Matthieu 14, 19

Puis, ordonnant à la foule de s’asseoir sur l’herbe, il prit les cinq pains et les deux poissons, et, levant les yeux au ciel, il prononça la bénédiction ; il rompit les pains, il les donna aux disciples, et les disciples les donnèrent à la foule.

Puis, ordonnant à la foule de s’asseoir sur l’herbe, il prit les cinq pains et les deux poissons, et, levant les yeux au ciel, il prononça la bénédiction ; il rompit les pains, il les donna aux disciples, et les disciples les donnèrent à la foule.
Saint Thomas d'Aquin
1691. ET APRÈS AVOIR ORDONNÉ QUE LA FOULE S’ASSOIE SUR L’HERBE, etc. Ici est présentée l’installation des gens, car il les fit asseoir sur l’herbe. Is 40, 6 : Toute chair est comme l’herbe. S’asseoir sur l’herbe n’est donc rien d’autre que de mortifier sa chair. Col 3, 5 : Mortifiez vos membres terrestres. De même, la loi est signifiée par l’herbe. Parce que ceux-ci étaient juifs, ils étaient élevés par la loi. Il ne voulut donc pas qu’ils s’assoient par terre.

1692. IL PRIT LES CINQ PAINS ET LES DEUX POISSONS, etc. Il faut remarquer que le Seigneur, lorsqu’il fait des miracles, parfois prie et parfois ne prie pas. Parfois il prie, comme ici, afin de montrer qu’il est vraiment un homme ; parfois aussi il fait des choses plus grandes et ne prie pas, afin de montrer qu’il est Dieu.

1693. LEVANT LES YEUX AU CIEL, IL BÉNIT. AU CIEL, c’est-à-dire vers son Père. Ps 120[121], 1 : J’ai levé les yeux vers les montagnes d’où me viendra le secours. IL BÉNIT, car tout est béni par la parole de Dieu. Il faut remarquer que notre bénédiction n’est pas créatrice, mais a valeur de signe ; mais la bénédiction de Dieu est créatrice. Ainsi, la bénédiction a un rapport avec la multiplication. Gn 1, 22 : [Dieu] bénit et dit : «Croissez et mutipliez-vous, et remplissez la terre.»

1694. ROMPANT LES PAINS, IL LES DONNA À SES DISCIPLES. Par cela est signifié que la première distribution a été faite aux disciples par le Christ tête. 1 Co 11, 3 : Le Christ est la tête de tous les hommes. Mais il a rompu [le pain] afin d’indiquer sa distribution. Is 58, 7 : Romps ton pain avec celui qui a faim. IL LES DONNA AUX DISCIPLES, en tant qu’ils sont médiateurs, plus loin, 26, 20 : Prenez et mangez. 1 Co 11, 28 : Et que l’homme se montre digne de manger ce pain et de boire cette coupe, etc. QUI LES DONNÈRENT AUX FOULES, en tant qu’ils sont les dispensateurs.

