Luc 1, 55
de la promesse faite à nos pères, en faveur d’Abraham et sa descendance à jamais. »
de la promesse faite à nos pères, en faveur d’Abraham et sa descendance à jamais. »
Elle ne veut point parler d'Israël selon la chair, qui tirait sa noblesse de son nom, mais d'Israël selon l'esprit, qui tenait son nom de sa foi, et dont les yeux s'appliquaient à voir Dieu par la foi. On peut aussi appliquer ces paroles aux Israélites selon la chair, puisqu'un nombre infini d'entre eux ont embrassé la foi. Dieu agit de la sorte en souvenir de sa miséricorde, car il accomplissait la promesse faite à Abraham ( Gn 22): «Tous les peuples de la terre seront bénis en celui qui sortira de vous». C'est cette même promesse que la Mère de Dieu célèbre lorsqu'elle dit: «Selon la promesse qu'il a faite à nos pères, à Abraham», etc. Dieu avait dit en effet à Abraham ( Gn 17): «J'affermirai mon alliance avec vous, et après vous avec votre race dans la suite de leurs générations, par un pacte éternel, afin que je sois votre Dieu, et le Dieu de votre postérité après vous».
Et son serviteur obéissant, humble; car celui qui refuse de s'humilier ne peut être sauvé.
Cette postérité doit s'entendre beaucoup moins des descendants d'Abraham selon la chair, que des imitateurs de sa foi, et c'est à eux que la venue du Sauveur a été promise pour des siècles.
La Glose
Après avoir rappelé en général les effets de la miséricorde et de la justice divine, Marie en vient aux effets particuliers du nouveau mystère de l'Incarnation qui vient de s'accomplir: «Il a pris en sa protection Israël, son serviteur», etc. Il l'a pris comme un médecin prend un malade, il s'est rendu visible parmi les hommes, afin qu'Israël (c'est-à-dire, voyant Dieu) , devînt son serviteur.
En effet, la promesse qui a pour objet cet héritage n'aura point de terme, jusqu'à la fin des siècles il y aura des croyants, et la glorieuse félicité qui leur est réservée sera éternelle.
Ces deux versets forment la troisième
strophe du Magnificat. Marie y exprime en termes emphatiques la part spéciale qu'aura le peuple juif au salut
opéré par le Messie-Dieu qu'elle porte dans son sein. - Il a relevé Israël son serviteur. Par le mystère de
l'Incarnation, Dieu a donc soulevé de terre, en lui tendant une main secourable, la nation théocratique,
désignée ici comme en tant d'autres passages de la Bible par le nom mystique du patriarche Jacob. - Se
souvenant de sa miséricorde. Belle expression. Dieu avait semblé oublier sa miséricorde à l'égard du peuple
juif, auquel il avait infligé depuis tant d'années de si profondes humiliations, de si rudes souffrances. Mais
voici qu'il se ressouvient enfin de sa bonté ! - Selon ce qu'il avait dit à nos pères. C'est une proposition
incidente, une sorte de parenthèse, qui explique Dieu traitera maintenant Israël avec compassion. Ne s'y est-il pas engagé depuis longtemps par des promesses solennelles, réitérées vingt fois aux premiers pères du
peuple juif ? Les mots Abraham et sa race indiquent l'objet de la miséricorde divine. Sans doute il y avait
des siècles qu'Abraham n'était plus : Marie peut néanmoins affirmer que Dieu, en traitant avec tendresse la
postérité de ce grand patriarche, usera par là-même de miséricorde envers lui, parce qu'un père est supposé,
après sa mort comme de son vivant, prendre part au sort de ses enfants, se réjouir avec eux de leur bonheur. -
Pour toujours. Cette formule, qui termine souvent les psaumes, sert aussi de conclusion au cantique de
Marie. C'est un cri de vive confiance jeté à la fin du Magnificat. La race du père des croyants, race dilatée, il
est vrai, et spiritualisée, durera jusqu'à la fin des temps. Pendant les siècles des siècles, Dieu se souviendra
envers elle de ses miséricordes ! « Et toi Israël, mon serviteur, Jacob que j’ai élu, semence de mon ami
Abraham, dans lequel je t’ai saisi et t’ai appelé de loin, je t’ai dit : tu es mon serviteur. Je t’ai élu et ne t’ai
pas rejeté. Ne crains pas, car je suis avec toi. Ne t’éloigne pas, car je suis moi ton Dieu. Je t’ai fortifié et je te
suis venu en aide, et la droite de mon juste te reçoit ». Is. 41, 8-10. - Tel est le cantique de la Très Sainte
Vierge. Mais nous n'avons pas dit encore que, si on l'examine attentivement, on ne tarde pas à découvrir qu'il
paraît être en grande partie un écho, et même une reproduction de divers pages de l'Ancien Testament.
