Luc 10, 18

Jésus leur dit : « Je regardais Satan tomber du ciel comme l’éclair.

Jésus leur dit : « Je regardais Satan tomber du ciel comme l’éclair.
Louis-Claude Fillion
Au retour des soixante-douze disciples S. Luc rattache trois admirables paroles de Jésus. Cfr. v. 21 et 23. Les vv. 18-20 renferment la première. - Je voyais Satan… Assez généralement, les Pères (S. Cyprien, S. Ambroise, S. Jean Chrysostome, etc.), aiment à supposer que Jésus fait appel en ce passage à ses souvenirs et que, pour donner une leçon tacite d'humilité aux Soixante-douze, trop humainement affectés de leur succès sur les démons, il leur propose le terrible châtiment de Lucifer, comme s'il leur eût dit : Défiez-vous de l'orgueil, car c'est lui qui a précipité Satan de son trône glorieux ! De mes propres yeux je l'ai vu autrefois tomber du ciel. Mais les meilleurs exégètes catholiques des temps modernes, entre autres Maldonat, Corneille de Lapierre, D. Calmet, s'accordent à penser, d'un côté que rien n'autorise à prendre en mauvaise part la joie et les paroles des disciples, de l'autre que l'intuition à laquelle Notre-Seigneur fait allusion est loin de remonter si haut. Elle avait eu lieu, disent-ils, pendant la mission même des Soixante-douze. Ceux-ci venaient de raconter joyeusement à leur Maître leurs glorieux triomphes sur les puissances infernales. Vous ne m'apprenez rien, répondit le Sauveur, car, vous suivant d'un regard prophétique, je voyais Satan dépossédé partout, sur votre parcours, de son pouvoir usurpé. Nous trouvons, comme D. Calmet, ce second sentiment « plus simple et plus littéral ». Dans tous les cas, quelle majesté dans cette courte description de Jésus ! Pouvait-il mieux dépeindre les effets merveilleux de son Incarnation, les victoires remportées par le royaume de Dieu sur le royaume de l'esprit mauvais ? « Maintenant a lieu le jugement de ce monde ; maintenant le prince de ce monde va être jeté dehors » (Joan. 12, 31). Et la parole de Jésus est toujours vraie. Le « je voyais » dure encore, puisque les bons prêtres continuent chaque jour l’œuvre des premiers disciples. - Tomber du ciel comme la foudre : magnifique métaphore, probablement empruntée à Isaïe, 14, 9-15. Ces mots expriment une chute rapide en même temps que la perte d'un grand pouvoir. Comparez les figures analogues de Cicéron : « tomber des astres », ad Attic. Ep. 3, 21 ; « retrancher du ciel », Phil. 2, 42.