Matthieu 6, 10
que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.
que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.
Ou bien nous demandons l'avènement de ce royaume que Dieu nous a promis, que Jésus-Christ nous a mérité par son sang, afin qu'après l'avoir servi sur la terre nous puissions régner avec lui dans le ciel.
On peut encore entendre le royaume de Dieu de Jésus-Christ lui-même, dont l'avènement fait tous les jours l'objet de nos désirs les plus ardents. Car, de même qu'il est la résurrection (Jn 11, 25), parce que c'est en lui que nous ressusciterons, on peut aussi le prendre pour le royaume de Dieu, parce que c'est en lui que nous règnerons. C'est avec dessein que le Sauveur nous fait demander le royaume de Dieu, c'est-à-dire celui qui est dans les cieux, car il y a aussi un royaume terrestre ; mais celui qui a renoncé au monde est supérieur à ses honneurs et à son royaume. Celui donc qui s'est consacré à Dieu et à Jésus-Christ ne désire plus les royaumes de la terre, mais le royaume du ciel.
Ainsi nous ne demandons pas que Dieu fasse ce qu'il veut, mais que, quant à nous, nous puissions faire ce que Dieu veut. Or, il n'y a que la volonté divine qui puisse nous en rendre capables, c'est-à-dire sa protection et le secours qu'il nous donne, car personne n'est fort de ses propres forces et la miséricorde divine fait seule toute notre sûreté.
Voyez cet enchaînement admirable : Notre-Seigneur nous a enseigné à diriger nos désirs vers le ciel par ces paroles : « Que votre règne arrive ; » en ajoutant : « Que votre volonté soit faite sur la terre comme au ciel, » il veut, avant de parvenir au ciel, que nous fassions de la terre un ciel anticipé en accomplissant ces paroles : « Que votre volonté soit faite sur la terre comme au ciel. »
La vertu n'est pas seulement le fruit de nos efforts, mais de la grâce d'en haut. Or, Notre-Seigneur prescrit de nouveau à chacun de nous de prier ici pour l'univers entier, car il n'a pas dit : « Que votre volonté soit faite en moi, » ou « soit faite en nous, » mais : « Qu'elle soit faite par toute la terre ; » que l'erreur en soit arrachée, que la vérité y soit plantée, que le mal en soit banni, que la vertu y soit ramenée et qu'ainsi il n'y ait plus de différence entre le ciel et la terre.
On doit joindre ces paroles : « Sur la terre comme au ciel » aux demandes précédentes : « Que votre nom soit sanctifié sur la terre comme dans le ciel ; que votre règne arrive sur la terre comme dans le ciel ; que votre volonté soit faite dans la terre comme dans le ciel. » Et voyez quelle sagesse dans les paroles du Sauveur ; il ne nous fait pas dire : « Père, sanctifiez en nous votre nom, que votre règne arrive pour nous, faites en nous votre volonté, » ou bien : « Sanctifions votre nom ; recevons votre royaume ; faisons votre volonté, » dans la crainte que l'accomplissement de ces commandements parût être l'oeuvre exclusive ou de Dieu ou de l'homme. Il s'exprime donc en général et sans déterminer personne, car de même que l'homme ne peut faire le bien sans le secours de Dieu, de même Dieu ne peut opérer le bien dans l'homme, si l'homme ne lui prête le concours de sa volonté.
Ou bien nous demandons d'une manière générale que le démon cesse de régner sur toute la surface de la terre, ou que Dieu règne dans chacun de nous et détruise le règne du péché dans notre corps mortel
Considérons quelle hardiesse étonnante et quelle pureté de conscience il faut avoir pour oser demander le royaume de Dieu, et ne pas craindre ses jugements.
Qu'ils rougissent ici de leur opinion, ceux qui prétendent que le péché fait tous les jours des ruines dans le ciel.
Ces paroles ne veulent pas dire que Dieu ne règne pas actuellement sur la terre et qu'il n'y ait pas toujours régné. Cette expression : « Qu'il arrive » signifie donc : « Qu'il soit manifesté aux hommes. » Or, personne qui puisse ignorer le royaume de Dieu, lorsque son Fils unique viendra non plus d'une manière spirituelle, mais visiblement pour juger les vivants et les morts ; c'est alors, comme le Seigneur l'enseigne, qu'aura lieu le jugement dernier, lorsque l'Évangile aura été prêché à toutes les nations. Cette demande se rattache à la sanctification du nom de Dieu.
Voulons-le, ne le voulons pas, le royaume de Dieu ne laissera pas d'arriver, mais nous nous excitons à le désirer, afin qu'il arrive pour nous et que nous puissions y régner un jour.
