Marc 9, 12
Jésus leur dit : « Certes, Élie vient d’abord pour remettre toute chose à sa place. Mais alors, pourquoi l’Écriture dit-elle, au sujet du Fils de l’homme, qu’il souffrira beaucoup et sera méprisé ?
Jésus leur dit : « Certes, Élie vient d’abord pour remettre toute chose à sa place. Mais alors, pourquoi l’Écriture dit-elle, au sujet du Fils de l’homme, qu’il souffrira beaucoup et sera méprisé ?
Après la manifestation du mystère de la gloire sur la montagne, alors que les disciples en descendent, Jésus leur recommande de ne publier sa transfiguration qu'après le triomphe île sa mort et de sa résurrection. «Comme les disciples descendaient de la montagne, Jésus leur défendit», etc.
Le Sauveur ne se borne pas à leur ordonner le silence; il leur fait entendre qu'il doit souffrir la mort et que tel est le motif du silence qu'il leur recommande.
Les Apôtres, qui ignoraient le mystère de la résurrection, conservèrent la parole qu'ils avaient entendue, et elle fut pour eux un objet de discussion: «Ils retinrent cette parole en eux-mêmes».
Voici, ce me semble, l'intention des Apôtres, en faisant au Sauveur cette question: «Nous avons vu Elie avec vous, mais nous vous avons vu avant de voir Elie; et cependant les scribes enseignent qu'Elie apparaîtra avant le Messie; ils nous ont donc trompés».
Et Jésus répond à leur question dans les paroles suivantes: «Lorsque Elie viendra», etc. Il leur apprend donc qu'Elie viendra avant le second avènement; car les Écritures distinguent deux avènements, l'un qui a déjà eu lieu, et l'autre qui doit s'accomplir plus tard. Or, le Sauveur déclare qu'Elie sera le précurseur de ce second avènement.
Le Sauveur vient d'affirmer qu'Elie serait le précurseur du dernier avènement; il déclare en même temps que c'est Jean-Baptiste qui a été le précurseur du premier. «Mais je vous dis qu'Elie est déjà venu». Il donne à Jean le nom d'Elie, non qu'il eut été Elie en personne, mais parce qu'il avait rempli le ministère d'Elie et qu'il avait été le précurseur du premier avènement, comme Elie le sera du second.
Ou bien encore, ce sont les disciples qui demandent à Jésus le sens de cette parole de l'Ecriture, que le Fils de l'homme doit souffrir; «et Jésus leur répond: Jean est venu pour remplir un ministère semblable à celui d'Elie, et comme Elie, les Juifs l'ont maltraité; de même le Fils de l'homme doit souffrir, comme les Écritures l'ont prédit».
Cette observation, qui est personnelle à saint M arc, signifie que quand la mort aura été absorbée dans la victoire, tout ce qui aura précède sera mis en oubli ( 1Co 15,54 Is 65,17 Is 25,8 Ap 21,4 ).
Ou bien les Apôtres, regardant la transfiguration, dont ils viennent d'être les témoins sur la montagne, comme la transformation glorieuse de Jésus-Christ, ils lui disent: Si c'est ici votre avènement glorieux, comment no voyons-nous pas votre précurseur? Elie, en effet, avait disparu.
Elie rétablira toutes choses, comme Malachie l'a annoncé ( Ma 4): «Je vous enverrai mon prophète Elie, qui réconciliera le coeur des pères avec leurs enfants, et le coeur des enfants avec leurs pères»; il acquittera aussi envers la mort, la dette dont sa vie prolongée a différé le paiement.
Ou bien, ces paroles de Jésus, «comment est-il écrit», etc., signifient de même qu'il est écrit dans un grand nombre de prophéties, que le Christ doit souffrir, de même quand Elie viendra, il sera l'objet du mépris des impies qui lui feront souffrir mille outrages.
Les hommes se seraient scandalisés d'entendre raconter des choses si glorieuses de celui qu'ils devaient voir mourir sur une croix: il ne convenait donc pas de leur faire connaître avant sa passion la gloire qui devait la suivre; après la résurrection au contraire, ce mystère n'avait plus rien d'incroyable pour eux.
