Matthieu 17, 4
Pierre alors prit la parole et dit à Jésus : « Seigneur, il est bon que nous soyons ici ! Si tu le veux, je vais dresser ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. »
Pierre alors prit la parole et dit à Jésus : « Seigneur, il est bon que nous soyons ici ! Si tu le veux, je vais dresser ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. »
Ou bien encore, comme ce monde visible a été créé après le nombre complet de six jours, celui qui s'élève au-dessus de toutes les choses du monde, peut monter sur cette montagne élevée pour y contempler la gloire du Verbe de Dieu.
Dans le sens mystique, celui qui, comme nous l'avons dit, s'est élevé au-dessus des six jours, voit Jésus transfiguré devant les yeux de son coeur; car le Verbe de Dieu a diverses formes, et il se découvre à chacun de la manière qu'il sait lui être la plus utile, sans jamais se dévoiler au delà des dispositions de son âme. Aussi l'Évangéliste ne dit-il pas simplement: «il fut transfiguré, mais il fut transfiguré devant eux ». En effet, dans l'Évangile, Jésus est compris d'une manière simple et ordinaire par ceux qui ne peuvent monter sur la montagne élevée de la sagesse par les saints exercices des entretiens spirituels. Ceux, au contraire, qui sont assez heureux pour gravir cette montagne, ne le connaissent plus selon la chair, mais voient en lui le Verbe de Dieu. C'est devant eux que Jésus se transfigure et non pas devant ceux qui vivent ici-bas d'une vie toute terrestre. Ceux devant lesquels Jésus se transfigure, deviennent les enfants de Dieu; il se découvre à leurs yeux comme le soleil de justice, et ses vêtements deviennent brillants comme la lumière. Ces vêtements sont les discours et les récits de l'Évangile, dont Jésus est comme revêtu, et que les Apôtres nous ont conservés dans leurs écrits.
Celui qui comprend le rapport qui existe entre l'esprit de la loi et les paroles de Jésus, et qui sait trouver dans les prophéties la sagesse cachée du Christ, celui-là voit Moïse et Élie dans la même gloire que Jésus.
Mais que dit ici Pierre, toujours plein d'ardeur? « Or, Pierre, prenant la parole, dit à Jésus: Seigneur, nous sommes bien ici », etc. Comme il avait appris de Jésus lui-même qu'il lui fallait aller à Jérusalem, il craint encore pour son Maître; mais après le reproche qu'il en a reçu, il n'ose plus lui dire: « Gardez-vous en bien, Seigneur»; mais il exprime la même pensée sous une autre forme. Il voyait sur la montagne un grand calme et une solitude profonde, et d'après la disposition des lieux, il pense y pouvoir trouver une demeure convenable, comme il le dit au Sauveur: « Nous sommes bien ici ». Il voudrait même y rester toujours, et il parle d'y élever des tentes: « Faisons, s'il vous plaît, trois tentes ». Il espérait que s'il pouvait s'établir sur la montagne, Jésus n'irait pas à Jérusalem, et qu'en évitant d'aller dans cette ville, il éviterait en même temps la mort; car il savait que les scribes tramaient sa perte. Il se confiait encore sur la présence d'Élie, qui avait fait descendre le feu sur la montagne ( 2R 1 ), et sur celle de Moïse ( Ex 24,23 ), qui était entré dans la nuée pour parler à Dieu. Ils auraient pu ainsi se déro ber à tous les regards et à toutes les recherches des persécuteurs.
Ces trois disciples que Jésus prend avec lui figurent l'élection future de tous les peuples qui descendent de la triple souche de Sem, de Cham et de Japhet.
Moïse et Élie sont choisis de préférence parmi tous les saints, pour nous montrer le règne de Jésus-Christ établi au milieu de la loi et des prophètes; car il doit juger Israël, assisté des mêmes té moins qui ont annoncé sa venue.
Ce n'est point immédiatement après cette promesse, mais six jours après, qu'il les conduit sur la montagne; il veut, par ce retard de quelques jours, étouffer tout sentiment humain d'envie dans les autres disciples, et exciter dans l'âme de ceux qu'il doit prendre avec lui un plus vif désir et le soin d'une préparation plus parfaite.
