Jean 5, 39
Vous scrutez les Écritures parce que vous pensez y trouver la vie éternelle ; or, ce sont les Écritures qui me rendent témoignage,
Vous scrutez les Écritures parce que vous pensez y trouver la vie éternelle ; or, ce sont les Écritures qui me rendent témoignage,
Troisième témoignage rendu à N.S.
Jésus-Christ, vv. 39-40. C'est celui de la Bible, et, vu le caractère religieux et la science des auditeurs de
Jésus, il est à coup sûr le plus frappant des trois, de sorte qu'il y a gradation ascendante dans cette série de
témoignages. - Vous scrutez : Le grec έρευνᾶτε (quelques manuscrits ont έραυνᾶτε) peut se traduire par
l'indicatif présent et par l'impératif, ce qui a occasionné de tout temps une petite divergence d'interprétation :
c'est ainsi que S. Cyrille d'Alexandrie était pour la première opinion, S. Jean Chrysostome pour la seconde.
Dans le premier cas, Jésus constaterait un fait ; dans le second, il donnerait un ordre. Les partisans de l'impératif allèguent le passage analogue, 7, 52 ; les autres, et à meilleur titre, s'appuient sur le contexte
immédiat, « et vous ne voulez pas » (v. 40), qui dépend de « scrutez ». Vous étudiez les Écritures, et
cependant, malgré leur témoignage si clair, vous refusez de croire en moi. D'ailleurs, il était très vrai que les
Juifs lisaient sans cesse et scrutaient minutieusement leur Bible ; ils la disséquaient même pour y trouver les
sens les plus divers et les plus étranges. Cette dissection laborieuse est fort bien exprimée par le verbe
ἐρευνᾶν, l'équivalent du דרש hébreu (darasch, d'où vient le substantif midrasch מדרש, qui désigne les
commentaires rabbiniques). Elle est également fort bien décrite, d'une part dans les livres de l'historien
Josèphe (De Bello Jud. 2, 8, 14; Antiq. 17, 2, 4), où nous entendons les Pharisiens se vanter (« considérés
comme les interprètes exacts des lois..., rattachant tout au destin et à Dieu »), d'autre part dans le « Dialogues
avec Tryphon » de S. Justin (112, 4), qui reproche aux Juifs de scruter les minuties et de négliger les choses
importantes (« pourquoi l'usage de tant de mesures de farine, de tant de mesures d'huile, dans les offrandes
prescrites par la loi »). - Parce que vous pensez... Dans cette croyance ils ne se trompaient pas, quoique leur
foi fût entachée de mille superstitions qui durent encore. - Avoir en elles la vie éternelle. Dieu l'avait dit par
la bouche de Moïse, Levit. 18, 5 : « Vous observerez mes décrets et mes ordonnances ; l’homme qui les
mettra en pratique y trouvera la vie ». Cf. Rom. 7, 12; 10, 5. Et les Rabbins l'ont aussi fréquemment répété :
« Quiconque s’approprie les paroles de la Loi s'approprie la vie éternelle ». En effet, la sainte Écriture est la
vie en tant qu'elle est un flambeau qui éclaire la foi et les mœurs : elle est surtout la vie parce qu'elle conduit
au Sauveur : aussi est-il vivement à regretter que les prêtres n'y viennent pas puiser, autant qu'aux anciens
jours, de quoi vivifier, soit eux-mêmes, soit les âmes qui leur sont confiées. - Ce sont celles aussi (avec
emphase)... Résultat de toute enquête biblique conduite sérieusement et de bonne foi : qui me rendent
témoignage (au présent, le témoignage demeurant perpétuel). N.-S. Jésus-Christ est le centre des saints
Livres, qui parlent de lui à tout instant, et en termes directs dans les prophéties messianiques, et au figuré par
des types nombreux. Voyez l'indication des principaux passages dans l'Évangile selon S. Luc, p. 408 ; dans
Bacuez et Vigouroux, Manuel biblique, t. 2, p. 471 et ss. de la 3e édit., et dans Edersheim, The Life and
Times of Jesus the Messiah, Londres 1883, t. 2, p. 707-738 (longue et curieuse liste des textes sacrés que les
Rabbins appliquaient au Messie). - Tout ce verset démontre jusqu'à l'évidence l'inspiration des écrits de
l'Ancien Testament, qui autrement ne formeraient qu'un livre humain, absolument incapable de rendre
témoignage au Christ de la part de Dieu.
