Luc 5, 7

Ils firent signe à leurs compagnons de l’autre barque de venir les aider. Ceux-ci vinrent, et ils remplirent les deux barques, à tel point qu’elles enfonçaient.

Ils firent signe à leurs compagnons de l’autre barque de venir les aider. Ceux-ci vinrent, et ils remplirent les deux barques, à tel point qu’elles enfonçaient.
Saint Ambroise
Dans le sens allégorique, la barque de Pierre qui, selon saint Matthieu, est agitée par les flots, et qui, selon saint Luc, est remplie de poissons, figure l'Église jouet des flots à son origine, et dans la suite, se réjouissant de la multitude innombrable de ses enfants. La barque qui porte Pierre n'est point agitée, mais celle qui portait Judas est ballottée par les flots. Pierre, il est vrai, se trouvait dans ces deux barques, mais bien qu'il demeurât ferme dans la conscience de son innocence personnelle, il était cependant agité par suite des crimes d'un autre. Gardons-nous donc de toute société avec les traîtres, il n'en faut qu'un seul pour nous jeter dans l'agitation et le trouble. Là où la foi est faible, il y a nécessairement trouble, là, au contraire, où la charité est parfaite, il y a pleine et entière sécurité. Remarquez enfin que si Notre-Seigneur commande à tous les disciples de jeter leurs filets, c'est à Pierre seul qu'il dit: «Avance en pleine mer»,c'est-à-dire dans la profondeur des controverses. Qu'y a-t-il de plus profond que la connaissance du Fils de Dieu? Mais quels sont ces filets qu'il commande aux Apôtres de jeter, sinon les réseaux des paroles, les détours des discussions et les profondes sinuosités des discours, qui ne laissent point échapper ceux qu'ils ont pris? Les instruments dont se servent les Apôtres pour cette pèche spirituelle sont justement comparés à des filets qui ne tuent point ceux qu'ils prennent, mais les tiennent en réserve, et qui les retirent des flots agités, pour les transporter jusque dans les cieux. Pierre dit à Jésus: « Maître, nous avons travaillé toute la nuit sans rien prendre », parce que ce n'est point ici l'oeuvre de l'éloquence humaine, mais un don de la vocation céleste. Aussi ceux dont les efforts avaient été jusque là infructueux, prennent, sur la parole du Seigneur, une grande quantité de poissons.

L'autre barque représente la Judée, dans laquelle Jean et Jacques sont choisis; ils viennent de la synagogue à la barque de Pierre (c'est-à-dire à l'Église), et ils viennent pour remplir les deux barques, car tous juifs, ou grecs, doivent fléchir le genou au nom de Jésus.

Nous pouvons encore voir dans cette seconde barque la figure d'une autre Église; car l'Église de Jésus-Christ qui est une, se divise en plusieurs Églises particulières.
Saint Jean Chrysostome
Il s'accommode aux dispositions comme aux diverses occupations des hommes, c'est par une étoile qu'il avait appelé les mages, c'est par le métier de la pêche qu'il appelle à lui les pécheurs.
Saint Augustin
Leurs filets se rompaient, et les barques étaient remplies de cette quantité de poissons, au point qu'elles étaient près de couler à fond, figure de cette multitude d'hommes charnels, qui devaient abonder un jour dans l'Église, au point de rompre la paix et de déchirer l'Église par les hérésies et par les schismes.
Saint Cyrille d'Alexandrie
Pierre fait signe à ses compagnons de venir à son secours, un grand nombre, en effet, se sont associés aux travaux des Apôtres d'abord ceux qui ont écrit les Évangiles, ensuite les autres évêques ou pasteurs des peuples, et les docteurs versés dans la science de la vérité.

C'était la figure de ce qui devait arriver dans la suite aux prédicateurs de l'Évangile; car ceux qui jetteront le filet de la doctrine évangélique ne travailleront pas inutilement, mais parviendront à réunir la multitude des nations.

Après avoir donné au peuple les enseignements qu'il jugeait convenables, le Sauveur reprend le cours de ses opérations merveilleuses et divines, et en favorisant à ses disciples l'exercice de la pêche, il les prend lui-même dans ses filets: « Lorsqu'il eut cessé de parler, il dit à Simon: «Avancez en pleine mer, et jetez vos filets pour pêcher ».
Saint Bède le Vénérable
Ou bien encore, la seconde barque c'est l'Église des Gentils qui, pour suppléer à l'insuffisance de la première est aussi remplie de poissons, qui représentent les élus; car le Seigneur connaît ceux qui sont à lui, il a déterminé le nombre précis de ses élus; et comme il n'a pas trouvé dans la Judée autant de fidèles qu'il en avait prédestinés à la vie éternelle, il cherche pour ainsi dire une autre barque pour recevoir les poissons qui sont à lui, et il répand la grâce de la foi dans le coeur des Gentils. Le filet venant à se rompre, on a recours à la barque voisine; ainsi lorsque Judas le traître, Simon le Magicien, Ananie et Saphire, et un grand nombre de disciples se séparent de l'unité, Paul et Barnabé sont choisis pour exercer l'apostolat parmi les Gentils.

