Marc 11, 14

Alors il dit au figuier : « Que jamais plus personne ne mange de tes fruits ! » Et ses disciples avaient bien entendu.

Alors il dit au figuier : « Que jamais plus personne ne mange de tes fruits ! » Et ses disciples avaient bien entendu.
Saint Jean Chrysostome
Comment se fait-il que le Sauveur avait faim dès le matin, comme le raconte saint Matthieu, si ce n'est par une permission divine qui était la suite de son incarnation. «Et voyant de loin un figuier qui avait des feuilles, il s'avança pour voir s'il ne trouverait pas quelque fruit». Il est évident que l'Évangéliste conforme son récit à la pensée des disciples, qui croyaient que Jésus s'approchait du figuier dans ce dessein, et qu'il avait maudit en figuier parce qu'il n'y avait trouvé pas de fruit. «Mais après s'en être approché, il n'y trouva que des feuilles, car ce n'était pas le temps des fruits. Et il dit au figuier, que jamais nul ne mange plus de ton fruit». Il maudit donc ce figuier, dans l'intérêt des disciples, pour affermir leur confiance. Jusque là, en effet, il avait partout semé les bienfaits sous ses pas, et n'avait puni personne; il importait donc qu'il donnât un exemple de sa puissance vindicative pour apprendre aux disciples qu'il aurait pu dessécher de la même manière les Juifs ses persécuteurs; mais il ne voulut pas exercer sur les hommes cet acte de sévérité, c'est sur un arbuste qu'il l'a fait éclater. Nous voyons par là que c'est justement pour ce motif qu'il s'approche du figuier, et non parce qu'il avait faim. Et qui serait assez ignorant pour supposer qu'il pût éprouver de si grand matin le besoin de la faim? Qui d'ailleurs l'empêchait de satisfaire ce besoin avant de sortir de la maison? On ne peut dire non plus que c'est la vue des fruits qui excitait son appétit, car ce n'était point la saison des figues; et puis s'il avait faim, pourquoi ne pas chercher un autre aliment au lieu de demander des figues à un figuier qui ne pouvait lui en donner. Quelle peine encore pouvait mériter un figuier de ne point porter de fruits avant la saison? Toutes ces circonstances autorisent suffisamment cette conclusion que le Sauveur voulait donner un exemple de sa puissance, pour prévenir l'abattement où sa passion devait jeter ses disciples.

On peut encore dire que le Sauveur a maudit ce figuier sur lequel il n'avait point trouvé le fruit qu'il demandait avant le temps, parce que tous ceux qui accomplissent les commandements de la loi, celui-ci, par exemple: «Vous ne commettrez point d'adultère», sont dits porter des fruits dans leur temps. Celui, au contraire, qui non content d'éviter l'adultère, pratique la virginité, ce qui est beaucoup plus parfait, s'élève au plus haut degré des vertus. Or, le Seigneur exige des parfaits la pratique, non-seulement des devoirs ordinaires, mais des vertus supérieures à ce qu'exigent les commandements.
Saint Jérôme
C'est le matin qu'il vient vers les Juifs, et c'est au soir du monde qu'il nous visite.
Saint Bède le Vénérable
Le temps de sa passion n'étant pas éloigné, Notre-Seigneur voulut se rapprocher du lieu où il devait souffrir, pour bien établir qu'il mourait par un effet de sa volonté: «Et Jésus entra à Jérusalem dans le temple». A peine entré dans la ville, il se dirige vers le temple; il nous donne ainsi un grand exemple de religion et nous apprend qu'en arrivant dans un endroit où se trouve une maison de prières, nous devons nous empresser de nous y rendre. Remarquons encore que la pauvreté du Sauveur était si grande et qu'il recherchait si peu la faveur des hommes, que dans une si grande ville il ne trouve personne qui le reçût, aucun endroit où il pût se retirer. Il est oblige d'aller dans une pauvre campagne demander l'hospitalité à Lazare et à ses soeurs, car Béthanie était le village qu'ils habitaient. «Et ayant observé toutes choses (c'est-à-dire, si quelqu'un lui offrirait un asile), comme déjà l'heure était avancée», etc. Il ne fit pas seulement cela une fois, mais pendant les cinq jours qui s'écoulèrent depuis son entrée à Jérusalem jusqu'à sa passion; il enseignait toute la journée dans le temple, et sortait de Jérusalem le soir pour aller passer la nuit sur la montagne des Oliviers.

