Luc 16, 21
Il aurait bien voulu se rassasier de ce qui tombait de la table du riche ; mais les chiens, eux, venaient lécher ses ulcères.
Il aurait bien voulu se rassasier de ce qui tombait de la table du riche ; mais les chiens, eux, venaient lécher ses ulcères.
L'insolence et l'orgueil des riches se révèlent ici à des signes non équivoques: «Et personne ne lui en donnait». Les riches, en effet, sont si oublieux de leur condition, qu'ils s'imaginent être d'une nature supérieure, et trouvent dans la misère même des pauvres un nouveau stimulant pour leurs voluptés, ils se moquent du pauvre, ils insultent aux malheureux, et ils vont jusqu'à dépouiller ceux dont ils auraient dû prendre pitié.
Toute pauvreté n'a pas le privilège de la sainteté, comme aussi toute richesse n'est pas nécessairement criminelle, mais de même que c'est la vie molle et sensuelle qui déshonore les richesses, c'est la sainteté qui rend la pauvreté recommandable.
Il semble que ce soit ici une histoire plutôt qu'une parabole, puisqu'il y a désignation précise du nom.
«Il y avait», et non: Il y a, car il a passé comme une ombre fugitive.
Cet homme recouvrait de pourpre et de soie, la cendre, la poussière et la terre, ou bien la cendre, la poussière et la terre portaient la pourpre et la soie. Sa table répondait à ses vêtements. Il en est ainsi de nous, telle est notre table, tels sont nos vêtements: «Et il faisait tous les jours une chère splendide».
Dans la parabole, au contraire, on propose un exemple et on passe les noms sous silence. Le mot Lazare signifie qui est secouru ; en effet, il était pauvre et il avait Dieu pour soutien.
Il était couché devant la porte, afin que le riche ne pût dire: Je ne l'ai pas vu, personne ne m'en a parlé. Il le voyait donc toutes les fois qu'il entrait et sortait. Le Sauveur ajoute que ce pauvre était couvert d'ulcères pour faire ressortir par ce trait toute la cruauté du riche. O le plus malheureux des hommes, vous voyez votre corps dans celui de votre semblable, mourant et étendu à votre porte, et vous n'en avez aucune pitié ! Si vous êtes peu sensible aux commandements de Dieu, souvenez-vous au moins de votre condition, et craignez d'être un jour réduit à ce triste état. Mais encore la maladie trouve-t-elle quelque soulagement dans les richesses, quand elle les possède; qu'elle est donc grande la misère de ce pauvre, puisque couvert de tant de plaies, il oublie ses douloureuses souffrances pour ne se souvenir que de la faim qu'il éprouve: «Il désirait se rassasier des miettes qui tombaient de la table du riche», et semblait lui dire: Faites-moi l'aumône de ce que vous rejetez de votre table, et faites-vous un gain avec ce que vous perdez.
Ces animaux compatissants viennent lécher ces plaies qu'aucun homme ne daignait laver et panser.
En effet, l'avarice des riches est insatiable, elle n'a ni crainte pour Dieu, ni égard pour les hommes, elle n'épargne pas son père, elle trahit les droits sacrés de l'amitié, elle opprime la veuve et s'empare des biens de l'orphelin.
Ou encore ce récit du mauvais riche et de Lazare, est présenté sous forme de parabole, pour apprendre à ceux qui possèdent de grandes richesses, qu'ils encourront une sévère condamnation, s'ils refusent de secourir les nécessités des pauvres. Une tradition juive rapporte qu'il y avait alors à Jérusalem un homme nommé Lazare, accablé tout à la fois sous le poids de l'indigence et de la maladie, et c'est lui que Notre-Seigneur prend ici pour exemple pour donner plus de clarté à ses divins enseignements.
Ajoutez que le pauvre voyait tous les jours le riche s'avancer, entouré d'un nombreux cortége de gens obséquieux, tandis qu'il était complètement délaissé dans son infirmité et dans son indigence, car une preuve évidente que personne ne venait le visiter, c'est que les chiens venaient paisiblement lécher ses ulcères: «Et les chiens venaient, ajoute le Sauveur, et léchaient ses ulcères».
Dans un seul fait, Dieu exerce un double jugement. Il permet que le pauvre Lazare soit étendu devant la porte du riche, afin que ce riche impitoyable aggravât ainsi la sévérité de sa condamnation, et aussi pour que le pauvre augmentât ses droits à la récompense, car le premier voyait tous les jours celui dont il devait avoir pitié, et le second avait sans cesse sous les yeux ce qui faisait le sujet de son épreuve et de son mérite.
Si la recherche des vêtements fins et précieux n'était pas coupable, le Sauveur n'aurait pas détaillé avec tant de soin ces diverses circonstances. En effet, on ne désire de luxe dans les vêtements, que par un motif de vaine gloire, pour obtenir plus de considération; car quel est celui qui voudrait se revêtir d'habits somptueux, s'il ne devait être vu par personne?
Remarquons ici avec attention qu'il est presque impossible de faire fréquemment des festins sans se rendre coupable; car presque toujours la volupté est la compagne inséparable de ces festins, lorsque le corps est amolli par les plaisirs de la terre, le coeur s'abandonne lui-même à une joie déréglée.
