Luc 4, 8

Jésus lui répondit : « Il est écrit : C’est devant le Seigneur ton Dieu que tu te prosterneras, à lui seul tu rendras un culte. »

Jésus lui répondit : « Il est écrit : C’est devant le Seigneur ton Dieu que tu te prosterneras, à lui seul tu rendras un culte. »
Origène
On peut encore expliquer ces paroles dans un sens tout différent. Deux rois veulent régner ici-bas à l'envi l'un de l'autre, le roi du péché, le démon veut régner sur les pécheurs; le roi de la justice, Jésus-Christ sur les justes. Or le démon, sachant bien que le Christ venait détruire son royaume, lui fait voir tous les royaumes du monde, non pas le royaume des Perses et des Mèdes, mais son royaume à lui, comment il règne sur le monde, c'est-à-dire, comment il règne sur les uns par la fornication, sur les autres par l'avarice, et il lui fait voir en un instant, c'est-à-dire, dans la durée du temps présent, ce qu'il obtient en un instant en face de l'éternité. Le Sauveur n'avait pas besoin qu'il lui mît devant les yeux un plus long tableau des choses du monde; aussitôt qu'il eut ouvert les yeux pour regarder, il vit d'un seul coup d'oeil le règne du péché et l'esclavage de ceux qui étaient soumis à la domination des vices. Le démon lui tient donc ce langage: «Vous êtes venu pour me disputer l'empire, adorez-moi, et je vous donne le royaume qui est en ma possession. Mais le Seigneur veut régner, il est vrai, mais comme étant la justice, c'est-à-dire qu'il veut régner sans péché; il veut que les nations lui soient soumises, pour qu'il les place sous l'empire de la vérité, et il ne veut pas de ce règne qui le soumettrait lui-même à l'empire du démon: «Et Jésus lui répondit: Il est écrit: Vous adorerez le Seigneur votre Dieu», etc.

Ou bien dans un autre sens: Je veux que tous les hommes me soient soumis, afin qu'ils adorent le Seigneur leur Dieu, et ne servent que lui seul; et tu veux que je commence par donner l'exemple de la prévarication, moi qui suis venu pour détruire le péché?
Saint Ambroise
L'Évangéliste fait remarquer avec justesse que ce fut en un instant qu'il montra tous les royaumes du monde, et il veut exprimer ainsi la fragilité de cette puissance passagère, bien plus que le tableau rapide que le démon fit passer sous les yeux du Sauveur, car toutes ces choses passent en un moment, et souvent la gloire du siècle disparaît avant qu'elle soit venue.

Il est dit ailleurs: «Toute puissance vient de Dieu», c'est donc à Dieu qu'il appartient de donner, de régler la puissance, mais c'est du démon que vient l'ambition du pouvoir; ce n'est pas le pouvoir qui est mauvais, c'est l'usage condamnable qu'on en fait. Quoi donc ! Est-ce un bien que d'exercer le pouvoir? que de rechercher les honneurs? C'est un bien d'exercer le pouvoir lorsqu'on vous le défère, mais non lorsque vous l'usurpez. Et encore faut-il distinguer soigneusement ce bien, car il y a un bien relatif dons ce monde, et il y a un bien absolu qui consiste dans la perfection de la vertu. C'est ainsi qu'il est bien de chercher Dieu et de ne se laisser détourner par aucune préoccupation du soin assidu de connaître la Divinité. Or, si celui qui cherche Dieu est bien souvent tenté par suite de la fragilité de sa choir et de la faiblesse de son esprit, combien plus celui qui est tout entier dans la recherche des honneurs du monde. Le Sauveur nous apprend donc ici à mépriser l'ambition, comme étant soumise à la puissance du démon. D'ailleurs la faveur publique a ses périls qui lui sont propres; pour dominer les autres, il faut d'abord se faire leur esclave, il faut se courber servilement sous la volonté des autres pour en obtenir les honneurs qu'on désire, et tandis qu'on veut s'élever au-dessus de tous, on s'abaisse et on s'avilit sous les dehors d'une humilité mensongère. Aussi écoutez le démon: «Si donc vous voulez m'adorer», etc.
Tite de Bostra
Il faisait un double mensonge, car il ne possédait pas cette puissance, et il ne pouvait donner ce qu'il n'avait pas. En effet, la puissance du démon est nulle, et Dieu n'a laissé à cet ennemi que le triste pouvoir de nous faire la guerre.

