Luc 1, 38
Marie dit alors : « Voici la servante du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole. » Alors l’ange la quitta.
Marie dit alors : « Voici la servante du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole. » Alors l’ange la quitta.
Chacun célébrera à sa manière les vertus qui éclatent dans ces paroles de la Vierge; l'un admirera son assurance et sa fermeté, l'autre la promptitude avec laquelle elle obéit, un autre qu'elle n'ait point été éblouie par les promesses magnifiques et sublimes du premier des archanges, un autre enfin qu'elle n'ait point porté trop loin la résistance; elle s'est tenue également en garde et contre la légèreté d'Eve et contre la désobéissance de Zacharie. Pour moi, sa profonde humilité ne me paraît pas moins digne d'admiration.
Contemplez Marie, mes bien-aimés, voyez comment Gabriel entra chez elle et quelle objection elle lui adressa: Comment cela va-t-il se faire? (Lc 1,34). Le serviteur de l'Esprit Saint lui fit cette réponse: "Cela est facile à Dieu; pour lui tout est simple." Considérez comment elle crut à la parole entendue et dit: Voici la servante du Seigneur (Lc 1,38).
Dès lors le Seigneur descendit d'une manière que lui seul connaît; il se mit en mouvement et vint comme il lui plaisait; il entra en elle sans qu'elle le sente, et elle l'accueillit sans éprouver aucune souffrance. Elle portait en elle, comme un enfant, celui dont le monde était rempli. Il descendit pour être le modèle qui renouvellerait l'antique image d'Adam.
Aussi, lorsqu'on t'annonce la naissance de Dieu, observe le silence. Que la parole de Gabriel te soit présente à l'esprit, car il n'y a rien d'impossible à cette glorieuse Majesté qui s'est abaissée pour nous et qui est née de notre humanité.
En ce jour, Marie est devenue pour nous le ciel qui porte Dieu, car la Divinité sublime est descendue et a établi en elle sa demeure. En elle, Dieu s'est fait petit - mais sans amoindrir sa nature - pour nous faire grandir. En elle, il nous a tissé un habit avec lequel il nous sauverait. En elle se sont accomplies toutes les paroles des prophètes et des justes. D'elle s'est levée la lumière qui a chassé les ténèbres du paganisme.
Nombreux sont les titres de Marie, et il convient que je les rapporte. Elle est le palais dans lequel a habité le puissant Roi des rois. Et il ne l'a pas quittée comme il était venu, car c'est d'elle qu'il a pris chair et qu'il est né.
Elle est aussi le nouveau ciel dans lequel a habité le Roi des rois. En elle s'est levé le Christ et d'elle il est sorti pour entrer dans la création, formé et façonné à son image.
Elle est le cep de vigne qui a porté la grappe. Elle a donné un fruit supérieur à la nature; et lui, bien que différent d'elle par sa nature, a revêtu sa couleur et est né d'elle.
Elle est la source de laquelle ont jailli les eaux vives pour les assoiffés, et ceux qui ont goûté de sa boisson portent des fruits au centuple.
Dès lors le Seigneur descendit d'une manière que lui seul connaît; il se mit en mouvement et vint comme il lui plaisait; il entra en elle sans qu'elle le sente, et elle l'accueillit sans éprouver aucune souffrance. Elle portait en elle, comme un enfant, celui dont le monde était rempli. Il descendit pour être le modèle qui renouvellerait l'antique image d'Adam.
Aussi, lorsqu'on t'annonce la naissance de Dieu, observe le silence. Que la parole de Gabriel te soit présente à l'esprit, car il n'y a rien d'impossible à cette glorieuse Majesté qui s'est abaissée pour nous et qui est née de notre humanité.
En ce jour, Marie est devenue pour nous le ciel qui porte Dieu, car la Divinité sublime est descendue et a établi en elle sa demeure. En elle, Dieu s'est fait petit - mais sans amoindrir sa nature - pour nous faire grandir. En elle, il nous a tissé un habit avec lequel il nous sauverait. En elle se sont accomplies toutes les paroles des prophètes et des justes. D'elle s'est levée la lumière qui a chassé les ténèbres du paganisme.
Nombreux sont les titres de Marie, et il convient que je les rapporte. Elle est le palais dans lequel a habité le puissant Roi des rois. Et il ne l'a pas quittée comme il était venu, car c'est d'elle qu'il a pris chair et qu'il est né.
Elle est aussi le nouveau ciel dans lequel a habité le Roi des rois. En elle s'est levé le Christ et d'elle il est sorti pour entrer dans la création, formé et façonné à son image.
Elle est le cep de vigne qui a porté la grappe. Elle a donné un fruit supérieur à la nature; et lui, bien que différent d'elle par sa nature, a revêtu sa couleur et est né d'elle.
Elle est la source de laquelle ont jailli les eaux vives pour les assoiffés, et ceux qui ont goûté de sa boisson portent des fruits au centuple.
Vous me demanderez peut-être: Comment le Christ descend-il de David? Marie est évidemment de la famille d'Aaron, puisqu'au dire de l'ange, elle est la cousine d'Elisabeth il faut voir ici l'effet d'un dessein providentiel de Dieu, qui voulait unir le sang royal à la race sacerdotale, afin que Jésus-Christ, qui est à la fois prêtre et roi, eût aussi pour ancêtres, selon la chair, les prêtres et les rois. Nous lisons aussi dans l'Ex qu'Aaron a pris, dans la tribu de Juda, une épouse du nom d'Elisabeth, fille d'Aminadab. Et voyez combien est admirable la conduite providentielle de l'Esprit de Dieu, en permettant que l'épouse de Zacharie s'appelât aussi Elizabeth, pour nous rappeler ainsi l'épouse d'Aaron qui portait également ce nom d'Elisabeth.
Voyez l'humilité de la Vierge, voyez sa religion: «Alors Marie lui dit: Voici la servante du Seigneur». Elle se proclame la servante du Seigneur, elle qui est choisie pour être sa mère; elle ne conçoit aucun orgueil d'une promesse aussi inespérée; elle devait enfanter celui qui est doux, humble par excellence, elle devait elle-même donner l'exemple de l'humilité. En se proclamant d'ailleurs la servante du Seigneur, elle ne s'attribue d'autre part dans cette grâce si extraordinaire, que de faire ce qui lui était ordonné; c'est pour cela qu'elle ajoute: «Qu'il me soit fait selon votre parole»; vous avez vu son obéissance, vous voyez la disposition de son coeur: «Voici la servante du Seigneur»; c'est la préparation à remplir son devoir: «Qu'il me soit fait selon votre parole», c'est l'expression de son désir.
