Luc 1, 46

Marie dit alors : « Mon âme exalte le Seigneur,

Marie dit alors : « Mon âme exalte le Seigneur,
Origène
Jésus qu'elle portait dans son sein, avait hâte lui-même d'aller sanctifier Jean-Baptiste, qui était encore dans le sein de sa mère: «Elle s'en alla en toute hâte», etc.

Il ne fut pas rempli de l'Esprit saint avant l'arrivée de celle qui portait Jésus-Christ dans son sein, et c'est au même instant qu'il en fut rempli et qu'il tressaillit dans les entrailles de sa mère: «Et Elisabeth fut remplie de l'Esprit saint». Nul doute qu'Elizabeth n'ait dû à son fils d'avoir été elle-même remplie de l'Esprit saint.

Elle lui dit «Vous êtes bénie entre toute s les femmes; elle est la seule qui ait reçu et qui ait pu recevoir une si grande abondance de grâce, car elle seule est la mère d'un enfant divin.

Elle appelle le seigneur le fruit des entrailles de la mère de Dieu, parce qu'il n'a point un homme pour père, et qu'il est né de Marie seule, car ceux qui sont nés d'un père mortel, sont considérés comme ses fruits.

Elisabeth partage ici les sentiments de son fils, car Jean lui-même se sentait indigne que Jésus-Christ descendît jusqu'à lui. En proclamant mère du Seigneur Marie, qui était vierge, elle anticipe sur l'événement par une inspiration prophétique. Reconnaissons ici une disposition toute providentielle qui conduit Marie chez Elisabeth, pour que Jean-Baptiste, encore dans le sein de sa mère, rende témoignage au Seigneur, car dès lors le Sauveur investit Jean-Baptiste du titre et des fonctions de prophète, comme l'expliquent les paroles suivantes: «Aussitôt que la voix de votre salutation», etc.

La mère du Sauveur était venu visiter Elisabeth, pour voir la conception miraculeuse que l'ange lui avait annoncée, et s'affermir ainsi dans la foi au miracle bien plus surprenant dont une vierge devait être l'objet. C'est cette foi qu'Elisabeth célèbre par ces paroles: «Et vous êtes bienheureuse d'avoir cru, parce que les choses qui vous ont été dites de la part du Seigneur s'accompliront en vous».
Eusèbe de Césarée
Il la quitte non seulement satisfait d'avoir obtenu ce qu'il désirait, mais plein d'admiration pour la perfection de cette divine Vierge et pour la sublimité de sa vertu.

Le Christ est le fruit des entrailles de Marie, cette vérité suffit pour détruire l'hérésie d'Eutychès: car tout fruit est de même nature que la plante; par une conséquence nécessaire, la Vierge est donc de même nature que le nouvel Adam qui vient effacer les péchés du monde. Que ceux qui se forment l'idée d'une chair fantastique en Jésus-Christ, rougissent de leur opinion en considérant l'enfantement véritable de la mère de Dieu, car le fruit provient de la substance même de l'arbre. Où sont encore ceux qui osent dire que le Christ n'a fait que passer dans la Vierge comme par un canal. Qu'ils apprennent de ces paroles d'Elisabeth remplie de l'Esprit saint, que le Sauveur est le fruit des entrailles de Marie.
Saint Ambroise
L'ange qui annonçait à Marie des choses aussi mystérieuses, lui donne pour affermir sa foi, l'exemple d'une femme stérile qui était devenue mère. A cette nouvelle, Marie s'en va vers les montagnes de Judée. Quoi donc? Est-ce qu'elle ne croit point aux paroles de l'ange? est-ce qu'elle n'est point certaine de la divinité de son message? Est-ce qu'elle doute de l'exemple qu'il lui donne? non, c'est un saint désir qui la transporte, c'est un sentiment religieux du devoir qui la pousse, c'est une joie divine qui lui inspire cet empressement «Marie partit et s'en alla dans les montagnes», etc. Toute remplie de Dieu qu'elle est, où pourrait-elle diriger ses pas, si ce n'est vers les hauteurs.

La grâce de l'Esprit saint ne connaît ni lenteurs ni délais. Apprenez de la Vierge chrétienne à ne point vous arrêter sur les places publiques et à ne prendre aucune part aux conversations qui s'y tiennent.

