Marc 14, 72
Et aussitôt, pour la seconde fois, un coq chanta. Alors Pierre se rappela cette parole que Jésus lui avait dite : « Avant que le coq chante deux fois, tu m’auras renié trois fois. » Et il fondit en larmes.
Et aussitôt, pour la seconde fois, un coq chanta. Alors Pierre se rappela cette parole que Jésus lui avait dite : « Avant que le coq chante deux fois, tu m’auras renié trois fois. » Et il fondit en larmes.
Pierre, avant d'avoir reçu l'Esprit saint, faillit à la voix d'une servante, mais après l'avoir reçu, il résiste courageusement aux rois et aux princes.
Dans le sens allégorique, la première servante, c'est l'état d'une âme qui chancelle; la seconde, c'est le consentement; la troisième personne, c'est l'acte même du crime. C'est ce triple renoncement que le souvenir des paroles de Jésus lave dans les larmes de la pénitence. Le coq nous fait entendre sa voix, lorsqu'un prédicateur excite nos coeurs à la componction et au repentir. Nous commençons à pleurer, lorsqu'une étincelle de la parole vient embraser notre coeur, et nous sortons dehors, lorsque nous rejetons hors de notre âme toutes nos anciennes habitudes.
Tous les Évangélistes ne racontent pas dans le même ordre la tentation et la chute de Pierre qui eut lieu pendant que Jésus était en butte à ces indignes outrages. Saint Luc la place en tête du récit des outrages faits au Sauveur; saint Jean commence par la chute de Pierre, entre dans le détail de quelques-uns de ces outrages, ajoute que Jésus fut ensuite envoyé au grand-prêtre Caïphe, puis il récapitule pour l'expliquer, la tentation et le renoncement de Pierre. Saint Matthieu et saint Marc racontent d'abord la scène des outrages et puis ensuite la chute de Pierre: «Pendant que Pierre était au bas, dans la cour, une des servantes du grand-prêtre», etc.
Cette servante n'est pas la même, mais elle est différente de la première, comme le dit expressément saint Matthieu. On peut aussi admettre qu'avant le second renoncement, Pierre fut interpellé par deux personnes, par la servante dont parlent saint Matthieu et saint Marc, et par une autre dont parle sain t Luc: «Mais il le nia pour la seconde fois». Pierre était revenu dans la cour, comme le raconte saint Jean, près du foyer où il allait renoncer son maître pour la seconde fois. Or la servante faisait cette remarque, non pas à lui, mais à ceux qui étaient restés pendant qu'il sortait, de manière cependant à être entendue de Pierre, qui revient alors près du foyer et dément leurs assertions en reniant de nouveau le Sauveur. En effet, en comparant entre eux le récit de tous les Évangélistes, on arrive à cette conclusion certaine, que ce n'est pas devant la porte que Pierre renia Jésus pour la seconde fois, mais dans l'intérieur de la cour et près du foyer. Saint Matthieu et saint Marc, qui rapportent que Pierre sortit dehors, ont passé sous silence, pour abréger, qu'il était rentré dans l'intérieur de la cour.
Mais pourquoi Pierre est-il tout d'abord aperçu et découvert par une femme, alors qu'il y avait là un grand nombre d'hommes qui auraient dû bien plutôt le reconnaître? C'était pour montrer la part que prenait à la mort du Seigneur ce sexe qui devait aussi être racheté par sa passion.
Les autres Évangélistes passent sous silence ce premier chant du coq, mais sans contester ce fait; c'est ainsi qu'il est un grand nombre de faits omis par les uns et racontés par les autres.
Le renoncement de Pierre nous apprend qu'on ne renie pas seulement Jésus-Christ, en soutenant qu'il n'est pas le Christ, mais en niant qu'on soit chrétien, lorsqu'on l'est en réalité. En effet, Notre-Seigneur ne dit pas à Pierre: Vous nierez que vous soyez mon disciple, mais vous me renierez. Il a donc renié Jésus-Christ, lorsqu'il a nié qu'il fût son disciple: «Et peu de temps après, ceux qui étaient présents dirent encore à Pierre: Assurément, vous êtes-de ces gens-là, car vous êtes Galiléen»; etc. Ce n'est pas que la langue que l'on parlait eu Galilée, fût différente de celle que l'on parlait à Jérusalem, puisque de part et d'autre c'était la langue hébraïque; mais chaque province, chaque contrée avait son dialecte, ses locutions et son accent particulier dont on ne peut jamais se dépouiller.