Presque toutes ses expressions ramènent à la pensée soit le cantique d'Anne, 1 Reg. 2, 1-10, soit certains
psaumes, etc., comme le prouvera le tableau ci-joint :
Que mon âme magnifie le Seigneur ! Ps.33. 4 : « Magnifiez le Seigneur avec moi »
Et mon esprit a exulté en Dieu l Reg 2, 1 : « Mon cœur a exulté dans le Seigneur »
Qui a regardé la bassesse de sa servante. 1 Reg 1, 11 : « Si, en regardant, tu vois l’affliction
de ta servante. »
Toutes les générations me diront bienheureuse Gen. 30, 13 : « Bienheureuse me diront les femmes »
Il a fait pour moi de grandes choses Ps. 70, 19 : « Tu as fait de grandes choses »
Saint est son nom Ps. 110, 9 : « Saint et terrible est son nom. »
Sa miséricorde de génération en génération pour
ceux qui le craignent
Ps. 102, 17 : « La miséricorde d’éternité en éternité
sur ceux qui le craignent »
Il a montré de la puissance avec son bras Ps. 117, 16 : « La droite du Seigneur produit de la
puissance »
Il disperse les esprits au cœur superbe Ps. 88 11 « Tu humilies les superbes, et tu disperses
tes ennemis. »
Il a déposé les puissants de leur trône et a exalté les
humbles
Eccl. 10, 17 : « Il a détruit les trônes des chefs, et a
fait asseoir les doux de cœur »
Il a comblé de biens les affamés, et renvoyé les
riches les mains vides
1 Reg. 2, 5 : « Les repus chercheront un lieu où
manger, et les affamés seront rassasiés »
Se souvenant de sa miséricorde, comme il a parlé à
nos pères, Abraham etc
Mic. 7, 20 : « Tu donneras la vérité à Jacob, la
miséricorde à Abraham, que tu as juré à nos pères
aux temps anciens »
De cette ressemblance manifeste, les rationalistes se sont hâtés de conclure que le Magnificat ne saurait être
l’œuvre personnelle de Marie, qu'il est apocryphe par conséquent ; par conséquent aussi que les divers
événements dont il est entouré dans le troisième Évangile sont de même l’œuvre d'un faussaire. Affirmations
bien audacieuses, mais qu'une simple réflexion peut réduire à néant. Si ce principe était vrai, que toute œuvre
littéraire doit avoir été contrefaite quand elle a une certaine analogie avec des écrits plus anciens, combien de
livres cesseraient d'être authentiques ! Virgile imite parfois les discours ou les descriptions d'Homère : donc
l'Énéide a été composée deux ou trois siècles après Virgile. Le cantique de Jonas et la prière d'Habacuc sont
des compilations des psaumes, etc. : donc les prophéties de Jonas et d'Habacuc sont apocryphes : Sont-ce là
des conclusions bien légitimes ? La vraie critique raisonne autrement. Elle se contentera de dire, mais en
toute vérité : Donc Virgile connaissait les poèmes d'Homère, donc Jonas et Habacuc avaient lu les psaumes.
En effet, une lecture sérieuse de la Bible prouve que les écrivains sacrés connaissaient à fond les parties de
l'Écriture antérieures à leur époque et qu'ils aimaient, dans l'occasion, à en citer les paroles. Les
réminiscences ou allusions que nous avons remarquées dans le Magnificat s'expliquent de la même manière.