Apprenez aussi, femmes chrétiennes, les soins empressés que vous devez à vos parentes, lorsqu'elles sont sur le point d'être mères. Voyez Marie, elle vivait seule auparavant dans une profonde retraite, aujourd'hu i ni la pudeur naturelle aux vierges ne l'empêche de paraître en public, ni les montagnes escarpées n'arrêtent son zèle, ni la longueur du chemin ne lui fait retarder le bon office qu'elle va rendre à sa cousine. Vierges de Jésus-Christ, apprenez encore quelle fut l'humilité de Marie. Elle vient vers sa parente, elle vient, elle la plus jeune, visiter celle qui est plus âgée, et non seulement elle la prévient, mais elle la salue aussi la première: «Et elle salue Elisabeth». En effet, plus une vierge est chaste, plus aussi son humilité doit être grande, plus elle doit avoir de déférence pour les personnes plus âgées; celle qui fait profession de chasteté, doit aussi être maîtresse en humilité. Il y a encore ici un motif de charité, le supérieur vient trouver son inférieur pour lui venir en aide, Marie vient visiter Elisabeth, Jésus-Christ, Jean-Baptiste.

Les bienfaits de l'arrivée de Marie et de la présence du Seigneur se font immédiatement sentir: «Aussitôt qu'Elisabeth eut entendu la voix de Marie qui la saluait, son enfant tressaillit», etc. Remarquez ici la différence et la propriété de chacune des paroles de l'auteur sacré. Elisabeth entendit la voix la première, mais Jean ressentit le premier l'effet de la grâce; elle entendit d'après l'ordre naturel, mais Jean tressaillit par suite d'une action toute mystérieuse; l'arrivée de Marie se fait sentir à Elisabeth, la venue du Seigneur à Jean-Baptiste.

Elisabeth s'était dérobée aux regards du monde du moment qu'elle avait conçu un fils, elle commence à se produire, glorieuse qu'elle est de porter dans son sein un prophète; elle éprouvait alors une espèce de honte, maintenant elle bénit Dieu: «Et s'écriant à haute voix, elle dit: Vous êtes bénie entre toutes les femmes», elle s'écrie à haute voix, aussitôt qu'elle ressent l'arrivée du Seigneur, parce qu'elle crut à la divinité de l'enfantement de Marie.

Ce n'est point par ignorance qu'elle parle ainsi, elle sait que c'est la grâce et l'action de l'Esprit saint qui ont porté la mère du Seigneur à venir saluer la mère du prophète pour la sanctification de son enfant, mais elle reconnaît hautement qu'elle n'a pu mériter cette grâce, et que c'est un don purement gratuit de la miséricorde divine: «D'où me vient cet honneur ?» c'est-à-dire, à quelles oeuvres de justice, à quelles actions, à quelles vertus en suis-je redevable?

Vous le voyez, Marie n'a nullement douté, mais elle a cru, e t a recueilli le fruit de sa foi.