Remarquez encore que dans le peuple on connaît bien mieux le nom des riches que celui des pauvres; or Notre-Seigneur nous fait connaître ici le nom du pauvre et passe sous silence le nom du riche, pour nous apprendre que Dieu connaît et chérit les humbles, tandis qu'il ne connaît point les superbes. Une nouvelle épreuve venait s'ajouter à sa pauvreté, il était victime à la fois de la pauvreté et de la souffrance: «Il était couché à sa porte, couvert d'ulcères».
Le Sauveur venait d'exhorter à se faire des amis avec les richesses d'iniquité, et comme les pharisiens se moquaient de ses enseignements, il les confirme par l'exemple suivant: «Il y avait un homme riche», etc.
La pourpre est la couleur des habits des rois, on la tire de coquillages marins par une incision faite avec le fer. Ce que la Vulgate traduit par byssus est une espèce de lin très-blanc et très-doux.
Tableau de la plus
extrême misère après celui de la plus grande félicité temporelle. - Nommé Lazare. « Le monde donnait un
nom au riche et taisait celui du pauvre ; le Sauveur tait le nom du riche et mentionne celui du pauvre », S.
Augustin. Ce nom de Lazare, également porté par l'ami de Jésus, frère de Marthe et de Marie, Joan. 11, 1, est
habituellement regardé comme une forme abrégée de Eléazar, « secours de Dieu », Lightfoot, Hor. hebr. In h.
l., démontre fort bien, par divers exemples tirés de la littérature rabbinique, que parfois le même personnage
était indifféremment appelé Lazare et Eléazar. C'était d'ailleurs une dénomination très commune à l'époque
de Notre-Seigneur, ainsi qu'on le voit par les écrits de Josèphe. Elle convenait admirablement au pauvre qui
nous est présenté ici par le divin Maître, car elle exprimait d'une manière symbolique sa confiance en Dieu,
sa patience au milieu de ses misères. Aussi bien, quoique aucun autre nom propre n'apparaisse dans les
paraboles évangéliques, nous ne croyons pas qu'elle suffise à elle seule pour prouver que, dans ce cas spécial,
Jésus décrivait une histoire réelle et non un simple fait imaginaire. Sur cette question, controversée dès les
temps les plus reculés, voyez S. Irénée, contr. Her. 4, 2, 4, Théophylacte, h. l., D. Calmet, Maldonat,
Corneille de Lapierre, Schegg, etc. - Qui était couché à sa porte. Le verbe grec signifie littéralement « avait
été jeté », comme si les amis de Lazare l'eussent apporté et abandonné à la porte du riche, dans la pensée que
celui-ci lui viendrait largement en aide. Lazare est couché à la porte cochère, l'entrée principale. - Couvert
d'ulcères. Pour Lazare, la maladie, et quelle affreuse maladie !, s'ajoutait au dénuement le plus absolu. Dans
sa détresse, ce malheureux désirait ardemment (Cfr. 15, 16) se rassasier des miettes qui tombaient de la table
du riche ; mais personne ne lui en donnait, car les serviteurs, façonnés à l'image de leur maître, étaient
inhumains comme lui. Bien que cette dernière phrase, qui manque dans le texte primitif, soit probablement
apocryphe, elle ne paraît que trop conforme à la réalité extérieure. La glose de la Vulgate correspond donc
parfaitement au sens général du récit. - Mais les chiens venaient… Trait pittoresque, dramatique et touchant,
quelque signification qu'il faille d'ailleurs lui attribuer. Les exégètes se divisent en effet à son sujet, les uns le
regardant comme une antithèse, les autres y voyant une gradation ascendante. Ceux-là (S. Jérôme, Hugues de
S. Victor, Érasme, Wetstein, Stier, Trench, etc.), pensent, conformément à la croyance populaire qui attribue à
la langue des chiens une vertu médicinale, que la narration oppose sciemment à la cruauté du mauvais riche
envers Lazare la pitié de bêtes dénuées de raison. Ceux-ci, et c'est le plus grand nombre (entre autres
Jansénius, Fr. Luc. Reischl), voient dans ce trait final un indice de la plus extrême misère : incapable de se
défendre, Lazare devait subir les cruels coups de langue des chiens l'Orient, qui errent sans maître dans les
rues, constamment affamés. La particule « aussi », et la coutume biblique de présenter ces animaux sous un
jour peu favorable, semblent appuyer le second sentiment.
Sur le plan international, celui des rapports entre les Etats ou, selon le langage courant, entre les divers «mondes», il est nécessaire qu'il y ait un respect total de l'identité de chaque peuple, avec ses caractéristiques historiques et culturelles. Il est également indispensable, comme le souhaitait déjà l'encyclique Populorum progressio, de reconnaître à chaque peuple le même droit à «s'asseoir à la table du festin» au lieu d'être comme Lazare qui gisait à la porte, tandis que «les chiens venaient lécher ses ulcères» (cf. Lc 16, 21). Les peuples aussi bien que les individus doivent jouir de l'égalité fondamentale sur laquelle est basée, par exemple, la Charte de l'Organisation des Nations Unies, égalité qui est le fondement du droit de tous à participer au processus de développement intégral.