Marie avait lu et relu les saints Livres : au moment donc où elle ouvrait la bouche pour louer et remercier son
Dieu, les textes inspirés se présentèrent en foule à sa mémoire. Se les appropriant, elle les employa parce
qu'ils contenaient la parfaite expression de ses sentiments privés. Quoi de plus naturel ? Et en réalité tout,
dans le Magnificat, est admirablement adapté à la situation de Marie, convient à merveille à la Vierge de
Nazareth devenue Mère du Christ. Il est donc en ce sens une œuvre tout à fait originale. Ce n'est pas ainsi
qu'on aurait inventé après coup, car on eût alors avidement recherché des idées et des formules neuves. - Il
n'est peut-être pas de compositeur célèbre qui n'ait annoté le beau cantique de Marie : les œuvres les plus
renommées sont celles d'Orlando di Lasso, de Palestrina, de Bach, de Mendelsohn, de Moralès, de Sheppard.
On a du peintre Botticelli un incomparable chef-d’œuvre » (Rio) qui représente la Vierge écrivant le
Magnificat.
Dans l'Eucharistie, l'Église s'unit pleinement au Christ et à son sacrifice, faisant sien l'esprit de Marie. C'est une vérité que l'on peut approfondir en relisant le Magnificat dans une perspective eucharistique. En effet, comme le cantique de Marie, l'Eucharistie est avant tout une louange et une action de grâce. Quand Marie s'exclame: « Mon âme exalte le Seigneur et mon esprit exulte en Dieu mon Sauveur », Jésus est présent en son sein. Elle loue le Père « pour » Jésus, mais elle le loue aussi « en » Jésus et « avec » Jésus. Telle est précisément la véritable « attitude eucharistique ».
En même temps, Marie fait mémoire des merveilles opérées par Dieu dans l'histoire du salut, selon la promesse faites à nos pères (cf. Lc 1, 55), et elle annonce la merveille qui les dépasse toutes, l'Incarnation rédemptrice. Enfin, dans le Magnificat est présente la tension eschatologique de l'Eucharistie. Chaque fois que le Fils de Dieu se présente à nous dans la « pauvreté » des signes sacramentels, pain et vin, est semé dans le monde le germe de l'histoire nouvelle dans laquelle les puissants sont « renversés de leurs trônes » et les humbles sont « élevés » (cf. Lc 1, 52). Marie chante les « cieux nouveaux » et la « terre nouvelle » qui, dans l'Eucharistie, trouvent leur anticipation et en un sens leur « dessein » programmé. Si le Magnificat exprime la spiritualité de Marie, rien ne nous aide à vivre le mystère eucharistique autant que cette spiritualité. L'Eucharistie nous est donnée pour que notre vie, comme celle de Marie, soit tout entière un Magnificat!
En même temps, Marie fait mémoire des merveilles opérées par Dieu dans l'histoire du salut, selon la promesse faites à nos pères (cf. Lc 1, 55), et elle annonce la merveille qui les dépasse toutes, l'Incarnation rédemptrice. Enfin, dans le Magnificat est présente la tension eschatologique de l'Eucharistie. Chaque fois que le Fils de Dieu se présente à nous dans la « pauvreté » des signes sacramentels, pain et vin, est semé dans le monde le germe de l'histoire nouvelle dans laquelle les puissants sont « renversés de leurs trônes » et les humbles sont « élevés » (cf. Lc 1, 52). Marie chante les « cieux nouveaux » et la « terre nouvelle » qui, dans l'Eucharistie, trouvent leur anticipation et en un sens leur « dessein » programmé. Si le Magnificat exprime la spiritualité de Marie, rien ne nous aide à vivre le mystère eucharistique autant que cette spiritualité. L'Eucharistie nous est donnée pour que notre vie, comme celle de Marie, soit tout entière un Magnificat!
