Matthieu 21, 1

Jésus et ses disciples, approchant de Jérusalem, arrivèrent en vue de Bethphagé, sur les pentes du mont des Oliviers. Alors Jésus envoya deux disciples

Jésus et ses disciples, approchant de Jérusalem, arrivèrent en vue de Bethphagé, sur les pentes du mont des Oliviers. Alors Jésus envoya deux disciples
Saint Thomas d'Aquin
2142. Plus haut, l’évangile de Matthieu a été divisé en trois parties : dans la première, [Matthieu] présente l’entrée du Christ dans le monde jusqu’au troisième chapitre ; dans la seconde, son parcours ; dans la troisième, sa sortie. Une fois achevées les deux premières parties, il s’agit ici de la troisième. Et elle comporte des divisions, car il s’agit en premier lieu de certains préambules ; en second lieu, de la passion du Christ, et cela, dans le chapitre XXVI.

2143. Premièrement, la provocation des persécuteurs est présentée ; deuxièmement, le réconfort donné aux disciples, et cela, au chapitre XXVI.

[Le Seigneur] avait réconforté les disciples en prédisant l’avenir. Certains avaient été provoqués par sa gloire, qu’ils enviaient : c’est de cela qu’il est question dans le présent chapitre. Certains l’avaient été par sa science, et de cela il s’agit dans le chapitre XXII.

La première partie se divise en deux, car, en premier lieu, il est question de la gloire du Christ ; en second lieu, de l’indignation des persécuteurs, en cet endroit : LES GRANDS PRÊTRES ET LES SCRIBES, etc. [21, 45].

2144. À propos du premier point, [Matthieu] fait trois choses. Premièrement, il présente la gloire du Christ manifestée pendant qu’il était en route ; deuxièmement, celle [qu’il manifesta] alors qu’il était dans la ville ; troisièmement, [il parle] de celle qu’il reçut de [son] pouvoir dans le temple. Le second point [se trouve] en cet endroit : QUAND IL ENTRA DANS JÉRUSALEM, etc. [21, 10] ; le troisième, en cet endroit : ET JÉSUS ENTRA DANS LE TEMPLE, etc. [21, 12].

En cours de route, la gloire lui fut apportée par deux choses : les disciples et [son] ministère auprès des foules. Le second point [se trouve] en cet endroit : ALORS UNE FOULE TRÈS NOMBREUSE ÉTENDIT SES VÊTEMENTS SUR LE CHEMIN [21, 8].

2145. À propos du premier point, [le Seigneur] fait trois choses. Premièrement, il donne un ordre au sujet de son ministère ; deuxièmement, il en donne la raison ; troisièmement, [Matthieu] présente l’exécution de l’ordre. Le second point [se trouve] en cet endroit : TOUT CELA ARRIVA, etc. [21, 4] ; le troisième, en cet endroit : LES DISCIPLES ALLÈRENT DONC, etc. [21, 6]

À propos du premier point, [Matthieu] fait trois choses. Premièrement, le lieu est présenté ; deuxièmement, les personnes à qui cela est arrivé ; troisièmement, l’ordre.

2146. Le lieu est présenté lorsque [Matthieu] dit : QUAND ILS APPROCHÈRENT DE JÉRUSALEM, etc. L’évangéliste a raconté en détail l’arrivée du Christ à Jérusalem. Premièrement, il a raconté comment il était venu de Galilée et comment il était passé par Jéricho et y avait redonné la vue à des aveugles qui se trouvaient tout proches. Ensuite, il dit : QUAND ILS APPROCHÈRENT DE JÉRUSALEM ET FURENT ARRIVÉS À BETHPHAGÉ, EN VUE DU MONT DES OLIVIERS. [Ce mont] porte ce nom parce que s’y trouvent beaucoup d’oliviers, et il est à un mille de Jérusalem. Bethphagé était une bourgade sacerdotale, car les prêtres accomplissaient leur service au temple selon un rythme hebdomadaire. Mais le jour du sabbat, le prêtre revenant du temple s’y rendait, car il ne devait pas faire plus de mille pas. Ceux qui s’étaient rendus au temple le jour du sabbat [précédent] en revenaient. Ou bien, Bethphagé est la même chose que «maison des mâchoires», car l’offrande des mâchoires était réservée au prêtre. Au sens moral, Jérusalem veut dire «vision de paix», et elle signifie la société des bons. Ps 121[122], 3 : Jérusalem, bâtie comme une ville, où tout ensemble fait corps.

