Jean 18, 31
Pilate leur dit : « Prenez-le vous-mêmes et jugez-le suivant votre loi. » Les Juifs lui dirent : « Nous n’avons pas le droit de mettre quelqu’un à mort. »
Pilate leur dit : « Prenez-le vous-mêmes et jugez-le suivant votre loi. » Les Juifs lui dirent : « Nous n’avons pas le droit de mettre quelqu’un à mort. »
Voyant leur
embarras, et piqué à son tour qu’ils le prennent de si haut avec lui, le « procurator » ne tombera pas dans
ce piège grossier. Voyant qu’ils ne veulent formuler aucune accusation précise, il réplique : Prenez-le
vous-mêmes, et jugez-le selon votre loi. L’ironie de ces paroles saute aux yeux. Juger N.-S. Jésus-Christ
d’après la loi juive ! mais ils venaient justement de le faire, et ils n’étaient alors au prétoire que pour
obtenir la confirmation de leur sentence. C’était leur dire : Votre résistance est vaine, car il vous faut ma
sanction pour agir, et je ne l’accorderai qu’à bon escient. Et pourtant les gouverneurs romains, Pilate
surtout, n’étaient rien moins que scrupuleux en pareille matière, malgré le respect extérieur pour la loi qui
a été signalée plus haut ; mais il est visible que Jésus avait déjà produit, par son seul aspect, une profonde
impression sur le « procurator », lequel mettra tout en œuvre, à partir de cet instant, ou pour apitoyer les
Juifs sur leur victime, ou pour rejeter sur d’autres (Hérode, le Sanhédrin) la responsabilité et l’odieux de la
condamnation à mort. Trois fois de suite, dans la narration de S. Jean, il insiste dans les termes les plus
catégoriques sur l’innocence de Jésus : 18, 39 ; 19, 4 et 6. - Mais les Juifs lui dirent… Confession bien
humiliante pour ces Juifs superbes. Ils avaient en effet perdu le « droit du glaive » depuis quelques années,
le jour où Archélaüs avait été déposé et la Judée transformée en province romaine. On ne leur avait laissé
que le droit illusoire de juger les causes qui touchaient à leur religion, d’excommunier et de fouetter les
coupables. S’ils décrétaient la peine de mort, et ils avouent ici d’une manière indirecte que tel était le cas
pour Jésus, la sentence ne devenait valable qu’après la ratification du gouverneur, et elle était mise à
exécution par les soldats romains. Tout cela est historiquement certain, indépendamment même de ce
passage ; aussi est-ce à tort qu’on a voulu restreindre le sens du verbe mettre à mort, et l’entendre soit du
crucifiement, soit de la peine capitale exécutée le jour de Pâque. Voyez les traités talmudiques Bab.
Sanhedr. f. 24, 2 ; Bab Aboda sara, f. 8, 2 ; Jos. Ant. 20, 9, 1 ; Keil, Archaeologie, p. 717 ; J ; Langen, Die
letzten Lebenstage Jesu, p. 251 et ss. La lapidation de S. Étienne (Act. 6, 9 - 7, 59) et la conjuration qui
avait pour but la mort de S. Paul (Act. 23, 12 et ss.) ne prouvent rien contre cette thèse, car ce furent en
réalité des assassinats accomplis sans aucune sentence préalable.
Les Romains avaient ôté aux Juifs le pouvoir de vie et de mort, et se l’étaient réservé.