Matthieu 13, 44

Le royaume des Cieux est comparable à un trésor caché dans un champ ; l’homme qui l’a découvert le cache de nouveau. Dans sa joie, il va vendre tout ce qu’il possède, et il achète ce champ.

Le royaume des Cieux est comparable à un trésor caché dans un champ ; l’homme qui l’a découvert le cache de nouveau. Dans sa joie, il va vendre tout ce qu’il possède, et il achète ce champ.
Saint Hilaire de Poitiers
Ce trésor se trouve sans qu'il en coûte rien, car la prédication de l'Évangile est sans condition; mais il faut nécessairement acheter le droit d'user de ce trésor et d'en devenir le possesseur ainsi que du champ qui le renferme, car on ne peut posséder les ri chesses du ciel sans être disposé à leur sacrifier les biens de la terre.
Saint Jean Chrysostome
Les paraboles précédentes du levain et du grain de sénevé avaient pour objet de faire ressortir la puissance de la prédication évangélique qui a triomphé du monde en tier; Notre-Seigneur veut faire connaître maintenant tout le prix et la magnificence de cette sublime doctrine, et il se sert pour cela de la parabole du trésor et de la pierre précieuse: «Le royaume des cieux est semblable à un trésor caché dans un champ». La prédication de l'Évangile est cachée dans le monde, et si vous ne vendez pas tout ce que vous possédez, vous ne pourrez l'acheter. Il faut de plus faire ce sacrifice avec joie. «Lorsqu'un homme le trouve, il le cache».
Saint Jérôme
Il cache ce trésor, ce n'est point par un sentiment d'envie, mais il le cache dans son coeur par le désir de conserver et par la crainte de perdre ce trésor qu'il a su préférer aux richesses qu'il possédait.

Ou bien encore ce trésor dans lequel sont cachés tous les trésors de la sagesse et de la science (cf. Col 2,3 ), c'est ou le Verbe Dieu qui est comme caché dans la nature humaine de Jésus-Christ, ou bien les saintes Écritures dans lesquelles est renfermée la connaissance du Sauveur.
Saint Augustin
Ce trésor caché dans le champ, ce sont les deux Testa ments qui se trouvent dans l'Église; lorsqu'un homme parvient à les atteindre par une partie seulement de son intelligence, il comprend que ce champ renferme de grandes richesses, il s'en va, il vend tout ce qu'il possède et il l'achète, c'est-à-dire que par le mépris des choses tempo relles il achète le repos, afin de s'enrichir ainsi du trésor de la connaissance de Dieu.
Saint Grégoire le Grand
Ou bien ce trésor caché dans un champ, c'est le désir du ciel: le champ dans lequel il est caché, c'est la perfection et la sainteté de la vie qui conduit au ciel. Lorsqu'un homme a trouvé ce trésor, il le cache pour le conserver, car le goût et le désir ardent des biens célestes ne suffisent pas pour défendre ce trésor contre les esprits mauvais, si celui qui le possède ne s'efforce pas de le dérober aux attaques des louanges des hommes. En effet, la vie présente est semblable à une route que nous parcourons pour arriver à la patrie; mais cette route se trouve assiégée par les esprits mauvais comme par autant de voleurs de grand chemin. Ceux donc qui portent ce trésor à découvert semblent vouloir devenir la proie des voleurs. Je ne veux pas dire que notre prochain ne doive pas être témoin de nos bonnes oeuvres, mais simplement qu'il ne faut pas dans nos actions nous proposer les louanges des hommes. Or, le royaume des cieux est comparé aux choses de la terre, pour que notre esprit puisse s'élever de ce qu'il connaît à ce qu'il ne connaît pas encore, et que de l'amour qu'il donne aux choses dont il a la connaissance, il apprenne à aimer ce qu'il ne connaît pas. «Et dans la joie qu'il en ressent», etc. On achète le champ avec le prix de tous les biens qu'on a vendus, lorsqu'on renonce aux voluptés charnelles et qu'on foule aux pieds tous les désirs ter restres par une obéissance entière aux lois qui conduisent au ciel.
Saint Thomas d'Aquin
1624. Plus haut, le Seigneur a montré sous forme de paraboles les obstacles et le développement de l’enseignement évangélique ; maintenant, il montre sa dignité par quelques paraboles qu’il a expliquées aux apôtres. La dignité [de l’enseignement évangélique] est montrée par trois choses : sa richesse, sa beauté et son caractère universel. Le second point [se trouve] en cet endroit : LE ROYAUME DES CIEUX EST ENCORE SEMBLABLE À UN NÉGOCIANT, etc. [13, 45] ; le troisième, en cet endroit : LE ROYAUME DES CIEUX EST ENCORE SEMBLABLE À UN FILET QU’ON JETTE EN MER, etc. [13, 47].

