Luc 4, 4

Jésus répondit : « Il est écrit : L’homme ne vit pas seulement de pain. »

Jésus répondit : « Il est écrit : L’homme ne vit pas seulement de pain. »
Origène
Lorsque vous voyez que Jésus est plein de l'Esprit saint, et que vous lisez dans les Actes, que les Apôtres furent remplis de l'Esprit saint, gardez-vous de penser que les Apôtres ont reçu l'Esprit saint dans la même mesure que le Sauveur. En effet, lorsque vous dites: Ces vases sont pleins de vin ou d'huile, vous ne voulez pas toujours dire qu'ils en contiennent la même quantité; de même aussi Jésus et Paul étaient pleins de l'Esprit saint, mais le vase de Paul était beaucoup plus petit que celui de Jésus, et cependant chacun de ces vases était rempli suivant sa capacité. Or, le Sauveur, après avoir été baptisé et rempli de l'Esprit saint, qui était descendu des cieux sur sa tête sous la forme d'une colombe, était conduit par l'Esprit, car tous ceux qui sont poussés par l'Esprit de Dieu, sont enfants de Dieu ( Rm 8), mais Jésus était le Fils propre de Dieu, d'une manière bien plus excellente que tous les autres.

Jésus fut tenté pendant quarante jours, et nous ne savons quelles furent ces tentations, car peut-être les Évangélistes n'en disent rien, parce qu'elles étaient trop fortes pour être décrites.

Le père à qui son fils demande du pain ne lui donne pas une pierre, mais le démon qui est un ennemi artificieux et trompeur, donne une pierre pour du pain.

Nous pouvons dire que jusqu'à ce jour le démon, en leur montrant une pierre, excite tous les hommes à dire: «Commandez à cette pierre qu'elle devienne du pain». Quand vous voyez, en effet, les hérétiques manger au lieu de pain, le mensonge de leurs fausses doctrines, soyez certain que leurs discours sont cette pierre qui leur est montrée par le démon.
Saint Gregoire de Nazianze
Le Sauveur a jeûné quarante jours sans prendre aucune nourriture, car il était Dieu; mais pour nous, nous devons proportionner la pratique du jeûne à nos forces, bien que le zèle persuade à quelques-uns qu'ils peuvent aller bien au delà.

En effet, un aliment matériel ne peut devenir la nourriture d'une nature incorporelle.
Saint Basile le Grand
Il ne provoque point l'ennemi en le défiant par ses paroles, mais en l'excitant par cette démarche, car le démon se plaît dans le désert et ne peut supporter les villes, où l'union des habitants est pour lui un sujet de tristesse.

Ou bien encore, on peut dire que le Seigneur fut quarante jours sans être tenté, car le démon voyant qu'il jeûnait sans éprouver le besoin de la faim, n'osait s'approcher de lui: «Et il ne mangea rien pendant ces Jours», etc. Notre-Seigneur a voulu jeûner pour nous apprendre que la tempérance est nécessaire à celui qui veut se préparer aux combats des tentations.

Cependant il ne faut point macérer sa chair en la privant de nourriture, jusqu'à lui faire perdre toute son énergie naturelle, oui jusqu'à réduire l'esprit à une extrême langueur par suite de l'épuisement complet du corps. Aussi Notre-Seigneur ne prolongea son jeûne de la sorte qu'une seule fois, et dans tout le reste de sa v ie il se conforma pour la direction de son corps aux lois ordinaires de la nature, comme Moïse et Elie avaient fait eux-mêmes.

Il conseillait au Sauveur d'apaiser sa faim avec, des pierres, c'est-à-dire, de détourner le désir des aliments naturels sur des choses qui sont en dehors de toute condition alimentaire.

Mais comme il est au-dessus de la nature de l'homme d'éprouver le besoin de la faim, Notre-Seigneur se soumet à ce besoin qu'il sait n'être point un péché; et il laisse, lorsque telle est sa volonté la nature humaine soumise aux lois de sa condition: «Et quand ces jours furent passés, il eut faim». Cette faim n'est point chez lui l'effet d'une nécessité naturelle, mais il veut par là provoquer le démon au combat. En effet, le démon croyant que cette faim est l'indice nécessaire de sa faiblesse, entreprend de le tenter, et cherchant pour ainsi dire à inventer de nouveaux moyens de tentation, il conseille au Sauveur, qu'il voit souffrant de la faim, d'apaiser sa faim avec des pierres changées en pain: «Si vous êtes le Fils de Dieu, dites à cette pierre qu'elle devienne du pain».

