Jean 11, 52

et ce n’était pas seulement pour la nation, c’était afin de rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés.

et ce n’était pas seulement pour la nation, c’était afin de rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés.
Louis-Claude Fillion
Cette affreuse parole de Caïphe, S. Jean « la voit tout éclairée d’un rayon prophétique », Bougaud, Jésus-Christ, 3e édit., p. 485. Proférée par le grand-prêtre, elle lui semble être « un de ces oracles involontaires que l’Esprit Saint a arrachés plus d’une fois aux méchants ». - Il ne dit pas cela de lui-même : c'est-à-dire en tant qu’homme ordinaire. Ce n’étaient pas les paroles de Caïphe, c’étaient les paroles du Pontife suprême, du représentant officiel, quoique indigne, de Jéhova sur la terre. - Étant grand prêtre… ; l’idée principale est dans cette réflexion de l’écrivain sacré. - Il prophétisa : doit se prendre dans la signification la plus stricte : Caïphe parla, quoique sans en avoir conscience, en vertu d’une véritable inspiration divine. Cf. Corluy, Comment. in Evang. S. Joan, 2è édit. p. 299 ; Patrizi, De interpretat. Scripturae sacrae, lib. 1, 4, 89. Anciennement, les grands prêtres juifs avaient le privilège de rendre des oracles en consultant Dieu par l’Urim et le Thummim (Cf. Ex. 28, 30 ; Num. 28, 19 ; 1 Reg. 28, 6. Le Seigneur fit revivre en quelque sorte pour Caïphe ce merveilleux pouvoir. Comparez Philon, De Creat. princ., 8, 11, où il est dit que tout vrai prêtre est un prophète. - Jésus devait mourir pour la nation (ἔθνος, expression générale, mais désignant le peuple juif). Tel avait été, au fond, le sens du discours de Caïphe : seulement, le grand-prêtre était demeuré à la surface de l’idée ; l’Esprit prophétique avait vu bien au-delà, et S. Jean exprime en son nom la signification complète. - Et non-seulement pour la nation (encore ἔθνος). Le mot λαος cesse d’être employé, les Juifs, ne méritant pas d’être la nation choisie, ou toute faveur de ce genre devant désormais disparaître. Le narrateur se reprend et se corrige pour ainsi dire : ce n’est pas seulement Israël qui bénéficiera de la mort de Jésus, mais le monde tout entier. - Mais aussi pour rassembler … les enfants de Dieu. Beau nom donné aux païens par anticipation. Ils sont les fils de Dieu en puissance, jusqu’à ce qu’ils le deviennent en réalité. - Qui étaient dispersés est un trait pittoresque. Les gentils étaient en effet disséminés à travers toute la surface du globe. Toutefois, le bon Pasteur saura bien les ramener à un seul et même bercail : pour rassembler en un seul corps (10, 16. Cf. 17, 21). Voyez plus bas, 18, 51, une allusion à cette importante parole de Caïphe.
Fulcran Vigouroux
Les enfants de Dieu : l’Evangéliste appelle ainsi les Gentils par anticipation.
Concile œcuménique
À faire partie du Peuple de Dieu, tous les hommes sont appelés. C’est pourquoi ce peuple, demeurant uni et unique, est destiné à se dilater aux dimensions de l’univers entier et à toute la suite des siècles pour que s’accomplisse ce que s’est proposé la volonté de Dieu créant à l’origine la nature humaine dans l’unité, et décidant de rassembler enfin dans l’unité ses fils dispersés (cf. Jn 11, 52). C’est dans ce but que Dieu envoya son Fils dont il fit l’héritier de l’univers (cf. He 1, 2), pour être à l’égard de tous Maître, Roi et Prêtre, chef du peuple nouveau et universel des fils de Dieu. C’est pour cela enfin que Dieu envoya l’Esprit de son Fils, l’Esprit souverain et vivifant, qui est, pour l’Église entière, pour tous et chacun des croyants, le principe de leur rassemblement et de leur unité dans la doctrine des Apôtres, et la communion fraternelle, dans la fraction du pain et les prières (cf. Ac 2, 42 grec).