Par cette demande : « Que votre règne arrive, » que peuvent désirer ceux qui ont déjà reçu la grâce de la sainteté, si ce n'est la persévérance dans cette grâce que Dieu leur a faite ? Car le royaume de Dieu, dont l'avènement est certain pour ceux qui persévèrent jusqu'à la fin, ne viendra pour eux qu'à cette condition (Mt 10, 22 ; 24, 13).
Dans ce royaume de la vraie félicité, la vie heureuse aura toute sa perfection dans les saints, comme elle l'a maintenant dans les anges : aussi, après cette demande : « Que votre règne arrive, » vient celle-ci : « Que votre volonté soit faite sur la terre comme au ciel, » c'est-à-dire : « De même que les anges accomplissent cette volonté en jouissant de vous sans qu'aucun nuage d'erreur obscurcisse leur intelligence, sans qu'aucune misère fasse obstacle à leur bonheur, qu'elle s'accomplisse également dans les saints qui sont sur la terre et qui ont été, quant à leur corps, formés de la terre. On peut encore entendre ces paroles : « Que votre volonté soit faite » dans ce sens : Soyez obéi sur la terre comme dans le ciel, par les hommes comme par les anges, non pas que les anges agissent eux-mêmes sur la volonté de Dieu, mais parce qu'ils font ce qu'il veut et qu'ils agissent d'une manière conforme à sa volonté.
Ou bien : « Sur la terre comme au ciel, » c'est-à-dire dans les pécheurs comme dans les justes, ce qui revient à dire : « De même que les justes font votre volonté, que les pécheurs l'accomplissent également en se convertissant à vous, » ou bien « De manière qu'on rende à chacun ce qui lui est dû, ce qui aura lieu au dernier jugement. » Ou bien encore nous pouvons entendre par le ciel et la terre l'esprit et la chair, et alors dans ces paroles de l'Apôtre : « Je suis soumis à la loi de Dieu selon l'esprit » (Rm 7), nous verrons la volonté de Dieu accomplie en esprit. Dans ce sens, le merveilleux changement qui est promis aux justes nous est signifié par ces paroles : « Que votre volonté soit faite sur la terre comme au ciel ; » c'est-à-dire que le corps soit soumis à l'esprit comme l'esprit est soumis à Dieu. Ou bien enfin « sur la terre comme dans le ciel, » c'est-à-dire dans l'Église comme en Jésus-Christ, dans l'épouse qu'il s'est unie comme dans l'époux qui a fidèlement exécuté la volonté de son Père. En effet, le ciel et la terre sont une figure très juste de l'homme et de la femme, car la terre ne produit des fruits qu'autant qu'elle est fécondée par le ciel.
Nous avons ici contre les Pélagiens une preuve évidente que le commencement de la foi est un don de Dieu, puisque la sainte Église prie pour les infidèles, afin que Dieu leur donne le commencement de la foi. Puisque la volonté de Dieu est déjà faite dans les saints, en priant qu'elle se fasse de nouveau, que demandent-ils si ce n'est de persévérer dans la voie où ils sont entrés ?
La Glose
Après l'adoption des enfants, il est juste que nous demandions l'avènement du royaume qui est promis aux enfants. C'est l'objet de la demande suivante : « Que votre règne arrive. »
906. QUE [TON RÈGNE] VIENNE. Cette demande peut correspondre soit au don d’intelligence, qui purifie le cœur, soit [au don] de piété. QUE [TON RÈGNE] VIENNE. Selon Chrysostome et Augustin, le règne de Dieu, c’est la vie éternelle, et je crois que c’est là l’explication littérale. Nous demandons donc : QUE [TON RÈGNE] VIENNE, c’est-à-dire : «Fais-nous parvenir et participer à la vie éternelle», plus loin, 25, 34 : Venez, les bénis ; Lc 22, 39 : Et moi, je dispose pour vous [du royaume]. Ou bien d’une autre façon, toujours selon Augustin : QUE [TON RÈGNE] VIENNE, [c’est-à-dire] que le Christ a commencé à régner à partir du moment où il a racheté le monde, Jn [Mt 28, 18] : Le pouvoir m’a été donné. QUE VIENNE donc [TON RÈGNE], c’est-à-dire la consommation de ton règne. Et cela adviendra lorsqu’il placera ses ennemis sous ses pieds. Ainsi, QUE VIENNE, c’est-à-dire : «Seigneur, viens juger afin qu’apparaisse la gloire de ton règne», Lc 21, 28 : Lorsque ces choses commenceront, etc. Et les saints désirent la venue du Christ, parce qu’alors ils posséderont une gloire parfaite, 2 Tm 4, 8 : Non seulement pour moi, mais aussi pour eux. Mais, en sens contraire, il est dit [Am 5, 18] : Malheur à ceux qui désirent le jour du Seigneur, car, selon Jérôme, c’est le propre de la conscience tranquille de ne pas craindre un si grand juge. Ou bien QUE VIENNE, c’est-à-dire : «Que soit détruit le règne du péché, et toi, Seigneur, règne sur nous». En effet, autant nous servons la justice, autant Dieu règne ; autant [nous servons] le péché, autant le Diable [règne], Rm 6, 12 : Qu’il ne règne donc pas parmi vous ; 1 R[S] 8, 7 : Ils ne t’ont pas repoussé. Et il faut remarquer que ceux qui s’étaient montrés des fils en disant : NOTRE PÈRE, etc. pouvaient assez justement demander : QUE TON RÈGNE VIENNE. En effet, l’héritage revient aux fils ; mais ce règne se trouve dans les cieux, et tu ne peux y aller si tu ne deviens pas céleste.
