Matthieu 8, 17
pour que soit accomplie la parole prononcée par le prophète Isaïe : Il a pris nos souffrances, il a porté nos maladies.
pour que soit accomplie la parole prononcée par le prophète Isaïe : Il a pris nos souffrances, il a porté nos maladies.
Par les souffrances qu'il a endurées dans son corps (selon les oracles des prophètes), il a fait disparaître complètement les infirmités de la faiblesse humaine.
C'est surtout des péchés que le Prophète semble avoir voulu parler. Comment donc l'Évangéliste peut-il entendre ces paroles des maladies ? C'est qu'il a voulu les appliquer à un fait historique, ou bien nous faire comprendre que la plupart des maladies ont pour cause les péchés de notre âme, et que la mort elle-même n'a point d'autre origine.
La multitude de ceux qui croyaient en Jésus-Christ s'était augmentée, et malgré le temps qui les pressait, ils ne voulaient pas se séparer du Sauveur ; aussi, le soir étant venu, ils lui amènent plusieurs possédés du démon. « Sur le soir, dit l'Évangéliste, on lui présenta un grand nombre de possédés. »
Considérez quelle multitude de guérisons particulières les Évangélistes passent sous silence ; ils ne font pas mention de chaque personne guérie, mais d'un seul mot ils nous mettent sous les yeux cet océan inexprimable de miracles. Et afin que la grandeur de ces prodiges ne devienne un motif de ne point admettre qu'une si grande multitude et tant de maladies aient été guéries en un instant, l'Évangéliste vous présente le Prophète appuyant de son témoignage ces faits miraculeux. Et ainsi fut accompli ce que le prophète Isaïe avait prédit : « Il a pris lui-même nos infirmités. » (cf. Is 53, 4 ; 1 P 2, 24)
Remarquons que toutes ces guérisons s'opèrent non pas le matin, non pas au milieu du jour, mais vers le soir, lorsque le soleil est sur son coucher, et que le grain tombe dans la terre pour y mourir et produire des fruits en abondance.
Ces expressions : « Le soir étant venu, » indiquent assez qu'il s'agit ici du même jour, bien qu'il ne soit pas nécessaire de les entendre toujours du soir de la même journée.
Il s'est revêtu de l'infirmité de notre nature pour nous rendre forts et robustes, de faibles que nous étions.
Or Jésus-Christ, Fils de Dieu, auteur du salut des hommes, source et origine de toute miséricorde, appliquait à tous un remède divin. « Et il chassait les esprits par sa parole, et il guérit tous ceux qui étaient malades. » Il mettait en fuite les démons et les maladies d'un seul mot, pour montrer par ces prodiges de sa puissance qu'il était venu pour le salut du genre humain tout entier.
Ce n'est pas sans doute pour les garder, mais pour nous en délivrer, et il s'est chargé de nos maladies afin de porter lui-même en notre place ce qui était un fardeau écrasant pour notre faiblesse.
En effet, le coucher du soleil figure la passion et la mort de celui qui a dit : « Tant que je suis dans le monde, je suis la lumière du monde ; » de celui qui dans le temps de sa vie mortelle n'a enseigné qu'un très petit nombre de Juifs, mais qui après avoir détruit l'empire de la mort a promis les dons de la foi à toutes les nations répandues sur la face de la terre.
1061. Et parce qu’il paraissait étonnant que [Jésus] en guérît un si grand nombre, [Matthieu] apporte la confirmation qui se trouve en Is 53, 4 : Il a pris sur lui nos infirmités et il s’est chargé de nos maladies. Et bien que cela ne se trouve pas dans la suite du texte, exposons-le tel que cela se présente : IL A PRIS NOS INFIRMITÉS, c’est-à-dire qu’il les a effacées, de sorte que par les infirmités soient compris les péchés légers. Et IL A PORTÉ, c’est-à-dire qu’il a enlevé, NOS MALADIES, à savoir, les péchés plus importants. Ou bien puisqu’il est lui-même la puissance et la sagesse de Dieu, [il a enlevé] NOS INFIRMITÉS, à savoir, celles de la souffrance et de la mort. Ainsi, il a pris [notre] vulnérabilité afin d’enlever notre infirmité et notre maladie, etc., 1 P 2, 24 : Lui qui a porté nos péchés dans son corps, afin que, morts à nos péchés, nous vivions par la justice. Mais, puisque Isaïe avait parlé des péchés, on se demande pourquoi on parle [ici] des infirmités corporelles. La raison en est que souvent, par les péchés spirituels, sont causées des maladies corporelles.
