Matthieu 13, 11

Il leur répondit : « À vous il est donné de connaître les mystères du royaume des Cieux, mais ce n’est pas donné à ceux-là.

Il leur répondit : « À vous il est donné de connaître les mystères du royaume des Cieux, mais ce n’est pas donné à ceux-là.
Saint Thomas d'Aquin
1530. La réponse vient donc ensuite : LEUR RÉPONDANT, IL LEUR DIT. Et d’abord, l’ordre voulu par Dieu est présenté ; deuxièmement, une certaine explication en est donnée. [Le Seigneur] dit donc : «Je dis donc que je parle en paraboles PARCE QU’À VOUS IL A ÉTÉ DONNÉ DE CONNAÎTRE LE MYSTÈRE DU ROYAUME DES CIEUX, TANDIS QU’À EUX CELA N’A PAS ÉTÉ DONNÉ.»

1531. Dans ces paroles, trois choses sont présentées. Premièrement, que certains comprennent, et d’autres non ; et cela ne doit pas être attribué à quiconque, car c’est Dieu qui l’a voulu. Ainsi, cela vous a été donné, mais pas à d’autres. Il s’agit donc d’un ordre voulu par Dieu. De même, cela est d’une grande utilité, car il s’agit d’une certaine annonce de la béatitude : cela est donc très utile, dans la mesure où cela vous donne une connaissance des mystères divins. Jr 9, 12 : Qui est le sage qui comprend cela et à qui la parole est-elle adressée pour annoncer cela ? C’est aussi un signe de l’amour divin. Jn 15, 15 : Je vous ai appelés mes amis parce que tout ce que j’ai entendu de la part de mon Père, je vous l’ai fait connaître. De même, cela est le résultat d’un don, et non du mérite. Ph 1, 29 : Car cela vous a été donné en vue du Christ, non seulement que vous ayez la foi, mais aussi que vous souffriez pour lui. Et cela est LE MYSTÈRE DU ROYAUME DES CIEUX de Dieu, et cela vient de Dieu, 1 Co 4, 7 : Qu’as-tu que tu n’aies reçu ?
Louis-Claude Fillion
Il leur répondit. Jésus trouve la demande des Apôtres juste et naturelle ; aussi daigne-t-il leur expliquer très clairement les motifs de la nouveauté dont ils viennent d’être témoins. - Parce que... Cette conjonction doit être prise dans toute sa force ; elle répond au « pourquoi » des Apôtres et signifie « Parce que ». Ce n’est nullement une redondance, comme le pensent divers auteurs. - A vous : mes disciples, par opposition à la foule, à la masse des auditeurs qui sont désignés plus bas par « à eux ». - Donné : c’est un don gratuit du ciel, une grâce de choix qui n’est accordée qu’à un petit nombre d’hommes. Et en quoi consiste cette faveur particulière ? Jésus la désigne par les mots : connaître les mystères du royaume des cieux. Le royaume a ses secrets d’État que personne ne peut connaître ni comprendre sans une révélation spéciale. Combien de vérités cachées jusqu’à l’époque de Jésus, et manifestées seulement par Lui à ceux qu’il jugeait dignes de recevoir la lumière ! Sans doute beaucoup de ces vérités relatives au règne messianique avaient été déposées par Dieu dans les écrits de l’ancienne Alliance, mais en termes généralement si mystérieux, que l’intelligence humaine, livrée à ses propres forces, s’était trouvée incapable de les pénétrer. Mais Jésus dévoilait, divulguait tout à ses disciples. - A eux, cela n’a pas été donné. « Il dit cela non comme impliquant une nécessité, non comme un sort jeté témérairement et définitivement, mais pour montrer qu’ils étaient eux-mêmes la cause de leurs maux. » St Jean Chrysostome, Hom. 45 in Matth. On ne saurait donc induire de ces paroles que Jésus-Christ avait une doctrine ésotérique et une doctrine exotérique à la façon des prêtres païens et même des Rabbins juifs, l’une communiquée librement et dans toute son étendue à l’entourage favori du Maître, l’autre, considérablement restreinte, à l’usage du vulgaire non initié. Tous étaient appelés sans exception à la connaissance des mystères les plus secrets, tous avaient des grâces suffisantes pour y parvenir : si la plupart n’y arrivaient pas, ils ne pouvaient en attribuer la faute qu’à eux-mêmes, comme Jésus va le dire plus bas. - Revenons sur la signification générale du v. 11. Les Apôtres ont demandé au Sauveur : Pourquoi parlez-vous en paraboles ? Ne voyez-vous pas que vous n’êtes point compris ? Jésus a répondu : Je parle en paraboles parce que, dans le nombre de mes auditeurs, il en est qui ont reçu l’insigne privilège de comprendre les mystères évangéliques, tandis que les autres ne l’ont pas reçu. C’est donc en vertu d’un décret divin que le Sauveur s’exprimera désormais en paraboles, et ce décret provient de la différence morale qui existe entre les hommes dont est composé l’auditoire de Jésus. On ne saurait mieux définir le double motif, le double but de l’enseignement sous la forme de paraboles. La nouvelle prédication de Notre-Seigneur est marquée tout à la fois au sceau de sa condescendance et de sa sainte colère. Aux âmes bien disposées, elle portera plus facilement la lumière ; elle mettra au contraire un bandeau devant les yeux des indignes qui ne comprendront pas la vérité voilée pour eux, et ne pourront pas en abuser contre Jésus. Les littérateurs et les philosophes sont unanimes à reconnaître l’existence de ces effets. « Les paraboles ont été inventées et leur usage s’est répandu pour deux motifs. Car ce qui est le plus étonnant, c’est qu’elles servent à des fins contraires. On fait des paraboles pour voiler et masquer sa pensée, et on en fait pour l’éclairer et pour l’illustrer. » Bacon, de Sap. Vet. Cf. de Augm. Scient. 2, 13. D’une part donc la parabole obscurcit la pensée, « les figures défendent le secret contre la banalité et la vulgarité » Macrob. Somm. Scip. 1, 2. D’autre part elle l’illumine et en facilite l’intelligence ; en effet, dit Quintilien, Instit. 8, 3, 72 : « Les comparaisons ont été judicieusement inventées pour apporter de l’éclairage aux choses ». Aussi Tertullien après avoir affirmé que « les paraboles assombrissent la lumière de l’évangile », de Res. Carn. 32, ajoute-t-il « Dieu tend la main à une foi qui est rendue plus facile par les images et les paroles représentant des personnes et des choses », de Anima, 43. Elles ressemblent sous ce rapport, suivant une belle comparaison, à la colonne de nuée et de feu qui éclairait le peuple de l’Alliance et obscurcissait les yeux des Égyptiens (De Gerlach). Il y a en cela quelque chose de paradoxal en apparence, mais rien assurément de contradictoire, puisque l’expérience confirme tous les jours ce double résultat. Les Juifs mal disposés, ou même simplement indifférents à l’égard de Jésus, écoutaient sans comprendre et s’en allaient sans avoir rien appris ; d’un autre côté, les amis du Christ, désireux de connaître le sens de ces gracieux tableaux qui avaient piqué vivement leur curiosité, cherchaient, travaillaient, interrogeaient et finissaient par réussir. Pour eux, le nouveau système était une grâce de plus, puisqu’il les excitait à courir avec une ardeur croissante après l’intelligence des saints mystères.