Matthieu 12, 36

Je vous le dis : toute parole creuse que prononceront les hommes, ils devront en rendre compte au jour du Jugement.

Je vous le dis : toute parole creuse que prononceront les hommes, ils devront en rendre compte au jour du Jugement.
Saint Thomas d'Aquin
1465. OR, JE VOUS LE DIS, etc. Le Seigneur les a repris en raison de la gravité de leur péché et de leur malice ; maintenant, [il le fait] en raison du jugement futur, auquel nous croyons. En effet, il est dit en Jb 19, 29 : Fuyez devant le glaive, car le glaive est le vengeur des iniquités, et sachez qu’il y aura un jugement ; Qo 12, 14 : Tout ce qui est fait, le Seigneur le fera venir en jugement, que ce soit bon ou mauvais. De même, 1 Co 5, 10 : Il faut que nous soyons présentés devant le tribunal du Christ afin qu’il rende à chacun ce qui lui revient, soit en bien, soit en mal. Ainsi, il y aura alors une mise en examen, car chacun rendra compte de ses actes. C’est pourquoi [le Seigneur] parle aussi des paroles, en disant : OR, JE VOUS LE DIS : DE TOUTE PAROLE VAINE QUE LES HOMMES AURONT PRONONCÉE, ILS RENDRONT COMPTE AU JOUR DU JUGEMENT. Et cela est dit dans Sg 1, 8 : Celui qui dit des choses iniques, il ne pourra pas se cacher.

1466. Vient ensuite : La parole secrète ne demeurera pas secrète. Mais que veut dire ce qu’il dit : PAROLE VAINE ? Une parole vaine s’entend en deux sens. En un sens, toute parole mauvaise est vaine, car on appelle vain ce qui ne poursuit pas une fin, comme lorsque quelqu’un en cherche un autre et ne le trouve pas, on dit qu’il a cherché en vain. Car la parole est donnée pour renseigner. Lorsqu’elle sert à quelque chose, elle n’est pas vaine. Ep 4, 29 : Qu’aucune parole mauvaise ne sorte de votre bouche ; mais si quelqu’un a quelque chose [à dire] pour l’édification de la foi et pour le bien des auditeurs, etc. Selon Chrysostome, cela concerne le sujet en cause, parce qu’ils avaient dit qu’[IL CHASSAIT LES DÉMONS] PAR BÉELZÉBOUL, etc. «Cette parole était pernicieuse, et donc aussi vaine», selon Jérôme. Toutefois, il y a une différence entre être pernicieux et être vain, parce qu’est pernicieux ce qui cherche à nuire, mais est vain ce qui n’apporte rien d’utile. Grégoire dit qu’«est vain ce qui ne se soucie pas d’une pieuse utilité ou de la nécessité. Ainsi, toute parole qui est exprimée avec légèreté est dite vaine, à moins qu’elle n’ait une pieuse utilité ou une pieuse nécessité». Mais il est clair que ceux-ci avaient exprimé une parole pernicieuse. Pourquoi donc [le Seigneur] ne mentionne-t-il que [la parole] vaine ? Parce qu’il raisonne a minori, car, s’il faut rendre compte de [la parole] vaine, à bien plus forte raison de [la parole] pernicieuse.
Louis-Claude Fillion
Jésus-Christ annonce à ses adversaires, sous la forme d’un raisonnement « a fortiori », le châtiment qu’ils s’attirent par leur conduite à son égard. - De toute parole... Nominatif absolu dont nous avons rencontré plusieurs exemples ; Cf. 10, 14-32. - Inutile serait, d’après plusieurs commentateurs modernes, synonyme de « mauvaise ». Toutefois nous n’avons pas de raisons suffisantes pour nous écarter du sens littéral et de l’interprétation unanime des anciens auteurs. Mais qu’est-ce qu’une parole oiseuse ? Les Pères répondent clairement à cette question, « Une parole inutile (oiseuse, superflue) est une parole qui n’édifie pas les auditeurs, qui est dite sans utilité pour celui qui la dit et pour celui qui l’écoute », S. Jérôme ; « Une parole inutile est une parole qui ne répond pas à une juste nécessité ou à une pieuse intention », S. Greg. Past. Cur. 3, 15. ; « Une parole inutile est une parole qui n’a aucun motif valable. Quelle explication raisonnable peut-on donner à une parole qui est étrangère à la raison ? », S. Bern. De tripl. Custodia. - Les hommes rendront compte. Dans le royaume surnaturel, les actes, même légèrement coupables, de l’homme sensuel et animal, comme l’appelle S. Paul, seront justement châtiés. « Les hommes disent, par suite d’une folie volontaire : Une parole ou deux qui ne signifiaient rien, qu’est-ce que cela ? Je n’ai fait qu’un bien petit mal ! L’histoire du monde et de la vie humaine réfute en tous lieux cette excuse insensée, répétant bien haut que les paroles sont des actes qui opèrent longtemps et profondément ». Stier, Reden des Herrn Jesu, in h. l. - Jésus ne tire pas lui-même la conclusion à laquelle il voulait amener ses auditeurs ; mais il leur était aisé de la déduire eux-mêmes. « Voici l’explication de la parole inutile.. Elle n’est pas sans péril pour celui qui la prononce, cette parole. Et au jour du jugement, chacun devra rendre compte de ses paroles. A plus forte raison, vous qui calomniez les œuvres du Saint-Esprit. » St. Jérôme.