Notre-Seigneur prend avec lui ces trois disciples, parce qu'ils étaient supérieurs aux autres Apôtres. Remarquez ici que saint Matthieu ne cherche point à taire le nom de ceux qui lui furent préférés; c'est ce que fait également saint Jean, en rapportant les magnifiques prérogatives accordées à saint Pierre, car le collège des Apôtres était pur de tout sentiment d'envie et de vaine gloire.
« En même temps, ils virent paraître Moïse », etc. On peut donner plu sieurs raisons de cette apparition; premièrement, comme le peuple disait que Jésus était Élie ou Jérémie, ou un des prophètes, il paraît entouré des premiers des prophètes, pour montrer la différence qui existe entre le maître et les serviteurs. Deuxièmement, les Juifs accusèrent conti nuellement Jésus d'être un blasphémateur, un transgresseur de la loi, un usurpateur de la gloire de son Père; pour établir son innocence sur ces deux points, il fait paraître deux hommes qui ont brillé surtout par leur zèle pour la loi, comme pour la gloire de Dieu; car c'est Moïse qui donna la loi, et Élie fut un des plus zélés défenseurs de la gloire de Dieu. Troisièmement, il veut leur apprendre qu'il est le maître de la vie et de la mort, et c'est dans ce dessein qu'il fait paraître Moïse, qui avait payé le tribut à la mort, et Élie, qui n'y avait pas encore été soumis. Une quatrième raison que nous fait connaître l'Évangéliste, c'était pour dévoiler la gloire de la croix et calmer les inquiétudes et les craintes de Pierre et des autres disciples à l'égard de la passion; car, comme le remarque un autre Évangéliste: « Ils s'entretenaient avec lui de sa mort qui devait s'accomplir dans Jérusalem » ( Lc 9 ). Il se montre donc au milieu de ceux qui se sont exposés à la mort pour être agréables à Dieu, et pour le peuple fidèle; car tous deux se présentèrent avec fermeté devant deux tyrans, Moïse devant Pharaon ( Ex 5 ), et Élie devant Achab ( 1R 10 ). Il les fait encore paraître dans cette circonstance, pour exciter ses disciples à imiter leurs vertus, c'est-à-dire la douceur de Moïse et le zèle d'Élie.
On se de mande comment, d'après saint Matthieu, ce fut six jours après que Jésus prit avec lui ses disci ples, tandis que saint Luc compte huit jours d'intervalle. La réponse est facile: saint Matthieu ne compte que les jours pleins qui séparent ces deux événements, tandis que S. Luc compte de plus le premier et le dernier jour.
Remarquons encore que tandis qu'il refusa de faire voir aux scribes et aux pharisiens un prodige dans le ciel, il en fait éclater un de cette nature devant les Apôtres, pour augmenter leur foi, puisqu'il fait descendre Élie du ciel où il était monté, et ressusciter Moïse des enfers. C'est ce double prodige qu'Isaïe conseillait à Achab de demander au plus profond de l'abîme ou au plus haut des cieux ( Is 7,11 ).
Vous êtes cependant dans l'erreur, Pierre, et comme le remarque un autre Évangéliste ( Lc 9,33 ): « Vous ne savez ce que vous dites ». Ne cherchez pas à élever trois tentes, lorsqu'il ne doit y avoir qu'une seule tente, celle de l'Évangile, qui contient le mystérieux abrégé de la loi et des prophètes. Si cependant vous voulez trois tentes, n'égalez pas les serviteurs au maî tre, mais établissez trois tentes (ou plutôt une seule), pour le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Que ces trois personnes qui n'ont qu'une seule et même divinité, n'aient aussi dans votre coeur qu'une seule et même demeure.
Six jours après cette prédiction, Notre-Seigneur accomplit dans sa transfiguration sur la montagne, la promesse de cette apparition glorieuse qu'il avait faite à ses disciples. « Et six jours après , dit l'Évangéliste, Jésus prit Pierre, Jacques et Jean », etc.