Bienheureux vous aussi qui avez entendu et qui avez cru; car toute âme qui croit, conçoit et engendre le Fils de Dieu, et mérite de connaître ses oeuvres.
Saint Jean Chrysostome
Disons encore que Marie cachait avec soin ce que l'ange lui avait dit, et ne le découvrait à personne; elle savait qu'on n'ajouterait point foi à un récit aussi merveilleux, et elle craignait qu'il ne lui attirât des outrages, et qu'on ne l'accusât de vouloir ainsi pallier son crime et son déshonneur.
Saint Augustin
Pour parler ainsi, comme l'Évangéliste le déclare, Elisabeth a été remplie de l'Esprit saint, et c'est lui, sans aucun doute, qui lui a révélé la signification de ce tressaillement mystérieux de son enfant, tressaillement qui lui annonçait la venue de la mère du Sauveur, dont son fils devait être le Précurseur et le héraut. L'explication d'un si grand mystère a pu être connue des personnes plus âgées, comme Marie et Elisabeth, sans l'être de l'enfant lui-même; car Elisabeth ne dit point: L'enfant a tressailli dans mon sein par un mouvement de foi, mais «a tressailli de joie». Nous voyons tous les jours tressaillir, non seulement des enfants, mais même des animaux, sans que ni la foi, ni la religion, ni aucune cause intelligente y aient la moindre part; mais ici le tressaillement est extraordinaire et d'un genre tout nouveau, parce qu'il se produit dans le sein d'Elisabeth, et à l'arrivée de celle qui devait enfanter le Sauveur de tous les hommes. Ce t ressaillement donc, qui fut comme le salut rendu à la mère du Seigneur, a eu pour cause, comme tous les miracles, un acte de la puissance divine dans cet enfant, et non un mouvement naturel de l'enfant lui-même. Et alors même qu'on admettrait dans cet enfant un usage prématuré de la raison et de la volonté, qui aurait pu lui permettre, dès le sein de sa mère, un sentiment de connaissance, de foi, de sympathie, on devrait l'attribuer à un miracle de la puissance divine, et non à une simple action des lois naturelles.
Saint Grégoire le Grand
L'inspiration prophétique d'Elisabeth s'étendit à la fois au passé, au présent et à l'avenir. Elle connut que Marie avait ajouté foi aux promesses de l'ange; en la proclamant mère du Seigneur, elle comprit qu'elle portait dans son sein le Rédempteur du genre humain; et en prophétisant tout ce qui devait s'accomplir en elle, elle plongea son regard jusque dans les profondeurs de l'avenir.
Saint Bède le Vénérable
Aussitôt que l'ange a obtenu le consentement de la Vierge, il remonte vers les cieux: «Et l'ange s'éloigna d'elle».

Elisabeth la bénit dans les mêmes termes que l'ange Gabriel, pour montrer qu'elle est digne de la vénération des anges et des hommes.

C'est ce fruit que Dieu promettait à David en ces termes: «J'établirai sur votre trône le fruit de vos entrailles».

Rien d'étonnant si le Seigneur, Rédempteur du monde, commence par sa mère l'oeuvre de sa rédemption; c'est par elle que le salut devait être donné àtous les hommes, il était juste qu'elle reçût la première le fruit du salut de l'enfant qu'elle portait dans son sein.

Toute âme aussi qui a conçu le Verbe de Dieu, monte aussitôt par les pas de l'amour jusqu'aux sommets les plus élevés des vertus, pénètre dans la ville de Juda, c'est-à-dire, dans la citadelle de la louange et de la joie, et y demeure comme pendant trois mois dans la pratique parfaite de la foi, de l'espérance et de la charité.
Commentaire grec
C'est près d'Elisabeth seule qu'elle va se réfugier; elle avait coutume d'en agir ainsi à cause de sa parenté qui les unissait, et plus encore à cause de la conformité de leurs sentiments et de leurs moeurs.

Le prophète voit et entend plus clairement que sa mère, il salue le prince des prophètes, et au défaut de la parole qui lui manque, il tressaille dans le sein de sa mère (ce qui est le signe le plus expressif de la joie); mais qui jamais a ressenti ces tressaillements de la joie avant sa naissance? La grâce produit, des effets inconnus à la nature: le soldat renfermé dans les entrailles de sa mère reconnaît son Seigneur et son roi dont la naissance approche, l'enveloppe du sein maternel n'est point un obstacle à cette vision mystérieuse; car il le voit non des yeux ou du corps, mais des yeux de l'âme.

C'est donc ici le seul fruit vraiment béni, parce qu'il a été produit sans le concours de l'homme et l'influence du péché.
Saint Théophylacte d'Ohrid
Elle va vers les montagnes, parce que c'est là qu'habitait Zacharie: «En une ville de Juda, et elle entra dans la maison de Zacharie».

