père. Et c’est pourquoi Matthieu a exprimé l’intention de celui qui parle, et il dit : C’EST LUI, etc. «Il montre que c’est dit en quelque sorte pour les autres», comme a dit Augustin.
379. En outre, on se demande pourquoi Matthieu et Marc disent : En qui je me, et Luc : En toi. Augustin dit que le Père se complaît dans le Fils et dans les hommes. C’est donc pour cela que ce qui est dit, EN QUI, signifie qu’il se complaît dans les hommes. Je me complais dans les autres, c’est-à-dire pour mon honneur, parce que certains, voyant le Fils, ont glorifié le Père. Ou bien selon l’un et l’autre sens : EN QUI JE ME SUIS COMPLU, c’est-à-dire que mon plaisir fut d’accomplir le salut des hommes, et c’est en toi, c’est-à-dire par toi.
380. Et note que dans ce baptême sont représentés non seulement la fin et le fruit, mais aussi la forme du baptême qui est : Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, [voir] plus loin. Car le Fils fut dans la chair, le Père dans la voix, l’Esprit Saint dans l’apparence de colombe. Et note que ce qui fut séparément ne relève pas d’une division des opérations selon les personnes de la Trinité, puisque, de même que son essence est commune, de même son opération. Mais cela est dit pour opérer une attribution, parce que c’est toute la Trinité qui a créé et cette colombe et cette chair ; mais ces dernières se rapportent à des personnes différentes.
376. BIEN-AIMÉ, pas comme les autres créatures, Sg 2, 13, mais comme un fils naturel, Jn 5, 20 : Le Père aime le Fils, et lui montre tout ce qu’il fait, et lui montrera des œuvres plus grandes que celles-ci, pour que vous admiriez. C’est aussi ce que veut dire le Ps 2, 7 : Le Seigneur m’a dit : «Mon fils c’est toi, moi aujourd’hui je t’ai engendré.» Mais parce que les saints aussi sont aimés par lui, il ajoute FILS, par quoi il distingue son fils compris dans un sens unique des autres.
377. EN QUI JE ME SUIS COMPLU. Partout où brille une qualité de quelqu’un, quelque chose se complaît en soi-même, comme un artiste se complaît dans la belle œuvre qu’il a faite, et comme un homme qui voit sa belle image dans un miroir. L’excellence divine est dans n’importe quelle créature particulière, mais jamais toute parfaite, sinon dans le Fils et le Saint-Esprit. Et c’est pourquoi il ne se complaît entièrement que dans le Fils, qui a autant d’excellence que le Père. [Il dit] donc : EN QUI, c’est-à-dire que moi je me complais en lui, Jn 3, 35 : Le Père aime le Fils, et il a tout donné dans la main de celui-ci.
378. Mais note qu’il semble y avoir une contradiction entre cet évangéliste et les autres, parce que Mc 1, 11 et Lc 3, 22 disent : Tu es mon fils bien-aimé, mais Matthieu [dit] : LUI C’EST MON FILS BIEN-AIMÉ – et : En toi. Mais l’idée est la même, parce que ce qui est dit : Tu es, paraissait directement dit au Christ, mais [le Père] le disait à cause des autres, parce que le Christ était sûr de l’amour de son Père. Et c’est pourquoi Matthieu a exprimé l’intention de celui qui parle, et il dit : C’EST LUI, etc. «Il montre que c’est dit en quelque sorte pour les autres», comme a dit Augustin.
379. En outre, on se demande pourquoi Matthieu et Marc disent : En qui je me, et Luc : En toi. Augustin dit que le Père se complaît dans le Fils et dans les hommes. C’est donc pour cela que ce qui est dit, EN QUI, signifie qu’il se complaît dans les hommes. Je me complais dans les autres, c’est-à-dire pour mon honneur, parce que certains, voyant le Fils, ont glorifié le Père. Ou bien selon l’un et l’autre sens : EN QUI JE ME SUIS COMPLU, c’est-à-dire que mon plaisir fut d’accomplir le salut des hommes, et c’est en toi, c’est-à-dire par toi.
380. Et note que dans ce baptême sont représentés non seulement la fin et le fruit, mais aussi la forme du baptême qui est : Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, [voir] plus loin. Car le Fils fut dans la chair, le Père dans la voix, l’Esprit Saint dans l’apparence de colombe. Et note que ce qui fut séparément ne relève pas d’une division des opérations selon les personnes de la Trinité, puisque, de même que son essence est commune, de même son opération. Mais cela est dit pour opérer une attribution, parce que c’est toute la Trinité qui a créé et cette colombe et cette chair ; mais ces dernières se rapportent à des personnes différentes.