Le langage que l'ange avait tenu jusqu'alors à Marie était au-dessus de son intelligence; il descend donc à des choses plus accessibles, et cherche à la persuader par des faits extérieurs et sensibles: «Et voici qu'Elisabeth, votre cousine». Remarquez l'à propos et la convenance de ces paroles. Gabriel ne rappelle pas à Marie les exemples de Sara, ou de Rébecca, ou de Rachel, ils étaient trop anciens; il lui cite un fait tout récent, pour produire en elle une conviction assurée, Dans ce même dessein il fait ressortir et l'âge et l'impuissance de la nature: «Elle a conçu aussi elle-même un fils dans sa vieillesse». Il ajoute: «Et c'est ici le sixième mois», etc. Il ne lui a point appris dès le commencement la conception d'Elisabeth, mais après six mois écoulés, afin que les signes visibles de sa grossesse fussent une preuve de la vérité de ses paroles.
Il est le souverain Maître de la nature, il peut donc tout ce qu'il veut, lui qui fait et dispose toutes choses, et qui tient dans ses mains les rênes de la vie et de la mort.
Il en est qui tiennent ce langage: Si Dieu est tout-puissant, qu'il fasse que les choses qui ont existé n'aient pas existé. Ils ne voient pas que ce langage revient à dire Qu'il fasse que les choses qui sont vraies, par là même qu'elles sont vraies soient fausses. Dieu sans doute peut faire que ce qui existait n'existe plus, c'est ainsi que par un acte de sa puissance, celui qui a reçu l'existence en naissant, la perd en mourant. Mais qui pourra dire que Dieu ôte l'existence à ce qui ne l'a déjà plus? Car tout ce qui est passé a cessé d'exister; si dans ce qui est passé il y a encore quelques éléments d'existence, ces éléments existent réellement, et s'ils existent, comment sont-ils passés? Quand nous affirmons en vérité qu'une chose a existé, elle n'existe donc plus, elle existe dans notre pensée et non dans la chose elle-même qui a cessé d'être; or Dieu ne peut faire que cette affirmation soit fausse. Nous disons que Dieu est tout-puissant, mais non pas dans ce sens que nous pensions qu'il puisse mourir. Celui-là seul peut être appelé sans restriction tout-puissant, qui existe véritablement et de qui seul tout ce qui existe reçoit l'être et la vie.
Par un mystère vraiment ineffable, la même Vierge dut à une conception sainte et à un enfantement virginal d'être la servante du Seigneur, et sa mère selon la vérité, des deux natures.
Pour faire disparaître toute défiance dans l'esprit de la Vierge sur la vérité de son enfantement, l'ange lui cite l'exemple d'une femme stérile qui enfantera dans sa vieillesse, elle apprendra ainsi que tout est possible à Dieu, même ce qui paraît le plus contraire aux lois de la nature; car, ajoute-t-il: «Rien n'est impossible à Dieu».
Frères très chers, l'évangile qui est lu aujourd'hui met en valeur la naissance de notre salut. En effet, il nous raconte l'envoi par Dieu d'un ange du ciel chargé d'annoncer à la Vierge la naissance inouïe, dans la chair, du Fils de Dieu, par lequel nous pourrions rejeter notre vieillerie coupable, et être renouvelés au point d'être comptés parmi les fils de Dieu. Donc, pour que nous puissions obtenir les dons du salut promis, écoutons d'une oreille attentive le récit de son origine.
L'ange Gabriel, dit l'évangile, fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée, appelée Nazareth, à une jeune fille, une vierge, accordée en mariage à un homme de la maison de David, appelé Joseph; et le nom de la jeune fille était Marie (Lc 1,26-27).
Ce qui est dit de la maison de David ne concerne pas seulement Joseph, mais aussi Marie. Car la Loi prescrivait que chacun devait épouser une femme de sa tribu et de sa famille, au témoignage de l'Apôtre, qui écrit à Timothee: Souviens-toi de Jésus Christ, le descendant de David: il est ressuscité d'entre les morts, voilà mon évangile (2Tm 2,8). Le Seigneur est véritablement issu de la descendance de David parce que sa mère vierge a réellement pris naissance de la souche de David. L'ange entra chez elle et dit: Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu. Voici que tu vas concevoir et enfanter un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus. Il sera grand, il sera appelé Fils du Très-Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père (Lc 1,30-32).
Le trône de David désigne ici le pouvoir sur le peuple d'Israël, que David gouverna en son temps avec un zèle plein de foi, en obéissant aux ordres du Seigneur et en bénéficiant de son secours. Donc le Seigneur a donné à notre Rédempteur le trône de David son père, quand il décida de le faire s'incarner dans la race de David. Ce peuple, que David dirigea par son pouvoir temporel, le Christ va l'entraîner par une grâce spirituelle vers le royaume éternel dont l'Apôtre dit: Il nous a arrachés au pouvoir des ténèbres, il nous a fait entr er dans le royaume de son Fils bien-aimé (Col 1,13).
Il régnera pour toujours sur la maison de Jacob (Lc 1,33). La maison de Jacob désigne l'Église universelle qui, par la foi et le témoignage rendus au Christ, se rattache à la destinée des Patriarches, soit chez ceux qui ont tiré leur origine charnelle de leur souche, soit chez ceux qui, nés charnellement d'une autre nation, sont renés dans le Christ, par le baptême dans l'Esprit.
C'est sur cette maison de Jacob qu'il régnera éternellement: et son règne n'aura pas de fin (Lc 1,33). Oui, il règne sur elle dans la vie présente, lorsqu'il gouverne le coeur des élus où il habite, par leur foi et leur amour envers lui; et il les gouverne par sa continuelle protection, pour leur faire parvenir les dons de la rétribution céleste; il règne dans l'avenir, lorsque, une fois achevé l'état de l'exil temporel, il les introduit dans le séjour de la patrie céleste. Et là, ils se réjouissent de ce que sa présence visible leur rappelle continuellement qu'ils n'ont rien à faire d'autre que de chanter ses louanges.
L'ange Gabriel, dit l'évangile, fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée, appelée Nazareth, à une jeune fille, une vierge, accordée en mariage à un homme de la maison de David, appelé Joseph; et le nom de la jeune fille était Marie (Lc 1,26-27).
Ce qui est dit de la maison de David ne concerne pas seulement Joseph, mais aussi Marie. Car la Loi prescrivait que chacun devait épouser une femme de sa tribu et de sa famille, au témoignage de l'Apôtre, qui écrit à Timothee: Souviens-toi de Jésus Christ, le descendant de David: il est ressuscité d'entre les morts, voilà mon évangile (2Tm 2,8). Le Seigneur est véritablement issu de la descendance de David parce que sa mère vierge a réellement pris naissance de la souche de David. L'ange entra chez elle et dit: Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu. Voici que tu vas concevoir et enfanter un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus. Il sera grand, il sera appelé Fils du Très-Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père (Lc 1,30-32).
