Luc 16, 22
Or le pauvre mourut, et les anges l’emportèrent auprès d’Abraham. Le riche mourut aussi, et on l’enterra.
Or le pauvre mourut, et les anges l’emportèrent auprès d’Abraham. Le riche mourut aussi, et on l’enterra.
2° Nous sommes tout à coup
transportés dans l'autre monde, où nous retrouvons les deux héros de notre parabole. Mais leurs rôles sont
désormais bien changés ! Cette fois, c'est Lazare qui nous est le premier présenté. - Le mendiant mourut. La
mort vint enfin le délivrer de ses cruelles souffrances ; bien plus, nous le voyons, à peine entré dans l'autre
vie, comblé d'honneurs et jouissant des saints délices réservés aux élus. - Emporté par les anges. Celui que
les hommes avaient autrefois délaissé est maintenant servi par les esprits célestes, qui le portent doucement
au séjour des bienheureux. « Ils accourent en grand nombre, s'écrie S. Jean Chrysostome, l. c., afin de former
un chœur joyeux ; chacun des anges se réjouit de toucher à ce fardeau, car ils aiment à se charger de tels
fardeaux pour conduire les hommes au royaume des cieux ». C'était la croyance des Juifs que les âmes des
justes étaient ainsi portées par les anges au paradis. « Ne peuvent entrer dans le Paradis que les justes. Leurs
âmes y sont amenées par les anges », Targum Cant. 4, 12. Cfr. Lightfoot, Hor. Hebr. h. l. ; voyez aussi Thilo,
Cod. apocryphus N. T. t. 1, pp. 25, 45, 777. - Dans le sein d'Abraham. Autre image empruntée par
Notre-Seigneur à la théologie rabbinique. D'ailleurs presque toutes les couleurs qu'il emploie ici pour peindre
l'état des bons et des méchants dans l'autre vie sont extraites des idées qui avaient alors cours en Palestine.
Voyez Schegg, Evang. nach Lukas, t. 2, p. 486 et ss. Ces idées étaient généralement exactes, et, en s'y
accommodant, le Sauveur ne pouvait que rendre sa narration plus saisissante. Or, comme le démontre
Lightfoot (l. c.) à l'aide plusieurs passages du Talmud, les Juifs contemporains de Jésus se servaient de trois
locutions principales pour désigner le séjour des bienheureux : dans le jardin d'Eden ; sous le trône de gloire ;
dans le sein d'Abraham. Cette dernière exprimait d'une façon toute gracieuse le repos et le bonheur des élus,
« Cette métaphore est tirée des parents qui, pour les consoler, reçoivent dans leur sein, leurs enfants fatigués
par une longue marche, ou de retour à la maison après un épuisant voyage, ou se lamentant pour tout autre
motif », Gerhard, Loc. Theolog. 27, 8, 3. Cfr. Lud. Capellus, Spicilegium, p. 56. Nous la retrouvons, légèrement amplifiée, au 4è livre (apocryphe) des Macchabées. Par l'intermédiaire des SS. Pères (voyez
Suicer, Thesaurus ; S. Augustin, Epist. 187 ; Confess. 9, 3 ; de Anima, l. 4, c. 16), elle passa dans la liturgie
et la théologie catholiques, où elle représente tantôt le limbe des patriarches, tantôt le ciel proprement dit
(« Que les anges t'emmènent dans le sein d'Abraham ». Prières des agonisants). Cfr. S. Thomas d'Aq., Summ.
Theolog. p. 3, q. 52 art. 2 , et Mamachius, de Animabus justorum in sinu Abrahae ante Christi mortem, Rome
1766, t. 2, p. 834 et ss., 1014 et s. L'art chrétien, surtout au 13è siècle, représentait volontiers le ciel sous
cette naïve figure. On la voit sculptée à S. Étienne de Bourges, à Moissac, à Vézelay, à Notre-Dame de
Reims (voir Ch. Cerf, Histoire et description de N.-D. de Reims, t. 2, p. 49 et s.) Comparez du reste
l'expression analogue du quatrième Évangile, 1, 18, « le Fils unique, qui est dans le sein du Père ». - Le riche
mourut aussi. Alors se réalisa la parole de Job, 21, 13 : « Ils achèvent leurs jours dans le bonheur, et
descendent en paix au séjour des morts ». Cette mort semble avoir suivi de près celle de Lazare. - Et il fut
enseveli. Dans le texte grec, la phrase s'arrête après ce verbe, de sorte que les mots en enfer commencent une
nouvelle proposition. Ceux qui préfèrent cette construction mettent volontiers en relief la mention expresse
de la sépulture du riche. Il fut enseveli, c'est-à-dire qu'on lui fit des funérailles splendides, conformes à sa
fortune et à son rang. Le récit était resté complètement muet sur l'humble enterrement de Lazare. Mais la
ponctuation de la Vulgate nous paraît plus claire, plus naturelle et plus conforme au parallélisme. - En enfer.