Sainte Marie, tu appartenais aux âmes humbles et grandes en Israël qui, comme Syméon, attendaient « la consolation d'Israël » (Lc 2, 25) et qui, comme Anne, attendaient « la délivrance de Jérusalem » (Lc 2, 38). Tu vivais en contact intime avec les Saintes Écritures d'Israël, qui parlaient de l'espérance – de la promesse faite à Abraham et à sa descendance (cf. Lc 1, 55). Ainsi nous comprenons la sainte crainte qui t'assaillit quand l'ange du Seigneur entra dans ta maison et te dit que tu mettrais au jour Celui qui était l'espérance d'Israël et l'attente du monde. Par toi, par ton « oui », l'espérance des millénaires devait devenir réalité, entrer dans ce monde et dans son histoire. Toi tu t'es inclinée devant la grandeur de cette mission et tu as dit « oui »: « Voici la servante du Seigneur; que tout se passe pour moi selon ta parole » (Lc 1, 38). Quand remplie d'une sainte joie tu as traversé en hâte les monts de Judée pour rejoindre ta parente Élisabeth, tu devins l'image de l'Église à venir qui, dans son sein, porte l'espérance du monde à travers les monts de l'histoire. Mais à côté de la joie que, dans ton Magnificat, par les paroles et par le chant tu as répandue dans les siècles, tu connaissais également les affirmations obscures des prophètes sur la souffrance du serviteur de Dieu en ce monde. Sur la naissance dans l'étable de Bethléem brilla la splendeur des anges qui portaient la bonne nouvelle aux bergers, mais en même temps on a par trop fait en ce monde l'expérience de la pauvreté de Dieu. Le vieillard Syméon te parla de l'épée qui transpercerait ton cœur (cf. Lc 2, 35), du signe de contradiction que ton Fils serait dans ce monde. Quand ensuite commença l'activité publique de Jésus, tu as dû te mettre à l'écart, afin que puisse grandir la nouvelle famille, pour la constitution de laquelle Il était venu et qui devait se développer avec l'apport de ceux qui écouteraient et observeraient sa parole (cf. Lc 11, 27s.). Malgré toute la grandeur et la joie des tout débuts de l'activité de Jésus, toi, tu as dû faire, déjà dans la synagogue de Nazareth, l'expérience de la vérité de la parole sur le « signe de contradiction » (cf. Lc 4, 28ss). Ainsi tu as vu le pouvoir grandissant de l'hostilité et du refus qui progressivement allait s'affirmant autour de Jésus jusqu'à l'heure de la croix, où tu devais voir le Sauveur du monde, l'héritier de David, le Fils de Dieu mourir comme quelqu'un qui a échoué, exposé à la risée, parmi les délinquants. Tu as alors accueilli la parole: « Femme, voici ton fils! » (Jn 19, 26). De la croix tu reçus une nouvelle mission. À partir de la croix tu es devenue mère d'une manière nouvelle: mère de tous ceux qui veulent croire en ton Fils Jésus et le suivre. L'épée de douleur transperça ton cœur. L'espérance était-elle morte? Le monde était-il resté définitivement sans lumière, la vie sans but? À cette heure, probablement, au plus intime de toi-même, tu auras écouté de nouveau la parole de l'ange, par laquelle il avait répondu à ta crainte au moment de l'Annonciation: « Sois sans crainte, Marie! » (Lc 1, 30). Que de fois le Seigneur, ton fils, avait dit la même chose à ses disciples: N'ayez pas peur! Dans la nuit du Golgotha, tu as entendu de nouveau cette parole. À ses disciples, avant l'heure de la trahison, il avait dit: « Ayez confiance: moi, je suis vainqueur du monde » (Jn 16, 33). « Ne soyez donc pas bouleversés et effrayés » (Jn 14, 27). « Sois sans crainte, Marie! » À l'heure de Nazareth l'ange t'avait dit aussi: « Son règne n'aura pas de fin » (Lc 1, 33). Il était peut-être fini avant de commencer ? Non, près de la croix, sur la base de la parole même de Jésus, tu étais devenue la mère des croyants. Dans cette foi, qui était aussi, dans l'obscurité du Samedi Saint, certitude de l'espérance, tu es allée à la rencontre du matin de Pâques. La joie de la résurrection a touché ton cœur et t'a unie de manière nouvelle aux disciples, appelés à devenir la famille de Jésus par la foi. Ainsi, tu fus au milieu de la communauté des croyants qui, les jours après l'Ascension, priaient d'un seul cœur pour le don du Saint-Esprit (cf. Ac 1, 14) et qui le reçurent au jour de la Pentecôte. Le « règne » de Jésus était différent de ce que les hommes avaient pu imaginer. Ce « règne » commençait à cette heure et n'aurait jamais de fin. Ainsi tu demeures au milieu des disciples comme leur Mère, comme Mère de l'espérance. Sainte Marie, Mère de Dieu, notre Mère, enseigne-nous à croire, à espérer et à aimer avec toi. Indique-nous le chemin vers son règne! Étoile de la mer, brille sur nous et conduis-nous sur notre route!