Notre-Seigneur, sur le point de découvrir à ses disciples la splendeur de sa gloire, les conduit sur une montagne: « Et il les conduisit sur une haute montagne ». Ainsi enseigne-t-il à tous ceux qui désirent arriver à la contemplation de Dieu, qu'ils ne doivent point rester plongés dans les vils plaisirs des sens, mais s'élever toujours par les affections de leur coeur jusqu'aux biens invisibles des cieux. Il veut apprendre aussi à ses disciples à ne point chercher la gloire de la divine clarté dans les basses régions de ce monde, mais dans le royaume de la félicité céleste. Il les conduit à l'écart, parce que les saints sont ici-bas séparés des méchants par les dispositions de leur âme et l'intention de leur foi, et qu'ils en seront complètement séparés dans le siècle futur. Ou bien encore, parce qu'il y en a beaucoup d'appelés et peu d'élus ( Mt 20 ). « Et il fut transfiguré », etc. Il apparut aux yeux des Apôtres tel qu'il apparaîtra au jour du jugement. Ne nous imaginons pas, toutefois, qu'il ait quitté sa première forme et sa figure or dinaire, et qu'il ait laissé le corps véritable dont il était revêtu, pour prendre un corps spirituel ou aérien. L'Évangéliste nous apprend la manière dont s'opéra cette transfiguration: « Son visage devint brillant comme le soleil, et ses vêtements blancs comme la neige ». Puisque l'Évangéliste nous décrit l'éclat de son visage et la blancheur de ses vêtements, la substance n'en fut donc pas détruite, l'éclat seul en fut changé. Sans doute le Seigneur fut transformé en cette gloire dont il sera revêtu lorsqu'il viendra pour établir son règne; mais cette transformation lui donna un nouvel éclat, sans changer ni les traits ni la nature de son visage. Supposons que son corps soit devenu un corps spirituel, est-ce que la nature de ses vêtements fut également changée? Ils devinrent si blancs, dit un autre Évangéliste ( Mc 9 ), que nul foulon sur la terre ne pourrait leur donner une pareille blancheur. Or des objets de ce genre ont une forme corporelle, on peut les toucher, et ce n'est pas quelque chose de spirituel et d'aérien qui fait illusion aux regards et n'a qu'une apparence fantastique. Si le visage du Sauveur est devenu brillant comme le soleil, et que le visage des saints doive aussi briller un jour comme cet astre, faut-il en conclure que la gloire du Seigneur et celle des serviteurs auront le même éclat? Non, sans doute, mais comme rien dans la création n'approche de l'éclat du soleil, les saintes Écritures, pour nous donner une idée de la résurrection future, nous disent que le visage du Seigneur resplendit comme le soleil, et que les justes brilleront eux-mêmes un jour comme cet astre.
L'erreur de Pierre fut encore de vouloir établir sur la terre le royaume des élus, que Jésus avait promis d'établir un jour dans les cieux; il se trom pa encore en oubliant qu'il était mortel, lui et les deux autres disciples, et en voulant entrer dans l'éternelle félicité sans avoir passé par la mort.
Ou bien, dans un au tre sens, à la vue de la gloire du Seigneur et de ses deux fidèles serviteurs, Pierre fut tellement ravi de joie, qu'il oublie toutes les choses de la terre, et qu'il voudrait rester toujours dans cet endroit. Or, si tel fut l'enivrement et le transport de cet Apôtre, quelle douceur et quelle sua vité de voir un jour le Roi de gloire dans toute sa beauté (cf. Is 33,17 ), et de se trouver mêlé aux choeurs des anges et de tous les saints? Cette parole de Pierre: « Seigneur, si vous le voulez », est une preuve tout à la fois de son dévouement et de son obéissance.
Le nombre six n'est point mis ici sans raison; c'est après six jours écoulés que le Sauveur manifeste sa gloire, figure de la résurrection qui doit avoir lieu à la fin des six âges de l'homme.
Ou bien, il ne prend avec lui que trois disciples, parce qu'il y en a beaucoup d'appelés, mais peu d'élus. Ou bien encore, parce que ceux-là seuls qui conservent dans une âme pure la foi en la sainte Trinité, jouiront alors de l'éternelle vision des cieux.
Il se trompa enfin, en croyant qu'il fallait des tentes pour la vie du ciel, où il n'est nul besoin d'habitation, alors qu'il est écrit: « Je n'ai pas vu de temple dans la céleste Jérusalem » ( Ap 21,22 ).
La Glose
Ou bien les vêtements du Christ figurent les saints dont Isaïe a dit: « Ils seront pour vous comme un habillement d'honneur dont vous serez revêtu » ( Is 49,18 ). Ils sont comparés à la neige, parce qu'ils auront l'éclat pur de la vertu, et que le feu des passions ne pourra plus les atteindre.