Le trône de David désigne ici le pouvoir sur le peuple d'Israël, que David gouverna en son temps avec un zèle plein de foi, en obéissant aux ordres du Seigneur et en bénéficiant de son secours. Donc le Seigneur a donné à notre Rédempteur le trône de David son père, quand il décida de le faire s'incarner dans la race de David. Ce peuple, que David dirigea par son pouvoir temporel, le Christ va l'entraîner par une grâce spirituelle vers le royaume éternel dont l'Apôtre dit: Il nous a arrachés au pouvoir des ténèbres, il nous a fait entr er dans le royaume de son Fils bien-aimé (Col 1,13).
Il régnera pour toujours sur la maison de Jacob (Lc 1,33). La maison de Jacob désigne l'Église universelle qui, par la foi et le témoignage rendus au Christ, se rattache à la destinée des Patriarches, soit chez ceux qui ont tiré leur origine charnelle de leur souche, soit chez ceux qui, nés charnellement d'une autre nation, sont renés dans le Christ, par le baptême dans l'Esprit.
C'est sur cette maison de Jacob qu'il régnera éternellement: et son règne n'aura pas de fin (Lc 1,33). Oui, il règne sur elle dans la vie présente, lorsqu'il gouverne le coeur des élus où il habite, par leur foi et leur amour envers lui; et il les gouverne par sa continuelle protection, pour leur faire parvenir les dons de la rétribution céleste; il règne dans l'avenir, lorsque, une fois achevé l'état de l'exil temporel, il les introduit dans le séjour de la patrie céleste. Et là, ils se réjouissent de ce que sa présence visible leur rappelle continuellement qu'ils n'ont rien à faire d'autre que de chanter ses louanges.
Puisqu'il fallait que l'homme fût divinisé, et puisqu'une telle oeuvre dépasse les capacités de la nature, le début devait être du même ordre. Aussi le Christ est-il devenu homme pour diviniser l'homme en le faisant entrer dans une extraordinaire union avec lui.
Or, si ce second événement est merveilleux, combien plus merveilleux encore le premier! Si la montée aux cieux dépasse tout ce qu'on peut dire, comment la descente ne dépasserait-elle pas tout ce qu'on peut concevoir? Là, en effet, la créature mortelle est montée aux cieux; ici, Dieu en est descendu. Celui qui est sans limite a connu des limites. Celui qui a modelé la nature s'est uni à une nature dotée d'une âme. Celui qui ne comporte rien de tangible ni de matériel est né d'une vierge. <> Quel discours pourrait bien nous faire comprendre cette merveille?
Aujourd'hui donc, nous passons d'un pays étranger dans notre patrie, nous sommes rétablis dans l'Éden et ramenés dans Sion, d'où nous nous étions éloignés pour notre malheur.
Oh! la chose admirable! Alors que nous avions péché, puis subi la punition, nous avons à nouveau été jugés dignes des plus grands biens. Nous étions tombés du paradis, et nous avons trouvé la maison céleste. Nous avions glissé par terre, et nous possédons la demeure sublime qui nous était promise.
Et ceci est encore plus admirable: la bonne nouvelle ne devance pas la joie comme cela se passe d'habitude chez les hommes, mais, au moment où l'ange en fait l'annonce à la Vierge, le Dieu annoncé s'incarne et l'humanité assumée est divinisée.
Oh! la parole inouïe! Oh! la multitude des grâces et l'infinité des merveilles! Tout s'y trouve réuni: la voix de l'archange, l'incarnation du Seigneur, la divinisation du corps assumé, l'union de ceux qui étaient séparés, la libération de ceux qui étaient asservis, le retour des exilés dans leur patrie, la réconciliation des ennemis. Une seule et brève parole apporte la joyeuse salutation à la Mère de Dieu, en même temps que les biens innombrables qui en découleront et que l'esprit ne peut saisir.
Et voici l'essentiel: Dieu devient homme et l'homme devient Dieu, le mystère tenu caché est manifesté en ces temps qui sont les derniers. La prophétie prend fin et la rédemption attendue arrive. La terre se mêle au ciel, les choses sensibles se rapprochent des réalités spirituelles et les êtres séparés s'unissent admirablement. Dès sa conception, le Seigneur devient le Médiateur entre les deux natures, car il unit toute l'humanité à la divinité.
Or, si ce second événement est merveilleux, combien plus merveilleux encore le premier! Si la montée aux cieux dépasse tout ce qu'on peut dire, comment la descente ne dépasserait-elle pas tout ce qu'on peut concevoir? Là, en effet, la créature mortelle est montée aux cieux; ici, Dieu en est descendu. Celui qui est sans limite a connu des limites. Celui qui a modelé la nature s'est uni à une nature dotée d'une âme. Celui qui ne comporte rien de tangible ni de matériel est né d'une vierge. <> Quel discours pourrait bien nous faire comprendre cette merveille?
Aujourd'hui donc, nous passons d'un pays étranger dans notre patrie, nous sommes rétablis dans l'Éden et ramenés dans Sion, d'où nous nous étions éloignés pour notre malheur.
Oh! la chose admirable! Alors que nous avions péché, puis subi la punition, nous avons à nouveau été jugés dignes des plus grands biens. Nous étions tombés du paradis, et nous avons trouvé la maison céleste. Nous avions glissé par terre, et nous possédons la demeure sublime qui nous était promise.
Et ceci est encore plus admirable: la bonne nouvelle ne devance pas la joie comme cela se passe d'habitude chez les hommes, mais, au moment où l'ange en fait l'annonce à la Vierge, le Dieu annoncé s'incarne et l'humanité assumée est divinisée.
Oh! la parole inouïe! Oh! la multitude des grâces et l'infinité des merveilles! Tout s'y trouve réuni: la voix de l'archange, l'incarnation du Seigneur, la divinisation du corps assumé, l'union de ceux qui étaient séparés, la libération de ceux qui étaient asservis, le retour des exilés dans leur patrie, la réconciliation des ennemis. Une seule et brève parole apporte la joyeuse salutation à la Mère de Dieu, en même temps que les biens innombrables qui en découleront et que l'esprit ne peut saisir.
Et voici l'essentiel: Dieu devient homme et l'homme devient Dieu, le mystère tenu caché est manifesté en ces temps qui sont les derniers. La prophétie prend fin et la rédemption attendue arrive. La terre se mêle au ciel, les choses sensibles se rapprochent des réalités spirituelles et les êtres séparés s'unissent admirablement. Dès sa conception, le Seigneur devient le Médiateur entre les deux natures, car il unit toute l'humanité à la divinité.
