Matthieu 10, 27

Ce que je vous dis dans les ténèbres, dites-le en pleine lumière ; ce que vous entendez au creux de l’oreille, proclamez-le sur les toits.

Ce que je vous dis dans les ténèbres, dites-le en pleine lumière ; ce que vous entendez au creux de l’oreille, proclamez-le sur les toits.
Saint Thomas d'Aquin
1250. Ensuite, le Seigneur les instruit comme un avoué est instruit, car celui-ci est d’abord instruit de ce qu’il doit alléguer avant de l’exprimer devant d’autres. Le Seigneur avait ainsi choisi ses disciples pour qu’ils sèment sa parole chez tout le peuple ; c’est pourquoi il voulait d’abord les instruire en disant : CE QUE JE VOUS DIS DANS LES TÉNÈBRES, DITES-LE AU GRAND JOUR. Il y a deux sens qui contribuent à l’enseignement : l’ouïe et la vue. Ce qui est dit dans les ténèbres est secret ; de même en est-il de ce qui est dit à l’oreille. CE QUE JE VOUS DIS DANS LES TÉNÈBRES, DITES-LE AU GRAND JOUR, car tout devient clair au grand jour. De même, ce qui est entendu par l’oreille est secret ; c’est pourquoi il dit : ET CE QUE VOUS ENTENDEZ À L’OREILLE, ANNONCEZ-LE SUR LES TOITS. Mais ce qui est dit en Jn 18, 20 est contraire à cela : Je n’ai rien dit en secret. Il faut comprendre cela de la manière suivante : «Je n’ai rien dit dans le secret qui ne puisse être dit en clair.» Ou de la manière suivante : CE QUE JE VOUS DIS DANS LES TÉNÈBRES, c’est-à-dire parmi les Juifs, qui sont ténèbres. Ainsi, Ep 5, 8 : Vous étiez autrefois ténèbres. Ou bien : CE QUE JE DIS À VOUS, qui êtes ténèbres, DITES-LE AU GRAND JOUR. 1 Co 4, 5 : Lui qui éclairera les profondeurs des ténèbres et mettra à nu les desseins des cœurs.

1251. ET CE QUE VOUS ENTENDEZ À L’OREILLE, ANNONCEZ-LE SUR LES TOITS. Pr 10, 14 : Les sages cachent la sagesse ; et Jb 5, 27 : Ce qui a été entendu en y portant attention. SUR LES TOITS, car dans certains pays, c’est la coutume que les toits soient plats, de sorte qu’on puisse y parler en s’adressant à tous. Au sens mystique, celui-là prêche sur les toits, qui, en soumettant sa chair, prêche aux autres.
Louis-Claude Fillion
Il est à remarquer qu’un grand nombre des recommandations contenues dans cette troisième partie du discours ont été exprimées sous la forme d’aphorismes populaires : ce vêtement imagé les rend tout à fait saisissantes. Les adages du v. 27 renferment une déduction tirée du fait d’expérience qui vient d’être signalé : Puisque vous êtes sûrs de retirer un jour de votre rôle une gloire si pure et une si belle récompense, ne craignez pas, malgré les amertumes présentes, de prêcher hautement, publiquement, ma doctrine. - Dans les ténèbres... dans la lumière, à l'oreille... sur les toits sont des antithèses faciles à comprendre. Quand on parle dans l’obscurité, on échappe aux regards curieux ; quand on murmure quelques mots à l’oreille de son voisin, on n’est entendu que de lui. Lorsqu’on prêche en plein midi et sur les toits, on est vu et entendu de tout le monde, et c’est en plein midi, sur les toits, que les Apôtres du Christ devront prêcher l’Évangile. Notre-Seigneur fait allusion au caractère de sa prédication personnelle : bien qu’elle n’eût jamais été secrète, les circonstances avaient nécessairement restreint le nombre des auditeurs qui la reçurent de la bouche même du divin Maître. Pour les missionnaires dispersés au nom de Jésus-Christ sur toute la surface du globe, il ne doit pas y avoir de cercle intime : les vérités évangéliques s’annonceront à tous ouvertement, car elles n’ont rien à craindre de la lumière ; elles n’ont rien de commun avec l’erreur qui aime à ramper dans l’ombre. - Les mots « sur les toits » rappellent un antique usage de l’Orient, qu’on trouve mentionné de très bonne heure dans les livres de l’ancienne Alliance. Les toits des maisons orientales étant plats, on pouvait à l’occasion s’en servir comme de tribunes du haut desquelles l’orateur, en élevant un peu la voix, se faisait entendre fort loin. Aussi est-ce de là qu’avaient lieu habituellement les proclamations importantes, en particulier celles qui intéressaient le culte sacré : « Le ministre de la synagogue sonne six fois de la trompette, le soir du sabbat, sur le toit d’une très haute maison, pour que tous sachent que le sabbat commence ». On sait qu’aujourd’hui encore, chez les musulmans, le muezzin monte sur le minaret de la mosquée pour annoncer les heures de la prière ; bien plus, que les ordres des gouverneurs locaux, dans les divers districts de la Palestine, sont notifiés aux habitants du haut d’un toit par le crieur public ; Thomson, The Land and the Book, p. 43. L’expression « prêcher sur les toits » devint par là synonyme de « proclamer à haute voix, au su et vu de tout le monde » ; Cf. Amos, 3, 9.
Fulcran Vigouroux
Sur les toits. Les toits des maisons orientales sont en forme de terrasse.