Ces barques ne cessent de se remplir jusqu'à la fin du monde; lorsqu'elles sont pleines, elles s'enfoncent, ou plutôt elles sont exposées au danger d'être submergées; car elles ne le sont jamais en réalité. C'est ce qu'enseigne l'Apôtre, lorsqu'il dit: « Dans les derniers temps, il y aura des temps périlleux, les hommes s'aimeront eux-mêmes »,etc. En effet, les barques sont submergées lorsque les hommes que Dieu avait retirés du siècle par la vocation à la foi y sont de nouveau entraînés par la corruption des moeurs. Pierre était dans l'admiration des dons de Dieu, et plus il avait éprouvé de crainte, moins il était porté à la présomption: « Ce que voyant Simon Pierre, il tomba aux pieds de Jésus, en disant: Éloignez-vous de moi, Seigneur, parce que je suis un pécheur ».

Le filet se rompt, mais le poisson ne s'échappe pas, parce que le Seigneur conserve les siens au milieu des scandales de ceux qui les persécutent.
Saint Théophylacte d'Ohrid
Pierre ne fait aucune difficulté d'obéir: « Et Simon lui répondit: Maître, nous avons travaillé toute la nuit sans rien prendre ». Il n'ajoute pas: Je ne me rendrai pas à votre parole, je ne veux pas m'exposer à de nouvelles fatigues. Loin de là, il s'empresse de répondre: « Mais sur votre parole, je jetterai le filet ».C'était de la barque de Pierre que Notre-Seigneur avait enseigné le peuple, il ne veut pas laisser sans récompense le maître de la barque; et il le récompense doublement, d'abord il lui fait prendre une multitude innombrable de poissons, et en second lieu, il en fait lui-même son disciple: « Et l'ayant jeté, ils prirent une si grande quantité de poissons, que leur filet se rompait ». Pierre prit une telle quantité de poissons, qu'il ne pouvait les tirer hors de l'eau, et qu'il demanda du secours à ses compagnons: « Et ils firent signe à leurs compagnons qui étaient dans l'autre barque de venir », etc. Il les appelle en leur faisant signe; car l'étonnement que lui causait cette pèche abondante, lui ôtait pour ainsi dire l'usage de la parole. Les autres disciples répondent à son appel: «Et ils vinrent, et ils remplirent les deux barques»,etc. L'évangéliste saint Jean paraît raconter un miracle semblable, mais qui est cependant tout autre, et qui eut lieu après la résurrection du Sauveur sur la mer de Tibériade. Ces deux miracles diffèrent et quant au temps, et quant à la nature même du fait. Dans saint Jean, les filets, jetés à la droite de la barque, prennent cent cinquante-trois grands poissons, et l'Évangéliste a soin de dire que, malgré la grandeur des poissons, les filets ne se rompirent pas. Et il avait alors en vue le fait miraculeux raconté par saint Luc, où le filet se rompait sous le poids énorme des poissons qu'il contenait.
Louis-Claude Fillion
Le filet, en vertu de la divine prescience de Jésus, était tombé au milieu d'un de ces énormes bancs de poissons qu'on trouve dans toutes les mers et particulièrement dans le lac de Gennésareth. Voyez Tristram, Natural History of the Bible, 5è édit., p. 283. La fin du v. 6 et le v. 7 tout entier renferment des détails destinés à rehausser l'éclat du prodige : 1° Leur filet se rompait : il y eut en réalité un commencement de rupture : le secours apporté à temps (v. 7) empêcha seul le filet de se déchirer complètement. 2° Ils firent signe … D'après Théophylacte et Euthymius, Pierre et ceux qui étaient dans sa barque auraient été obligés de recourir au langage des signes. Mais cette explication nous semble un peu forcée. Il est plus simple de dire avec la plupart des exégètes qu'on employa les signaux parce que l'autre nacelle était trop loin pour que la parole articulée fût facilement entendue. 3° Ils remplirent les deux barques ; 4° Non-seulement les deux canots furent remplis de poissons, mais ils le furent à tel point qu'ils étaient presque submergés, tant la charge était pesante.