Mes bien-aimés, réjouissons-nous dans le Seigneur. Quand bien même notre action de grâce ne serait pas aussi grande qu'elle devrait être, remercions notre Créateur, du moins autant que nous le pouvons, avec son aide. Ainsi, la grâce qu'il nous donne à profusion ne nous trouvera pas ingrats.
Nous fêtons aujourd'hui, en effet, l'admirable conception de Jésus par la Vierge. Nous célébrons le commencement de notre rédemption et annonçons le dessein de Dieu formé avec bonté et puissance. Car si le Seigneur de l'univers était venu à la recherche de ses serviteurs en fuite, pour les juger et non pour leur montrer sa bonté, il ne se serait jamais revêtu de cette fragile enveloppe de limon dans laquelle il a pu souffrir avec nous et pour nous.
Aux païens cela paraît, pour reprendre les paroles de saint Paul, de la faiblesse et de la folie (cf. 1Co 1,23-25), car ils se fondent sur les raisonnements de la vaine philosophie et jugent du Créateur d'après les lois de la création. Est-il plus grande oeuvre de puissance que de faire concevoir la Vierge, à rencontre des lois de la nature? Et, après avoir pris notre chair, de ramener une nature mortelle à la gloire de l'immortalité en passant par la mort? C'est pourquoi l'Apôtre dit: La faiblesse de Dieu est plus forte que l'homme (1Co 1,25)
Aujourd'hui le sein de la Vierge devient la porte du ciel par laquelle Dieu descend chez les hommes pour les faire monter au ciel. La très bienheureuse Vierge, sûre de n'avoir jamais connu d'homme, s'étonne d'entendre qu'elle va mettre au monde un fils. Cependant l'ange l'encourage et lui apprend ce qui lui a valu de voir s'accom plir en elle une chose naturellement impossible chez les autres femmes, et par quelle puissance cela se fera. Il dit: Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès du Seigneur (Lc 1,30). C'est comme s'il disait: "Ce que je t'annonce n'est pas de l'ordre de la nature, mais le don d'une grâce sans pareille." Aussi ajoute-t-il: L'Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre (Lc 1,35).
Elle seule a mérité d'être choisie pour que, de son corps immaculé, soit façonné le corps immaculé de celui qui, dès avant le temps, était prédestiné à être le Fils de Dieu dans la Puissance. Voilà pourquoi l'ange dit encore à la très bienheureuse Vierge: L'être saint qui naîtra de toi sera appelé Fils de Dieu (Lc 1,35). Vraiment, celui qui allait s'offrir pour la sanctification des pécheurs devait être saint.
Frères très chers, la conception virginale renferme en elle-même un grand et admirable mystère, car par elle l'acte de notre condamnation pour désobéissance est détruit, Dieu et l'homme sont réunis, et les deux, à savoir le Christ et l'Église, ne font qu'une seule chair.
La chambre de cette union fut, en quelque sorte, le sein virginal duquel, après neuf mois, selon la loi de la nature, le Christ sortit comme un époux sortant de sa chambre, en compagnie de son épouse, c'est-à-dire de la chair qui est la nôtre. Il dressa sa tente, c'est-à-dire la chair assumée, au soleil (Ps 18,5-6) puisqu'aussi bien il rendit visible à tous sa propre chair par laquelle il vaincrait l'Adversaire.
Frères bien-aimés, méditons assidûment ces mystères. Goûtons, à la mesure de l'immense désir de notre coeur, l'inestimable bonté de Dieu, en considérant tous les biens célestes qui nous sont promis. Ainsi, les réalités terrestres qui paraissent désirables à des coeurs aveugles et cupides ne nous empêcheront pas de remporter, au bout de notre course, le prix attaché à notre vocation divine. <> Conformons-nous à celui qui, en venant sur la terre, nous a proposé sa vie comme règle de l'existence chrétienne. Lors de sa première venue, il a voulu nous remodeler intérieurement à son image, et c'est encore lui qui, à sa seconde venue, transformera nos pauvres corps à l'image de son corps glorieux (Ph 3,21), Jésus Christ notre Seigneur, qui vit et règne pour les siècles des siècles. Amen.
Nous fêtons aujourd'hui, en effet, l'admirable conception de Jésus par la Vierge. Nous célébrons le commencement de notre rédemption et annonçons le dessein de Dieu formé avec bonté et puissance. Car si le Seigneur de l'univers était venu à la recherche de ses serviteurs en fuite, pour les juger et non pour leur montrer sa bonté, il ne se serait jamais revêtu de cette fragile enveloppe de limon dans laquelle il a pu souffrir avec nous et pour nous.
Aux païens cela paraît, pour reprendre les paroles de saint Paul, de la faiblesse et de la folie (cf. 1Co 1,23-25), car ils se fondent sur les raisonnements de la vaine philosophie et jugent du Créateur d'après les lois de la création. Est-il plus grande oeuvre de puissance que de faire concevoir la Vierge, à rencontre des lois de la nature? Et, après avoir pris notre chair, de ramener une nature mortelle à la gloire de l'immortalité en passant par la mort? C'est pourquoi l'Apôtre dit: La faiblesse de Dieu est plus forte que l'homme (1Co 1,25)
Aujourd'hui le sein de la Vierge devient la porte du ciel par laquelle Dieu descend chez les hommes pour les faire monter au ciel. La très bienheureuse Vierge, sûre de n'avoir jamais connu d'homme, s'étonne d'entendre qu'elle va mettre au monde un fils. Cependant l'ange l'encourage et lui apprend ce qui lui a valu de voir s'accom plir en elle une chose naturellement impossible chez les autres femmes, et par quelle puissance cela se fera. Il dit: Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès du Seigneur (Lc 1,30). C'est comme s'il disait: "Ce que je t'annonce n'est pas de l'ordre de la nature, mais le don d'une grâce sans pareille." Aussi ajoute-t-il: L'Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre (Lc 1,35).
Elle seule a mérité d'être choisie pour que, de son corps immaculé, soit façonné le corps immaculé de celui qui, dès avant le temps, était prédestiné à être le Fils de Dieu dans la Puissance. Voilà pourquoi l'ange dit encore à la très bienheureuse Vierge: L'être saint qui naîtra de toi sera appelé Fils de Dieu (Lc 1,35). Vraiment, celui qui allait s'offrir pour la sanctification des pécheurs devait être saint.
Frères très chers, la conception virginale renferme en elle-même un grand et admirable mystère, car par elle l'acte de notre condamnation pour désobéissance est détruit, Dieu et l'homme sont réunis, et les deux, à savoir le Christ et l'Église, ne font qu'une seule chair.
La chambre de cette union fut, en quelque sorte, le sein virginal duquel, après neuf mois, selon la loi de la nature, le Christ sortit comme un époux sortant de sa chambre, en compagnie de son épouse, c'est-à-dire de la chair qui est la nôtre. Il dressa sa tente, c'est-à-dire la chair assumée, au soleil (Ps 18,5-6) puisqu'aussi bien il rendit visible à tous sa propre chair par laquelle il vaincrait l'Adversaire.