907. C’est pourquoi [Jésus] ajoute ensuite : QUE TA VOLONTÉ SOIT FAITE, c’est-à-dire fais de nous des imitateurs des choses célestes, 1 Co 15, 49 : Comme nous avons porté. Et remarque qu’il ne dit pas : QUE TA VOLONTÉ SOIT FAITE au sens de : «Que Dieu fasse notre volonté», mais au sens de : «Que sa volonté s’accomplisse en nous, elle qui veut que tous les hommes soient sauvés», 1 Tm 2, 4 ; 1 Th 4, 3 ; Ps 142[143], 10 : Enseigne-moi à faire [ta volonté]. Par là est détruite l’erreur de Pélage qui disait que nous n’avions pas besoin du secours de Dieu. COMME AU CIEL : cela est expliqué de plusieurs façons par Augustin. Premièrement, de cette manière : COMME AU CIEL, c’est-à-dire comme les anges font au ciel ta volonté, que nous sur terre accomplissions ta volonté. Il est dit au sujet des anges, au Ps 102[103], 21 : Vous, ses serviteurs, qui faites, par quoi est détruite l’erreur d’Origène, qui affirmait que l’ange peut pécher. Ou bien autrement : QUE TA VOLONTÉ SOIT FAITE SUR LA TERRE COMME AU CIEL, c’est-à-dire dans l’Église comme dans le Christ. En effet, la terre est fécondée par le ciel. C’est pourquoi les Gentils disaient que les dieux du ciel étaient de sexe masculin, ceux de la terre, de sexe féminin. Jn 6, 38 : Je suis descendu du ciel. Ou bien par CIEUX sont signifiés les saints dont la vie est dans les cieux [Ph 3, 20]. Or, le rapport du ciel à la terre ressemble à celui des saints aux pécheurs, comme [s’il disait] : «Seigneur, convertis les pécheurs afin qu’ils fassent ta volonté.» Ou bien : QUE [TA VOLONTÉ] SOIT FAITE, etc. : en effet, comme le ciel se compare à la terre dans le monde, l’esprit se compare à la chair dans l’homme. L’esprit, pour ce qui relève de lui, fait la volonté de Dieu, mais la chair résiste, Rm 7, 23 : Je vois [une autre loi dans mes membres] ; Ps 50[51], 12 : [Crée en moi] un cœur pur. Toutes ces demandes sont en partie ébauchées, mais elles seront accomplies dans l’avenir. Mais Chrysostome met ceci, à savoir, COMME AU CIEL, en rapport avec tout ce qui précède. En conséquence, [il interprète] : QUE TON RÈGNE VIENNE, SUR LA TERRE COMME AU CIEL, et ainsi de suite. De même, selon Chrysostome, il faut remarquer que [le Seigneur] ne dit pas : «Sanctifions», ni «Sanctifie», mais il utilise un moyen terme. Il ne dit pas non plus : ENTRONS DANS LE ROYAUME, mais QUE TON RÈGNE [VIENNE]. [Le Seigneur] s’en est ainsi tenu à un moyen terme, et cela, parce que deux choses sont nécessaires pour notre salut : la grâce de Dieu et le libre arbitre. Ainsi, s’il avait dit : «Sanctifie», il n’aurait pas fait place au libre arbitre ; s’il [avait dit] : «Faisons», il aurait tout accordé au libre arbitre. Mais il a parlé en termes moyens, et ainsi : QUE TA VOLONTÉ SOIT FAITE, etc.