2° Les manifestations extraordinaires qui suivirent le baptême de Jésus furent au nombre de trois : le ciel
s’ouvre, l’Esprit-Saint en descend sous la forme d’une colombe, une voix divine se fait entendre. - Jésus,
ayant été baptisé : Jésus fut baptisé selon le rite accoutumé, c’est-à-dire par immersion. Les peintres et les
sculpteurs font donc un contre-sens historique lorsqu’ils supposent, dans leurs représentations, que le
baptême fut administré au Sauveur par effusion. Signalons en passant, puisque nous avons nommé les
peintres, les tableaux d’Annibal Carrache, de Louis Carrache, de Nicolas Poussin, d’Albano, de Raphaël et
les fresques de Pérugin et de Flandrin. - Sortit aussitôt. Les autres baptisés restaient quelque temps dans le
fleuve pour faire la confession de leurs péchés ; Jésus, qui n’avait pas de fautes personnelles à accuser, sort
immédiatement du Jourdain, et vient, d’après une note importante de S. Luc. 13, 21, prier sur le rivage. -
C’est alors qu’ont lieu les trois phénomènes que nous avons indiqués. - a. Les cieux ouverts, S. Marc
emploie une expression qui est encore plus pittoresque. Mais qu’est-ce à dire, les cieux ouverts ou déchirés ?
Cela signifie, d’après Paulus, que le ciel, nuageux auparavant, se serait subitement éclairci ; d’après Kuinoel,
qu’un orage aurait éclaté tout à coup ! Voilà bien de ces tours de force réalistes auxquels le rationalisme
moderne ne nous a que trop accoutumés ; on en trouvera la réfutation dans l’excellent ouvrage de M. Dehaut,
l’Évangile expliqué, défendu, médité, t. 1, p. 464, 5è édit. Il est pourtant assez difficile de se faire une idée
exacte de cette ouverture des cieux. Plusieurs exégètes, au sentiment desquels nous nous rallions volontiers,
croient qu’elle eut lieu sous la forme « d’une lumière subite qui parut sortir du fond du ciel ou d’une nuée,
comme quand on voit les éclairs ou la foudre fendre l’air et se faire jour à travers la nue ». D. Calmet. Ainsi pensait déjà S. Justin ; l’Évangile des Ebionites parle dans le même sens. Le but de cette première apparition
était de montrer que la colombe et la voix venaient véritablement du ciel. - b. Descente de l’Esprit-Saint. Et
il vit l'Esprit Saint... Le sujet du verbe est Jésus et non S. Jean-Baptiste ; Cf. Marc., 1, 10 : « Et aussitôt, en
remontant de l’eau, il vit les cieux se déchirer et l’Esprit descendre sur lui comme une colombe... » Mais le
Précurseur fut aussi témoin de ce miracle, ainsi qu’il l’atteste lui-même dans le quatrième Évangile, Joan., 1,
32. Il faut prendre ces mots « il vit » dans leur acception ordinaire, de manière à leur faire désigner un
phénomène extérieur et réel, et non pas seulement, comme le voulait Origène, une vision purement
spirituelle et interne. - Descendant comme une colombe. On a fréquemment conclu dans les quatre Évangiles
que les écrivains sacrés voulaient simplement établir une comparaison entre la descente du Saint-Esprit
rendu visible et le mouvement d’une colombe à travers les airs, par exemple « il vint rapide comme une
colombe », Fritzsche ; « L’éclair n’a pas été aperçu subitement, mais peu à peu, comme cela sied aux
colombes, en descendant » dit aussi Rosenmüller. Toutefois le terme de comparaison est la forme sous
laquelle apparut l’Esprit-Saint, et nullement le mode de son apparition ; il descendit comme une colombe,
c’est-à-dire sous la forme d’une colombe. Le texte très explicite de S. Luc, « L’Esprit Saint, sous une
apparence corporelle, comme une colombe, descendit sur Jésus », 3, 22, renverse ces opinions plus ou moins
rationalistes, dont le but manifeste est de supprimer le miracle ou d’en diminuer l’étendue. La tradition écrite
et monumentale est de même tout-à-fait formelle sur ce point. Si l’on demande maintenant pourquoi le
Saint-Esprit s’est manifesté de préférence sous la forme d’une colombe, nous répondrons que, dans le
langage symbolique des divines Écritures, cet oiseau nous est toujours présenté comme le type de la pureté,
de la sainteté, de la douceur, par conséquent, comme le type des qualités qui conviennent si éminemment à
l’Esprit de Jésus. « Ce n’est pas sans raison que c’est une colombe qui vient pour indiquer l’agneau de Dieu,
car rien ne convient mieux à un agneau qu’une colombe. Ce que l’agneau est pour les animaux, la colombe
l’est pour les oiseaux. L’un et l’autre représentent l’innocence suprême, la douceur suprême, la simplicité
suprême », S. Bern., Serm. 1, de Epiph. S. Jean Chrysostôme, Hom. in h.l., nous ouvre une autre
perspective : « Au déluge, cet oiseau est apparu portant dans son bec une branche d’olivier, et annonçant la
tranquillité définitive de toute la terre. Et le signe de la colombe apparaît aussi dans le baptême pour nous
montrer le libérateur ». En ce moment s’accomplirent les célèbres prophéties d’Isaïe, 11, 2 : « Que l’Esprit
du Seigneur repose sur lui, l’esprit de sagesse et d’intelligence », etc. ; 61, 1 : « L’Esprit du Seigneur est sur
moi, du fait que c’est le Seigneur qui m’a oint. » Notre-Seigneur Jésus-Christ reçut visiblement l’onction de
l’Esprit-Saint par laquelle il fut consacré Roi-Messie. - Qui vint sur lui. S. Jean ajoute : « il demeura sur lui.