Ou bien le démon fit de vive voix cette description du monde, et il le représenta à la pensée du Sauveur, sous la forme d'une maison comme il le pensait.
Saint Cyrille d'Alexandrie
Comment toi, dont le sort est de brûler dans un feu qui ne s'éteint pas, oses-tu promettre au Seigneur de toutes choses ce qui lui appartient? Quoi ! tu as espéré avoir pour adorateur celui dont la crainte fait trembler tout ce qui existe !

Mais pourquoi, si, comme le veulent les hérétiques, il est fils de la créature, doit-il être adoré? Ou est le crime de ceux qui adorent la créature au lieu du Créateur, si nous-mêmes nous adorons comme Dieu le Fils qui n'est d'après eux qu'une simple créature?

Cette parole pénétra le démon jusqu'au fond de son âme. Avant la venue du Sauveur, il avait partout des autels, et voilà que la loi divine le chasse du trône qu'il avait usurpé, et déclare que l'adoration n'est due qu'à celui qui est Dieu par nature.
Saint Grégoire le Grand
Qu'y a-t-il d'étonnant que le Sauveur ait permis au démon de le conduire sur cette montagne, lui qui a bien voulu être crucifié par les suppôts et les ministres du démon?
Saint Bède le Vénérable
Le démon fait au Sauveur cette proposition: «Si vous consentez à vous prosterner et à m'adorer», et il apprend de sa bouche, au contraire, que lui-même doit plutôt l'adorer comme son Seigneur et son Dieu.

Si l'on demande comment ce précepte, de ne servir que Dieu seul, peut se concilier avec ces paroles de l'Apôtre: «Assujettissez-vous les uns aux autres par une charité spirituelle ( Ga 5), nous répondrons que le mot dulie qui vient du grec, exprime cette espèce de culte ordinaire et commun, que nous rendons soit à Dieu, soit aux hommes, c'est dans ce sens qu'il nous est commandé de nous rendre les serviteurs les uns des autres; au contraire, le mot latrie signifie le culte d'adoration que nous devons à Dieu, et qui nous ordonne de ne servir que lui seul.
Saint Théophylacte d'Ohrid
L'ennemi de notre salut avait d'abord tenté Jésus-Christ par la sensualité, comme il avait autrefois tenté Adam, il le tente en second lieu par la cupidité ou par l'avarice, en lui montrant tous les royaumes du monde: «Et le démon le conduisit sur une haute montagne», etc.

Mais comment le démon a-t-il pu lui faire voir tous les royaumes du monde? Il en est qui prétendent que cette vision fut toute intérieure, mais mon avis est qu'elle fut extérieure et fantastique.
Louis-Claude Fillion
Par cette citation (cfr. Deut. 6, 43) Jésus oppose aux séductions diaboliques le grand principe monothéiste. Et pourtant il sera roi, mais son royaume n'aura rien de terrestre, et il ne se rapportera qu'à Dieu, et à lui seul !
Catéchisme de l'Église catholique
De la vertu de religion, l’adoration est l’acte premier. Adorer Dieu, c’est le reconnaître comme Dieu, comme le Créateur et le Sauveur, le Seigneur et le Maître de tout ce qui existe, l’Amour infini et miséricordieux. " Tu adoreras le Seigneur ton Dieu, et c’est à lui seul que tu rendras un culte " (Lc 4, 8) dit Jésus, citant le Deutéronome (6, 13).