Luc 9, 55

Mais Jésus, se retournant, les réprimanda.

Mais Jésus, se retournant, les réprimanda.
Louis-Claude Fillion
Le désir des fils de Zébédée provenait certainement d'une foi profonde et d'un ardent amour à l'égard de Jésus. Il était néanmoins très imparfait ; aussi Notre-Seigneur refusa-t-il avec force de le réaliser. - Se tournant vers eux. Trait pittoresque. Jésus marchait, selon sa coutume, en tête du cortège : il se retourne pour réprimander les deux frères qui étaient derrière lui. Ce détail prouve que Jacques et Jean n'étaient pas les messagers envoyés chez les Samaritains, car alors ils eussent été en face du Sauveur. - Disant. Dans les manuscrits Sinait., A, B, C, E, G, H, L, S, et beaucoup d'autres, la phrase se termine brusquement après ce mot et les paroles de Jésus (vous ne savez pas… pour les sauver) sont complètement omises. Toutefois il ne nous est pas possible, quoique disent Lachmann, Tischendorf et Tregelles, de les regarder comme une interpolation. Disant annonce en effet quelques mots du Sauveur : que sont-ils devenus si les deux phrases suivantes ne sont pas authentiques ? Au reste, ces phrases sont parfaitement dans l'esprit de Notre-Seigneur, et nous les croyons suffisamment garanties par le témoignage de la Vulgate, de l'Itala, de divers Pères et de manuscrits grecs assez nombreux (D, F, K, M, V, etc.). - Vous ne savez pas. Quelques exégètes donnent un tour interrogatif à la pensée : ne savez-vous pas…?). Vous, les apôtres de la nouvelle Alliance, par opposition à Elie, le prophète terrible de l'Ancien Testament. Ce sont en effet les deux Alliances, et les deux esprits si distincts qui les dominaient, que Jésus met en regard par manière de contraste. Or, comme le dit magnifiquement S. Augustin, contr. Adim. 17, « La crainte et l'amour, tel est en effet, dans toute sa concision, la différence qui sépare les deux Testaments ». Mais voici que les fils du Tonnerre, par leur demande inconsidérée, voulaient ramener la « Loi enflammée » du Sinaï, oubliant la loi d'amour apportée par l'Évangile : n'était-ce pas méconnaître l'esprit de l'institution à laquelle ils appartenaient ? Sans doute, Elie avait agi par un mouvement de l'Esprit de Dieu, et le Sauveur ne blâme nullement sa conduite ; mais le temps d’Élie était passé, et Jéhova avait modifié ses voies envers les hommes, se faisant tout aimable et miséricordieux après avoir été un Dieu terrible. - Les deux frères montrèrent plus tard admirablement combien ils comprenaient l'esprit de l'Évangile : le premier, S. Jacques, en vérifiant le mot célèbre de Lactance, Institutions Divines, 5, 20, « Il faut défendre la religion non en tuant les autres, mais en mourant pour elle » ; le second, S. Jean, quand il vint avec S. Pierre dans ces mêmes contrées pour faire descendre sur elles un autre feu du ciel, en administrant le sacrement de confirmation à leurs habitants convertis au Messie. Cfr. Act. 8, 14.