Frères bien-aimés, méditons assidûment ces mystères. Goûtons, à la mesure de l'immense désir de notre coeur, l'inestimable bonté de Dieu, en considérant tous les biens célestes qui nous sont promis. Ainsi, les réalités terrestres qui paraissent désirables à des coeurs aveugles et cupides ne nous empêcheront pas de remporter, au bout de notre course, le prix attaché à notre vocation divine. <> Conformons-nous à celui qui, en venant sur la terre, nous a proposé sa vie comme règle de l'existence chrétienne. Lors de sa première venue, il a voulu nous remodeler intérieurement à son image, et c'est encore lui qui, à sa seconde venue, transformera nos pauvres corps à l'image de son corps glorieux (Ph 3,21), Jésus Christ notre Seigneur, qui vit et règne pour les siècles des siècles. Amen.
Ayant destiné d'avance Marie à devenir sa mère, le Verbe de Dieu l'a comblée d'une grâce particulière. Bien mieux, il vivait avec elle avant qu'elle ne le mette au monde. Il est né, en effet, comme dirait saint Paul, au temps qui lui était réservé, et son corps fut formé du sang de l'Immaculée. Or, depuis que celle-ci a commencé à exister dans le sein infécond de sa mère, il n'y eut aucun moment où il ne fut pas uni à elle. Il ne serait pas raisonnable d'avoir une autre opinion sur ce point. Car si Jean Baptiste, d'immortelle mémoire, fut rempli de l'Esprit Saint dès le sein de sa mère, comme nous en avons été instruits, il serait déraisonnable de ne pas croire la même chose de Marie, la toute pure.
C'est ce que l'ange Gabriel veut dire par ces mots: Le Seigneur est avec toi (Lc 1,28), et il nous le fait comprendre en opérant une certaine distinction dans le temps. En effet, lorsqu'à la demande de la Vierge sans souillure, il cherche à expliquer la manière dont elle concevra, il ne parle pas au présent, mais au futur. Il fait cette prophétie: L'Esprit très saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre (Lc 1,35). Mais lorsqu'il salue la Vierge, il est clair qu'il la loue pour ce qu'elle possède déjà. Il dit: Réjouis-toi, il l'appelle Comblée-de-grâce (Lc 1,28), et la proclame bénie entre toutes les femmes (cf. Lc 1,42), car elle est d'une bonté supérieure à toutes les autres femmes. Si donc il la nomme Comblée-de-grâce, ce n'est pas parce qu'elle le deviendra, mais parce qu'elle l'est - et elle l'est effectivement -, ajoutant encore qu'elle est bénie. C'est comme s'il disait: "O Vierge comblée-de-grâce, le Seigneur est avec toi ; parce qu'il vit dans ton âme, tu es bénie entre toutes les femmes. "
Voilà ce qu'il en est du présent. Ce qui vient ensuite concerne l'annonce d'événements futurs. Ceux-ci découlent évidemment du libre consentement donné par l'Immaculée, ce don précieux qu'elle fait à Dieu, si précieux qu'on ne peut lui en offrir de meilleur. Quoi donc, en effet, pourrait bien égaler l'offrande dont Dieu avait justement besoin pour en faire l'assise et la fondation du mystère du salut, par lequel l'univers a été recréé et reconstruit beaucoup plus beau qu'avant?
Il est clair aux yeux de tous qu'il en est ainsi. Au moment, en effet, où elle s'offrit de son plein gré et pria Dieu de tout son coeur pour que s'accomplisse sa volonté, elle dit: Voici la servante du Seigneur; que tout se passe pour moi selon ta parole (Lc 1,38). Alors, par la bienveillance du Père et la coopération de l'Esprit, le Verbe qui leur est consubstantiel et coéternel, qui avec eux est sans commencement, fut conçu dans le sein de la Vierge et assuma notre substance, mais sans la souillure. Il est venu, portant en lui la nature assumée, sans mélanger les deux natures, ni la nature créatrice ni la nature créée. Il est apparu comme un être unique, une personne, divinisant l'humanité assumée et, par elle, sauvant toute la masse humaine, comme par un ferment.
C'est ce que l'ange Gabriel veut dire par ces mots: Le Seigneur est avec toi (Lc 1,28), et il nous le fait comprendre en opérant une certaine distinction dans le temps. En effet, lorsqu'à la demande de la Vierge sans souillure, il cherche à expliquer la manière dont elle concevra, il ne parle pas au présent, mais au futur. Il fait cette prophétie: L'Esprit très saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre (Lc 1,35). Mais lorsqu'il salue la Vierge, il est clair qu'il la loue pour ce qu'elle possède déjà. Il dit: Réjouis-toi, il l'appelle Comblée-de-grâce (Lc 1,28), et la proclame bénie entre toutes les femmes (cf. Lc 1,42), car elle est d'une bonté supérieure à toutes les autres femmes. Si donc il la nomme Comblée-de-grâce, ce n'est pas parce qu'elle le deviendra, mais parce qu'elle l'est - et elle l'est effectivement -, ajoutant encore qu'elle est bénie. C'est comme s'il disait: "O Vierge comblée-de-grâce, le Seigneur est avec toi ; parce qu'il vit dans ton âme, tu es bénie entre toutes les femmes. "
Voilà ce qu'il en est du présent. Ce qui vient ensuite concerne l'annonce d'événements futurs. Ceux-ci découlent évidemment du libre consentement donné par l'Immaculée, ce don précieux qu'elle fait à Dieu, si précieux qu'on ne peut lui en offrir de meilleur. Quoi donc, en effet, pourrait bien égaler l'offrande dont Dieu avait justement besoin pour en faire l'assise et la fondation du mystère du salut, par lequel l'univers a été recréé et reconstruit beaucoup plus beau qu'avant?
Il est clair aux yeux de tous qu'il en est ainsi. Au moment, en effet, où elle s'offrit de son plein gré et pria Dieu de tout son coeur pour que s'accomplisse sa volonté, elle dit: Voici la servante du Seigneur; que tout se passe pour moi selon ta parole (Lc 1,38). Alors, par la bienveillance du Père et la coopération de l'Esprit, le Verbe qui leur est consubstantiel et coéternel, qui avec eux est sans commencement, fut conçu dans le sein de la Vierge et assuma notre substance, mais sans la souillure. Il est venu, portant en lui la nature assumée, sans mélanger les deux natures, ni la nature créatrice ni la nature créée. Il est apparu comme un être unique, une personne, divinisant l'humanité assumée et, par elle, sauvant toute la masse humaine, comme par un ferment.