Ce dessein découle de « l’amour dans sa source », autrement dit de la charité de Dieu le Père qui, étant le principe sans principe, de qui le Fils est engendré, de qui le Saint- Esprit procède par le Fils, nous a créés librement dans sa surabondante bonté et miséricorde, et nous a de plus appelés gracieusement à partager avec lui sa vie et sa gloire ; qui a répandu sur nous sans compter sa miséricorde et ne cesse de la répandre, en sorte que lui, qui est le créateur de toutes choses, devienne enfin « tout en tous » (1 Co 15, 28) en procurant à la fois sa gloire et notre bonheur. Il a plu à Dieu d’appeler les hommes à participer à sa vie, non pas seulement de façon individuelle sans aucun lien les uns avec les autres, mais de les constituer en un peuple dans lequel ses enfants, qui étaient dispersés, seraient rassemblés dans l’unité (cf. Jn 11, 52).
Catéchisme de l'Église catholique
L’alliance avec Noé est en vigueur tant que dure le temps des nations (cf. Lc 21, 24), jusqu’à la proclamation universelle de l’Évangile. La Bible vénère quelques grandes figures des " nations ", tels qu’ " Abel le juste ", le roi-prêtre Melchisédech (cf. Gn 14, 18), figure du Christ (cf. He 7, 3) ou les justes " Noé, Daniel et Job " (Ez 14, 14). Ainsi, l’Écriture exprime quelle hauteur de sainteté peuvent atteindre ceux qui vivent selon l’alliance de Noé dans l’attente que le Christ " rassemble dans l’unité tous les enfants de Dieu dispersés " (Jn 11, 52)

Les baptisés ne peuvent prier " notre " Père sans porter auprès de Lui tous ceux pour qui il a donné son Fils bien-aimé. L’amour de Dieu est sans frontière, notre prière doit l’être aussi (cf. NA 5). Prier " notre " Père nous ouvre aux dimensions de Son amour manifesté dans le Christ : prier avec et pour tous les hommes qui ne Le connaissent pas encore, afin qu’ils soient " rassemblés dans l’unité " (Jn 11, 52). Ce souci divin de tous les hommes et de toute la création a animé tous les grands priants : il doit dilater notre prière en largeur d’amour lorsque nous osons dire " notre " Père.

Le peuple issu d’Abraham sera le dépositaire de la promesse faite aux patriarches, le peuple de l’élection (cf. Rm 11, 28), appelé à préparer le rassemblement, un jour, de tous les enfants de Dieu dans l’unité de l’Église (cf. Jn 11, 52 ; 10, 16) ; il sera la racine sur laquelle seront greffés les païens devenus croyants (cf. Rm 11, 17-18. 24).

Contre toute espérance humaine, Dieu promet à Abraham une descendance, comme fruit de la foi et de la puissance de l’Esprit Saint (cf. Gn 18, 1-15 ; Lc 1, 26-38. 54-55 ; Jn 1, 12-13 ; Rm 4, 16-21). En elle seront bénies toutes les nations de la terre (cf. Gn 12, 3). Cette descendance sera le Christ (cf. Ga 3, 16) en qui l’effusion de l’Esprit Saint fera " l’unité des enfants de Dieu dispersés " (cf. Jn 11, 52). En s’engageant par serment (cf. Lc 1, 73), Dieu s’engage déjà au don de son Fils Bien-aimé (cf. Gn 22, 17-19 ; Rm 8, 32 ; Jn 3, 16) et au don de " l’Esprit de la Promesse (...) qui (...) prépare la rédemption du Peuple que Dieu s’est acquis " (Ep 1, 13-14 ; cf. Ga 3, 14).
Pape Saint Jean-Paul II
La spiritualité missionnaire est caractérisée également par la charité apostolique, celle du Christ venu « afin de rassembler dans l'unité les enfants de Dieu dispersés » (Jn 11, 52), du Bon Pasteur qui connaît ses brebis, qui les cherche et qui offre sa vie pour elles (Jn 10). Celui qui a l'esprit missionnaire éprouve le même amour que le Christ pour les âmes et aime l'Eglise comme le Christ.

Et, au sujet de l'universalité, le Concile lui-même s'est exprimé notamment en ces termes: « A faire partie du Peuple de Dieu, tous les hommes sont appelés. C'est pourquoi ce Peuple, demeurant un et unique, est destiné à se dilater aux dimensions de l'univers entier et à toute la suite des siècles pour que s'accomplisse ce que s'est proposé la volonté de Dieu créant à l'origine la nature humaine dans l'unité, et décidant de rassembler enfin dans l'unité ses fils dispersés (cf. Jn 11, 52).... L'Eglise ou Peuple de Dieu par qui ce royaume prend corps ne retire rien aux richesses temporelles de quelque peuple que ce soit, au contraire, elle sert et assume toutes les richesses, les ressources et les formes de vie des peuples en ce qu'elles ont de bon, elle les purifie, elle les renforce, elle les élève... Ce caractère d'universalité qui brille sur le Peuple de Dieu est un don du Seigneur lui-même... En vertu de cette catholicité, chacune des parties apporte aux autres et à l'Eglise tout entière le bénéfice de ses propres dons, en sorte que le tout et chacune des parties s'accroissent par un échange mutuel universel et par un effort commun vers une plénitude dans l'unité ».