1897. Vient ensuite la réaction émotive de Pierre : PIERRE ALORS, PRENANT LA PAROLE, DIT, etc. Et nous pouvons l’expliquer en nous tournant soit vers sa condition charnelle, soit vers sa dévotion. Chrysostome se tourne vers sa condition charnelle. Plus haut, le Christ avait dit qu’il allait souffrir et Pierre l’avait rabroué lorsqu’il l’avait repris. Moïse et Élie apparurent donc en train de parler de la passion [du Christ]. C’est pourquoi lorsque Pierre [les] entendit s’y référer, il ne put l’entendre. Il ne voulait pas s’y opposer. Il pensait donc que, s’il restait là, il éviterait la mort. Ainsi, pour qu’ils ne partent pas immédiatement, il dit : FAISONS ICI TROIS TENTES. Et pourquoi dit-il : UNE POUR MOÏSE, UNE POUR ÉLIE ? Parce qu’il voyait que [le Seigneur] était affecté par la mort, il voulait que ceux-ci [l’]empêchent de mourir. On lit au sujet d’Élie, en 4 R [2 R] 1, 10, que lorsque le roi envoya la cinquantaine, [Élie] fit descendre le feu du ciel. On lit aussi de Moïse, [au même endroit], 16, 32, que lorsqu’un conflit surgit dans le tabernacle, il descendit des nuées. [Pierre] pensait donc que les nuées pouvaient écouter Moïse et le feu, Élie.
D’autres se tournent vers la dévotion de Pierre. À ce sujet, [Matthieu] fait deux choses. Premièrement, il aborde la réaction émotive [de Pierre] ; deuxièmement, sa suggestion, en cet endroit : SI TU LE VEUX, etc.
1898. [Pierre] dit donc : SEIGNEUR, IL EST HEUREUX QUE NOUS SOYONS ICI. Voyant la gloire dans le trop grand éclat de la neige, [Pierre] fut tellement ému qu’il ne voulut jamais en être séparé, si Dieu le voulait. Et qu’en sera-t-il de ceux qui seront dans une gloire parfaite ! Ainsi donc, ceux qui seront dans cette béatitude ne voudront jamais en être séparés. Ps 72, 28 : Il est bon pour moi d’être attaché à Dieu, etc. En second lieu, il fait une suggestion et, comme le dit Lc 9, 23, sans savoir ce qu’il disait. Il dit donc : SI TU LE VEUX, DRESSONS ICI TROIS TENTES, car nous devons soumettre notre volonté à la volonté de Dieu, comme plus haut, 6, 10 : Que ta volonté soit faite, etc. En cela, Pierre a donc bien parlé ; mais, sous un autre aspect, il a mal parlé, parce qu’il a cru qu’on pouvait obtenir la gloire sans la mort, ce qui va à l’encontre de 2 Co 5, 1 : En effet, nous savons que, si la demeure terrestre où nous habitons est détruite, nous avons une maison qui n’est pas construite de main d’homme, mais qui est éternelle dans les cieux. [Il a aussi mal parlé] parce qu’il a cru que la gloire des saints se trouvait en ce monde, elle qui n’est pas ici, mais dans les cieux, plus haut, 5, 12 : Réjouissez-vous et exultez, car votre récompense est grande dans les cieux. [Il a aussi mal parlé] parce qu’il a cru qu’ils avaient besoin de tentes ; mais ils n’en avaient pas besoin ici, car ils en ont dans les cieux. Ap 21, 3 : Voici la tente de Dieu au milieu des hommes. [Il a encore mal parlé] parce qu’il a voulu dresser trois tentes : en effet, une seule suffit pour le Père, le Fils et l’Esprit Saint. De même, il a comparé le Christ aux autres. Or, il ne faut pas agir ainsi. Jb 32, 21 : Je n’égalerai pas Dieu à l’homme. Pierre, tous n’ont qu’une seule tente, qui est la foi !
D’autres se tournent vers la dévotion de Pierre. À ce sujet, [Matthieu] fait deux choses. Premièrement, il aborde la réaction émotive [de Pierre] ; deuxièmement, sa suggestion, en cet endroit : SI TU LE VEUX, etc.