2147. Ainsi, voulant se rapprocher de Jérusalem, [Jésus] passa par Bethphagé et par le don de la confession. Rm 10, 10 : On croit de cœur pour la justice, et on confesse de bouche pour le salut. Bethphagé est située sur le mont des Oliviers, où il y avait beaucoup d’oliviers. Is 5, 1 : La vigne a donné une abondance d’huile. Par l’huile, la miséricorde est signifiée, car elle a la propriété de réjouir. Ps 103[104],15 : Afin que son visage se réjouisse de l’huile. Ainsi réjouit la miséricorde : Dieu aime celui qui donne en riant, 2 Co 9, 7. L’huile sert aussi à allumer les lampes. Le Seigneur a ordonné qu’une huile très pure lui soit offerte. De même, [l’huile] est utile pour guérir les douleurs, et elle signifie la grâce du Saint-Esprit qui guérit. Ainsi, il est dit, en Lc 10, 34, que le Samaritain versa de l’huile dans le vin.

2148. ALORS IL ENVOYA DEUX de ses DISCIPLES EN LEUR DISANT. [Le Seigneur] signifiait la mission des apôtres dans le monde. Jn 20, 21 : Comme mon Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie. Mais [il en envoya] DEUX afin de signifier la charité, qui exige au moins deux [personnes]. [On lit] ainsi ailleurs, Lc 10, 1 : Il les envoya deux à deux. Ou bien, [le nombre deux] signifie la vie active et la vie contemplative. Ou encore, les deux ordres de prédicateurs, à savoir, celui des Juifs et celui des Gentils. Ainsi, l’Apôtre [dit] en Ga 2, 8 : Celui qui a agi en Pierre pour en faire un apôtre a aussi agi en moi en faveur de Gentils. Ou encore, DEUX, qui devaient être envoyés vers les païens, Pierre et Philippe.
Louis-Claude Fillion
Nous discuterons un peu plus loin, 26, 2, les principales données chronologiques de l’Évangile relatives à la Passion et nous pourrons fixer alors avec connaissance de cause la date des événements les plus importants. En attendant, nous admettrons comme un point hors de conteste la tradition ecclésiastique d’après laquelle l’entrée solennelle du Sauveur à Jérusalem aurait eu lieu dans la journée du Dimanche qui précéda immédiatement la Pâque, c’est-à-dire le 10 du mois de Nisan (2 avril de l’an de Rome 782). - Lorsqu'ils approchèrent. Pour venir de Jéricho à Bethphagé, Jésus avait dû traverser pendant plusieurs heures l’une des régions les plus sauvages de la Palestine : une des plus belles paraboles du divin Maître, Cf. Luc. 10, 25 et ss., nous fournira l’occasion de la décrire. - Bethphage, en hébreu Beth-Phaghé, maison des figues. C’était un petit village, ou même probablement un simple hameau formé de quelques maisons, et situé sur la route de Jéricho à Jérusalem. Il était à peu de distance de Béthanie, Cf. Marc. 11, 1 ; Luc. 19, 29 ; mais on ne sait pas au juste dans quelle direction. L’emplacement traditionnel que l’on montre aux pèlerins à l’Ouest et à environ dix minutes de Béthanie semble réunir en sa faveur les meilleures garanties d’authenticité ; Cf. Schegg, Gedenkbuch einer Pilgerreise, t. 1. p. 361 et ss. Sepp; Jerusalem, t. 1. p. 579 et ss. Il correspond du reste très bien au renseignement que nous fournit encore S. Matthieu, car il se trouve près de la montagne des Oliviers, sur le revers oriental de cette montagne célèbre qu’il nous faut ici décrire en peu de mots. Elle se dresse à l’E. de la ville sainte, dont elle n’est séparée que par la profonde vallée du Cédron. Son nom, Cf. Zach. 14, 4, lui vient des nombreux oliviers qui couvraient autrefois, et qui couvrent encore en partie ses flancs. Elle ne s’élève guère que de trois cents pieds au-dessus du mont Sion, bien que son altitude réelle soit de 2724 pieds au-dessus du niveau de la mer. Elle présente trois sommets arrondis qui portent, dans la direction du N. au S., les nom suivants : « Viri Galilæi », montagne de l’Ascension, montagne du Scandale. Le sommet central est le plus haut des trois. Tandis que le versant occidental descend par une pente rapide jusqu’au lit du Cédron, celui de l’Orient domine à peine le plateau élevé, solitaire, sur lequel étaient autrefois les villages de Béthanie et de Bethphagé. La vue admirable dont on jouit du haut du mont des Oliviers a été vantée par tous les voyageurs. A l’Ouest Jérusalem avec ses églises, ses mosquées, ses