L'Archange a accompli sa mission. Il se tait, et attend respectueusement
la réponse de Marie. Quel instant solennel ! « O bienheureuse Marie, le siècle captif au complet demande ton
consentement… Ne tarde pas, Vierge ! Donne vite une réponse à l’envoyé, et reçois le fils » S. Augustin,
Serm. 17, de tempore). Comp. S. Bern. Serm 4 sup. Missus, et Faber, Bethlehem, p. 74 et 75. Marie, sûre
désormais de conserver la virginité qui lui est si chère, n'a aucun motif de refuser ce que le Seigneur lui
demande. Aussi répond-elle, dans le double sentiment de son humilité et de son ardent désir : Voici la
servante du Seigneur ! Il y a là une foi sublime. Heureux de cet assentiment, l'ange s'éloigna, et aussitôt,
selon l'opinion commune des théologiens, eut lieu le mystère de l'Incarnation. Du sang le plus pur de Marie
l'Esprit Saint forma le corps de Jésus, et l'unit à une âme humaine qu'il créa au même instant : le Verbe prit
possession de ce corps et de cette âme, et le mystère fut accompli. « Et le Verbe s’est fait chair et il a habité
parmi nous. » - Après avoir adoré les anéantissements du Verbe, il faut admirer ici la beauté, la grandeur du
caractère de Marie. Comme elle est bien, autant du moins que cela était compatible avec une nature créée, à
la hauteur du rôle qui lui est offert ! Quel « type idéal de pureté, d'humilité, de candeur, de foi naïve et
forte ! » Bougaud, Jésus-Christ, 2è éd. p. 147. Vraiment, dit un autre écrivain, « Marie apparaît sur le vieux
tronc du judaïsme comme la fleur sur l'arbre, pour annoncer la saison de maturité ». Admirons aussi la
narration de S. Luc, si sobre, si exquise, si délicate, si simplement sublime. Ce n'est pas ainsi que
l'Annonciation est racontée dans les Évangiles apocryphes ! Voyez Thilo, Tischendorf et Brunet. Est-il
surprenant qu'un tel épisode, où l'humain et le divin s'associent de la manière la plus étonnante, ait été
fréquemment reproduit par l'art chrétien, à l'aide du pinceau ou du ciseau ? Voyez Rohault de Fleury,
l'Évangile, études iconograph. et archéolog. t. 1 p. 11 et ss. ; Grimouard de S. Laurent, Guide de l'art
chrétien, t. 4 pp. 101 et ss. Parmi ces nombreux chefs-d’œuvre nous préférons, à cause de leur grâce, de leur
piété et de leur pureté, les tableaux de Fra Angelico, de Lorenzo di Credi, de Baroccio, du Guide, de Nic.
Poussin, et les sculptures des cathédrales d'Amiens et de Reims. « La Anunciacion » a aussi inspiré un beau
cantique à Moratin.
Mais il plut au Père des miséricordes que l’Incarnation fût précédée par une acceptation de la part de cette Mère prédestinée, en sorte que, une femme ayant contribué à l’œuvre de mort, de même une femme contribuât aussi à la vie. Ce qui est vrai à un titre exceptionnel de la Mère de Jésus qui donna au monde la vie destinée à tout renouveler, et fut pourvue par Dieu de dons à la mesure d’une si grande tâche. Rien d’étonnant, par conséquent, à ce que l’usage se soit établi chez les saints Pères, d’appeler la Mère de Dieu la Toute Sainte, indemne de toute tache de péché, ayant été comme pétrie par l’Esprit Saint, et formée comme une nouvelle créature. Enrichie dès le premier instant de sa conception d’une sainteté éclatante absolument unique, la Vierge de Nazareth est saluée par l’ange de l’Annonciation, qui parle au nom de Dieu, comme « pleine de grâce» (cf. Lc 1, 28). Messager céleste auquel elle fait cette réponse : « Voici la servante du Seigneur, qu’il en soit de moi selon ta parole » (Lc 1, 38). Ainsi Marie, fille d’Adam, donnant à la Parole de Dieu son consentement, devint Mère de Jésus et, épousant à plein cœur, sans que nul péché ne la retienne, la volonté divine de salut, se livra elle-même intégralement, comme la servante du Seigneur, à la personne et à l’œuvre de son Fils, pour servir, dans sa dépendance et avec lui, par la grâce du Dieu tout-puissant, au mystère de la Rédemption. C’est donc à juste titre que les saints Pères considèrent Marie non pas simplement comme un instrument passif aux mains de Dieu, mais comme apportant au salut des hommes la coopération de sa libre foi et de son obéissance. En effet, comme dit saint Irénée, « par son obéissance elle est devenue, pour elle-même et pour tout le genre humain, cause du salut ». Aussi avec lui, un bon nombre d’anciens Pères disent volontiers dans leurs prédications : « Le nœud dû à la désobéissance d’Ève s’est dénoué par l’obéissance de Marie ; ce qu’Ève la vierge avait noué par son incrédulité, la Vierge Marie l’a dénoué par sa foi » ; comparant Marie avec Ève, ils appellent Marie « la Mère des vivants » et déclarent souvent : « Par Ève la mort, par Marie la vie.»
Par les prophètes, Dieu forme son peuple dans l’espérance du salut, dans l’attente d’une Alliance nouvelle et éternelle destinée à tous les hommes (cf. Is 2, 2-4), et qui sera inscrite dans les cœurs (cf. Jr 31, 31-34 ; He 10, 16). Les prophètes annoncent une rédemption radicale du Peuple de Dieu, la purification de toutes ses infidélités (cf. Ez 36), un salut qui incluera toutes les nations (cf. Is 49, 5-6 ; 53, 11). Ce seront surtout les pauvres et les humbles du Seigneur (cf. So 2, 3) qui porteront cette espérance. Les femmes saintes comme Sara, Rébecca, Rachel, Miryam, Débora, Anne, Judith et Esther, ont conservé vivante l’espérance du salut d’Israël. La figure la plus pure en est Marie (cf. Lc 1, 38).
Marie " est restée Vierge en concevant son Fils, Vierge en l’enfantant, Vierge en le portant, Vierge en le nourrissant de son sein, Vierge toujours " (S. Augustin, serm. 186, 1 : PL 38, 999) : de tout son être elle est " la servante du Seigneur " (Lc 1, 38).
La prière de Marie nous est révélée à l’aurore de la Plénitude des temps. Avant l’Incarnation du Fils de Dieu et avant l’effusion de l’Esprit Saint, sa prière coopère d’une manière unique au Dessein bienveillant du Père, lors de l’Annonciation pour la conception du Christ (cf. Lc 1, 38), lors de la Pentecôte pour la formation de l’Église, Corps du Christ (cf. Ac 1, 14). Dans la foi de son humble servante le Don de Dieu trouve l’accueil qu’il attendait depuis le commencement des temps. Celle que le Tout-Puissant a faite " pleine de grâce " répond par l’offrande de tout son être : " Voici la servante du Seigneur, qu’il m’advienne selon ta parole ". Fiat, c’est la prière chrétienne : être tout à Lui puisqu’Il est tout à nous.
