Matthieu 12, 2
Voyant cela, les pharisiens lui dirent : « Voilà que tes disciples font ce qu’il n’est pas permis de faire le jour du sabbat ! »
Voyant cela, les pharisiens lui dirent : « Voilà que tes disciples font ce qu’il n’est pas permis de faire le jour du sabbat ! »
1379. Ensuite, [Matthieu] présente le reproche adressé par les Pharisiens : CE QUE VOYANT, LES PHARISIENS LUI DIRENT : «VOILÀ QUE TES DISCIPLES FONT CE QU’IL N’EST PAS PERMIS DE FAIRE LE JOUR DU SABBAT !» Les disciples faisaient deux choses mauvaises : premièrement, ils arrachaient des épis qui appartenaient à d’autres ; deuxièmement, ils enfreignaient le sabbat. Mais les Pharisiens ne leur faisaient pas de reproches sur le premier point, car ceci était permis par la loi, Dt 33. Ainsi, parce que cela était permis, ils ne [les] calomniaient pas, mais, parce que c’était le sabbat, ils [les] calomniaient. Par cela, est détruite l’hérésie des Hébreux, qui disaient que la loi devait être observée en même temps que l’évangile. Et parce que Paul s’oppose à cette position, ils font des reproches à Paul. Jérôme s’objecte à ceux-ci, car même les disciples ne l’observaient pas.
Les accusateurs ne sont pas loin. Peut-être, comme l’ont
dit d’anciens interprètes, avaient-ils suivi à quelque distance la troupe apostolique, pour voir si elle ne
franchirait point de quelques pas la limite prescrite. Le rôle d’espion était parfaitement dans le caractère de
ces hypocrites austères. Quoi qu’il en soit, ils ont trouvé une excellente occasion de nuire à Jésus, et ils la
saisissent avidement. - Voici, s’écrient-ils pleins d’une joie maligne. Regarde et juge toi-même ; nous les
avons surpris en flagrant délit. - Ils font ce qu'il n'est pas permis de faire. Notons bien qu’ils n’incriminent
pas l’acte en lui-même, comme si les Disciples se fussent rendus coupables d’injustice et de vol ; car la Loi
autorisait expressément quiconque traversait une vigne, ou un champ de blé, à cueillir autant de grappes, ou
autant d’épis qu’il le désirait, et à s’en nourrir sans scrupule, pourvu qu’il fît dans l’intérieur du champ ou de
la vigne son agreste repas ; Cf. Deut. 23, 24 et 25. Cette coutume subsiste même encore dans l’ancienne
patrie des Juifs. « La contrée que nous traversions, raconte le Dr Robinson, Palæstina, 2. 319, était en grande
partie couverte de champs de blé. Les épis étaient mûrs et nous fûmes témoins d’une interprétation vivante
de la Sainte Écriture. Nos Arabes avaient faim, et, tandis que nous traversions les champs, ils se mirent à
arracher des épis, dont ils mangeaient les grains après les avoir frottés entre leurs mains. Aux questions que
nous leur adressâmes là-dessus, ils répondirent que c’était un ancien usage et que personne n’y trouverait à
redire... Nous eûmes dans la suite beaucoup d’autres exemples du même genre ». Cf. Thomson, the Land and
the Book, p. 648. C’est donc la circonstance de temps qui, aux yeux des Pharisiens, rendait illicite et
coupable la conduite des disciples de Jésus. Arracher des épis, les frotter entre leurs mains, n’étaient-ce pas là deux œuvres serviles, par conséquent une profanation criminelle du sabbat ? « Il est condamnable de
moissonner le sabbat, même en petite quantité ; et arracher des épis est une espèce de moisson », Talmud.
Pour nous faire une juste idée du scandale des Pharisiens à cette occasion et dans les autres cas semblables
où nous les verrons accuser si vivement le Sauveur de violer le repos sabbatique, il est bon d’entrer ici dans
quelques détails historiques qui nous seront fournis par les coutumes anciennes et même modernes des
Israélites. L’observation du sabbat a de tout temps été regardée comme l’un des préceptes les plus importants
du Décalogue et de la religion mosaïque. Mais depuis longtemps, les Pharisiens s’en étaient emparés pour
perfectionner, croyaient-ils, sur ce point comme sur tant d’autres, ce qui manquait à la Loi, c’est-à-dire, ainsi
que le leur reprochera Notre-Seigneur Jésus-Christ, pour ajouter aux divines prescriptions des traditions
humaines tantôt ridicules, tantôt opposées à la morale religieuse, toujours pesantes, et à la longue
insupportables pour de faibles mortels. Nulle part leur étroitesse d’esprit ne s’était mieux manifestée que
pour ce qui concernait le sabbat. Sans doute, la limite entre le travail prohibé et l’action qui demeure licite est
assez difficile à tracer dans un grand nombre de cas, et, la Loi n’étant pas entrée dans tous les détails, il
appartenait aux Docteurs d’éclairer l’opinion publique ; mais ils s’étaient acquittés de cette fonction de la
façon la plus mesquine, au point de rendre le jour du sabbat aussi ennuyeux qu’un dimanche puritain et à peu
près incompatible avec une vie éveillée. Là où Jéhova n’avait prescrit que la cessation du travail proprement
dit, les Pharisiens avaient prescrit la cessation de toute action, ou peu s’en faut. Sans être aussi rigides que
cette secte samaritaine dont les membres s’engageaient à garder durant le sabbat tout entier la position qu’ils
avaient à son début, ils avaient fait du sabbatisme à outrance le génie propre de leur religion. On le voit par la
longue énumération des œuvres qu’ils interdisaient le samedi. Ils les avaient réparties entre 39 catégories
(pères) subdivisées elles-mêmes en nombreuses sections secondaires (générations) et le travail accessoire ou
dérivé, comme ils disaient, n’était pas moins prohibé que le travail-père ou primitif. Voilà pourquoi les
disciples de Jésus profanaient actuellement le sabbat, leur action étant de même nature que le travail du
moissonneur. Voilà pourquoi il était défendu de monter sur un arbre en un jour de sabbat, non que la chose
fût interdite en tant que telle, mais parce qu’on s’exposait, en l’accomplissant, à casser quelques branches, ce
qui a de l’affinité avec le travail du bûcheron et demeure proscrit par là-même. La suite des événements nous
fournira l’occasion de citer d’autres exemples : ceux que nous avons rapportés suffisent pour montrer la
différence qu’il y avait entre le joug vraiment suave et léger du Sauveur, et le joug intolérable des Pharisiens
et des Docteurs juifs. L’esprit pharisaïque subsiste encore en Israël : on sait en effet que les Juifs demeurés
croyants observent le sabbat avec autant de rigueur que leurs pères. Il en est qui n’osent pas même remonter
leur montre ce jour-là (Cf. Thomson l. c. p. 276), qui appellent un chrétien pour allumer le feu qu’ils ont
préparé la veille, qui croiraient commettre une faute grave en écrivant une seule ligne. Tel rabbin allemand
adressait naguère une protestation au ministère de l’intérieur à Berlin, parce que, des élections se trouvant
fixées au samedi, les électeurs Juifs étaient, disait-il, ou dans l’impossibilité de voter, ou dans la nécessité de
transgresser leurs préceptes religieux, attendu qu’il fallait écrire le nom du candidat sur le bulletin de vote.