Matthieu 14, 23

Quand il les eut renvoyées, il gravit la montagne, à l’écart, pour prier. Le soir venu, il était là, seul.

Quand il les eut renvoyées, il gravit la montagne, à l’écart, pour prier. Le soir venu, il était là, seul.
Saint Thomas d'Aquin
1701. ET QUAND IL EUT RENVOYÉ LES FOULES, IL GRAVIT LA MONTAGNE, SEUL, POUR PRIER. Il est ensuite parlé du danger, et le danger est indiqué par le moment, par le lieu et par le vent.

1702. En premier lieu, l’absence du Christ est présentée, car, alors qu’il était avec les disciples, IL GRAVIT LA MONTAGNE, SEUL, POUR PRIER. En effet, il était venu pour semer notre foi. C’est pourquoi il agissait parfois humainement, parfois divinement. Le fait d’avoir multiplié les pains, cela venait de Dieu ; le fait qu’il ait prié, cela était humain, non pas qu’il en eût besoin, mais pour donner l’exemple. En effet, toute action du Christ est un enseignement pour nous. Jn 13, 15 : Je vous ai donné un exemple, afin que vous fassiez comme j’ai fait. Et il nous donne l’exemple comment prier : pour prier, le repos de l’esprit, l’élévation et la solitude sont nécessaires. Le repos est indiqué : QUAND IL EUT RENVOYÉ LA FOULE, qui représente les pensées troublantes avec lesquelles un homme ne peut pas prier. C’est pourquoi [le Seigneur] enseigne à fermer les portes de notre cœur, plus haut, 6, 6 : Lorsque tu pries, entre dans ta chambre, etc. Aussi, l’élévation. Lm 3, 28 : Il siégera seul et s’élèvera au-dessus de lui-même. Aussi, la solitude. Os 2, 14 : Je la mènerai au désert et je parlerai à son cœur. Par la montagne, on entend le ciel. En effet, il n’y a rien de plus élevé que le ciel. Après avoir renvoyé les foules, c’est-à-dire après avoir renvoyé ce qui est mortel, il alla vers le ciel, et lui seul y monta, et par sa propre puissance. Mi 2, 13 : Il est monté devant pour ouvrir le chemin. De même, il est monté pour prier. He 7, 25 : Montant de lui-même.

1703. Mais ici semble se poser une question, car Jean semble dire qu’il mena les foules sur la montagne, comme on lit en Jn 6, 3 ; mais ici, on dit qu’après avoir nourri les foules, il gravit la montagne. La réponse est qu’il mena [les foules] vers la montagne, mais qu’après, il monta vers un endroit plus élevé. Se pose aussi une autre question, car on trouve en Jn 6, 15 qu’il s’enfuit, parce qu’on voulait le faire roi. Mais ici, on dit qu’il monta pour prier. Augustin dit que ce peut être la même cause qui le fit fuir et [le conduisit] à prier.

1704. Ensuite, le danger est décrit par le moment, car c’était la nuit, et, la nuit, la mer est plus dangereuse. [Matthieu] dit donc : LE SOIR VENU. Et cela signifie sa passion, car il monta seul vers sa passion. Ac 1, 9 : Sous leurs yeux, il s’éleva et la nuée le déroba à leurs yeux.
Louis-Claude Fillion
Lorsqu'il eut renvoyé la foule : il y réussit aisément, à l’aide de ces bonnes et douces paroles dont il avait le secret. D’ailleurs, il put s’échapper sans peine, étant seul et n’ayant pas à conduire avec lui douze disciples sympathiques aux folles idées de la multitude. - Il monta sur une montagne. Ce devait être la montagne par excellence de la région où se trouvait alors le Sauveur. S. Jean nous apprend, 6, 3 ; Cf. 15, que Jésus s’était retiré sur cette même montagne avec ses disciples aussitôt après avoir débarqué : elle eût été le lieu de son repos sans la nouvelle direction donnée tout à coup aux événements par la Providence. - Pour prier. Ces prières qui accompagnent les événements les plus solennels de la vie de Jésus demeureront toujours pour nous un profond mystère : elles sont uniques en leur genre, car c’étaient les supplications, les adorations d’une âme hypostatiquement unie à la divinité : elles constituent l’un des actes principaux du sacerdoce de Jésus-Christ. « N’assigne pas le fait d’aller monter pour prier à celui qui a rassasié cinq mille hommes avec cinq pains. Mais à celui qui, après avoir appris la mort de Jean, se retire dans la solitude. Je ne dis pas cela dans le but de lui attribuer deux personnes. Mais ses œuvres se répartissent entre Dieu et l’homme », Saint Jérôme, Comm. in h. l. Les anciens commentateurs aiment à relever, dans un but moral, les circonstances de temps et de lieu parmi lesquelles Jésus accomplit sa prière. - Le soir étant venu : voir la note du v. 15. « Les ténèbres recouvraient déjà la terre », lisons-nous dans S. Jean, 6, 17. - Il était là, seul parce que la foule s’était peu à peu écoulée, voyant qu’elle ne pouvait pas réaliser son projet.