Notre-Seigneur Jésus-Christ, en repoussant les tentations, ne délivre pas la nature de la faim, comme si elle était une cause de mal, puisqu'elle a pour but, au contraire, la conservation de notre vie; mais en maintenant la nature dans ses propres limites, il nous apprend quelle est sa nourriture: «Jésus lui répondit: L'homme ne vit pas seulement de pain», etc.
Saint Grégoire de Nysse
La vertu ne se nourrit donc point de pain, et ce n'est pas la chair des animaux qui donne à l'âme la santé et l'embonpoint spirituel; la vie surnaturelle se développe et s'accroît par d'autres aliments, sa nourriture c'est la tempérance, son pain c'est la sagesse, la justice est son mets le plus exquis, la fermeté sa boisson, son plaisir le goût de la vertu.
Saint Ambroise
Jésus était donc poussé dans le désert tout à la fois, par un conseil divin pour provoquer le démon au combat, car si le démon ne l'eût point attaqué, le Sauveur n'en eût point triomphé dans notre intérêt; pour accomplir un mystère, c'est-à-dire, pour délivrer de l'exil cet Adam qui avait été chassé du paradis dans le désert; enfin pour nous apprendre par son exemple que le démon v oit avec un oeil d'envie ceux qui tendent à une vie plus parfaite, et que nous devons alors nous tenir sur nos gardes, pour ne pas nous exposer à perdre par la faiblesse de notre âme la grâce du sacrement que nous avons reçu: «Et il fut tenté par le démon».

Trois choses donc concourent puissamment au salut de l'homme, la grâce du sacrement, la solitude, le jeûne. Nul n'est couronné s'il n'a combattu en se conformant aux lois du combat ( 2Tm 1,5 ), et personne n'est admis aux combats de la vertu avant d'être purifié des souillures de ses fautes et consacré par l'effusion de la grâce céleste.

(cf. Gn 7,4 Gn 7,12 Dt 9,9 Dt 10,10 Ex 16,35 Nb 14,33 Dt 8,2 Jos 5,6 Ac 7,36 ) Vous reconnaissez ce nombre mystérieux de quarante jours, vous vous rappelez que les eaux du déluge tombèrent sur la terre pendant le même nombre de jours; qu'après quarante jours sanctifiés par le jeûne, Dieu ramena la douceur d'un ciel plus serein; que c'est après quarante jours de jeûne que Moïse fut jugé digne de recevoir la loi de la bouche de Dieu, et que pendant quarante années les patriarches furent nourris dans le désert du pain des anges.

Les trois tentations du Sauveur nous enseignent que le démon cherche surtout à blesser notre âme par les trois traits de la sensualité, de la vaine gloire et de l'ambition. Il commence par la tentation qui avait autrefois triomphé d'Adam. Apprenons donc à éviter la sensualité, à fuir l'impureté, car ce sont les traits dont le démon veut nous percer. Mais que veulent dire ces paroles: «Si vous êtes le Fils de Dieu ?» C'est que le démon savait bien que le Fils de Dieu devait venir sur la terre, mais qu'il ne croyait pas qu'il dût venir revêtu d'une chair passible et mortelle. Le démon cherche tout à la fois à savoir ce qu'est le Sauveur et à le tenter, il fait profession de croire à sa puissance comme Dieu, et en même temps il se joue de lui comme homme.

Vous voyez de quelles armes se sert le Sauveur pour défendre l'homme contre les insinuations de l'esprit du mal qui lui suggère la tentation de la sensualité. Il n'use pas ici de sa puissance comme Dieu (quel avantage m'en reviendrait-il ?) mais il recherche comme homme le secours qui est à la portée de tous les hommes, et tout occupé de la nourriture des divins enseignements, il oublie la faim du corps, pour obtenir plus sûrement la nourriture de la parole divine. En effet, celui qui fait profession de suivre le Verbe ou la parole de Dieu, ne peut plus faire d'un pain matériel l'objet de ses désirs, car les choses divines sont infiniment au-dessus des choses de la terre. Ajoutons que par ces paroles: «L'homme ne vit pas seulement de pain». Notre-Seigneur fait voir que son humanité seule a été soumise à la tentation, c'est-à-dire, ce qu'il avait pris de notre nature et non pas sa divinité.
Saint Jean Chrysostome
Par un dessein plein de sagesse, le Sauveur ne voulut point jeûner plus longtemps que n'avait fait Moïse et Elie, pour ne point donner lieu de croire qu'il n'avait qu'un corps imaginaire et fantastique, ou qu'il avait pris une nature supérieure à la nôtre.
Saint Augustin
Ce nombre quarante est le symbole de cette vie laborieuse, pendant laquelle, sous la conduite et le commandement de Jésus-Christ notre roi; nous combattons contre le démon. Ce nombre, en effet, signifie la durée de la vie présente; ainsi chaque année se divise en quatre parties égales; de plus le nombre quarante contient quatre fois dix, et ces quatre dizaines forment quarante, multipliées par le chiffre qui part de l'unité pour aller jusqu'au nombre quatre. Nous voyons donc ici que le jeûne de quarante jours (où l'humiliation de l'âme) fut consacré sous la loi et les prophètes par Moïse et par Elie, et sous la loi de l'Évangile par le jeûne du Seigneur lui-même.
Saint Cyrille d'Alexandrie
Bien longtemps auparavant Dieu avait dit: «Mon Esprit ne demeurera pas dans ces hommes, parce qu'ils ne sont que chair; mais aussitôt que nous sommes enrichis de la régénération par l'eau et par l'Esprit, nous sommes devenus par l'infusion de l'Esprit saint, participants de la nature divine. Or celui qui est le premier né d'un grand nombre de frères, a reçu le premier l'Esprit saint qu'il communique lui-même aux autres, afin que la grâce de l'Esprit saint pût arriver par lui jusqu'à nous.

