Matthieu 12, 28
Mais, si c’est par l’Esprit de Dieu que moi, j’expulse les démons, c’est donc que le règne de Dieu est venu jusqu’à vous.
Mais, si c’est par l’Esprit de Dieu que moi, j’expulse les démons, c’est donc que le règne de Dieu est venu jusqu’à vous.
Or, c'est à juste titre que les Apôtres seront établis leurs juges, eux qui ont été revêtus du pouvoir de chasser les démons, pouvoir que les phari siens ont refusé de reconnaître dans le Christ lui-même.
Si donc les disciples agissent par la vertu du Christ, et que le Christ agisse lui-même par la vertu de l'Esprit saint, le royaume de Dieu arrive, puisqu'il a été communiqué aux Apôtres par le ministère du médiateur lui-même.
A cette première réponse, Notre-Seigneur en ajoute une seconde beau coup plus évidente encore: «Et si c'est par Béelzébub que je chasse les démons, par qui vos enfants les chasseront-ils ?»Par les enfants des Juifs, il entend les exorcistes établis par la loi ou les Apôtres sortis de la nation juive. S'il veut parler des exorcistes qui chassaient les dé mons en invoquant le nom de Dieu, il force les pharisiens par cette question adroite de recon naître en eux l'oeuvre de l'Esprit saint? Si le pouvoir de chasser les démons, leur dit-il, est dans vos enfants l'oeuvre de Dieu, et non pas des démons, pourquoi cette puissance aurait-elle en moi un autre principe? Ils seront donc eux-mêmes vos juges, non par la puissance qu'ils exerceront sur vous, mais par l'opposition de leur conduite avec la vôtre, puisque c'est à Dieu qu'ils font remonter le pouvoir de chasser les dénions, tandis que vous l'attribuez au prince des démons. Si au co ntraire ces paroles doivent s'entendre des Apôtres, ce qui est plus probable, ils seront leurs juges, parce qu'ils siégeront sur douze siéges pour juger les douze tribus d'israël ( Mt 19 ).
Le Sauveur ne dit pas ici: Mes disciples, ni mes Apôtres, mais «vos enfants», afin de leur donner toute facilité de reprendre leur dignité, ou, s'ils persévéraient dans leur ingratitude, d'ôter toute excuse à leur impudence. Or, les Apôtres chassaient les dé mons en vertu du pouvoir que le Sauveur lui-même leur avait donné; cependant les pharisiens ne songeaient pas à les accuser, car ce n'était pas le fait lui-même qu'ils attaquaient, mais la personne du Christ. Il prend les Apôtres pour exemple, afin de leur prouver que c'était sous l'inspiration de l'envie qu'ils parlaient ainsi de lui. Il les conduit ensuite de nouveau à la connaissance de lui-même, en leur démontrant qu'ils sont les ennemis déclarés de leur propre bonheur, et qu'ils s'opposent à leur salut, tandis qu'ils devraient se réjouir de ce qu'il était ve nu pour leur communiquer des biens ineffables. Or, poursuit-il, si c'est par l'Esprit de Dieu que je chasse les démons, le royaume de Dieu est donc parvenu jusqu'à vous». Il leur montre par là que chasser les démons n'est pas l'effet d'une grâce ordinaire; mais un acte de puissance extraordinaire, et c'est pour établir cette vérité qu'il tire cette conclusion: «Donc le royaume de Dieu est parvenu jusqu'à vous». Comme s'il disait: S'il en est ainsi, vous ne pouvez douter de la venue du Fils de Dieu sur la terre. Mais il laisse cette conséquence dans l'obscurité, pour ne pas leur être insupportable. Au contraire, comme il veut les attirer à lui, il ne se contente pas de dire: Le royaume de Dieu est arrivé, mais «il est arrivé jusqu'à vous». Il semble leur dire: Les biens vous arrivent et se répandent sur vous; pourquoi donc vous déclarer contre ce qui doit être votre salut? Ces oeuvres si grandes de la puissance divine ont été prédites par tous les prophètes comme le signe de la présence du Fils de Dieu sur la terre.