1695. Mais comment [les pains] ont-ils été multipliés ? Il faut dire que les morceaux ont été multipliés. Certains disent que cela peut être fait naturellement : en effet, le rapport de la matière à la forme est semblable à celui qu’elle a avec la quantité. Mais il est insensé que la matière ait un rapport avec n’importe quelle quantité, car ceci ne pourrait se faire que par raréfaction. Or, une telle raréfaction est limitée dans les choses naturelles. Certains disent que [Jésus] multiplie [les pains] à la manière dont un grand nombre de grains proviennent d’un petit nombre, mais là par la nature, et ici par l’action du Christ. Les mains du Christ étaient donc comme la terre, et les morceaux comme des grains. Ainsi, de même que les grains se multiplient, de même [en fut-il] des morceaux. Toutefois, ce miracle n’a pas consisté seulement en cela, mais en la conversion d’une autre matière en celle-ci.
Louis-Claude Fillion
Apportez-les moi. Jésus se fait apporter les cinq pains et les deux poissons qui vont servir de matière à l’un de ses miracles les plus éclatants. Puis, à la façon d’un hôte qui, avant de commencer le repas, distribue aux convives leurs places respectives, il établit entre ses nombreux invités un ordre harmonieux qui rendra le service plus facile. Voir les détails dans S. Marc et S. Luc. - S'asseoir sur l'herbe. La région dans laquelle se trouvait Jésus abonde en pâturages, comme tant d’autres endroits déserts de la Palestine au printemps, - et c’était précisément alors cette saison de l’année, - elle est couverte d’une herbe longue et serrée qui fournit pour ce repas providentiel les couches usitées aux festins des anciens : de là le mot « s'asseoir ». Ayant pris les cinq pains. Il prit les cinq pains à la fois et c’était chose facile, car les pains orientaux ont toujours été minces et légers. Ils ressemblent encore à des galettes qui ont l’épaisseur d’un doigt et la largeur d’une assiette ordinaire, Cf. Robinson, Palæstina, 3, p.40 et 293 ; de Wette, Archæologie, § 133. - Levant les yeux. En agissant ainsi, Jésus paraît s’être conformé à une ancienne coutume religieuse des Juifs. Au commencement de chaque repas, le père de famille prenait un pain et le bénissait en prononçant sur lui, les yeux levés au ciel, une formule traditionnelle qui avait probablement une grande analogie avec la suivante, dont les Israélites se servent aujourd’hui : « Sois béni, Jéhova notre Seigneur, roi du monde, qui fais sortir le pain de la terre ». Celui, dit le Talmud, qui jouit d’une chose sans action de grâces, ressemble à un homme qui volerait Dieu. Mais Jésus faisait assurément quelque chose de plus qu’une simple action de grâces. En levant les yeux vers le ciel, il s’unissait à son divin Père, il montrait la source de la puissance merveilleuse qu’il allait manifester. En bénissant les pains, il leur communiquait la fécondité en vertu de laquelle ils devaient rassasier une si grande quantité de personnes. - Rompant les pains. « Jésus , en les rompant , y répandit l'abondance » , dit saint Jérôme, Comment. in h. l. Luc de Bruges ajoute avec beaucoup de justesse : « La multiplication des pains a commencé par cette fraction de Jésus; elle s’est amplifiée par la distribution des disciples; et elle a trouvé son apogée dans les mains de ceux qui les ont mangés ». Tel est en effet le mode le plus naturel et le plus raisonnable de la multiplication des cinq pains. Il en fut de même pour les poissons. - Il les donna à ses disciples... L’analogie qui existe entre ce passage et l’institution de la sainte Eucharistie est vraiment remarquable ; Cf. 26, 26 : elle le devient davantage encore si l’on se rappelle que, le lendemain de ce miracle, Jésus promit, dans la synagogue de Capharnaüm, l’institution de l’adorable Sacrement de l’autel ; Cf. Joan. 6, 22 et ss. - Les disciples les donnèrent aux foules. La distribution aurait été trop lente si le Sauveur eût entrepris de la faire lui-même : c’est pourquoi il en chargea ses Apôtres qui, en moins d’une heure, grâce à l’organisation de la foule par groupes de cinquante et de cent, purent s’en acquitter aisément.
Catéchisme de l'Église catholique
Fraction du Pain parce que ce rite, propre au repas juif, a été utilisé par Jésus lorsqu’il bénissait et distribuait le pain en maître de table (cf. Mt 14, 19 ; 15, 36 ; Mc 8, 6. 19), surtout lors de la dernière Cène (cf. Mt 26, 26 ; 1 Co 11, 24). C’est à ce geste que les disciples le reconnaîtront après sa résurrection (cf. Lc 24, 13-35), et c’est de cette expression que les premiers chrétiens désigneront leurs assemblées eucharistiques (cf. Ac 2, 42. 46 ; 20, 7. 11). Ils signifient par là que tous ceux qui mangent à l’unique pain rompu, le Christ, entrent en communion avec Lui et ne forment plus qu’un seul corps en Lui (cf. 1 Co 10, 16-17).