Matthieu 23, 37

Jérusalem, Jérusalem, toi qui tues les prophètes et qui lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants comme la poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous n’avez pas voulu !

Jérusalem, Jérusalem, toi qui tues les prophètes et qui lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants comme la poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous n’avez pas voulu !
Saint Thomas d'Aquin
2367. Mais quelle est cette peine ? La destruction de la ville de Jérusalem. Et parce que [le Seigneur] veut parler de la destruction de Jérusalem, il se tourne donc vers la ville, en disant : JÉRUSALEM, JÉRUSALEM ! Premièrement, il présente [sa] faute ; deuxièmement, il rappelle les bienfaits [dont elle a bénéficié] ; troisièmement, il annonce à l’avance [sa] condamnation. Le second point [se trouve] en cet endroit : COMBIEN DE FOIS AI-JE VOULU RASSEMBLER TES ENFANTS… ET TU N’AS PAS VOULU ? [23, 37] ; le troisième, en cet endroit : VOICI QUE VOTRE MAISON SERA LAISSÉE DÉSERTE [23, 38].

2368. [Le Seigneur] dit donc : JÉRUSALEM, JÉRUSALEM ! Ce couple exprime l’affection de celui qui prend pitié. Ainsi est-il dit, en Lc 19, 41, que, regardant la ville, il pleura sur elle. TOI QUI TUES LES PROPHÈTES. Ac 7, 52 : Lequel des prophètes vos pères n’ont-ils pas persécuté ? Il dit : TOI QUI TUES, et non : «Toi qui as tué», parce qu’ils persévéraient encore dans leur malice. C’est cette Jérusalem dont il est question en Ez 5, 6 : Voici Jérusalem ! Je l’ai placée au centre des nations et je l’ai entourée de terres. Et elle a méprisé mes jugements. Ils pourraient se donner une excuse : «Nous n’avons eu personne pour nous le dire.» C’est pourquoi il dit : ET QUI LAPIDES CEUX QUI T’ONT ÉTÉ ENVOYÉS ! «J’ai donc envoyé des prophètes et bien des secours, mais vous ne les avez pas reconnus.»

2369. COMBIEN DE FOIS AI-JE VOULU RASSEMBLER TES ENFANTS COMME UNE POULE RASSEMBLE SES POUSSINS, ET TU N’AS PAS VOULU ? Par cela est indiquée l’éternité de sa divinité, selon ce que lui-même dit, Jn 8, 58 : Avant qu’Abraham n’existe, Je Suis. Ainsi, le Christ lui-même a envoyé les prophètes, les patriarches et les anges. Chaque fois qu’il en a envoyé, IL A VOULU RASSEMBLER, etc. Ceux-là sont rassemblés qui se convertissent au Seigneur, car les pécheurs sont unis en lui ; mais ceux-là sont dispersés qui sont séparés de l’unité. Ainsi, AI-JE VOULU RASSEMBLER COMME UNE POULE RASSEMBLE SES POUSSINS. On dit qu’il n’y aucun animal aussi compatissant envers ses poussins que la poule. La poule [les] défend contre le vautour, expose sa vie pour eux et les rassemble sous ses ailes. De même le Christ est-il compatissant envers nous : Vraiment, il a porté nos faiblesses, Is 53, 4. De même, s’est-il exposé au vautour, c’est-à-dire au Diable. Dt 31, 27 : Alors même que je vivais et que je marchais avec vous, vous vous êtes toujours comportés avec obstination envers le Seigneur. Mais, en sens contraire, le Seigneur a voulu, et eux n’ont pas voulu. Leur mauvaise volonté l’a donc emporté sur la volonté de Dieu. Il faut donc dire que «chaque fois que je l’ai voulu, je l’ai fait, mais, lorsque tu t’opposais, je l’ai fait lorsque je l’ai fait. Ta volonté a donc empêché que je ne le fasse.» Ou bien, le fait qu’il ait envoyé des prophètes était le signe qu’il voulait rassembler, ET TU N’AS PAS VOULU.
Louis-Claude Fillion
Après les terribles paroles que nous venons d’entendre, en voici d’autres qui respirent une tendresse toute maternelle. Jésus voudrait épargner à son peuple les affreux malheurs qu’il lui a prédits depuis le v. 33 : il essaie donc de le toucher par une apostrophe pleine d’un brûlant amour, mais en même temps pleine de tristesse, parce qu’il prévoit l’inutilité de ce dernier effort. On sent en quelque sorte son divin cœur palpiter à travers ces lignes. - Jérusalem... Il ne s’agit plus des Pharisiens ni des Scribes ; c’est à Jérusalem, nommée deux fois par compassion et par amour, Cf. S. Jean Chrys. Hom. 74 in Matth., que le Sauveur s’adresse comme au centre de la théocratie. (Le nom de la capitale juive est Ierouschalaïm.) - Qui tues… qui lapides. Les verbes sont au présent parce que Jérusalem était dans l’habitude d’égorger, de lapider les prophètes et les autres ministres sacrés que Dieu daignait lui envoyer pour la convertir. - Combien de fois ai-je voulu... Et pourtant, d’après S. Matthieu et les autres synoptiques, Jésus-Christ ne semble avoir exercé aucun ministère à Jérusalem avant la circonstance présente. Mais ces paroles mêmes démontrent qu’il y était venu fréquemment, et qu’il y avait rempli à diverses reprises un rôle très actif en vue de sauver la malheureuse cité. L’évangéliste S. Jean nous donnera un commentaire complet de ce « combien de fois ». Origène et d’autres anciens auteurs pensent du reste qu’en le prononçant Jésus tenait compte non seulement de son activité personnelle, mais encore de celles des prophètes qui l’avaient précédé ; Cf. S. Jérôme, Comm. in h. l. - Tes enfants. Les fils de Jérusalem, ce sont ses habitants : c’est, par extension, tout le peuple juif dont elle était la capitale. - Comme une poule... Belle et forte image qui peint au vif l’amour de Jésus pour ses compatriotes, et la protection toute maternelle dont il aurait voulu les environner ; Cf. Ps. 16, 6 ; 36, 7 ; Is. 31, 5 ; etc. « La poule aperçoit l’oiseau de proie dans les airs et aussitôt elle groupe avec anxiété ses poussins autour d’elle. Jésus voyait avec angoisse les aigles romaines s’approcher des enfants de Jérusalem pour les dévorer, et il s’efforçait par les plus doux moyens de les sauver », J. P. Lange, in h. l. - Mais hélas ! ses tentatives devaient échouer contre l’insensibilité, l’ingratitude et l’aveuglement de ces malheureux Juifs, et tu ne l'as pas voulu ! Jésus s’en plaint avec un sentiment de profonde tristesse, en même temps qu’il dégage sa responsabilité. Malheur donc à ceux qui n’auront pas voulu se laisser sauver ! Car l’amour méprisé amènera les catastrophes prophétisées plus haut.
Catéchisme de l'Église catholique
Jésus rappelle le martyre des prophètes qui avaient été mis à mort à Jérusalem (cf. Mt 23, 37a). Néanmoins, il persiste à appeler Jérusalem à se rassembler autour de lui : " Combien de fois j’ai voulu rassembler tes enfants à la manière dont une poule rassemble ses poussins sous ses ailes (...) et vous n’avez pas voulu ! " (Mt 23, 37b). Quand Jérusalem est en vue, il pleure sur elle et exprime encore une fois le désir de son cœur : " Ah ! Si en ce jour tu avais compris, toi aussi, le message de paix ! Mais, hélas, il est demeuré caché à tes yeux " (Lc 19, 41-42).