Par enfer il faut entendre ici le séjour des morts en général, le Scheôl hébreu, divisé, d'après le contexte, en
deux parties distinctes, le sein d'Abraham pour les justes, la Géhenne pour les méchants ; mais,
naturellement, c'est au fond de la géhenne que le mauvais riche fut plongé.
Le sein d’Abraham ; c’est-à-dire le lieu de repos des âmes des saints, jusqu’à ce que le Sauveur eût ouvert le ciel par sa mort. ― Le riche mourut aussi et fut enseveli dans l’enfer. « Le mauvais riche, dit saint Jean Chrysostome, n’est pas damné parce qu’il fut riche, mais qu’il ne fut pas miséricordieux. Le mauvais riche, dit saint Grégoire, n’est pas damné pour avoir dérobé le bien d’autrui, mais pour n’avoir pas fait de son propre bien un légitime usage. Le mauvais riche, dit saint Ambroise, n’est pas damné pour avoir frappé le pauvre, mais pour avoir été réellement homicide envers lui, en le laissant mourir sans secours. » (Mgr PICHENOT.)
Du début (de l’existence) (cf. Mt 18, 10) au trépas (cf. Lc 16, 22), la vie humaine est entourée de leur garde (cf. Ps 34, 8 ; 91, 10-13) et de leur intercession (cf. Jb 33, 23-24 ; Za 1, 12 ; Tb 12, 12). " Chaque fidèle a à ses côtés un ange comme protecteur et pasteur pour le conduire à la vie " (S. Basile, Eun. 3, 1 : PG 29, 656B). Dès ici-bas, la vie chrétienne participe, dans la foi, à la société bienheureuse des anges et des hommes, unis en Dieu.
Le séjour des morts où le Christ mort est descendu, l’Écriture l’appelle les enfers, le Shéol ou l’Hadès (cf. Ph 2, 10 ; Ac 2, 24 ; Ap 1, 18 ; Ep 4, 9) parce que ceux qui s’y trouvent sont privés de la vision de Dieu (cf. Ps 6, 6 ; 88, 11-13). Tel est en effet, en attendant le Rédempteur, le cas de tous les morts, méchants ou justes (cf. Ps 89, 49 ; 1 S 28, 19 ; Ez 32, 17-32) ce qui ne veut pas dire que leur sort soit identique comme le montre Jésus dans la parabole du pauvre Lazare reçu dans " le sein d’Abraham " (cf. Lc 16, 22-26). " Ce sont précisément ces âmes saintes, qui attendaient leur Libérateur dans le sein d’Abraham, que Jésus-Christ délivra lorsqu’il descendit aux enfers " (Catech. R. 1, 6, 3). Jésus n’est pas descendu aux enfers pour y délivrer les damnés (cf. Cc. Rome de 745 : DS 587) ni pour détruire l’enfer de la damnation (cf. DS 1011 ; 1077) mais pour libérer les justes qui l’avaient précédé (cf. Cc. Tolède IV en 625 : DS 485 ; Mt 27, 52-53).
La mort met fin à la vie de l’homme comme temps ouvert à l’accueil ou au rejet de la grâce divine manifestée dans le Christ (cf. 2 Tm 1, 9-10). Le Nouveau Testament parle du jugement principalement dans la perspective de la rencontre finale avec le Christ dans son second avènement, mais il affirme aussi à plusieurs reprises la rétribution immédiate après la mort de chacun en fonction de ses œuvres et de sa foi. La parabole du pauvre Lazare (cf. Lc 16, 22) et la parole du Christ en Croix au bon larron (cf. Lc 23, 43), ainsi que d’autres textes du Nouveau Testament (cf. 2 Co 5, 8 ; Ph 1, 23 ; He 9, 27 ; 12, 23) parlent d’une destinée ultime de l’âme (cf. Mt 16, 26) qui peut être différente pour les unes et pour les autres.