Mais les siècles précédents avaient vu d'autres saintes femmes qui ont donné le jour à des enfants souillés par le péché; elle ajoute donc: «Et le fruit de vos entrailles est béni». Ou dans un autre sens elle venait de dire: «Vous êtes bénie entre toutes les femmes»; elle en donne maintenant la raison comme si quelqu'un la lui demandait: «Et le fruit de vos entrailles est béni», etc ., c'est ainsi que nous lisons dans le psaume 117: «Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur. Le Seigneur est le vrai Dieu, et il a fait paraître sa lumière sur nous», car suivant l'usage de l'Écriture, et a le même sens que parce que.
Louis-Claude Fillion
Telles furent les félicitations que Marie reçut d'Elisabeth. Pour toute réponse, transformée par l'Esprit-Saint en une lyre harmonieuse, elle entonne son admirable cantique : Mon âme glorifie le Seigneur ! Elle répond aux louanges de sa cousine par la louange de Dieu. Les grandes merveilles accomplies par Jéhovah avaient inspiré plusieurs fois déjà des cantiques à des femmes d'Israël. Les plus célèbres étaient ceux de la sœur de Moïse, Ex. 15, 21, de Débora, Jud. 5, d'Anne, mère de Samuel, 1 Reg. 2. Il était réservé à Marie de chanter la merveille des merveilles, l’œuvre de la Rédemption, dans un hymne qui est le couronnement de tous les cantiques de l'ancienne Alliance, le prélude de tous les cantiques du Nouveau Testament. Hymne sublime en effet dans sa simplicité ; chant magnifique d'action de grâces, dont l'Église se sert chaque jour pour remercier Dieu de ses bienfaits. Au point de vue de la forme, le « Magnificat » a tous les caractères que la poésie revêtait chez les Hébreux : on y trouve le rythme, et surtout le parallélisme des membres. Il ressemble aux Psaumes eucharistiques de David. Ce beau poème s'échappa spontanément du cœur de Marie, sous l'inspiration divine, à l'occasion des paroles d'Elisabeth : c'est donc une véritable improvisation, l'effusion jusque-là comprimée d'une âme profondément émue par les grâces du ciel, mais qui n'avait pas encore trouvé l'occasion de s'épancher au dehors. - Et Marie dit. Divers manuscrits de l'Itala, S. Irénée et Origène lisent « Elisabeth » au lieu de « Marie » ; mais c'est une erreur énorme. Le Magnificat est l’œuvre de Marie, et non d'Elisabeth. Les exégètes, rapprochant ces simples mots « Marie dit » de la formule « Elle s'écria d'une voix forte » (v. 42) qui avait introduit l'allocution de la mère de S. Jean, aiment à faire ressortir la profonde quiétude qui règne dans le cantique de Marie. C'est là en réalité un caractère frappant du Magnificat, dont le lyrisme respire un calme vraiment divin. - Mon âme glorifie le Seigneur… La plupart des poèmes hébreux peuvent se diviser en strophes, qui sont plus ou moins bien marquées par la « direction »nouvelle donnée aux pensées. Les exégètes modernes, appliquant ce principe au cantique de Marie, ont essayé de le partager en stances à peu près égales, qui correspondent à autant d'idées nouvelles. Mais l'accord ne règne pas entre eux, les divisions de ce genre ayant toujours quelque chose de subjectif. Ewald, von Burger, Godet, etc., admettent quatre strophes : vv. 46-48a, 48b-50, 51-53, 54-55. Les Drs Schegg et Reischl n'en admettent que deux : vv. 46-49, louange à Dieu pour la part personnelle qu'il a faite à Marie dans le mystère de la Rédemption ; vv. 50-55, louange à Dieu pour les bienfaits qu'il n'a cessé d'accorder soit aux petits en général, soit spécialement à Israël. M. L. Abbott en distingue trois : vv. 46-49, 50-53, 54 et 55. Nous adoptons cette division qui nous semble la plus logique. - Première strophe. Marie témoigne au Seigneur la plus vive reconnaissance pour sa maternité divine. La pensée contenue dans les premiers mots du cantique, Mon âme glorifie le Seigneur, retentit à travers le Magnificat tout entier et « l'on pourrait, dit M. Schegg, la répéter comme un refrain après chaque verset ». Elle est pour ainsi dire le thème que Marie se propose de développer : toutes les idées qui suivent en seront de simples variations.
Fulcran Vigouroux
« Le Magnificat est le premier cantique du Nouveau Testament : il pourrait servir de conclusion à l’Ancien. Il a du rapport avec plusieurs autres, surtout avec ceux de Marie, sœur de Moïse, et d’Anne, mère de Samuel ; mais combien l’âme de la sainte Vierge paraît plus unie à Dieu et plus sainte ! Combien son langage a plus de majesté, d’élévation et de calme ! C’est bien le prélude de la voix du Sauveur. ― La conduite de Dieu dans l’établissement du christianisme y est admirablement dépeinte. Marie a devant les yeux tous les évènements qui vont s’accomplir : la synagogue réprouvée, l’Eglise fondée, les Apôtres glorifiés, les Gentils comblés de grâce, enfin toutes les promesses magnifiquement accomplies. ― A la salutation de sa parente : « Vous êtes bénie entre les femmes, » la sainte Vierge répond par une prédiction aussi précise que merveilleuse : « Toutes les générations me diront bienheureuse. » Or, elle a vu pendant sa vie et nous voyons encore tous les jours l’accomplissement de cet oracle. ― Les sentiments exprimés dans ce cantique sont bien ceux qui devaient pénétrer la mère de Jésus, après la faveur incompréhensible qu’elle avait reçue. Telles devaient être sa foi, son humilité, sa reconnaissance ; tel son ravissement sur la sagesse, la puissance, la bonté de Dieu dans la rédemption du monde. Quel admirable modèle pour les âmes intérieures que le Ciel favorise de ses grâces ! ― Enfin remarquez combien Marie était accoutumée au langage des écrivains sacrés. Elle n’emploie pas une expression qu’on ne lise dans le Psalmiste et dans les Prophètes. Toute la différence est dans la profondeur de ses pensées et dans la sublimité de ses sentiments. » (L. BACUEZ.)