1625. «Je dis donc que la richesse de l’enseignement évangélique ressemble à un trésor, car, de même qu’un trésor est une abondance de richesses, de même en est-il de l’enseignement évangélique.» Is 33, 6 : La richesse du salut, ce sont la sagesse et la science ; la crainte du Seigneur est elle-même un trésor. À ce sujet, il procède de la manière suivante. Premièrement, il présente un trésor caché ; deuxièmement, la découverte de ce trésor ; troisièmement, sa prise de possession, etc. Le second point [se trouve] en cet endroit : QU’UN HOMME VIENT À TROUVER, etc. [13, 44] ; le troisième, en cet endroit : RAVI DE JOIE, IL VA, etc. [13, 44].

1626. Ce trésor peut être interprété de plusieurs façons. Selon Chrysostome, c’est l’enseignement évangélique, dont il est question en 2 Co 4, 7 : Nous possédons ce trésor dans des vases fragiles, qui est caché dans le champ de ce monde, c’est-à-dire, des yeux des gens impurs, plus haut, 11, 25 : Tu as caché cela aux sages et aux prudents. Selon Grégoire, on parle du désir céleste. Is 33, 6 : La crainte du Seigneur est son trésor. Celui-ci est caché dans le champ de l’entraînement spirituel, car, à l’extérieur, il semble méprisable, mais, à l’intérieur, il possède une douceur. Pr 24, 27 : Occupe-toi de ton champ avec soin. [Col 2, 3] : En qui sont cachés tous les trésors de la sagesse et de la science, cachés qu’ils étaient dans le champ de son corps, car il était gardé caché dans la chair. Is 2, 7 : Et ses trésors sont sans fin. De même, on l’entend autrement de la Sainte Écriture, qui est cachée dans le champ de l’Église. Sg 8, 14 : En effet, c’est un trésor inépuisable pour les hommes.

1627. QU’UN HOMME VIENT À TROUVER, ET IL LE CACHE À NOUVEAU. Il se trouve chez tous par la foi. En effet, il ne peut exister chez quelqu’un que par la foi. Sg 1, 2 : Il est trouvé par ceux qui ne le cherchent pas ; il se révèle à ceux qui ont foi en lui. Mais il faut qu’il soit caché, selon ce qui est dit, Ps 118, 11 : J’ai caché tes paroles en mon cœur. Qu’on le cache, cela ne doit pas venir de l’envie, mais de la prudence. Mais les raisons pour le cacher sont multiples. Une première est qu’il fructifie et progresse, afin qu’il réchauffe davantage. En effet, un feu enfermé donne plus de chaleur. Ainsi en est-il de la parole lorsqu’elle est cachée. Jr 20, 9 : La parole du Seigneur est devenue un feu brûlant enfermé dans mes os, et je défaille et ne peux pas le supporter. Et dans Ps 38[39], 4 : Mon cœur s’est réchauffé et, quand je médite, un feu brûle en moi. De même est-il caché en raison de la vaine gloire. En effet, s’il se répand à l’extérieur, il est exposé au danger. C’est pourquoi le Seigneur [dit] plus haut, 6, 6 : Prie ton Père dans le secret. De même, parce qu’il est ainsi plus sûrement gardé. En effet, lorsqu’il est rendu public, quelqu’un viendra le voler. Is 39, 4 : Celui qui montre son trésor aux envoyés du roi de Babylone, puis vient ensuite : Voici venir les jours où tout ce qui est dans ta maison sera enlevé. Mais qu’en est-il de ce qui a été dit plus haut, 5, 15 : Que vos bonnes oeuvres brillent ? La solution se trouve dans la distinction entre les moments : lorsqu’il est trouvé pour la première fois, il est bon qu’il soit caché ; mais lorsqu’un homme est affermi, il est alors bon qu’il soit mis en lumière. Si 41, 17 : Le trésor invisible et la sagesse cachée : de quelle utilité sont-ils ? Grégoire dit qu’«il doit être accessible dans son effet, mais caché dans le cœur». Il dit donc : «Il est nécessaire qu’il ait un caractère public, bien que l’intention reste à l’intérieur du cœur. »

