Jean 14, 9
Jésus lui répond : « Il y a si longtemps que je suis avec vous, et tu ne me connais pas, Philippe ! Celui qui m’a vu a vu le Père. Comment peux-tu dire : “Montre-nous le Père” ?
Jésus lui répond : « Il y a si longtemps que je suis avec vous, et tu ne me connais pas, Philippe ! Celui qui m’a vu a vu le Père. Comment peux-tu dire : “Montre-nous le Père” ?
Non ! « ce n'est pas a côté de Jésus qu'il faut désirer voir le Père, mais en Jésus ». Le
Camus, l. c., p. 447. - La réponse du Sauveur commence par un reproche bien légitime, affectueusement
exprimé : Il y a si longtemps...! plus de trois années d'après la chronologie qui semble la meilleure. Et, en
outre, dans des relations si intimes ! La réflexion portait d'autant plus juste, que S. Philippe avait été l'un des
premiers attachés à la personne de N.-S. Jésus-Christ. Cf. 1, 44. - Et vous ne me connaissez pas. Le grec
emploie le singulier, ce qui rend le reproche plus direct. Le parfait est très expressif : Tu n'es point parvenu à
me connaître ! - Philippe. Il y a tout ensemble de la solennité et beaucoup de bonté dans cette appellation. Le
texte grec la rattache à la phrase qui précède : « tu ne m’as pas connu, Philippe ? ». La preuve que Jésus
n'était pas vraiment connu de ses plus intimes disciples, c'est que ceux-ci lui demandaient de voir son Père,
comme si son Père et lui n'étaient pas, un seul et même Dieu. - Celui qui me voit, voit aussi le Père. Cf. 12,
45, où Notre-Seigneur avait déjà fait cette majestueuse déclaration, proclamant son unité d'essence avec Dieu
dans les termes les plus catégoriques. - Comment peux-tu dire...? Jésus est comme douloureusement étonné
qu'on puisse lui adresser une telle prière : n'est-elle pas incompréhensible après tout ce qu'il a déjà montré de
lui-même, de son Père ? Voyez de beaux développements dans Bossuet, Méditat. sur l’Évangile, 84ème jour.
Après avoir, à bien des reprises et de bien des manières, parlé par les prophètes, Dieu « en ces jours qui sont les derniers, nous a parlé par son Fils » (He 1, 1-2). Il a envoyé en effet son Fils, le Verbe éternel qui éclaire tous les hommes, pour qu’il demeurât parmi eux et leur fît connaître les profondeurs de Dieu (cf. Jn 1, 1-18). Jésus Christ donc, le Verbe fait chair, « homme envoyé aux hommes», « prononce les paroles de Dieu » (Jn 3, 34) et achève l’œuvre de salut que le Père lui a donnée à faire (cf. Jn 5, 36 ; 17, 4). C’est donc lui – le voir, c’est voir le Père (cf. Jn 14, 9) – qui, par toute sa présence et par la manifestation qu’il fait de lui-même par ses paroles et ses œuvres, par ses signes et ses miracles, et plus particulièrement par sa mort et sa résurrection glorieuse d’entre les morts, par l’envoi enfin de l’Esprit de vérité, achève en l’accomplissant la révélation, et la confirme encore en attestant divinement que Dieu lui-même est avec nous pour nous arracher aux ténèbres du péché et de la mort et nous ressusciter pour la vie éternelle.
Toute la vie du Christ est Révélation du Père : ses paroles et ses actes, ses silences et ses souffrances, sa manière d’être et de parler. Jésus peut dire : " Qui me voit, voit le Père " (Jn 14, 9), et le Père : " Celui-ci est mon Fils bien-aimé ; écoutez-le " (Lc 9, 35). Notre Seigneur s’étant fait homme pour accomplir la volonté du Père (cf. He 10, 5-7), les moindres traits de ses mystères nous manifestent " l’amour de Dieu pour nous " (1 Jn 4, 9).
