Luc 1, 80
L’enfant grandissait et son esprit se fortifiait. Il alla vivre au désert jusqu’au jour où il se fit connaître à Israël.
L’enfant grandissait et son esprit se fortifiait. Il alla vivre au désert jusqu’au jour où il se fit connaître à Israël.
Ou bien il croissait en esprit et ne s'arrêtait pas au premier degré de perfection; l'esprit acquérait toujours en lui une nouvelle force, sa volonté tendant toujours vers un but plus parfait, était dans un progrès continuel, et son âme s'élevait à des contemplations de plus en plus divines. Sa mémoire s'exerçait pour amasser dans ses trésors les plus pures vérités. L'Évangéliste ajoute: «Et il se fortifiait».La nature humaine est faible, comme nous le lisons dans le saint Évangile ( Mt 26): «La chair est faible»,il faut donc que l'esprit la fortifie, car l'esprit est prompt. Il en est beaucoup qui ont en partage la force du corps; mais l'athlète de Dieu doit rechercher la force de l'esprit pour détruire la sagesse de la chair. Jean-Baptiste se retira donc dans le désert pour fuir le tumulte des villes et leurs assemblées bruyantes: «Et il était dans les déserts»; là où l'air est plus pur, le ciel plus ouvert, et Dieu plus familier. Jusqu'au temps où devait commencer son baptême et sa prédication, il s'appliquait à la prière, il conversait avec les anges, il invoquait le Seigneur, et l'entendait lui dire: «Me voici». (cf. Is 58, 9)
Il est digne de remarque que l'Évangéliste raconte le temps de la vie du prophète dans le sein de sa mère, pour ne point passer sous silence la présence de Marie, tandis qu'au contraire il ne dit rien de son enfance, parce que la force que la présence de Marie lui a communiquée dès le sein de sa mère, l'a délivré de toutes les faiblesses de l'enfance.
Le prédicateur futur de la pénitence pour prêcher un jour avec plus de liberté le détachement des plaisirs séducteurs du monde, passe dans le désert les premières années de sa vie: «L'enfant croissait»,dit le texte sacré.
Il croissait extérieurement en suivant les progrès de l'âge: «Et il se fortifiait». Les dons spirituels se développaient en même temps que le corps, et les opérations de l'esprit se manifestaient avec plus d'éclat de jour en jour.
Ou bien il demeurait dans le désert pour y être élevé loin de la malice du monde, et pour qu'un jour il pût le reprendre de ses crimes sans aucune crainte; car s'il avait vécu au milieu du monde, peut-être l'amitié, la société des hommes l'eussent amolli et dépravé, c'était aussi pour qu'il fût un témoin digne de foi lorsqu'il annoncerait le Christ. Il vivait donc caché dans le désert jusqu'à ce qu'il plût à Dieu de le montrer au peuple d'Israël: «Jusqu'au jour de sa manifestation dans Israël».
Ce verset résume les trente premières années du Précurseur. Malgré leur grande
concision, les renseignements qu'il renferme suffisent pour nous montrer la manière dont Jean-Baptiste fut
préparé à ses hautes fonctions. - L'enfant croissait. Ce verbe indique la croissance physique de l'enfant.
Quoique issu de parents affaiblis par l'âge, Jean, grâce à une bénédiction spéciale du Seigneur, devenait tous
les jours plus robuste et se développait dans d'excellentes conditions. Sa croissance morale, marquée par les
mots « et se fortifiait en esprit », n'était pas moins rapide, car Dieu se plaisait à l'honorer de toute sorte de
dons. Et il demeurait dans les déserts. La solitude a-t-on dit, est la patrie des grands hommes. Ce fut la patrie
de l'austère Jean-Baptiste. Son exemple, Elie, avait vécu assez longtemps dans le désert ; pour lui, il y passa
la plus grande partie de sa vie, n'ayant sans doute que de rares communications avec les hommes, et plongé
tout entier en Dieu et dans les choses divines. On ignore l'âge exact auquel il quitta sa famille pour se retirer
dans le désert ; mais ce dut être d'assez bonne heure. Le pluriel dans les déserts semblerait supposer que Jean
n'avait pas de résidence fixe, mais qu'il passait d'une solitude à l'autre. Le désert de Juda, où S. Matthieu nous
le montre au début de son ministère, était précisément entouré de plusieurs autres districts presque inhabités
où il put se fixer tour à tour. Voyez notre commentaire S. Matth. p. 66. La gracieuse localité nommée « S.
Jean dans le désert » par les chrétiens, Ain-Kârim par les musulmans, et située à deux lieues aux S. O. de
Jérusalem, dans une vallée fertile où abondent les roses, les oliviers et les plants de vigne, n'a aucune chance
sérieuse d'avoir servi de retraite constante au Précurseur (voir Schegg, Evang. nach Lucas, t. 1, p. 106). C'est
là du moins qu'on honore d'une manière plus spéciale le mystère de sa vie cachée. - Jusqu'au jour de sa
manifestation. La manifestation de S. Jean-Baptiste eut lieu quand il commença à se manifester d'une
manière officielle comme le héraut et l'avant-coureur du Messie, 3, 1-3. - Les Esséniens ayant, d'après le
témoignage de Pline, Hist. Nat. 5, 17, plusieurs établissements dans le désert de Juda, il a été de mode dans
un temps de prétendre que Jean-Baptiste était entré en relations avec eux et avait adopté en partie leurs
doctrines. Mais l'Essénisme du Précurseur est aujourd'hui abandonné par tous les critiques sérieux, aussi bien
que l'Essénisme de Jésus (voyez l'Evang. Selon S. Matth. p. 71). Jean fut formé directement par
l'Esprit-Saint ; il n'avait donc pas besoin de leçons humaines, surtout de leçons provenant d'une source qui
était hérétique et schismatique au point de vue de la religion juive. - Parmi les nombreuses peintures
composées en vue de reproduire quelque scène de la vie de S. Jean au désert, on signale au premier rang
celles de Murillo et du Guerchin.