Que la société des méchants est funeste ! Pierre, au milieu de ces gens sans foi, nie qu'il connaisse comme homme celui qu'il avait hautement reconnu comme Dieu au milieu des disciples. L'Ecriture sainte détermine souvent le mérite des différentes actions par le temps où elles se sont accomplies. Ainsi Pierre, qui renia le Seigneur au milieu de la nuit, se repentit au chant du coq: «Et aussitôt le coq chanta», etc.
C'est par un dessein providentiel que Dieu permit cette chute, afin que Pierre ne fût point tenté de s'enorgueillir, et aussi pour lui inspirer une grande compassion pour les pécheurs, instruit qu'il était par lui-même de la faiblesse humaine.
Pierre saisi, épouvanté de frayeur, oublie les paroles du Seigneur: «Celui qui m'aura confessé devant les hommes, je le confesserai aussi devant mon Père», renie son divin Maître: «Il se mit alors à dire avec imprécation et avec serment», etc.
Les larmes de Pierre renouèrent les liens qui l'attachaient au Sauveur. Cet exemple condamne et confond les novatiens, qui prétendent que celui qui pèche après avoir reçu le baptême ne peut être admis à l'espérance du pardon. Voici Pierre qui avait reçu le corps et le sang de Jésus-Christ, et à qui cependant la grâce du repentir est accordée. Les faiblesses des saints ont été écrites pour nous apprendre que si nous venons à tomber par défaut de vigilance, nous devons nous rappeler leur exemple, et mettre tonte notre espérance dans la miséricorde de Dieu.
Et aussitôt… L’adverbe aussitôt est omis par la Recepta ; mais on le trouve dans les meilleurs manuscrits.
— De nouveau est propre à S. Marc, qui seul, nous l’avons vu, v. 30, avait mentionné deux chants successifs
du coq dans la prédiction de Jésus. — Le premier chant était probablement passé inaperçu, mais le second
produisit une réaction dans le cœur de saint Pierre : il se souvint, les paroles de son Maître lui revinrent
subitement à la pensée, et alors, reconnaissant toute l’étendue de sa faute, il se mit à pleurer. Mais le verbe
grec traduit ici par « se mit à » a plusieurs sens, littéraux ou figurés. La phrase a reçu peut-être plus de vingt
interprétations différentes, parmi lesquelles il est assez difficile de choisir. La traduction de la Vulgate, « il
commença à pleurer », est également celle de plusieurs versions anciennes, telles que la Peschito syriaque,
l’arménienne, la gothique, etc ; elle est adoptée par Suidas, Euthymius, etc., et l’on cite, à son appui, divers
passages soit sacrés, soit profanes. D. Théophylacte traduit comme s’il y avait : « ayant jeté son manteau sur
sa tête, il pleura ». D’autres donnent à la phrase le sens de « ajoutant (à cela), il pleurait », c’est-à-dire
« pleura à plusieurs reprises ». D’autres sous-entendent « ayant fait attention » : l’Évangéliste voudrait dire
alors que saint Pierre « ayant fait attention » (à sa faute, ou bien au chant du coq, ou se rappelant les paroles
de Jésus) se mit à pleurer. D’assez nombreux auteurs modernes traduisent par « étant aussitôt sorti » ou
« sortant rapidement ». Les passages parallèles de S. Matthieu (Matth. 26, 75) et de S. Luc (Luc 22, 62)
« étant sorti dehors, il pleura amèrement », favorisent cette interprétation. Voir Bretschneider [543]. — On a
de remarquables compositions du Poussin, de Valentin, de Stella, sur les différentes scènes du reniement de
saint Pierre. Carlo Dolci a immortalisé à sa manière les larmes du prince des Apôtres dans son tableau connu
sous le nom de « saint Pierre pleurant ».