Marie, la première, prophétise avant Jésus lui-même (saint Ambroise). En méditant et en contemplant, elle rend, avec son âme, des louanges magnifiques à Dieu (saint Basile). Ce chant si humble et si élevé, ainsi que les récits de l’enfance de Jésus, saint Luc les a transmis, comme il les a reçus de Marie. On y sent le cœur de la Vierge Mère.
Catéchisme de l'Église catholique
L’Esprit Saint a préparé Marie par sa grâce. Il convenait que fût " pleine de grâce " la mère de Celui en qui " habite corporellement la Plénitude de la Divinité " (Col 2, 9). Elle a été, par pure grâce, conçue sans péché comme la plus humble des créatures, la plus capable d’accueil au Don ineffable du Tout-Puissant. C’est à juste titre que l’ange Gabriel la salue comme la " Fille de Sion " : " Réjouis-toi " (cf. So 3, 14 ; Za 2, 14). C’est l’action de grâce de tout le Peuple de Dieu, et donc de l’Église, qu’elle fait monter vers le Père dans l’Esprit Saint en son cantique (cf. Lc 1, 46-55) alors qu’elle porte en elle le Fils éternel.

Adorer Dieu, c’est, dans le respect et la soumission absolue reconnaître le " néant de la créature " qui n’est que par Dieu. Adorer Dieu, c’est comme Marie, dans le Magnificat, le louer, l’exalter et s’humilier soi-même, en confessant avec gratitude qu’Il a fait de grandes choses et que saint est son nom (cf. Lc 1, 46-49). L’adoration du Dieu unique libère l’homme du repliement sur soi-même, de l’esclavage du péché et de l’idolâtrie du monde.

L’Ancien Testament l’atteste : Dieu est source de toute vérité. Sa Parole est vérité (cf. Pr 8, 6 ; 2 R 7, 28). Sa loi est vérité (cf. Ps 118, 142). " Sa fidélité demeure d’âge en âge " (Ps 119, 90 ; Lc 1, 46). Puisque Dieu est le " Véridique " (Rm 3, 4) les membres de son Peuple sont appelés à vivre dans la vérité (cf. Ps 118, 30).

C’est pourquoi le cantique de Marie (cf. Lc 1, 46-55 ; le Magnificat latin, le Mégalinaire byzantin), est à la fois le cantique de la Mère de Dieu et celui de l’Église, cantique de la Fille de Sion et du nouveau Peuple de Dieu, cantique d’action de grâces pour la plénitude de grâces répandues dans l’Economie du salut, cantique des " pauvres " dont l’espérance est comblée par l’accomplissement des Promesses faites à nos pères " en faveur d’Abraham et de sa descendance, à jamais ".