1628. RAVI DE JOIE, IL S’EN VA VENDRE TOUT CE QU’IL A. Ceci est le troisième point à propos de l’acquisition, car il se réjouit. Jb 3, 21 : Alors qu’ils creusaient à la recherche d’un trésor et se réjouissent intensément d’avoir trouvé un sépulcre. Lorsque par la foi il a trouvé, IL S’EN VA RAVI DE JOIE, et commence à en tirer profit, ET IL VEND TOUT, c’est-à-dire qu’il méprise [tout], afin d’avoir les [biens] spirituels, ET IL ACHÈTE CE CHAMP. Ou bien, il se donne ainsi une bonne compagnie, ou il s’achète un loisir qu’il n’a pas, à savoir, la paix spirituelle. Ph 3, 8 : J’ai estimé que tout n’était que rebuts, afin de gagner le Christ. Ct 8, 7 : Si un homme donne tous les biens de sa maison par amour, il le considérera comme rien, etc.
Louis-Claude Fillion
Le royaume des cieux... Ainsi qu’on l’a indiqué plus haut (voir la note du v. 33) la cinquième et la sixième paraboles sont associées pour exprimer une même idée, comme l’avaient été la troisième et la quatrième. Plus haut, Jésus s’était proposé de décrire la force, l’efficacité du royaume des cieux ; maintenant il en veut décrire le prix et la valeur. Là, le royaume messianique nous avait été présenté en lui-même et objectivement ; ici nous le voyons davantage au subjectif, et nous apprenons ce que nous devons faire pour nous l’approprier. La cinquième parabole, de même que les deux suivantes, semble n’avoir été prononcée que devant le cercle intime des disciples ; Cf. v. 36. On ne les trouve que dans le premier Évangile. - Un trésor : il faut conserver à ce mot son acception générale et populaire. Il est défini en ce sens par le jurisconsulte Paulus : « Un trésor est un argent déposé depuis si longtemps qu’on en a perdu le souvenir, et qui n’a plus de propriétaire. » Il s’agit donc en ce passage d’un vrai trésor d’or ou d’argent, et non, comme le veut Schoettgen, d'une « abondance de froment enfouie dans le champ », ce qui n'est pas naturel. - Caché dans un champ. L’Oriental, au caractère soupçonneux, a toujours aimé à enfouir ses objets les plus précieux, supposant que c’était le meilleur moyen de les mettre en sûreté. Ce que faisaient sous ce rapport les habitants de la Palestine, Cf. Jerem. 41, 8 ; Job. 3, 21 . Prov. 2, 4, leurs successeurs le font encore aujourd’hui pour soustraire leurs richesses aux atteintes des Arabes maraudeurs. Aussi, les fouilles pratiquées en divers lieux de la Terre Sainte par les voyageurs européens dans l’intérêt de la science présentent-elles souvent de grandes difficultés, parce que les indigènes supposent toujours qu’elles sont motivées par la recherche de quelque trésor. - L'homme… le cache. Après son heureuse découverte, l’heureux homme dont parle Jésus-Christ s’empresse de confier de nouveau à la terre les richesses qu’il a trouvées : c’est une précaution jalouse pour s’en assurer l’entière possession, comme on le voit par le contexte. - Dans sa joie. On pourrait le traduire ainsi : Par suite de la joie que lui avait causée cette trouvaille inespérée. - Il vend tout..., il s’appauvrit momentanément pour s’enrichir à tout jamais. Il lui faut une somme dont il puisse disposer immédiatement, et, pour se la procurer, il n’hésite pas à vendre tout ce qu’il possède : peut-être perdra-t-il d’abord quelque chose, mais il sait qu’il y aura bientôt pour lui une ample compensation. - Et achète ce champ, et en même temps le précieux trésor dont il jouira sa vie durant. Jésus n’apprécie pas la moralité de cette conduite ; il se borne à mentionner un exemple, qu’il propose à tous d’imiter en ce qui concerne l’acquisition du royaume des cieux. Du reste, d’après la coutume juive de cette époque, confirmée par l’enseignement des Rabbins, chacun était censé le propriétaire absolu de tout ce qu’il trouvait dans ses biens meubles ou immeubles : « Si quelqu’un achète des fruits à son voisin et y découvre à l’intérieur de l’argent, cet argent lui appartient », Bav. Mez. 2, 4. « Le rabbi Emi trouva une urne pleine de pièces d’argent. Il acheta le champ pour posséder l’argent de plein droit », ibid. f. 28, 2. Aussi, dans les contrats de vente, pour prévenir toute cause de discussion et de litige, avait-on l’habitude d’insérer la formule suivante : « J’achète cet objet avec tout ce qui est dessus ou dedans ». D’après le droit romain, les trésors découverts par le propriétaire d’un immeuble lui appartenaient en entier : trouvés sur le bien d’un autre, ils devaient être partagés avec le propriétaire. - La morale de cette parabole est bien claire ; le trésor, c’est la foi, l’Évangile, la vérité chrétienne ; quand Dieu daigne nous le faire rencontrer, nous devons aussitôt nous efforcer de l’acquérir au prix des plus grands sacrifices, sans hésiter à nous dépouiller de tout, s’il le faut, pour en faire notre possession privée.
Fulcran Vigouroux
« Saint Augustin nous dit que le champ dans lequel on peut trouver le céleste trésor n’est autre que la vraie Eglise, parce que dans l’Eglise seule nous pouvons trouver dans toute leur pureté et les dogmes révélés de Dieu, et les lois qu’il nous a imposées, et le culte qu’il exige. » (VENTURA DE RAULICA.)