Matthieu 8, 20
Mais Jésus lui déclara : « Les renards ont des terriers, les oiseaux du ciel ont des nids ; mais le Fils de l’homme n’a pas d’endroit où reposer la tête. »
Mais Jésus lui déclara : « Les renards ont des terriers, les oiseaux du ciel ont des nids ; mais le Fils de l’homme n’a pas d’endroit où reposer la tête. »
1067. Vient ensuite : LES LOUPS ONT DES TANIÈRES. Jérôme interprète littéralement que «Dieu répond à ce dont on a l’intention, comme Il le fait souvent». [Le scribe] voulait suivre, mais il voulait en tirer un gain, et le Seigneur allègue contre ceci sa [propre] pauvreté. C’est pourquoi il dit : LES LOUPS ONT DES TANIÈRES ET LES OISEAUX DU CIEL DES NIDS ; MAIS LE FILS DE L’HOMME N’A PAS OÙ POSER SA TÊTE, comme on trouve en 2 Co 8, 9 : Lui qui s’est fait pauvre alors qu’il était riche, etc. Selon Augustin, [le Seigneur] lui impute trois vices : le vice de fourberie, car il parlait avec douceur, mais son cœur était plein de venin, Ps 13[14], 3 ; de même, il lui a attribué de l’orgueil, lorsqu’il dit : LES OISEAUX DU CIEL, par lesquels est signifié l’orgueil. Ou bien LES OISEAUX : les démons, comme on le lit plus loin, 13, 4, où il est dit : Et les oiseaux vinrent, et ils les mangèrent. De même, [le Seigneur lui imputa] de l’infidélité, car il n’était pas dans la charité qui habite en nous par la foi.
Le Sauveur, par sa réponse, jette un peu d’eau
froide sur cette âme trop ardente. Sans accepter l’offre du Scribe et sans la refuser, il se contente de peindre
au vif la vie de renoncement destinée à tous ceux qui le suivent. - Les renards ont des tanières... Les êtres les
plus pauvres, ceux-là même qui vivent au jour le jour, sans provision pour le lendemain, ont pourtant des
abris assurés. - Nids ne traduit point parfaitement le grec, qui a une signification plus générale, Cf. 13, 32 et
parall. ; sans compter que les nids ne sont pas construits pour être l’habitation régulière des oiseaux. - Fils de
l'homme : nom important et célèbre que Jésus-Christ aime à s’attribuer lui-même dans l’Évangile. Les
apôtres ne le lui donnent jamais ; seul, le diacre S. Étienne en fait usage dans son discours apologétique, Act.
7, 56. Ézéchiel le porte aussi dans sa Prophétie, 2, 1. 3-8 ; 3, 1-3, etc. ; mais alors c’est simplement
l’expression que son interlocuteur céleste lui applique pour désigner la distance qui sépare leurs natures
réciproques : d’un côté c’est un ange, de l’autre un simple « fils de l’homme », c’est-à-dire un mortel. Pour
bien comprendre le sens de cette appellation quand c’est Jésus qui la prend, il faut recourir à une vision
extatique de Daniel, pendant laquelle ce Prophète eut le bonheur de contempler le futur Messie revêtu de la
forme humaine : « Je regardais en une vision nocturne et voici qu’avec les nuées du ciel venait quelqu’un qui
était comme un fils d’homme », Dan. 7, 13. « Fils de l’homme » signifie certainement Messie dans ce
passage : on s’en convaincra en lisant la suite de la narration du Prophète : c’est aussi en tant que Messie que
Jésus se dit « le Fils de l’homme » par antonomase. Divers textes évangéliques ne laissent pas le moindre
doute à ce sujet. Dans le récit de S. Matthieu, 26, 63 et ss., Caïphe somme Jésus au nom du Dieu vivant de
lui dire s’il est le Christ, Fils de Dieu. Que répond Notre-Seigneur ? « Tu l’as dit. Car je vous le dis,
désormais vous verrez le Fils de l’homme assis à la droite de la puissance de Dieu et venant sur les nuées du
ciel.... » ; Cf. Marc. 14, 61, 62 ; Luc. 22, 66. 69. Bien plus, tel était le sens que les Juifs eux-mêmes
attribuaient à cette expression ; Cf. Joan. 12, 34, et surtout Luc. 12, 70, où ils tirent de la réponse ci-dessus
mentionnée du Sauveur la conclusion suivante : « Tu es donc le Fils de Dieu ? », ce qui revient à dire : Vous
êtes donc le Messie ? Toutefois, comme on l’a répété avec beaucoup de raison à la suite de la plupart des
Pères, ce titre de « Fils de l’homme » est loin d’être une dénomination glorieuse. « Le mot homme désigne
souvent un homme d’une ville condition, e.g. Jud. 16, 7, 11 ; Ps. 82 (Vulg. 81), 7 ; et Ps. 49 (Vulg. 48), 3. On
oppose fils de l’homme à fils de l’homme (hommes ordinaires à hommes courageux) », Rosenmüller, Schol.