Il faut s’aveugler volontairement, pour trouver ici un ordre donné à tous de lire les Ecritures. C’est évidemment un reproche fait aux pharisiens, de ce que lisant les Ecritures, et pensant y trouver la Vie éternelle, ils ne voulaient pas reconnaître Jésus-Christ, lui à qui toutes les Ecritures rendaient témoignage, et par qui seul ils pouvaient avoir cette véritable vie.
L’économie de l’Ancien Testament avait pour raison d’être majeure de préparer l’avènement du Christ Sauveur de tous, et de son Royaume messianique, d’annoncer prophétiquement cet avènement (cf. Lc 24, 44 ; Jn 5, 39 ; 1 P 1, 10) et de le signifier par diverses figures (cf. 1 Co 10, 11). Compte tenu de la situation humaine qui précède le salut instauré par le Christ, les livres de l’Ancien Testament permettent à tous de connaître qui est Dieu et qui est l’homme, non moins que la manière dont Dieu dans sa justice et sa miséricorde agit envers les hommes. Ces livres, bien qu’ils contiennent de l’imparfait et du caduc, sont pourtant les témoins d’une véritable pédagogie divine. C’est pourquoi les fidèles du Christ doivent les accepter avec vénération : en eux s’exprime un vif sens de Dieu ; en eux se trouvent de sublimes enseignements sur Dieu, une sagesse salutaire au sujet de la vie humaine, d’admirables trésors de prières ; en eux enfin se tient caché le mystère de notre salut.
Du commencement jusqu’à " la Plénitude du temps " (Ga 4, 4), la mission conjointe du Verbe et de l’Esprit du Père demeure cachée, mais elle est à l’œuvre. L’Esprit de Dieu y prépare le temps du Messie, et l’un et l’autre, sans être encore pleinement révélés, y sont déjà promis afin d’être attendus et accueillis lors de leur manifestation. C’est pourquoi lorsque l’Église lit l’Ancien Testament (cf. 2 Co 3, 14), elle y scrute (cf. Jn 5, 39. 46) ce que l’Esprit, " qui a parlé par les prophètes ", veut nous dire du Christ.
Dans le « Discours sur la Montagne », qui constitue lamagna carta de la morale évangélique, Jésus dit : « N'allez pas croire que je sois venu abolir la Loi et les Prophètes : je ne suis pas venu abolir, mais accomplir » (Mt 5, 17). Le Christ est la clé des Ecritures : « Vous scrutez les Ecritures, 1 ce sont elles qui me rendent témoignage » (Jn 5, 39) ; il est le centre de l'économie du salut, la récapitulation de l'Ancien et du Nouveau Testament, des promesses de la Loi et de leur accomplissement dans l'Evangile ; il est le lien vivant et éternel entre l'Ancienne et la Nouvelle Alliance. Commentant l'affirmation de Paul « la fin de la loi, c'est le Christ » (Rm 10, 4), saint Ambroise écrit : « Fin, non en tant qu'absence, mais en tant que plénitude de la Loi : elle s'accomplit dans le Christ (plenitudo legis in Christo est), du fait qu'il est venu non pour supprimer la Loi, mais pour la porter à son accomplissement. De la même manière qu'il y a un Ancien Testament, et que toute vérité cependant se trouve dans le Nouveau Testament, ainsi en est-il de la Loi : celle qui a été donnée par l'intermédiaire de Moïse est la figure de la vraie Loi. Donc, la Loi mosaïque est le prototype de la vérité »