Matthieu 14, 9

Le roi fut contrarié ; mais à cause de son serment et des convives, il commanda de la lui donner.

Le roi fut contrarié ; mais à cause de son serment et des convives, il commanda de la lui donner.
Saint Thomas d'Aquin
1669. LE ROI FUT CONTRISTÉ À CAUSE DE SON SERMENT. Ici est précisé comment [Jean] fut tué. Chrysostome [dit] : «Ici est donné un exemple de ce que l’honnêteté est respectée même par les impies», comme on le lit en Sg 5, 1s. Jérôme dit que celui-là est contristé qui auparavant avait voulu tuer, mais avait craint le peuple. Pourquoi [Matthieu] dit-il donc que [le roi] est contristé ? [Jérôme donne] la solution : c’est la coutume parmi les hommes de raconter ce qui est vu des hommes, comme ils disaient que le Christ était le fils de Joseph, parce qu’ils le pensaient, ainsi qu’on le lit en Lc 3. [Matthieu] dit donc qu’IL FUT CONTRISTÉ, parce qu’il le parut aux hommes.

1670. Vient ensuite l’exécution. Premièrement, l’ordre [de l’exécuter] est présenté ; deuxièmement, l’exécution. À CAUSE DE SON SERMENT ET DES CONVIVES. En cela, [Hérode] fut insensé, car on ne doit pas craindre d’avoir fait serment à propos d’une chose mauvaise, car par le fait même d’avoir juré, je suis parjure. Jr 4, 2 : Vous jurerez avec jugement (c’est-à-dire avec discernement), avec justice et vérité. De même, s’il avait fait serment, il fallait qu’il soit entendu que ce qu’il ferait de lui-même porterait sur ce qui est bien. Ainsi, ce qu’il ne devait pas faire de lui-même, il ne devait pas ordonner à un autre [de le faire]. Za 8, 17 : N’aimez pas un serment mensonger. ET AUSSI À CAUSE DES CONVIVES, afin de les rendre complices de l’homicide. En effet, tous appuyaient la jeune fille. IL COMMANDA DE LA LUI DONNER.
Louis-Claude Fillion
Le roi fut attristé. S. Jérôme et S. Hilaire ne croient pas pouvoir mettre cette parole d’accord avec le « voulant le faire mourir » du v. 5, à moins d’affirmer que la tristesse du tétrarque était feinte et hypocrite : « L’hypocrite et l’artisan de mort présentait comme de la tristesse sur son visage la joie qu’il ressentait dans son cœur », St Jérôme, Comm in h. l. Mais ce sentiment est peu vraisemblable. La tristesse d’Hérode était réelle, de même que son estime pour le Baptiste, de même que les craintes qui lui étaient inspirées par la possibilité d’une révolte de la part du peuple : cette contradiction apparente se justifie très bien au point de vue psychologique dans une âme d’un tel caractère. - Le roi : nous avons vu qu’Hérode était simplement tétrarque et qu’il ne portait pas le titre de roi. L’évangéliste l’appelle roi dans le sens général et populaire de ce mot. Cf. 2, 22. Plus tard, sur les instances réitérées d’Hérodiade, et jaloux de voir son neveu Agrippa élevé à la dignité royale par l’empereur, Hérode fit un voyage à Rome tout exprès pour obtenir le même honneur : il reçut une sentence qui l’exilait à Lyon. Après avoir passé quelques années dans cette ville, il alla probablement mourir en Espagne. Cf. Jos. Bell. Jud. 2, 9, 6. - A cause de son serment ; comme si un pareil serment était obligatoire ! Il craint d’être parjure après s’être engagé à la légère et de la façon la plus vague, et il ne craint pas de commettre une énorme atrocité ! - Et de ceux qui étaient à table. Le faux point d’honneur, tel est le second motif qui lui fait surmonter sa tristesse et son indécision. « Et pourquoi ne craignait-il pas ce qui était plus grave ? demande St Jean Chrysostôme. Car si tu craignais d’avoir des témoins du parjure, il te fallait à bien plus forte raison redouter un meurtre si criminel, dont un si grand nombre seraient témoins », Hom. 48 in Matth.