Le voilà descendu au rang des combattants, celui qui comme Dieu ordonne et règle les combats; le voilà parmi ceux qui sont couronnés, celui qui place la couronne sur le front des saints.

Ou bien dans un autre sens, notre corps qui est d'origine terrestre, se nourrit d'aliments terrestres, mais l'âme raisonnable puise dans le Verbe divin la force nécessaire à la santé spirituelle.
Saint Grégoire le Grand
Cependant l'ennemi de notre salut ne put ébranler par la tentation l'âme du médiateur de Dieu et des hommes; il a daigné se soumettre extérieurement à la tentation, mais en même temps son âme demeurait intérieurement unie à la divinité sans que rien pût l'en séparer.
Saint Bède le Vénérable
Afin que personne ne pût douter quel était cet Esprit qui, au récit des Évangélistes, avait conduit Jésus dans le désert; saint Luc dit en termes exprès: «Il était poussé par l'Esprit dans le désert pendant quarante jours». Il n'est donc pas possible de supposer que l'esprit immonde ait pu avoir quelque autorité sur celui qui, rempli de l'Esprit saint, agissait en tout d'après sa propre volonté.
Commentaire grec
Mais comment le Sauveur a-t-il été comme entraîné malgré lui, alors que nous-mêmes agissons en tout dans la plénitude de notre libre arbitre? Il faut donc entendre ces paroles: «Il était poussé par l'Esprit» dans ce sens, que c'est volontairement qu'il a embrassé cette vie de solitude spirituelle pour donner lieu au démon de le tenter.
Saint Théophylacte d'Ohrid
Notre-Seigneur Jésus-Christ a voulu être tenté après son baptême, pour nous apprendre qu'après notre baptême nous devons nous attendre à la tentation: «Jésus, plein de l'Esprit saint, revint des bords du Jourdain», etc.

C'est-à-dire, le pain n'est pas le seul aliment qui entretienne l'existence de l'homme, le Verbe de Dieu peut lui seul alimenter et nourrir tout le genre humain. C'est ainsi que le peuple d'Israël fut nourri pendant qua rante ans de la manne qu'il recueillait ( Ex 16, 15), et des oiseaux qui lui furent envoyés ( Nb 11, 32); ainsi par l'ordre de Dieu, des corbeaux pourvurent miraculeusement à la nourriture d'Elie (4R 4, 7).
Louis-Claude Fillion
Nous passons à l'histoire proprement dite de la tentation de Jésus. Elle consiste en trois assauts consécutifs du démon et en trois victoires du Messie. La première suggestion mauvaise de l'esprit tentateur est habilement rattachée à la faim dont souffrait le divin Maître. Les anciens peintres, se conformant à ce détail du troisième Évangile, mettaient une pierre à la main de Satan au moment où il tentait Jésus pour la première fois. Notez aussi l'entrée en matière Si vous êtes le Fils de Dieu. Le démon avait plus d'une raison de supposer que Jésus était le Christ ; néanmoins il pouvait lui rester quelques doutes, et c'est pour cela que « Il l’a tenté pour savoir s'il était le Christ » St. Augustin, de Civit. Dei, 11, 21. Il pensait l'obliger ainsi à se révéler lui-même. - Jésus lui répondit. On a invité Notre-Seigneur à faire usage de ses pouvoirs surnaturels pour satisfaire le besoin qui le presse. Il répond d'une manière aussi forte que simple, en s'appropriant un texte biblique (cfr. Deut. 8, 3), qu'il se gardera bien de se secourir lui-même de la sorte : ce n'est pas pour un motif personnel qu'il fera des miracles. Après tout, Dieu connaît les nécessités humaines et, d'une seule parole, il peut procurer à ses amis, l'histoire sainte est là pour le démontrer, une abondante nourriture. Les mots non seulement de pain désignent le pain ordinaire et en général tout ce qui peut servir d'aliment à l'homme. A ce pain Jésus oppose des mets fournis miraculeusement par Dieu : de toute parole de Dieu. S. Matthieu cite plus complètement le texte d'après les Septante ; S. Luc n'en donne qu'un sommaire.