», 1, 32, montrant ainsi que ce fut une effusion permanente. - c. La voix céleste : Et voici une voix venant du
ciel. « Fils de Dieu, dit saint Hilaire, Can. 2, il est montré par l’ouïe et par la parole. A la plèbe infidèle et
désobéissante aux prophètes, la vue et la parole témoignent de leur Seigneur. » La voix qui se fit entendre au
baptême du Christ fut de même nature que la voix de la Transfiguration, Cf. Matth. 17, 5, que la voix du
lundi ou du mardi saint, Cf. Joan., 12, 28, voix véritable, distincte, articulée, qui semblait venir du ciel. -
Celui-ci est ; d’après S. Marc et S.Luc, la voix s’adresse directement à Jésus : « Tu es ». - Mon Fils, tout à la
fois au point de vue juif et au point de vue chrétien. Au point de vue juif cette appellation désigne
simplement le Messie, qui était regardé comme le Fils de Dieu par excellence ; au point de vue chrétien, et
d’après le sens métaphysique que nous ne saurions exclure de ce passage, elle affirme que Jésus possède
vraiment la nature divine ; Cf. Ps., 2, 7. - En qui je me suis complu ; au prétérit pour exprimer une
complaisance absolue, éternelle, qui ne cesse jamais. N’est-ce pas là déjà ce qu’avait prédit le Seigneur, et
presque dans les mêmes termes, par la bouche d’Isaïe ? « Voici mon serviteur que je soutiens, mon élu qui a
toute ma faveur. J’ai fait reposer sur lui mon esprit », Is., 42, 1. - L’Esprit-Saint venait de se manifester ; dans
les paroles prononcées par la voix du ciel, nous voyons les deux autres personnes de la divine Trinité, le Père
et le Fils, non moins clairement indiquées, ce qui faisait dire à un ancien auteur : « Vas au Jourdain, et tu
verras la Trinité ». Le Père choisit le Fils comme médiateur entre lui et les hommes, le Fils accepte cette
grande mission, l’Esprit-Saint descend du ciel pour jouer le rôle de consécrateur dans cette ordination
messianique. Mais cette révélation trinitaire, déjà si lumineuse au jour du baptême personnel de Jésus, sera
devenue semblable à un soleil de vérité, quand il instituera plus tard le sacrement du « baptême de
régénération » en disant à ses apôtres : « Allez, baptisez au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit »,
Matth., 28, 19 ; Cf. Thom. Summ., p. 3, q. 39, a. 8.
On voit ici se manifester distinctement les trois personnes de la très sainte Trinité.
Les Évangiles rapportent en deux moments solennels, le Baptême et la transfiguration du Christ, la voix du Père qui Le désigne comme son " Fils bien-aimé " (cf. Mt 3, 17 ; 17, 5). Jésus se désigne Lui-même comme " le Fils Unique de Dieu " (Jn 3, 16) et affirme par ce titre sa préexistence éternelle (cf. Jn 10, 36). Il demande la foi " au nom du Fils unique de Dieu " (Jn 3, 18). Cette confession chrétienne apparaît déjà dans l’exclamation du centurion face à Jésus en croix : " Vraiment cet homme était Fils de Dieu " (Mc 15, 39). Dans le mystère pascal seulement le croyant peut donner sa portée ultime au titre de " Fils de Dieu ".