Le Sauveur combat ici l'opinion des pharisiens, qui prétendaient qu'Elie était le précurseur du premier avènement, et il en fait voir les inconvénients: «Et comment il est écrit», etc., c'est-à-dire, lorsque Elie de Thesbé viendra, il pacifiera les Juifs, et les amènera à la foi, et c'est ainsi qu'il sera le précurseur du second avènement. Mais s'il doit être le précurseur du premier avènement, comment expliquer ce que dit l'Ecriture, que le Fils de l'homme doit souffrir? Car de deux choses l'une: ou Elie n'est pas le précurseur du premier avènement, elles Écritures sont véridiques; ou il l'est réellement, et les Écritures ne disent pas la vérité, lorsqu'elles déclarent qu'il faut d'abord que le Christ souffre, puisqu'elles ajoutent qu'Elie doit tout rétablir, qu'il ne restera plus un seul Juif incrédule, que tous ceux qui l'entendront, ajouteront foi à sa prédication.
Jean avait été comme Elie, un censeur sévère, et, plein de zèle, un ami de la solitude; mais les Juifs ont été moins dociles à sa parole qu'ils ne le seront à celle d'Elie; ils l'ont mis à mort au milieu d'une fête criminelle, eu lui tranchant la tête, «ils lui ont fait tout ce qu'ils ont voulu».
La
réponse du Sauveur est exprimée d’une manière un peu obscure dans le second Évangile. La rédaction plus
nette de S. Matthieu fait disparaître toute difficulté. Un premier point est clair : c’est qu’Élie viendra d’abord,
et, qu’une fois de retour sur cette terre dont il a si mystérieusement disparu, il préparera les hommes à
recevoir le Messie. D’abord représente l’époque du second avènement de Notre-Seigneur Jésus-Christ ;
rétablira (mieux « rétablit », car le verbe grec est au présent), les travaux d’Élie pour amener les Juifs à la
vraie foi. Ainsi, Jésus donne raison aux Scribes ; seulement, il explique et rectifie leur dire en appliquant à la
fin des temps ce qu’ils s’attendaient à voir bientôt accompli [405]. — Et comme il est écrit... C’est ici que la
pensée devient énigmatique, à cause de la construction un peu lourde et enchevêtrée de la phrase. On a
proposé, pour l’améliorer, plusieurs changements dans la ponctuation. Par exemple, une coupure et un point
d’interrogation après Fils de l’homme : « Qu’est-il écrit du Fils de l’homme ? Qu’il souffrira beaucoup… »
Ou bien un simple point d’interrogation à la fin du verset : « Pourquoi est-il écrit du Fils de l’homme qu’il
aura beaucoup à souffrir ? » Nous préférerions une virgule après sera méprisé, de manière à établir une
corrélation étroite entre le v. 12 et la fin du v. 11 : « De même qu’il est écrit au sujet du Fils de l’homme qu’il
aura beaucoup à souffrir et qu’il sera méprisé (dans le grec, littéralement, « réduit à rien »), de même, je vous
dis qu’Élie est venu… comme il est écrit à son sujet ». Il nous semble que l’équilibre des mots et des idées
demande cette traduction. À l’apparition future du véritable Élie, Jésus oppose l’arrivée déjà ancienne de
l’Élie figuratif, Jean-Baptiste ; des souffrances subies par son Précurseur, il rapproche ses propres
souffrances. De part et d’autre il montre, planant au-dessus des destinées humaines, la volonté de Dieu
exprimée dans les Saintes Écritures. De la sorte, il existe entre toutes les parties de la phrase un lien qui les
unit, un contrepoids qui les soutient, et l’obscurité se trouve amoindrie. De plus, nous nous rapprochons ainsi
du texte de S. Matthieu, Matth. 17, 12 : « Je vous le dis : Élie est déjà venu et ils ne l’ont pas connu, et ils ont
fait contre lui tout ce qu’ils ont voulu. C’est ainsi que le Fils de l’homme doit souffrir par eux ». — Ils lui
ont fait… Jésus désignait ainsi les persécutions endurées par S. Jean [406]. Le prophète Élie n’avait pas
moins souffert [407].