907. C’est pourquoi [Jésus] ajoute ensuite : QUE TA VOLONTÉ SOIT FAITE, c’est-à-dire fais de nous des imitateurs des choses célestes, 1 Co 15, 49 : Comme nous avons porté. Et remarque qu’il ne dit pas : QUE TA VOLONTÉ SOIT FAITE au sens de : «Que Dieu fasse notre volonté», mais au sens de : «Que sa volonté s’accomplisse en nous, elle qui veut que tous les hommes soient sauvés», 1 Tm 2, 4 ; 1 Th 4, 3 ; Ps 142[143], 10 : Enseigne-moi à faire [ta volonté]. Par là est détruite l’erreur de Pélage qui disait que nous n’avions pas besoin du secours de Dieu. COMME AU CIEL : cela est expliqué de plusieurs façons par Augustin. Premièrement, de cette manière : COMME AU CIEL, c’est-à-dire comme les anges font au ciel ta volonté, que nous sur terre accomplissions ta volonté. Il est dit au sujet des anges, au Ps 102[103], 21 : Vous, ses serviteurs, qui faites, par quoi est détruite l’erreur d’Origène, qui affirmait que l’ange peut pécher. Ou bien autrement : QUE TA VOLONTÉ SOIT FAITE SUR LA TERRE COMME AU CIEL, c’est-à-dire dans l’Église comme dans le Christ. En effet, la terre est fécondée par le ciel. C’est pourquoi les Gentils disaient que les dieux du ciel étaient de sexe masculin, ceux de la terre, de sexe féminin. Jn 6, 38 : Je suis descendu du ciel. Ou bien par CIEUX sont signifiés les saints dont la vie est dans les cieux [Ph 3, 20]. Or, le rapport du ciel à la terre ressemble à celui des saints aux pécheurs, comme [s’il disait] : «Seigneur, convertis les pécheurs afin qu’ils fassent ta volonté.» Ou bien : QUE [TA VOLONTÉ] SOIT FAITE, etc. : en effet, comme le ciel se compare à la terre dans le monde, l’esprit se compare à la chair dans l’homme. L’esprit, pour ce qui relève de lui, fait la volonté de Dieu, mais la chair résiste, Rm 7, 23 : Je vois [une autre loi dans mes membres] ; Ps 50[51], 12 : [Crée en moi] un cœur pur. Toutes ces demandes sont en partie ébauchées, mais elles seront accomplies dans l’avenir. Mais Chrysostome met ceci, à savoir, COMME AU CIEL, en rapport avec tout ce qui précède. En conséquence, [il interprète] : QUE TON RÈGNE VIENNE, SUR LA TERRE COMME AU CIEL, et ainsi de suite. De même, selon Chrysostome, il faut remarquer que [le Seigneur] ne dit pas : «Sanctifions», ni «Sanctifie», mais il utilise un moyen terme. Il ne dit pas non plus : ENTRONS DANS LE ROYAUME, mais QUE TON RÈGNE [VIENNE]. [Le Seigneur] s’en est ainsi tenu à un moyen terme, et cela, parce que deux choses sont nécessaires pour notre salut : la grâce de Dieu et le libre arbitre. Ainsi, s’il avait dit : «Sanctifie», il n’aurait pas fait place au libre arbitre ; s’il [avait dit] : «Faisons», il aurait tout accordé au libre arbitre. Mais il a parlé en termes moyens, et ainsi : QUE TA VOLONTÉ SOIT FAITE, etc.
C’est la seconde demande de la première partie. « Votre règne » ne désigne pas autre chose que le
« règne des cieux » annoncé par le Précurseur, 3, 2, et par Jésus-Christ, 4, 17 : le royaume messianique est en
effet le royaume de Dieu par excellence. Les Juifs en appelaient l’avènement, en récitant leur célèbre
Kaddisch. « Que votre règne arrive, disaient-ils, que la rédemption vienne bientôt ». Nous disons comme eux
« Qu’il arrive ! » non toutefois dans le même sens, puisqu’il a été fondé par Notre-Seigneur Jésus-Christ.
« Arrive », c’est-à-dire, puisse-t-il se développer, se perfectionner, embrasser toute la terre après avoir
triomphé de tous les obstacles qui s’opposent à son parfait établissement ! Tant qu’il restera un seul homme à
convertir au Christianisme, tant qu’il y aura de pauvres brebis errantes en dehors de la bergerie, ce vœu aura
sa raison d’être. « Le sens n’est donc pas que Dieu règne dans nos cœurs, ou que nous régnions avec les
bienheureux, mais que Dieu règne dans l’absolu, et sans adversaire », Maldonat. Il existe un lien très étroit
entre cette demande et la précédente ; le nom de Dieu sera d’autant plus glorifié que son royaume sera plus
étendu. - Voici maintenant la troisième demande : Que votre volonté soit faite... Dante l’exprime dans les
termes suivants, avec l’élégante et profonde simplicité qui ne le quitte jamais :
« Comme tes anges font le sacrifice de leur volonté en te chantant Hosanna, que les hommes fassent le sacrifice de la leur. Seigneur de tout, ce que tu veux dans ton monde ! » Purg. 11, 10.