Il observe avec attention tous les coeurs et ne trouvant pas où reposer la tête dans ces contradicteurs de la vérité, il se retire chez les fidèles et fixe sa demeure parmi ceux qui lui obéissent, car Béthanie signifie maison d'obéissance.

Les actions du Sauveur sont paraboliques comme ses discours. Ainsi la faim semble le presser de chercher sur un figuier des figues, dont la saison, il le savait bien, n'était pas encore venue; et cependant il le frappe d'une stérilité perpétuelle, pour montrer que le peuple juif ne pouvait être sauvé par des feuilles sans fruit, c'est-à-dire, par les paroles de justice qui étaient sur ses lèvres, sans être accompagnées des bonnes oeuvres, mais qu'il serait arraché et jeté au feu. Notre-Seigneur donc, pressé par la faim, c'est-à-dire, plein du désir de sauver le genre humain, voit un figuier, c'est-à-dire, le peuple juif couvert de faillies, c'est-à-dire, des oracles de la loi et des prophètes, il cherche à lui faire produire le fruit des bonnes oeuvres par ses enseignements, ses reproduis, ses miracles, et ne trouvant pas ce fruit, il condamne le figuier. Vous aussi, si vous ne voulez pas être condamné par Jésus-Christ au jour du jugement, gardez-vous d'être un arbre stérile, mais empressez-vous d'offrir à Jésus-Christ pauvre, le fruit de piété qu'il nous demande.
Saint Théophylacte d'Ohrid
Son dessein était de leur prouver qu'il pouvait exterminer en un moment, s'il l'eût voulu, ceux qui devaient le crucifier. Dans le sens mystique, Notre-Seigneur entre dans le temple, et en sort aussitôt pour montrer qu'il allait l'abandonner, comme une solitude déserte, et exposée à la dévastation des voleurs.
Louis-Claude Fillion
Il lui dit. Jésus traite cet arbre trompeur comme un être doué d’intelligence ; bien plus, en le maudissant, il le traite en être moral, libre et responsable. Il y a là évidemment un symbole. En effet, dit Eusèbe d’Emèse (cité par Westcott), « Le Seigneur ne fait jamais rien sans raison. Quand il semble agir pour rien, c’est là le signe d’une grande chose ». Dans ce fait extraordinaire, qui n’a pas son parallèle dans la vie du Sauveur, nous devons donc voir, suivant l’heureuse expression du Vén. Bède, une parabole de choses ; autrement, il n’aurait pas de raison d’être, et serait incompréhensible pour nous. « L’Évangéliste dit positivement que ce n'était pas le moment des figues ; le Sauveur toutefois en cherchait sur cet arbre pour apaiser sa faim. Mais quoi ! le Christ ignorait-il ce que savait un paysan ? Le Créateur de ces arbres méconnaissait-il ce que savait le jardinier ? Il faut donc reconnaître qu'en cherchant des fruits sur cet arbre pour apaiser sa faim, il voulait faire entendre qu'il avait faim d'autre chose et qu'il cherchait une autre espèce de fruits. On le vit de plus maudire ce figuier qu'il trouva couvert de feuilles mais sans aucun fruit, et cet arbre se dessécha. Or comment avait -il démérité en ne portant pas de fruits [467] ? » Voici maintenant, d’après le même Père, la chose signifiée : « c'est qu'il est des hommes dont la stérilité est volontaire, et la volonté les rendant féconds, ils sont coupables de ne pas l'être. Tels étaient les Juifs ; arbres chargés de feuilles et dénués de fruits, ils se vantaient de posséder la loi sans en faire les œuvres ». Voyez l’Évangile selon S. Matthieu, Matth. 21, 19. Jéhova ne disait-il pas déjà, par l’intermédiaire du prophète Michée, Mi 7, 1,2, en parlant du peuple théocratique : « Hélas pour moi ! Je suis comme au temps des récoltes d’été, comme au grappillage des vendanges : plus une grappe à manger, plus de ces figues précoces que j’aime tant ! ». — Que jamais plus personne… Accumulation emphatique, exprimée avec plus de force encore dans le texte grec. Cette forme de la sentence est spéciale à S. Marc. Nous lisions dans S. Matthieu : « Qu’à jamais il ne naisse de toi aucun fruit ». — Et ses disciples l’entendirent. Ce trait est également propre au second Évangile. Il a pour but de préparer la suite du récit, vv. 20 et 21.