Parce que dans l’union mystérieuse de l’Incarnation " la nature humaine a été assumée, non absorbée " (GS 22, § 2), l’Église a été amenée au cours des siècles à confesser la pleine réalité de l’âme humaine, avec ses opérations d’intelligence et de volonté, et du corps humain du Christ. Mais parallèlement, elle a eu à rappeler à chaque fois que la nature humaine du Christ appartient en propre à la personne divine du Fils de Dieu qui l’a assumée. Tout ce qu’il est et ce qu’il fait en elle relève " d’Un de la Trinité ". Le Fils de Dieu communique donc à son humanité son propre mode d’exister personnel dans la Trinité. Ainsi, dans son âme comme dans son corps, le Christ exprime humainement les mœurs divines de la Trinité (cf. Jn 14, 9-10) :
La vérité que Dieu a confiée à l'homme sur lui-même et sur sa vie s'inscrit donc dans le temps et dans l'histoire. Il est certain qu'elle a été prononcée une fois pour toutes dans le mystère de Jésus de Nazareth. La Constitution Dei Verbum le dit clairement: « Après avoir, à maintes reprises et sous bien des formes, parlé par les prophètes, Dieu, "en ces jours qui sont les derniers, nous a parlé par son Fils" (He 1, 1-2). Il a, en effet, envoyé son Fils, à savoir le Verbe éternel qui éclaire tous les hommes, pour qu'il habitât parmi les hommes et leur fît connaître les profondeurs de Dieu (cf. Jn 1, 1-18). Jésus Christ donc, Verbe fait chair, envoyé "comme homme vers les hommes", "prononce les paroles de Dieu" (Jn 3, 34) et achève l'œuvre de salut que le Père lui a donnée à faire (cf. Jn 5, 36; 17, 4). C'est pourquoi lui-même — qui le voit, voit aussi le Père (cf. Jn 14, 9) —, par toute sa présence et par toute la manifestation de lui-même, par ses paroles et ses œuvres, par ses signes et ses miracles, mais surtout par sa mort et sa glorieuse résurrection d'entre les morts, enfin par l'envoi de l'Esprit de vérité, achève la Révélation en l'accomplissant ».
En effet, personne n’a jamais vu Dieu tel qu’il est en lui-même. Cependant, Dieu n’est pas pour nous totalement invisible, il n’est pas resté pour nous simplement inaccessible. Dieu nous a aimés le premier, dit la Lettre de Jean qui vient d’être citée (cf. 4, 10) et cet amour de Dieu s’est manifesté parmi nous, il s’est rendu visible car Il «a envoyé son Fils unique dans le monde pour que nous vivions par lui» (1 Jn 4, 9). Dieu s’est rendu visible: en Jésus nous pouvons voir le Père (cf. Jn 14, 9). En fait, Dieu se rend visible de multiples manières. Dans l’histoire d’amour que la Bible nous raconte, Il vient à notre rencontre, Il cherche à nous conquérir – jusqu’à la dernière Cène, jusqu’au Cœur transpercé sur la croix, jusqu’aux apparitions du Ressuscité et aux grandes œuvres par lesquelles, à travers l’action des Apôtres, Il a guidé le chemin de l’Église naissante. Et de même, par la suite, dans l’histoire de l’Église, le Seigneur n’a jamais été absent: il vient toujours de nouveau à notre rencontre – par des hommes à travers lesquels il transparaît, ainsi que par sa Parole, dans les Sacrements, spécialement dans l’Eucharistie. Dans la liturgie de l’Église, dans sa prière, dans la communauté vivante des croyants, nous faisons l’expérience de l’amour de Dieu, nous percevons sa présence et nous apprenons aussi de cette façon à la reconnaître dans notre vie quotidienne. Le premier, il nous a aimés et il continue à nous aimer le premier; c’est pourquoi, nous aussi, nous pouvons répondre par l’amour. Dieu ne nous prescrit pas un sentiment que nous ne pouvons pas susciter en nous-mêmes. Il nous aime, il nous fait voir son amour et nous pouvons l’éprouver, et à partir de cet «amour premier de Dieu», en réponse, l’amour peut aussi jaillir en nous.