" Si quelqu’un fait la volonté de Dieu, celui-là Dieu l’exauce " (Jn 9, 31 ; cf. 1 Jn 5, 14). Telle est la puissance de la prière de l’Église dans le Nom de son Seigneur, surtout dans l’Eucharistie ; elle est communion d’intercession avec la Toute Sainte Mère de Dieu (cf. Lc 1, 38. 49) et de tous les saints qui ont été " agréables " au Seigneur pour n’avoir voulu que sa Volonté :
" Puis, la prière achevée, tu dis : Amen, contresignant par cet Amen, qui signifie ‘Que cela se fasse’ (cf. Lc 1, 38) ce que contient la prière que Dieu nous a enseignée " (S. Cyrille de Jérusalem, catech. myst. 5, 18 : PG 33, 1124A).
C'est dans la vie même de Jésus, du début jusqu'à la fin, que l'on retrouve cette singulière « dialectique » entre l'expérience de la précarité de la vie humaine et l'affirmation de sa valeur. En effet, la vie de Jésus est marquée par la précarité dès sa naissance. Certes, il trouve l'accueil favorable des justes, qui s'unissent au « oui » immédiat et joyeux de Marie (cf. Lc 1, 38). Mais il y a aussi, dès le début, le refus d'un monde qui se montre hostile et qui cherche l'enfant « pour le tuer » (Mt 2, 13), ou qui reste indifférent et sans intérêt pour l'accomplissement du mystère de cette vie qui entre dans le monde: « Il n'y avait pas de place pour eux dans l'auberge » (Lc 2, 7). Le contraste entre les menaces et l'insécurité d'une part, et la puissance du don de Dieu d'autre part, fait resplendir avec une force plus grande la gloire qui se dégage de la maison de Nazareth et de la crèche de Bethléem: cette vie qui naît est salut pour toute l'humanité (cf. Lc 2, 11).
Annoncée à Marie par l'ange, la parole du Dieu vivant la concernait elle-même: «Voici que tu concevras en ton sein et enfanteras un fils» (Lc 1, 31). En accueillant cette annonce, Marie allait devenir la «Mère du Seigneur» et le mystère divin de l'Incarnation s'accomplirait en elle: «Le Père des miséricordes a voulu que l'Incarnation fût précédée par une acceptation de la part de cette Mère prédestinée». Et Marie donne ce consentement après avoir entendu toutes les paroles du messager. Elle dit: «Je suis la servante du Seigneur; qu'il m'advienne selon ta parole!» (Lc 1, 38). Ce fiat de Marie -«qu'il m'advienne»- a déterminé, du côté humain, l'accomplissement du mystère divin. Il y a une pleine harmonie avec les paroles du Fils qui, suivant la Lettre aux Hébreux, dit au Père en entrant dans le monde: «Tu n'as voulu ni sacrifice ni oblation, mais tu m'as façonné un corps... Voici, je viens... pour faire, ô Dieu, ta volonté» (He 10, 5-7). Le mystère de l'Incarnation s'est accompli lorsque Marie a prononcé son fiat: «Qu'il m'advienne selon ta parole!» rendant possible, pour ce qui la concernait dans le plan divin, la réalisation du dessein de son Fils.
Même si, à cet instant, elle s'est sentie dans la foi mère du «Messie-roi», elle a cependant répondu: «Je suis la servante du Seigneur, qu'il m'advienne selon ta parole» (Lc 1, 38). Dès ce premier moment, Marie a professé avant tout son «obéissance de la foi», elle s'en remet au sens que donnait aux paroles de l'Annonciation celui dont elles provenaient: Dieu lui-même.
S'éloigne-t-il par là de celle qui l'a mis au monde selon la chair? Voudrait-il la maintenir dans l'ombre de la discrétion qu'elle a elle-même choisie? Si l'on s'en tient au premier sens de ces paroles, il peut sembler en être ainsi, mais on doit observer que la maternité nouvelle et différente dont Jésus parle à ses disciples concerne précisément Marie de manière toute spéciale. Marie n'est-elle pas la première de «ceux qui écoutent la Parole de Dieu et la mettent en pratique»? Dans ces conditions, la bénédiction prononcée par Jésus en réponse aux paroles de la femme anonyme ne la concerne-t-elle pas avant tout? Assurément Marie est digne d'être bénie, du fait qu'elle est devenue la Mère de Jésus selon la chair («Heureuses les entrailles qui t'ont porté et les seins qui t'ont nourri de leur lait!»), mais aussi et surtout parce que dès le moment de l'Annonciation elle a accueilli la Parole de Dieu, parce qu'elle a cru, parce qu'elle a obéi à Dieu, parce qu'elle «conservait» la Parole et «la méditait dans son cœur» (cf. Lc 1, 38. 45; 2, 19. 51) et l'accomplissait par toute sa vie. Nous pouvons donc affirmer que la bénédiction prononcée par Jésus ne contredit pas, malgré les apparences, celle que formule la femme inconnue, mais elle la rejoint dans la personne de la Mère-Vierge qui ne s'est dite que «la servante du Seigneur» (Lc 1, 38). S'il est vrai que «toutes les générations la diront bienheureuse» (cf. Lc 1, 48), on peut dire que cette femme anonyme a été la première à confirmer à son insu ce verset prophétique du Magnificat de Marie et à inaugurer le Magnificat des siècles.
Si, par la foi, Marie est devenue la mère du Fils qui lui a été donné par le Père avec la puissance de l'Esprit Saint, gardant l'intégrité de sa virginité, dans la même foi elle a découvert et accueilli l'autre dimension de la maternité, révélée par Jésus au cours de sa mission messianique. On peut dire que cette dimension de la maternité appartenait à Marie dès le commencement, c'est-à-dire dès le moment de la conception et de la naissance de son Fils. Dès lors, elle était «celle qui a cru». Mais à mesure que se clarifiait à ses yeux et en son esprit la mission de son Fils, elle-même, comme Mère, s'ouvrait toujours plus à cette «nouveauté» de la maternité qui devait constituer son «rôle» aux côtés de son Fils. N'avait-elle pas dit dès le commencement: «Je suis la servante du Seigneur, qu'il m'advienne selon ta parole» (Lc 1, 38)? Dans la foi, Marie continuait à entendre et à méditer cette parole par laquelle la révélation que le Dieu vivant fait de lui-même devenait toujours plus transparente, d'une manière «qui surpasse toute connaissance» (Ep 3, 19). Mère, Marie devenait ainsi en un sens le premier «disciple» de son Fils, la première à qui il semblait dire: «Suis-moi!», avant même d'adresser cet appel aux Apôtres ou à quiconque (cf. Jn 1, 43).