C’est à partir de cette coopération singulière de Marie à l’action de l’Esprit Saint que les Églises ont développé la prière à la sainte Mère de Dieu, en la centrant sur la Personne du Christ manifestée dans ses mystères. Dans les innombrables hymnes et antiennes qui expriment cette prière, deux mouvements alternent habituellement : l’un " magnifie " le Seigneur pour les " grandes choses " qu’il a faites pour son humble servante, et par elle, pour tous les humains (cf. Lc 1, 46-55) ; l’autre confie à la Mère de Jésus les supplications et les louanges des enfants de Dieu, puisqu’elle connaît maintenant l’humanité qui en elle est épousée par le Fils de Dieu.
Pape Saint Jean-Paul II
Plus récemment, le Seigneur m'a donné la grande joie de signer une déclaration christologique commune avec le Patriarche assyrien de l'Orient, Sa Sainteté Mar Dinkha IV, qui a souhaité pour cela me rendre visite à Rome au mois de novembre 1994. Tenant compte des différences de formulations théologiques, nous avons pu ainsi professer ensemble la vraie foi au Christ. Je veux dire la joie que tout cela me donne en reprenant les paroles mêmes de la Vierge: « Mon âme exalte le Seigneur » (Lc 1, 46).
Pape Benoît XVI
Parmi les saints, il y a par excellence Marie, Mère du Seigneur et miroir de toute sainteté. Dans l’Évangile de Luc, nous la trouvons engagée dans un service de charité envers sa cousine Élisabeth, auprès de laquelle elle demeure «environ trois mois» (1, 56), pour l’assister dans la phase finale de sa grossesse. «Magnificat anima mea Dominum», dit-elle à l’occasion de cette visite – «Mon âme exalte le Seigneur» – (Lc 1, 46). Elle exprime ainsi tout le programme de sa vie: ne pas se mettre elle-même au centre, mais faire place à Dieu, rencontré tant dans la prière que dans le service du prochain – alors seulement le monde devient bon. Marie est grande précisément parce qu’elle ne veut pas se rendre elle-même grande, mais elle veut rendre Dieu grand. Elle est humble: elle ne veut être rien d’autre que la servante du Seigneur (cf. Lc 1, 38. 48). Elle sait qu’elle contribue au salut du monde, non pas en accomplissant son œuvre, mais seulement en se mettant pleinement à la disposition des initiatives de Dieu. Elle est une femme d’espérance: uniquement parce qu’elle croit aux promesses de Dieu et qu’elle attend le salut d’Israël; l’ange peut venir chez elle et l’appeler au service décisif de ces promesses. C’est une femme de foi: «Heureuse celle qui a cru», lui dit Élisabeth (Lc 1, 45). Le Magnificat – portrait, pour ainsi dire, de son âme – est entièrement brodé de fils de l’Écriture Sainte, de fils tirés de la Parole de Dieu. On voit ainsi apparaître que, dans la Parole de Dieu, Marie est vraiment chez elle, elle en sort et elle y rentre avec un grand naturel. Elle parle et pense au moyen de la Parole de Dieu; la Parole de Dieu devient sa parole, et sa parole naît de la Parole de Dieu. De plus, se manifeste ainsi que ses pensées sont au diapason des pensées de Dieu, que sa volonté consiste à vouloir avec Dieu. Étant profondément pénétrée par la Parole de Dieu, elle peut devenir la mère de la Parole incarnée. Enfin, Marie est une femme qui aime. Comment pourrait-il en être autrement ? Comme croyante qui, dans la foi, pense avec les pensées de Dieu et veut avec la volonté de Dieu, elle ne peut qu’être une femme qui aime. Nous le percevons à travers ses gestes silencieux, auxquels se réfèrent les récits des Évangiles de l’enfance. Nous le voyons à travers la délicatesse avec laquelle, à Cana, elle perçoit les besoins dans lesquels sont pris les époux et elle les présente à Jésus. Nous le voyons dans l’humilité avec laquelle elle accepte d’être délaissée durant la période de la vie publique de Jésus, sachant que son Fils doit fonder une nouvelle famille et que l’heure de sa Mère arrivera seulement au moment de la croix, qui sera l’heure véritable de Jésus (cf. Jn 2, 4; 13, 1). Alors, quand les disciples auront fui, elle demeurera sous la croix (cf. Jn 19, 25-27); plus tard, à l’heure de la Pentecôte, ce seront les disciples qui se rassembleront autour d’elle dans l’attente de l’Esprit Saint (cf. Ac 1, 14).