Il se désigne lui-même comme ce royaume de Dieu, dont il est dit ailleurs: «Le royaume de Dieu est au milieu de vous» ( Lc 17 ); Et encore: «Il y en a un au milieu de vous que vous ne connaissez pas» ( Jn 1 ). Ou bien encore, c'est ce royaume que Jean-Baptiste et le Seigneur lui-même ont annoncé en ces termes: «Faites pénitence, car le royaume des cieux est proche» ( Mt 3 ). Il est un troisième royaume de la sainte Écriture qui est enlevé aux Juifs pour être donné à une nation qui lui fera porter des fruits ( Mt 21 ).
On peut donc donner aussi cette explication: Si je chasse les démons par Béelzébub, même dans votre pensée, le royaume de Dieu est parvenu jusqu'à vous; car ce royaume du démon qui, de votre aveu, est divisé co ntre lui-même, ne peut subsister. Ce royaume de Dieu dont il parle, c'est celui où les impies subissent leur condamnation, et où ils sont séparés des fidèles qui font maintenant pénitence de leurs péchés.
Ou bien encore, c'est parce que les Apôtres avaient la conscience que le Christ ne les avait initiés à aucune science funeste.
La Glose
On peut dire aussi que l'affaiblissement du pouvoir du démon est une augmentation du royaume de Dieu.
1433. MAIS SI C’EST PAR L’ESPRIT DE DIEU QUE JE CHASSE LES DÉMONS, C’EST DONC QUE LE ROYAUME DE DIEU EST ARRIVÉ JUSQU’À VOUS. Comme s’il disait : «Celui qui écarte de lui ce qui lui arrive de bien est insensé ; mais cela, chasser les démons, tourne à votre bien. Vous pouvez donc en conclure que [cela arrive] dans l’Esprit Saint, car le doigt de Dieu, c’est l’Esprit Saint, comme [sa] main est le Fils.» Et il n’y a en cela aucune invocation, mais cela est fait par la seule autorité. Ainsi, SI JE CHASSE LES DÉMONS, etc.
1434. Mais pourquoi dit-on que les démons sont chassés par l’Esprit Saint ? Parce que l’amour et la bonté lui sont appropriés. C’est pourquoi chasser les démons ne convient aussi bien à nulle autre qu’à la personne de l’Esprit Saint. [LE ROYAUME DE DIEU] EST ARRIVÉ JUSQU’À VOUS. Lc 17, 21 : Le royaume de Dieu est parmi vous. Et qu’il arrive par le Christ, vous pouvez le savoir, et cela est votre bien. C’est pourquoi il dit : JUSQU’À VOUS. Ou bien, autre [interprétation] : LE ROYAUME DE DIEU, c’est-à-dire le pouvoir de Dieu sur les hommes, 1 Co 15, 25 : Mais il faut qu’il règne jusqu’à ce qu’il ait placé ses ennemis sous ses pieds. Si donc les démons commencent à être contrôlés, c’est que le règne et le pouvoir de Dieu sont déjà parvenus jusqu’à vous.
1434. Mais pourquoi dit-on que les démons sont chassés par l’Esprit Saint ? Parce que l’amour et la bonté lui sont appropriés. C’est pourquoi chasser les démons ne convient aussi bien à nulle autre qu’à la personne de l’Esprit Saint. [LE ROYAUME DE DIEU] EST ARRIVÉ JUSQU’À VOUS. Lc 17, 21 : Le royaume de Dieu est parmi vous. Et qu’il arrive par le Christ, vous pouvez le savoir, et cela est votre bien. C’est pourquoi il dit : JUSQU’À VOUS. Ou bien, autre [interprétation] : LE ROYAUME DE DIEU, c’est-à-dire le pouvoir de Dieu sur les hommes, 1 Co 15, 25 : Mais il faut qu’il règne jusqu’à ce qu’il ait placé ses ennemis sous ses pieds. Si donc les démons commencent à être contrôlés, c’est que le règne et le pouvoir de Dieu sont déjà parvenus jusqu’à vous.