39. C'est de ce point de vue qu'il faut, encore une fois, considérer l'événement fondamental dans l'économie du salut, c'est-à-dire l'Incarnation du Verbe au moment de l'Annonciation. Il est significatif que Marie, reconnaissant dans la parole du messager divin la volonté du Très-Haut et se soumettant à sa puissance, dise: «Je suis la servante du Seigneur; qu'il m'advienne selon ta parole» (Lc 1, 38). Le premier moment de la soumission à l'unique médiation «entre Dieu et les hommes» -celle de Jésus Christ- est l'acceptation de la maternité de la part de la Vierge de Nazareth. Marie consent au choix de Dieu pour devenir, par l'Esprit Saint, la Mère du Fils de Dieu. On peut dire que le consentement qu'elle donne à la maternité est surtout le fruit de sa donation totale à Dieu dans la virginité. Marie a accepté d'être choisie comme Mère du Fils de Dieu, guidée par l'amour nuptial, qui «consacre» totalement à Dieu une personne humaine. En vertu de cet amour, Marie désirait être toujours et en tout «donnée à Dieu», en vivant dans la virginité. Les mots «Je suis la servante du Seigneur» expriment le fait que, depuis le début, elle a accueilli et compris sa maternité comme un don total de soi, de sa personne, au service des desseins salvifiques du Très-Haut. Et toute sa participation maternelle à la vie de Jésus Christ, son Fils, elle l'a vécue jusqu'à la fin d'une manière qui répondait à sa vocation à la virginité.
Sainte Marie, tu appartenais aux âmes humbles et grandes en Israël qui, comme Syméon, attendaient « la consolation d'Israël » (Lc 2, 25) et qui, comme Anne, attendaient « la délivrance de Jérusalem » (Lc 2, 38). Tu vivais en contact intime avec les Saintes Écritures d'Israël, qui parlaient de l'espérance – de la promesse faite à Abraham et à sa descendance (cf. Lc 1, 55). Ainsi nous comprenons la sainte crainte qui t'assaillit quand l'ange du Seigneur entra dans ta maison et te dit que tu mettrais au jour Celui qui était l'espérance d'Israël et l'attente du monde. Par toi, par ton « oui », l'espérance des millénaires devait devenir réalité, entrer dans ce monde et dans son histoire. Toi tu t'es inclinée devant la grandeur de cette mission et tu as dit « oui »: « Voici la servante du Seigneur; que tout se passe pour moi selon ta parole » (Lc 1, 38). Quand remplie d'une sainte joie tu as traversé en hâte les monts de Judée pour rejoindre ta parente Élisabeth, tu devins l'image de l'Église à venir qui, dans son sein, porte l'espérance du monde à travers les monts de l'histoire. Mais à côté de la joie que, dans ton Magnificat, par les paroles et par le chant tu as répandue dans les siècles, tu connaissais également les affirmations obscures des prophètes sur la souffrance du serviteur de Dieu en ce monde. Sur la naissance dans l'étable de Bethléem brilla la splendeur des anges qui portaient la bonne nouvelle aux bergers, mais en même temps on a par trop fait en ce monde l'expérience de la pauvreté de Dieu. Le vieillard Syméon te parla de l'épée qui transpercerait ton cœur (cf. Lc 2, 35), du signe de contradiction que ton Fils serait dans ce monde. Quand ensuite commença l'activité publique de Jésus, tu as dû te mettre à l'écart, afin que puisse grandir la nouvelle famille, pour la constitution de laquelle Il était venu et qui devait se développer avec l'apport de ceux qui écouteraient et observeraient sa parole (cf. Lc 11, 27s.). Malgré toute la grandeur et la joie des tout débuts de l'activité de Jésus, toi, tu as dû faire, déjà dans la synagogue de Nazareth, l'expérience de la vérité de la parole sur le « signe de contradiction » (cf. Lc 4, 28ss). Ainsi tu as vu le pouvoir grandissant de l'hostilité et du refus qui progressivement allait s'affirmant autour de Jésus jusqu'à l'heure de la croix, où tu devais voir le Sauveur du monde, l'héritier de David, le Fils de Dieu mourir comme quelqu'un qui a échoué, exposé à la risée, parmi les délinquants. Tu as alors accueilli la parole: « Femme, voici ton fils! » (Jn 19, 26). De la croix tu reçus une nouvelle mission. À partir de la croix tu es devenue mère d'une manière nouvelle: mère de tous ceux qui veulent croire en ton Fils Jésus et le suivre. L'épée de douleur transperça ton cœur. L'espérance était-elle morte? Le monde était-il resté définitivement sans lumière, la vie sans but? À cette heure, probablement, au plus intime de toi-même, tu auras écouté de nouveau la parole de l'ange, par laquelle il avait répondu à ta crainte au moment de l'Annonciation: « Sois sans crainte, Marie! » (Lc 1, 30). Que de fois le Seigneur, ton fils, avait dit la même chose à ses disciples: N'ayez pas peur! Dans la nuit du Golgotha, tu as entendu de nouveau cette parole. À ses disciples, avant l'heure de la trahison, il avait dit: « Ayez confiance: moi, je suis vainqueur du monde » (Jn 16, 33). « Ne soyez donc pas bouleversés et effrayés » (Jn 14, 27). « Sois sans crainte, Marie! » À l'heure de Nazareth l'ange t'avait dit aussi: « Son règne n'aura pas de fin » (Lc 1, 33). Il était peut-être fini avant de commencer ? Non, près de la croix, sur la base de la parole même de Jésus, tu étais devenue la mère des croyants. Dans cette foi, qui était aussi, dans l'obscurité du Samedi Saint, certitude de l'espérance, tu es allée à la rencontre du matin de Pâques. La joie de la résurrection a touché ton cœur et t'a unie de manière nouvelle aux disciples, appelés à devenir la famille de Jésus par la foi. Ainsi, tu fus au milieu de la communauté des croyants qui, les jours après l'Ascension, priaient d'un seul cœur pour le don du Saint-Esprit (cf. Ac 1, 14) et qui le reçurent au jour de la Pentecôte. Le « règne » de Jésus était différent de ce que les hommes avaient pu imaginer. Ce « règne » commençait à cette heure et n'aurait jamais de fin. Ainsi tu demeures au milieu des disciples comme leur Mère, comme Mère de l'espérance. Sainte Marie, Mère de Dieu, notre Mère, enseigne-nous à croire, à espérer et à aimer avec toi. Indique-nous le chemin vers son règne! Étoile de la mer, brille sur nous et conduis-nous sur notre route!