1898. [Pierre] dit donc : SEIGNEUR, IL EST HEUREUX QUE NOUS SOYONS ICI. Voyant la gloire dans le trop grand éclat de la neige, [Pierre] fut tellement ému qu’il ne voulut jamais en être séparé, si Dieu le voulait. Et qu’en sera-t-il de ceux qui seront dans une gloire parfaite ! Ainsi donc, ceux qui seront dans cette béatitude ne voudront jamais en être séparés. Ps 72, 28 : Il est bon pour moi d’être attaché à Dieu, etc. En second lieu, il fait une suggestion et, comme le dit Lc 9, 23, sans savoir ce qu’il disait. Il dit donc : SI TU LE VEUX, DRESSONS ICI TROIS TENTES, car nous devons soumettre notre volonté à la volonté de Dieu, comme plus haut, 6, 10 : Que ta volonté soit faite, etc. En cela, Pierre a donc bien parlé ; mais, sous un autre aspect, il a mal parlé, parce qu’il a cru qu’on pouvait obtenir la gloire sans la mort, ce qui va à l’encontre de 2 Co 5, 1 : En effet, nous savons que, si la demeure terrestre où nous habitons est détruite, nous avons une maison qui n’est pas construite de main d’homme, mais qui est éternelle dans les cieux. [Il a aussi mal parlé] parce qu’il a cru que la gloire des saints se trouvait en ce monde, elle qui n’est pas ici, mais dans les cieux, plus haut, 5, 12 : Réjouissez-vous et exultez, car votre récompense est grande dans les cieux. [Il a aussi mal parlé] parce qu’il a cru qu’ils avaient besoin de tentes ; mais ils n’en avaient pas besoin ici, car ils en ont dans les cieux. Ap 21, 3 : Voici la tente de Dieu au milieu des hommes. [Il a encore mal parlé] parce qu’il a voulu dresser trois tentes : en effet, une seule suffit pour le Père, le Fils et l’Esprit Saint. De même, il a comparé le Christ aux autres. Or, il ne faut pas agir ainsi. Jb 32, 21 : Je n’égalerai pas Dieu à l’homme. Pierre, tous n’ont qu’une seule tente, qui est la foi !
Pierre, prenant la parole. Sur cet emploi particulier du verbe « prendre la parole », comparer 11, 25 et
l’explication. - D’après le troisième Évangile, 9, 33, c’est au moment où les augustes interlocuteurs de Jésus
commençaient à se retirer, que S. Pierre, enivré de délices et sachant à peine ce qu’il disait, Cf. Marc, 9, 5 ;
Luc. l. c., s’écria tout à coup en s’adressant au divin Maître : Il nous est bon d'être ici (en grec, beau et bon
tout à la fois). Les mots « nous » et « ici » sont emphatiques. Nous tous, tant que nous sommes, y compris
Moïse et Élie que l’Apôtre songeait précisément à retenir. Restons ici : notre séjour en ce lieu est trop plein
de suavité pour que nous songions si promptement à le quitter. S. Pierre exprime son bonheur en termes
simples et naïfs. S. Jean Chrysostôme, Théophylacte et Euthymius lui prêtent, mais à tort, une pensée lâche
et imparfaite : « Comme il craignait ce qu’il avait entendu dire, il n’y avait pas longtemps, savoir que
Jésus-Christ devait aller à Jérusalem pour y souffrir... Il crut que ce lieu était sûr et qu’il valait mieux y
demeurer », S. Jean Chrys. Hom. 56 in Matth. - Dans l’espoir de mieux faire accepter sa proposition, Pierre
ajoute plus naïvement encore qu’il est tout prêt à construire avec ses deux amis trois tentes où Jésus, Moïse
et Élie pourront commodément s’installer. - Si vous le voulez. Tournure délicate : il ne fera rien sans la
permission expresse de son Maître. - Trois tentes : il pensait à des cabanes de feuillage, semblables à celles
qui servaient aux Juifs de demeures transitoires pendant la fête des Tabernacles. Pour un séjour prolongé, tel
qu’il le souhaitait, des habitations étaient nécessaires au sommet de la saint Montagne : il s’offre résolument
pour en construire aussitôt. - Une pour vous... Dans cette énumération faite selon l’ordre de la dignité, Pierre
s’oublie totalement lui-même ainsi que ses deux compagnons. C’est qu’il s’envisage et qu’il les envisage
avec lui comme des serviteurs de l’auguste assemblée. Pour eux, un abri n’est pas nécessaire : qu’on les
laisse seulement où ils sont, ils ne demandent rien de plus. Les choses célestes et les choses terrestres étaient
pour le moment toutes confondues dans son esprit par suite du bonheur qu’il éprouvait. Il oublie qu’un pareil
moment ne saurait durer, être fixé sur la terre.