rues, ses jardins, ses ruines et son admirable ceinture de murs crénelés ; au Nord les hauteurs de Samarie qui s’élèvent graduellement : au Sud les montagnes de Juda jusque vers Hébron ; à l’Est des vallées profondes et sauvages, qui serpentent à travers des rochers nus, jetés pêle-mêle les uns sur les autres, puis dans le lointain la mer Morte aux couleurs azurées, derrière laquelle se dresse comme une muraille gigantesque la longue chaîne des montagnes de Moab : tout cela forme une perspective émouvante que le regard ne se lasse pas de savourer ; Cf. Schegg, loc. cit., p. 362 et ss. Mais le cœur y est encore plus ému que les yeux, quand il songe aux longs et fréquents séjours que Jésus fit sur le mont des Oliviers pendant les derniers temps de sa vie. - Jésus envoya. On pourrait supposer, d’après la relation des trois synoptiques, que l’entrée solennelle de Jésus-Christ dans Jérusalem eut lieu le même jour que le départ de Jéricho, Cf. 20, 29 et ss. Mais le quatrième évangéliste nous apprend qu’il s’écoula au moins un jour, Cf. Joan. 12, 2, entre ces deux événements, Jésus s’étant arrêté vingt-quatre heures, peut-être même trente-six heures, à Béthanie dans la maison de S. Lazare et de ses sœurs Marthe et Marie. S. Matthieu raconte aussi ce séjour, 26, 6 et ss., mais un peu plus loin et sans tenir compte de l’ordre chronologique, parce qu’il a hâte pour le moment d’introduire Jésus en qualité de Messie dans la capitale juive et dans le temple. - Deux de ses disciples. « Quels étaient ces deux disciples, dit Maldonat avec sa réserve accoutumée, un interprète prudent n’a pas à le rechercher, un lecteur prudent doit préférer l’ignorer, puisque les évangélistes ne l’ont pas précisé. Ils l’auraient fait certainement s’ils avaient jugé que nous avions intérêt à le savoir ». Les anciens avaient hasardé sur ce point toutes sortes d’hypothèses contradictoires dont il est inutile de s’occuper.
Fulcran Vigouroux
Bethphagé était un village non loin de Béthanie, et, comme le dit le texte, près du mont des Oliviers. ― Le mont des Oliviers lui-même est situé à l’est de Jérusalem dont il est séparé par le torrent de Cédron et la vallée de Josaphat. « Pour s’y rendre, on passe par la porte Saint-Etienne et la vallée de Josaphat ; on traverse le torrent de sur un pont d’une seule arche. Le torrent de Cédron traverse la vallée de Josaphat ; il est à vingt pas de Gethsémani. Non loin de Gethsémani est l’endroit où, malgré l’incertitude des traditions à cet égard, les chrétiens d’Orient soutiennent qu’eurent lieu les merveilles de l’Assomption de la très sainte Mère de Dieu. De cet endroit, on commence à monter le mont des Olives qui est fort roide. Rien n’égale la surprise que l’on éprouve, lorsque, arrivé à la moitié de sa hauteur, en se retournant, on aperçoit devant soi Jérusalem [et l’on jouit du magnifique spectacle qu’elle présente. Du haut de la montagne, en s’avançant vers le levant, on voit] la mer Morte, la plaine de Jéricho, le Jourdain et au-delà les montagnes de l’Arabie Pétrée. » (DE GERAMB.)
Catéchisme de l'Église catholique
Comment Jérusalem va-t-elle accueillir son Messie ? Alors qu’il s’était toujours dérobé aux tentatives populaires de le faire roi (cf. Jn 6, 15), Jésus choisit le temps et prépare les détails de son entrée messianique dans la ville de " David, son père " (Lc 1, 32 ; cf. Mt 21, 1-11) Il est acclamé comme le fils de David, celui qui apporte le salut ( "Hosanna " veut dire " sauve donc ! ", " donne le salut ! "). Or " Roi de Gloire " (Ps 24, 7-10) entre dans sa Ville " monté sur un ânon " (Za 9, 9) : il ne conquiert pas la Fille de Sion, figure de son Église, par la ruse ni par la violence, mais par l’humilité qui témoigne de la Vérité (cf. Jn 18, 37). C’est pourquoi les sujets de son Royaume, ce jour-là, sont les enfants (cf. Mt 21, 15-16 ; Ps 8, 3) et les " pauvres de Dieu ", qui l’acclament comme les anges l’annonçaient aux bergers (cf. Lc 19, 38 ; 2, 14). Leur acclamation, " Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur " (Ps 118, 26), est reprise par l’Église dans le " Sanctus " de la liturgie eucharistique pour ouvrir le mémorial de la Pâque du Seigneur.