« Comme », aussi constamment, aussi parfaitement, aussi joyeusement. Que la volonté des hommes se
conforme donc et se subordonne en tous points à celle de Dieu ! S’il en était ainsi, avec quelle promptitude le
royaume de notre Père céleste gagnerait toute la terre habitée ! Le traité rabbinique Sanhédrin nous
représente les anges disant à Dieu dans le ciel : « Maître du monde entier, le monde t'appartient ; réalise ce
que tu veux dans ce monde qui est tien ». C’est aussi ce que souhaite le chrétien dans l’Oraison dominicale. -
On voit, par ce court exposé, que la première partie du « Pater », bien qu’elle contienne trois phrases
parallèles, n’exprime au fond qu’un unique désir, celui de voir le royaume messianique se réaliser dans toute
sa perfection. Quoique chaque demande soit adressée en commun aux trois personnes de la Sainte Trinité, on
peut cependant approprier la première au Père, la seconde au Fils, la troisième au Saint-Esprit, car c’est le
nom du Père qui vient d’être directement invoqué, c’est par le Fils que le divin royaume a été établi sur la
terre, c’est à l’aide des secours de l’Esprit-Saint que nous pouvons réussir à faire toujours la volonté de Dieu.
« Votre nom soit sanctifié ; votre règne arrive ; votre volonté soit faite en la terre comme au ciel. C’est la perpétuelle continuation de l’exercice d’aimer. Sanctifier le nom de Dieu, c’est le glorifier en tout et ne respirer que sa gloire. Désirer son règne, c’est vouloir lui être soumis de tout son cœur, et vouloir qu’il règne sur nous, et non seulement sur nous, mais encore sur toutes les créatures. Son règne est dans le ciel, son règne éclatera sur toute la terre dans le dernier jugement. » (BOSSUET.)
Ou bien le juste s'exprime ainsi parce qu'il sait, au témoignage de sa conscience, que lorsque apparaîtra le royaume de Dieu il en sera rendu participant.
La demande chrétienne est centrée sur le désir et la recherche du Royaume qui vient, conformément à l’enseignement de Jésus (cf. Mt 6, 10. 33 ; Lc 11, 2. 13). Il y a une hiérarchie dans les demandes : d’abord le Royaume, ensuite ce qui est nécessaire pour l’accueillir et pour coopérer à sa venue. Cette coopération à la mission du Christ et de l’Esprit Saint, qui est maintenant celle de l’Église, est l’objet de la prière de la communauté apostolique (cf. Ac 6, 6 ; 13, 3). C’est la prière de Paul, l’Apôtre par excellence, qui nous révèle comment le souci divin de toutes les Églises doit animer la prière chrétienne (cf. Rm 10, 1 ; Ep 1, 16-23 ; Ph 1, 9-11 ; Col 1, 3-6 ; 4, 3-4. 12). Par la prière tout baptisé travaille à la Venue du Royaume.
Le ministère de Jésus est décrit dans le contexte de ses voyages dans son pays. L'horizon de sa mission avant la Pâque se concentre sur Israël; toutefois, il y a en Jésus un élément nouveau d'importance primordiale. La réalité eschatologique n'est pas renvoyée à une fin du monde éloignée, mais elle devient proche et commence à advenir. Le Royaume de Dieu est tout proche (cf. Mc 1, 15), on prie pour qu'il vienne (cf. Mt 6, 10), la foi le voit déjà à l'œuvre dans les signes, tels les miracles (cf. Mt 11, 4-5), les exorcismes (cf. Mt 12, 25-28), le choix des Douze (cf. Mc 3, 13-19), l'annonce de la Bonne Nouvelle aux pauvres (cf. Lc 4, 18). Dans les rencontres de Jésus avec les païens, il apparaît clairement que l'accès au Royaume advient par la foi et la conversion (cf. Mc 1, 15), et non du fait d'une simple appartenance ethnique.
L'espérance chrétienne nous soutient pour nous engager à fond dans la nouvelle évangélisation et dans la rnission universelle, et nous pousse à prier comme Jésus nous l'a enseigné: « Que ton Règne vienne, que ta Volonté soit faite sur la terre comme au ciel » (Mt 6, 10).