Luc 10, 15

Et toi, Capharnaüm, seras-tu élevée jusqu’au ciel ? Non ! Jusqu’au séjour des morts tu descendras !

Et toi, Capharnaüm, seras-tu élevée jusqu’au ciel ? Non ! Jusqu’au séjour des morts tu descendras !
Louis-Claude Fillion
Jésus vient de parler en général des villes qui se refuseront à recevoir ses envoyés, vv. 10-12. Cette pensée lui rappelle de tristes souvenirs personnels. Trois localités importantes des bords du lac, honorées entre toutes par sa présence, par son enseignement, par ses miracles, n'étaient-elles pas demeurées incrédules ? Au moment où il va quitter la Galilée pour n'y plus revenir, il lance contre elles un adieu terrible, qui consiste en un triple anathème, vv. 13-15. S. Matthieu, 11, 20-24 (voyez le commentaire), nous a déjà présenté ces malédictions de Jésus, et d'une manière un peu plus complète, mais avec un autre enchaînement. D'après sa chronologie elles se rattacheraient à Luc. 7, 35, par conséquent elles appartiendraient à une époque beaucoup moins avancée. Elles nous paraissent mieux convenir à la date que leur assigne notre évangéliste, car elles étaient alors plus justifiées. Divers auteurs admettent néanmoins qu'elles purent bien être répétées deux fois. - Corozaïn, Bethsaïda : deux cités juives, opposées à deux villes païennes, Tyr et Sidon, et menacées de châtiments beaucoup plus grands que ces dernières, qui eussent fait pénitence de leurs crimes, et renoncé à leurs trafics sordides, à leur luxe coupable, si elles avaient été témoins des prodiges de Jésus. - Revêtues d'un sac et assises dans la cendre (trait propre à S. Luc) est une belle personnification : Tyr et Sidon nous apparaissent comme deux pénitentes humblement assises à terre, revêtues d'un sac, la tête couverte de cendre. - Et toi, Capharnaüm… Des trois villes maudites, Capharnaüm était la plus ingrate, ayant été la plus privilégiée, puisqu'elle avait eu le bonheur de servir de résidence habituelle à Jésus. Aussi l'anathème qui la concerne a-t-il un caractère plus grave, plus emphatique. - Pour l'accomplissement intégral de cette prophétie, voyez l'Évangile selon S. Matthieu, p. 230. « Sur tout le pays la malédiction est tombée. Quoique toujours exquis dans sa beauté, il est maintenant désolé, dangereux même. Les oiseaux y chantent toujours par troupes innombrables, se jouant sur le cristal des eaux. Les ruisseaux accourent au lac des hauteurs voisines, le sein rempli de perles (comme dit le poète), et inondant leur sentier d'émeraudes. Les plantes aromatiques répandent encore leurs parfums quand le pied du passant les écrase, et les grands lauriers roses remplissent l'air comme autrefois de leur délicate senteur. Mais les vignobles et les vergers ont disparu ; les flottilles et les barques de pêcheurs cessent de traverser le lac ; le bruit des foules humaines ne se fait plus entendre, les sources du commerce prospère sont taries. Même les noms et les sites des bourgades et des villes sont tombés dans l'oubli, et, là où elles s'étalaient un jour brillantes et populeuses, jetant leurs ombres à travers les ondes dorées par le soleil, on ne discerne maintenant que des monticules gris, où les ruines sont trop ruines pour qu'on puisse y distinguer quelque chose ». Farrar, The Life of Christ, 23è édit. t. 2, p. 100 et 101. L'historien Josèphe, Bell. Jud. 3, 10, 8, immédiatement après avoir décrit, dans un passage célèbre, les splendeurs du lac et de la plaine de Gennésareth, raconte les maux affreux que les légions romaines firent subir à toute la contrée. Quelques pages plus haut, 3, 7, 31, il confessait que « c'était Dieu, à n'en pas douter, qui avait amené les Romains pour punir les Galiléens et pour faire détruire les villes par le