Matthieu 15, 5
Et vous, vous dites : “Supposons que quelqu’un déclare à son père ou à sa mère : “Les ressources qui m’auraient permis de t’aider sont un don réservé à Dieu.”
Et vous, vous dites : “Supposons que quelqu’un déclare à son père ou à sa mère : “Les ressources qui m’auraient permis de t’aider sont un don réservé à Dieu.”
Mais vous, par opposition à « Dieu a dit » du v. 3. - Quiconque
aura dit... Origène avouait qu’il ne serait jamais venu à bout de comprendre ce passage si un Juif ne le lui eût
éclairci. En effet, la connaissance des usages hébraïques de ces temps est tout à fait nécessaire pour expliquer
la formule suivante, prononcée par les mauvais fils qui voulaient se soustraire à l’obligation de venir en aide
à leurs parents. - Tout don, etc. Au lieu de « don », S. Marc, 7, 11, emploie l’expression technique « Corban »
(de approcher, offrir) qui désignait non pas un présent quelconque, mais une offrande religieuse faite à Dieu
ou au temple. Quand on avait une fois prononcé le simple mot Corban sur une propriété, sur une somme
d’argent, sur n’importe quel objet, ces choses étaient par là-même irrévocablement consacrées à Dieu. Cf.
Jos. Contr. App. 1, 22. Il régnait sur elles une sorte d’interdit relativement à toute autre personne que le
donataire. - Vous profitera. Vous participerez aux grâces et aux bénédictions que mon offrande attirera sur
notre famille entière ; tenez-vous donc pour satisfaits, car il m’est désormais impossible de vous soulager. La
phrase reste suspendue à la fin du verset, comme si Jésus n’eût pas voulu prononcer la barbare condition
autorisée par les principes pharisaïques : « ne sera obligé à rien ». Quiconque aura dit à son père ou à sa mère
: tout ce que j’offrirai au Seigneur vous profitera, se sera acquitté de ses obligations à leur égard, et il ne sera
pas tenu de leur venir en aide. On peut traduire le texte grec autrement que n’a fait la Vulgate, et donner à la
pensée ce tour beaucoup plus simple : « Est un don de moi tout ce qui t’est utile, tout ce qui peut te faire progresser ». Tous mes biens, à l’aide desquels je pourrais vous secourir, sont Corban ; je les ai promis à
Dieu, il ne m’est donc pas possible de faire quoi que ce soit pour vous ; Cf. S. Jean Chrys. Hom 51 in Matth.
Cette interprétation semble exigée par la formule hébraïque du vœu de Corban ; car elle a été
providentiellement conservée dans le Talmud où elle fait de fréquentes apparitions, c’est Corban, disait-on ;
c’est offert à Dieu, ce avec quoi je pourrais t’être utile. Ou encore : Que ce soit Corban..., car la traduction
par l’optatif est également permise ; elle dramatise même la situation en nous montrant un fils barbare qui, au
moment où ses parents nécessiteux implorent un secours, s’écrie pour échapper à leurs sollicitations
importunes : « Corban ». « Quand ils réalisaient que des choses avaient été consacrées à Dieu, les parents,
plutôt qu’encourir le nom de sacrilèges, les rejetaient sans hésiter, préférant demeurer dans l’indigence »,
Saint Jérôme. Ce mot produisait un effet magique, car il permettait à l’enfant sans cœur de jouir d’une
manière égoïste de toutes ses possessions, sous prétexte que, les ayant consacrées à Dieu, il ne pouvait plus
les aliéner. D’après la Vulgate, les mots vous profitera signifie : J’ai donné à Dieu tout ce que je possède,
mais vous en retirerez un profit spirituel. (commentaire Fillion 1903). « Personne ne conteste que celui qui
parle ainsi ne remette ses biens à des usages sacrés. Mais selon la doctrine des scribes, il ne s’est pas engagé
à les consacrer. Il ne se serait obligé qu’à aider de ses ressources la personne à qui il a dit ces choses »,
Lightfoot, Hor. Talm. in h. l. Aussi, n’étaient-ce pas seulement les fils dénaturés, mais encore les débiteurs
sans conscience, qui avaient recours à un moyen si commode d’esquiver les obligations les plus sacrées : le
Juif qui interpréta ce passage à Origène lui avoua franchement les honteux avantages que ses compatriotes
savaient retirer du Corban.