S. Matthieu qui, écrivant pour des Juifs,
s’efforce de rattacher les événements de la vie du Sauveur aux prédictions messianiques de l’Ancien
Testament, cite en cet endroit un passage célèbre d’Isaïe; 53, 4, avec l’introduction qui lui est familière, afin
que s'accomplît. Ces guérisons multiples qu’il a signalés sont, à ses yeux, l’accomplissement de ce qu’avait
annoncé le Prophète lorsqu'il avait dit au sujet du Christ : « Il a pris sur lui nos langueurs, et a porté nos
souffrances » (trad. de S. Jérôme, Vulg.). . On voit que, contrairement à son usage, S. Matthieu fait cette
citation d’une manière assez littérale d’après l’hébreu. Mais n’a-t-il pas transformé le sens de la parole du
Prophète ? Celui-ci, décrivant les souffrances futures du Messie, en indiquait les heureux résultats pour
l’humanité : c’est en voyant d’avance nos péchés effacés, enlevés, par la « satisfaction vicaire » du Christ
(réparation des offenses faites à Dieu, par Dieu qui s'est fait homme), qu’il s’écriait : « Lui-même a porté nos
péchés... ». Et telle est bien l’interprétation donnée par S. Pierre à ce passage, Cf. 1 Petr. 2, 24 : comment
donc l’évangéliste peut-il l’appliquer aux maladies guéries miraculeusement par Jésus ? Nous ne
l’excuserons pas à la façon de Maldonat, en disant qu’il fait ici une simple accommodation : ce serait une
concession aussi dangereuse qu’inutile. Tout peut se concilier très aisément, sans violence comme sans
subtilité d’aucune sorte. Isaïe parle directement, il est vrai, de nos péchés, que Jésus-Christ a daigné expier
en souffrant pour nous ; mais l’effet n’est-il pas contenu dans la cause ? Nos maladies physiques ne
sont-elles pas la conséquence funeste de la grande maladie morale, le péché ? Prédire de quelqu’un qu’il peut enlever nos péchés, c’est donc prédire par là-même qu’il peut à plus forte raison enlever nos maladies. Nous
verrons, en plusieurs circonstances, Notre-Seigneur mettre en relief cette connexion indiscutable et guérir des
malades en leur disant : Vos péchés vous sont remis. Concluons donc que, si l’évangéliste ne prend pas tout à
fait les paroles d’Isaïe dans leur sens littéral, il les cite du moins dans un sens « déduit de la lettre par le
raisonnement », Van Steenkiste, h. l., sens parfaitement légitime et justifiable. - Il a pris, c’est-à-dire il a
saisi, enlevé. Cf. v. 40 ; Act. 3, 11. - Et s'est chargé, même signification. S. Hilaire fait à propos de ce
passage une réflexion profonde et délicate : « Absorbant par la passion de son corps les infirmités de la
faiblesse humaine », Comm. in h. l. - La scène du v. 16 a été traduite d’une façon grandiose par le peintre
Jouvenet ; il existe sur le même sujet une eau-forte saisissante et populaire de Rembrandt.
Toute la vie du Christ est mystère de Rédemption. La Rédemption nous vient avant tout par le sang de la Croix (cf. Ep 1, 7 ; Col 1, 13-14 ; 1 P 1, 18-19), mais ce mystère est à l’œuvre dans toute la vie du Christ : dans son Incarnation déjà, par laquelle, en se faisant pauvre, il nous enrichit par sa pauvreté (cf. 2 Co 8, 9) ; dans sa vie cachée qui, par sa soumission (cf. Lc 2, 51), répare notre insoumission ; dans sa parole qui purifie ses auditeurs (cf. Jn 15, 3) ; dans ses guérisons et ses exorcismes, par lesquels " il a pris nos infirmités et s’est chargé de nos maladies " (Mt 8, 17 ; cf. Is 53, 4) ; dans sa Résurrection, par laquelle il nous justifie (cf. Rm 4, 25).
Emu par tant de souffrances, le Christ non seulement se laisse toucher par les malades, mais il fait siennes leurs misères : " Il a pris nos infirmités et s’est chargé de nos maladies " (Mt 8, 17 ; cf. Is 53, 4). Il n’a pas guéri tous les malades. Ses guérisons étaient des signes de la venue du Royaume de Dieu. Ils annonçaient une guérison plus radicale : la victoire sur le péché et la mort par sa Pâque. Sur la Croix, le Christ a pris sur lui tout le poids du mal (cf. Is 53, 4-6) et a enlevé le " péché du monde " (Jn 1, 29), dont la maladie n’est qu’une conséquence. Par sa passion et sa mort sur la Croix, le Christ a donné un sens nouveau à la souffrance : elle peut désormais nous configurer à lui et nous unir à sa passion rédemptrice.
171. Regarder la blessure du cœur du Seigneur qui « a pris nos infirmités et s’est chargé de nos maladies » ( Mt 8, 17) nous aide à être plus attentifs aux souffrances et aux besoins des autres, nous rend assez forts pour participer à son œuvre de libération en tant qu’instruments de diffusion de son amour. Lorsque nous contemplons le don du Christ pour chacun, nous nous demandons inévitablement pourquoi nous ne sommes pas capables de donner notre vie pour les autres : « À ceci nous avons connu l’Amour : celui-là a donné sa vie pour nous. Et nous devons, nous aussi, donner notre vie pour nos frères » ( 1 Jn 3, 16).