in h. l. « Parce que Dieu était aussi fils de Dieu, par une sorte d’antithèse, quant il parle de lui en tant
qu’homme, il s’appelle fils de l’homme », Maldonat. Toutes les autres interprétations sont inexactes, depuis
celle de Fritzsche qui réduit notre expression à un simple « Moi » ( « Moi, c’est moi le fils de parents
humains qui vous parle maintenant, cet homme que vous connaissez bien, c’est-à-dire : moi » : quelle
platitude !), jusqu’à celle qui lui fait désigner Jésus comme l’homme par excellence, l’homme idéal. « de
l'homme » doit se prendre d’une manière générale et ne représente pas spécialement Adam, comme l’a cru S.
Grégoire de Nazianze, Orat. 30, c. 21. - Où reposer sa tête. Rosenmüller fait sur ces paroles une réflexion
naïve quoique exacte : « Les hommes désirent des habitations surtout pour y trouver du repos. Mais celles
qui donnent du repos au corps servent d’abord à reposer la tête ». Elles expriment, suivant les uns, le
dénuement le plus absolu ; simplement, selon les autres, la vie agitée du missionnaire, incompatible avec le
confort dont on peut jouir sous son propre toit. La première interprétation, que patronnent les Pères, est
incontestablement la plus conforme à la réalité ; la seconde enlèverait à la pensée du Sauveur une grande
partie de sa force. S. Jérôme développe comme il suit le raisonnement de Jésus : « Pourquoi désires-tu me suivre pour les richesses et le luxe quand je suis d’une si grande pauvreté que je n’ai même pas un taudis,
que je n’ai pas de toit pour m’abriter ? » - Quel fut le résultat de cette réponse ? L’Évangéliste ne le dit pas,
mais il semble que la sévérité de ces paroles dut effrayer l’âme faible et téméraire à laquelle elles
s’adressaient ; telle est du moins l’impression que laisse ce récit.
Dans une telle variété de dons, tous ceux que Dieu appelle à la pratique des conseils évangéliques et qui en font profession, se vouent au Seigneur de façon spéciale en suivant le Christ chaste et pauvre (cf. Mt 8, 20 ; Lc 9, 58), qui par son obéissance jusqu’à la mort de la croix (cf. Ph 2, 8) a racheté les hommes et les a sanctifiés. Poussés dans cette voie par la charité que l’Esprit Saint a répandue dans leurs cœurs (cf. Rm 5, 5), ils vivent toujours davantage pour le Christ et pour son Corps qui est l’Église (cf. Col 1, 24). C’est pourquoi, plus fervente est leur union au Christ par cette donation d’eux-mêmes qui embrasse toute leur existence, plus riche devient la vie de l’Église et plus fécond son apostolat.
La pauvreté volontaire en vue de suivre le Christ, ce dont elle est un signe particulièrement mis en valeur de nos jours, doit être pratiquée soigneusement par les religieux et même, au besoin, s’exprimer sous des formes nouvelles. Par elle, on devient participant de la pauvreté du Christ qui s’est fait pauvre à cause de nous, alors qu’il était riche, afin de nous enrichir par son dépouillement (cf. 2 Co 8, 9 ; Mt 8, 20).
" L’amour de l’Église pour les pauvres ... fait partie de sa tradition constante " (CA 57). Il s’inspiré de l’Evangile des béatitudes (cf. Lc 6, 20-22), de la pauvreté de Jésus (cf. Mt 8, 20) et de son attention aux pauvres (cf. Mc 12, 41-44). L’amour des pauvres est même un des motifs du devoir de travailler, afin de " pouvoir faire le bien en secourant les nécessiteux " (Ep 4, 28). Il ne s’étend pas seulement à la pauvreté matérielle, mais aussi aux nombreuses formes de pauvreté culturelle et religieuse (cf. CA 57).