Jésus tire maintenant des arguments qui précèdent une déduction
importante. - Si je chasse les démons par l'Esprit de Dieu, ou bien « par le doigt de Dieu », selon
l’expression pittoresque de S. Luc, 11, 20. C’est plus qu’une hypothèse, car Jésus-Christ ne peut chasser les
démons qu’avec l’aide de Dieu ou par le concours de Satan ; or il vient de prouver que la seconde partie du
dilemme est fausse ; la première par conséquent demeure forcément vraie. Lui, il se sert d’un esprit puissant
pour guérir les possédés, mais c’est l’Esprit de Dieu et non par un esprit satanique comme on le lui reproche.
- Le royaume de Dieu est donc venu. Voici ce qu’ils auraient dû comprendre ! Le royaume de Satan s’écroule
visiblement ; il faut donc que le royaume de Dieu, le royaume messianique, soit déjà établi sur la terre, et,
s’il en est ainsi, le Christ, son fondateur, a dû faire son apparition, et le Christ n’est autre que Jésus !
Le mystère de l’Église sainte se manifeste en sa fondation. En effet, le Seigneur Jésus posa le commencement de son Église en prêchant l’heureuse nouvelle, l’avènement du règne de Dieu promis dans les Écritures depuis les siècles : « que les temps sont accomplis et que le Royaume de Dieu est là » (Mc 1, 15 ; Mt 4, 17). Ce Royaume, il brille aux yeux des hommes dans la parole, les œuvres et la présence du Christ. La parole du Seigneur est en effet comparée à une semence qu’on sème dans un champ (Mc 4, 14) : ceux qui l’écoutent avec foi et sont agrégés au petit troupeau du Christ (Lc 12, 32) ont accueilli le Royaume lui-même ; puis, par sa propre vertu, la semence germe et croît jusqu’au temps de la moisson (cf. Mc 4, 26-29). Les miracles de Jésus confirment également que le Royaume est déjà venu sur la terre : « si c’est par le doigt de Dieu que j’expulse les démons, c’est donc que le Royaume de Dieu est arrivé parmi vous » (Lc 11, 20 ; Mt 12, 28). Avant tout cependant, le Royaume se manifeste dans la personne même du Christ, Fils de Dieu et Fils de l’homme, « venu pour servir et donner sa vie en rançon d’une multitude » (Mc 10, 45).
Le ministère de Jésus est décrit dans le contexte de ses voyages dans son pays. L'horizon de sa mission avant la Pâque se concentre sur Israël; toutefois, il y a en Jésus un élément nouveau d'importance primordiale. La réalité eschatologique n'est pas renvoyée à une fin du monde éloignée, mais elle devient proche et commence à advenir. Le Royaume de Dieu est tout proche (cf. Mc 1, 15), on prie pour qu'il vienne (cf. Mt 6, 10), la foi le voit déjà à l'œuvre dans les signes, tels les miracles (cf. Mt 11, 4-5), les exorcismes (cf. Mt 12, 25-28), le choix des Douze (cf. Mc 3, 13-19), l'annonce de la Bonne Nouvelle aux pauvres (cf. Lc 4, 18). Dans les rencontres de Jésus avec les païens, il apparaît clairement que l'accès au Royaume advient par la foi et la conversion (cf. Mc 1, 15), et non du fait d'une simple appartenance ethnique.
La libération et le salut qu'apporte le Royaume de Dieu atteignent la personne humaine dans ses aspects physiques et spirituels. Deux gestes caractérisent la mission de Jésus: guérir et pardonner. Ses nombreuses guérisons montrent sa grande compassion en face de la misère humaine; mais elles signifient aussi qu'il n'y aura plus, dans le Royaume, ni maladies ni souffrances et que, dès le début, la mission tend à libérer les personnes de leurs maux. Dans la perspective de Jésus, les guérisons sont également signes du salut spirituel, c`est-à-dire de la libération du péché. En accomplissant des gestes de guérison, Jésus invite à la foi, à la conversion et au désir du pardon (cf. Lc 5, 24). Quand est reçu le don de la foi, la guérison pousse à aller plus loin: elle introduit dans le salut (cf. Lc 18, 42-43). Les gestes de libération de la possession du démon, mal suprême et symbole du péché et de la rébellion contre Dieu, sont des signes que « le Royaume de Dieu est arrivé jusqu'à vous » (Mt 12, 28).